13 avril 2012

Frais de scolarité: exercer une autorité intelligente (ajout)

Avec la lutte contre la hausse des frais de scolarité, j'espère que le premier ministre, Jean Charest, et la ministre de l'Éducation, Line Beauchamp, ont réalisé quels sont les étudiants que nous accueillons dans nos classes. Des jeunes pour qui l'autorité exercée de façon bête ne suffit pas. La police, la loi, ils s'en moquent un peu, croyez-moi. Ils ont des idées, des convictions. Et ils prennent les moyens pour les promouvoir.

Ce soir, je dois l'avouer, à ma grande honte, je suis parti à rire quand j'ai lu qu'une attaque informatique paralysait les sites Internet du ministère de l'Éducation et du parti libéral du Québec. Il s'agit d'un acte criminel, je sais, mais quand je pense à tout l'argent que notre gouvernement a dépensé en publicité, en sites Internet, en référencements de sites... je me demande qui est le plus condamnable.

Depuis le tout début de cette crise politique, le gouvernement a tout faux. Lors des consultations sur les frais de scolarité qu'ont boycottées toutes les associations étudiantes, il était clair que les dés étaient pipés. M. Charest et son entourage ont sous-estimé les étudiants. Et depuis, on a assisté à différentes attitudes gouvernementales.

La première consiste à infantiliser les étudiants en les grondant, on leur disant ce qu'ils doivent ou ne doivent pas faire. On est à la limite du mépris.

La seconde consiste à nier leurs revendications. Alors que, pendant deux ans, la société québécoise a réclamé une commission d'enquête sur l'industrie de la construction, nos dirigeants ont trouvé le moyen d'affirmer qu'ils écoutaient la majorité silencieuse dans ce conflit. 200 000 jeunes et moins jeunes sont descendus dans les rues de Montréal. La plus importante manifestation depuis des lustres. La ministre de l'Éducation fait une proposition renforçant l'endettement et refuse toute rencontre pendant que le premier ministre est à l'extérieur de la province alors qu'on connait la plus grave crise sociale de son mandat. Inutile de dire ici qu'on renforce de la sorte les risques d'escalade de ce conflit, ce qui définitivement la politique du pire. Par son manque de sensibilité, le gouvernement incite à la désobéissance civile et cautionne l'éclosion d'une génération qui croira que la résolution de tout conflit se trouve dans la rue et l'emploi de moyens parfois illégaux.

La troisième consiste à ne pas exercer un leadership pour sortir de cette crise et à sous-traiter la résolution du conflit à d'autres intervenants. Alors qu'après un affrontement si long, ce gouvernement  devrait s'élever au-dessus de la mêlée et en arriver à trouver une solution acceptable pour toutes les parties, la ministre de l'Éducation trouve le moyen de parler à la télé des lunettes brisées d'une de ses assistantes et sous-traite la résolution de ce conflit à des paliers de pouvoir inférieurs: les forces policières, les enseignants, les dirigeants des cégeps et des universités. Ce faisant, elle augmente les risques de dérapage puisqu'elle n'exerce plus un contrôle direct sur les actions de ces derniers. Une bavure policière, une déclaration malheureuse suffiront à embraser encore plus les jeunes.

Le pouvoir comprend la responsabilité de l'exercer avec intelligence, compétence et bienveillance. C'est de cette façon que les bons enseignants réussissent à amener les jeunes qui leur sont confiés un peu loin dans la vie qui s'ouvre à eux.

Le gouvernement actuel ne semble pas comprendre que, s'il continue dans la voie qu'il a choisie, il n'y aura que des perdants dans tout ce conflit. Le premier ministre Charest devrait se comporter en véritable chef d'État, revenir au pays au lieu de jouer au commis-voyageur en Amérique du Sud et déclarer un moratoire sur la hausse des frais de scolarité. En voulant augmenter ceux-ci de 1625$  en cinq ans, il s'est montré trop gourmand. Une hausse correspondant au cout de la vie avec des majorations ponctuelles aurait évité toute cette saga.

Monsieur Charest de grâce, cessez d'inciter une partie de notre jeunesse à la révolte et à la désobéissance civile par votre attitude. Manifestement, les gens qui vous entourent ne comprennent rien à la jeunesse d'aujourd'hui.

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Un exemple de la condescendance de la ministre Beauchamp. En entrevue à La Presse, elle déclare: «De leur côté, les leaders étudiants disent que la question, c'est celle du gel des droits de scolarité. Or ce n'est pas le bon sujet de discussion.» Pas le BON sujet? Qui est-elle pour affirmer cela quand 200 000 Québécois sont descendus dans la rue à ce sujet?

2 commentaires:

imaginezautrechose a dit…

Excellent billet!

Siocnarf a dit…

Je n'approuve aucun écart de conduite dans les manifestations. Toutefois, dans toutes situations de crises, lorsqu'une partie fait la sourde oreille, que reste-t-il?

Ce que j'ai de la difficulté à comprendre c'est que des gens soient du côté du gouvernement. Pourquoi? Parce que des étudiants ont le culot de faire ce que la masse n'a pas le courage?