28 février 2009

Méthodologie d'un sondage

Voilà la méthodologie du sondage que nous assène le Journal de Montréal depuis hier.

«Cette enquête d'opinion menée par l'IRB s'est déroulée sur Internet entre le 27 octobre et le 18 décembre 2008 auprès de 1 266 répondants qui ont fréquenté son site Web.v La marge d'erreur est de 2,7%, 19 fois sur 20. Une fois recueillies, les données ont été pondérées par la firme de recherche L'Observateur, afin d'être fidèles à la réalité sociodémographique du Québec.v Le sondage est demeuré en ligne jusqu'à ce que le nombre de répondants soit suffisant pour assurer aux résultats une faible marge d'erreur et permettre des analyses croisées plus fines et plus fiables.»

On notera les traces du copier-coller que le journaliste ne s'est pas donné la peine d'effacer... (D'ailleurs, tous les propos du monsieur de l'IRB proviennent du site Internet de cet institut et sont du copier-coller...)

Je ne sais pas, mais quelle est la validité d'un sondage sur Internet? De quelle façon a-t-on pondéré les résultats obtenus? Je suis sceptique.

Au delà de la méthodologie, c'est davantage le traitement journalistique que le Journal de Montréal fait de ces résultats qui m'embêtent.

Alors, j'ai décidé d'y aller de mon sondage, juste pour le plaisir.

Encore la fautes des profs!

Un petit ajout au sondage à l'effet que les Québécois estiment que les conventions collectives des enseignants nuisent aux services offerts aux élèves.

Ce matin, c'est Chantal Longpré, de la Fédération québécoise des directions d'établissements (FQDE), qui rajoute son grain de sel. D'après le journaliste, Mme Longpré «déplore que la «tâche» des profs soit aujourd'hui «décortiquée à la minute près» dans les conventions collectives.»

Pardon? Le décorticage de l'horaire à la minute près fait suite à la négociation sur l'équité salariale qui a amené la partie patronale à vouloir contrôler à la minute près, justement, notre tâche. Ce n'était pas une demande syndicale, à ce que je sache. D'ailleurs, ce sont les commissions scolaires et les directions d'école qui imposent ce modèle d'organisation du travail aux enseignants.

Cette dame reproche également à l'ancienneté de nuire aux élèves: «Le roulement de personnel se fait beaucoup par ancienneté. Un plus vieux peut prendre la place d'un plus jeune. Cela signifie qu'il faut toujours réexpliquer comment fonctionne l'école.»

Mais sur quelle planète vit-elle? Chez nous, les profs, quand ils ont une tâche qui fait leur affaire, ne bougent pas. Les plus anciens conservent les mêmes tâches depuis des années. Les mouvements de personnel chez les profs ayant de l'ancienneté sont extrêmement rares. Les jeunes, eux, sont davantage confrontés à des changements parce qu'ils servent de tampons pour la hausse ou la baisse du nombre d'élèves, par exemple.

Il y a des limites à publier n'importe quoi sans vérifier ses informations.

Semaine de relâche: un grossier mensonge (ajout)

Décidément, le Journal de Montréal ne fait pas dans la dentelle avec les profs cette semaine...

Ainsi, dans un article paru ce matin, on peut lire: «La semaine de relâche au Québec pour les élèves du primaire et du secondaire est entrée graduellement dans les moeurs dans les années 1980, à la demande des syndicats de professeurs

Faux! Faux! Totalement faux! Une petite recherche Internet aurait permis au journaliste Mathieu Turbide de trouver cette information que j'avais déjà entendue sur les ondes de Radio-Canada:

Description: Vous êtes professeur ou étudiant et vous êtes fatigué? Dites-vous bien que vous êtes chanceux d'avoir une semaine de relâche fin février début mars car elle n'a pas toujours existé. C'est monsieur Fernand Paradis, directeur de la commission des écoles catholiques qui l'a inventée en 1983. En voyant le taux d'absentéisme, il s'est inspiré d'un modèle de congé en France pour imposer la semaine de relâche appréciée de tous, surtout des élèves et professeurs

Non, mais quelle connerie!

En lien, ce texte que Catherine m'a indiqué sur la semaine de relâche, gracieuseté du Soleil.

27 février 2009

Ta gueule, Régis!


Je suis rarement vulgaire. Mais devant ce monument à la bétise, quand on sait qu'il ne comprendra rien à rien, reste l'injure qui soulage.

«M. Labeaume a livré un puissant plaidoyer en faveur de l'intervention militaire du Canada en sol afghan à l'occasion de la cérémonie marquant le départ prochain de quelque 2000 soldats stationnés principalement à la garnison de Valcartier, près de la capitale.

Pour le maire Labeaume, les opposants à la mission canadienne sont des «bavards emmitouflés dans leur salon», qui ergotent sur l'antimilitarisme.

A son avis, il vaut mieux prendre le parti des soldats combattant les talibans qui, selon lui, sont des barbares valorisant davantage les chèvres que les femmes.»


Tout d'abord, c'est tellement émouvant de voir M. Labaume défendre la cause des femmes. J'espère simplement pour lui qu'il n'a pas de squelette de caché dans son placard et qu'il paie correctement et les hommes et les femmes qu'il dirige. Et puis, il y a plein d'autres causes à travers le monde concernant les femmmes. Qu'attend notre sympathique Régis pour les appuyer?

Ensuite, j'espère que le maire de Québec va joindre la parole aux actes et quitter son salon cossu pour prendre les armes à son tour. «S'il faut donner son sang, Allez donner le vôtre», disait Boris Vian dans Le Déserteur. Sinon, lui aussi ne fait que bavarder. Il est si facile d'appuyer les troupes canadiennes quand on n'est pas directement concerné. Pourquoi ne pas y envoyer vos enfants, M. Labaume?

Si je suis contre une intervention armée en Afghanistan, je n'ai rien personnellement contre les soldats canadiens qui font leur devoir. Je ne crois cependant pas que ce type d'intervention changera quoi que ce soit à cette problématique.

Alors, au lieu de faire la leçon, Régis, agis concrèetement ou ferme ta BUSH. Les va-t'en guerre sont trop souvent de dangereux hypocrites.

Quel sondage! (ajout)


Oh! Rage! Oh! Colère! Fulminons un peu!

Quand il n'y a pas de nouvelle, on la crée. C'est un peu cet adage qu'a suivi le Journal de Montréal avec cet article d'aujourd'hui sur l'éducation.

Selon «un (sic) enquête d'opinion menée par l'observatoire social de l'IRB (Indice relatif de bonheur) et dont les résultats ont été fournis au Journal de Montréal (...) 43% de la population voit les syndicats d'enseignants comme «un boulet» qui nuit au système d'éducation

Le sondage lui-même

Passons sur la faute de grammaire qui rend l'affirmation savoureuse et parlons des vraies choses.

Qui est l'IRB? Quelle méthodologie a-t-il utilisée pour ce sondage? Combien d'individus ont été consultés? De mémoire, je crois qu'il s'agit de la même firme qui avait affirmé que Repentigny était la ville du bonheur. Oups...

Le contenu du sondage

Grosso modo, voici ce avec quoi le JdeM ouvre son article: «Les syndicats d'enseignants nuisent à la qualité de l'éducation offerte dans nos écoles en prenant la défense des mauvais professeurs et en n'appuyant pas assez les bons, estiment plus de deux Québécois sur cinq.»

Grosse nouvelle! Connaissez-vous un syndicat dont le mandat consiste à ne pas défendre ses membres? Oui, parfois, on peut être exaspéré de constater que certains abusent du système de protection syndicale, mais comment déterminerait-on légalement qui est celui qui mérite d'être défendu de celui qui ne le mérite pas? Bonne chance...

Dans la région de Québec, de nombreux enseignants ont été accusés à tort de voies de faits sur des enfants. Les accusations pleuvaient quasiment. Qui a défendu ces gens dont le comportement, à première vue, était condamnable?

De façon plus large, les syndicats enseignants sont nécessaires devant l'arbitraire de certaines directions. Au fil des années, j'ai pu constater des cas patents de directions qui tentaient de casser des profs qui ne pensaient pas comme elles, des profs qui soulevaient l'incohérence de leur gestion. Dans certains cas, leurs agissements s'apparentaient ni plus ni moins à du harcèlement.

J'ai vu un groupe d'enseignants expérimentés subir le comportement agressif et non professionnel d'un adjoint mais ne pas porter plainte parce qu'il était figé par la crainte d'éventuelles représailles.

Rarement, les profs prennent individuellement la parole en public parce qu'ils ont peur. Peur de quoi, d'après vous?

Il n'y a rien de plus facile que de rendre la vie d'un enseignant misérable au quotidien. Au primaire, on lui fourgue un local mal situé, sans fenêtre. Au secondaire, on lui attribue trois à quatre locaux sur des étages différents. On oublie ses demandes de matériel. On le convoque pour un oui ou pour un non. On le défend peu devant des élèves. Et cela, même s'il est syndiqué! Imaginez s'il ne l'était pas...

Qui, dans le monde de l'éducation, soulève de véritables débats? Les comités de parents, généralement manipulés par les décideurs scolaires et qu'on voit rarement au quotidien dans les écoles? Les commissaires scolaires trop occupés à essayer leur nouveau portable? Les directeurs de cégep partis en voyage d'études?

Je généralise, je sais, mais avouez que cette image est quand même pas si caricaturale.

Une méconnaissance du monde de l'éducation

Il faut mal connaitre le monde de l'éducation pour blâmer les syndicats enseignants de la sorte.

J'ai vu des directions engager des individus dont l'incompétence sortait par les pores de la peau et leur attribuer des évaluations positives menant à la permanence d'emploi. J'en ai vu d'autres croiser les bras devant des collègues qui ne faisaient que mettre les élèves devant un téléviseur ou les amuser à l'ordinateur.

Qui faut-il alors blâmer: celui qui les embauche ou celui qui les défend?

Permettez-moi alors de rire un peu quand je lis ce passage de l'article du JdeM: «L'enquête réalisée par l'IRB révèle qu'une proportion presque éqivalente (sic) de Québécois (38 %) jugent que les directeurs d'école n'ont plus assez de pouvoir sur les professeurs, «parce qu'ils ont les mains liées par les conventions syndicales.»

Pour certains directeurs, crier haro sur la convention collective est une façon de ne pas faire leur travail. Ça les arrange bien de se cacher derrière celle-ci.

De plus, on condamne la «protection» dont jouissent les enseignants, mais voudrait-on d'un système qui fout à la porte du personnel sans trop de réflexion? Voudrait-on des «profs jetables»?

J'ai côtoyé une collègue vidéo, comme j'appelle ces profs dont l'enseignement se résume à une bonne connaissance du club vidéo du coin. Dans les faits, elle était en détresse professionnelle et personnelle. Pendant deux ans, aucun membre de la direction ne l'a aidée. Finalement, un nouvel adjoint s'est penché sur son cas. Il a fait sa job en l'accompagnant. Elle est tombée en arrêt de travail et est allée se ressourcer, comme elle dit. Aujourd'hui, elle est une enseignante extraordinaire auprès d'élèves en grande difficulté.

Dans ma commission scolaire, la direction a un droit de gérance qui lui permet d'attribuer les tâches à qui elle le souhaite. Elle respecte le principe de l'ancienneté parce qu'il ne s'agit pas d'un critère arbitraire et parce qu'elle ne veut pas déstabiliser les équipes de travail.

La haine envers les enseignants

La ou je suis excédé, c'est de constater cette haine (je pèse mes mots) envers les enseignants quand on parle de leurs conditions de travail. Jamais elles n'ont été aussi mauvaises. Jamais je n'ai vu les enseignants si peu revendicateurs. Jamais on a vu autant d'enseignants quitter la profession. Jamais on a autant manqué d'enseignants. Jamais les congés de maladie n'ont été si nombreux.

Je suis convaincu que, si on faisait le même sondage avec des policiers, des infirmières, des fonctionnaires, on arriverait sensiblement aux mêmes résultats. Mais voilà: on ne fait pas de tels sondages... parce les profs sont des victimes faciles. Parce que les profs, eux, sont condamnés à l'excellence.

Et tous ces avantages dont jouiraient honteusement les enseignants, ils ont été consentis par le gouvernement, à ce que je sache. Le même gouvernement qui ne s'est pas gêné pour leur imposer une convention collective à l'aide du loi spéciale dont la légalité est contestée.

Il est remarquable d'ailleurs que ce texte du JdeM cite les propos de deux intervenants, un de la Fédération des commissions scolaires du Québec et un autre de l'Institut Fraser, dont les positions sont assez connues.

Pour le porte-parole de la FCSQ, Denis Pouliot: «Ce que la population nous dit, c'est qu'elle perçoit trop de rigidité dans l'organisation du travail. Ça témoigne du fait que la population souhaite qu'on soit davantage tourné vers les services aux élèves et peut-être un peu moins vers les revendications.»

Tout d'abord, quelqu'un peut-il lui rappeler que cette même population souhaite l'abolition des commissions scolaires? Moi, je garderais une petite gêne en utilisant l'avis du bon peuple... Ensuite, très honnêtement, pour ce qui est des services aux élèves, depuis quand est-ce le véritable souci de la FCSQ? Ces dernières années, je les ai vues davantage défendre leur existence qu'autre chose... Et, pour ce qui est de l'organisation du travail, devrait-on leur donner plus de pouvoir quand elles ont déjà assez de difficultés à gérer la neige sur les édifices dont elles ont la responsabilité...

Pour ce qui est l'Institut Fraser, rappelons qu'il se situe à la droite du portrait politique canadien. Pas étonnant de voir une de ses porte-parole s'en prendre au principe de l'ancienneté dans le monde du travail: «Ce système favorise la rétention des professeurs sur des bases qui n'ont rien à voir avec la qualité de leur travail. Même si un enseignant ne fournit pas une éducation de qualité, il peut être retenu au détriment d'un excellent professeur qui a moins d'ancienneté, déplore Mme Kheiriddin. Ceci n'est pas dans l'intérêt de l'éducation.»

À droite du portrait politique, ai-je dit. L'intérêt de l'éducation, n'est-ce pas des entreprises qui font leur part en payant des impôts qui servent à financer l'enseignement? Ça, l'Institut Fraser n'en parle jamais. Pourquoi donc?

La haine des syndicats

Un passage du texte du JdeM est particulièrement éclairant, quant à moi: «La perception de la population vis-à-vis des syndicats n'a jamais été aussi faible et mauvaise, indique le fondateur de l'IRB, Pierre Côté. Ils ont perdu la bataille de l'opinion publique. On les accuse, entre autres, de niveler vers le bas.» Chasuble que je partage cet avis!

Je viens de terminer la lecture du roman Un pays à l'aube, de Dennis Lahane. En toile de fond de celui-ci, on retrouve la montée du syndicalisme aux États-Unis.

Sans me livrer à une longue tirade, on peut en retirer que le syndicalisme est un contrepoids nécessaire au capitalisme et à l'exploitation des travailleurs, que ce dernier a même permis l'éclosion d'une classe moyenne nécessaire à notre société de consommation et de production, qu'il a déterminé des barèmes quant aux condition de travail et aux conditions salariales de tous les travailleurs. La CSST, les normes du travail ne sont pas apparues par magie ou parce que le patronat se sentait charitable.

Quand je regarde la situation économique aux États-Unis et au Canada, je remarque que les Lacroix, les Maldoff, les grands patrons des banques et de l'industrie automobile n'étaient pas syndiqués et ont longtemps été des héros nationaux.

Quand je relis ce texte du JdeM, je me demande finalement si certains ne souhaiteraient pas qu'on revienne à cette bonne vieille époque ou les travailleurs n'étaient que du bétail.

Oh! Rage! Oh! Colère! Fulminons un peu!

*****

Je me permettrai cet ajout. Relisez les deux questions. Au cégep, des élèves qui formuleraient de telles bêtises seraient recalés quant à moi.

Première question: Êtes vous (sic) d'accord avec l'idée selon laquelle les syndicats protègent trop les mauvais professeurs et n'encouragent pas les bons?

Qyestion en deux volets. Mauvais.

Êtes vous (sic)d'accord avec l'idée selon laquelle les directions d'écoles n'ont plus assez de pouvoir parce qu'elles ont les mains liées par les conventions syndicales?

Question sous forme négative. Mauvais aussi. Et puis, pourquoi «plus assez de pouvoir»? Les profs auraient fait des gains récemment? C'est plutôt le contraire!

25 février 2009

S'exiler en Ontario pour enseigner

Depuis quelques années, avec les modifications apportées au bac en enseignement (augmentation de trois à quatre années d'études avec impossibilité de «recycler» un bac dans une discipline enseignée à l'école), on a remarqué que certains étudiants allaient compléter leur formation en Ontario. Plus simple, plus rapide, moins de niaisage.

On a récemment modifié cette situation avec l'introduction de nouvelles formations (maitrise qualifiante à distance, par exemple).

Mais ce que l'on remarque surtout, c'est plusieurs Québécois vont également enseigner dans la province voisine. Le Soleil indique que ce nombre est passé de 1 868 à 2 775 en 10 ans, une augmentation de 50%.

S'agit-il de jeunes diplomés qui décident de rester sur place après leur formation ou d'enseignants déjà qualifiés qui s'exilent de la sorte? Pas de réponse.

Une pénurie d'enseignants francophones, une plus grande rapidité à obtenir un poste permanent et un meilleur salaire pourraient expliquer ce phénomène: «Selon les statistiques du ministère de l'Éducation, le salaire moyen des enseignants québécois était de 55 200 $ en 2004-2005 comparativement à 71 000 $ pour leurs collègues ontariens. Un écart de... 29%. Il faut toutefois préciser que les chiffres provenant de l'Ontario comprennent aussi les directeurs d'école et les professionnels travaillant auprès des élèves.»

Pendant ce temps, au Québec, nos potentats administratifs disent que les coffres sont vides pour payer correctement les profs ou les équiper mais s'offrent des petits plaisirs... comme le révèle cet article du Journal de Montréal.

Allez surtout à la fin du texte et tentez de ne pas hurler. Un décor pour le dernier CA d'un cégep... Il faut vraiment vivre sur une autre planète! Sans vouloir offusquer personne, on se croirait dans certains pays du Tier-Monde ou l'argent n'existe que pour les puissants.


Sources:
http://www.cyberpresse.ca/le-soleil/actualites/education/200902/24/01-830787-plus-de-profs-du-quebec-en-ontario.php
http://www.canoe.com/infos/quebeccanada/archives/2009/02/20090225-090900.html

24 février 2009

Intimidation et harcèlement: de la difficulté d'intervenir

On parle beaucoup du cas de David Fortin, ce jeune élève de la région d'Alma qui aurait fait une fugue (souhaitons-le) alors qu'il était aux prises avec une dynamique d'intimidation à son école.

Soulignons tout de suite que l'école Camille-Lajoie ou étudie ce jeune ne semble pas des plus lumineuses. Hier encore, le systéme téléphonique automatisé de cette école appelait ses parents pour leur demander de justifier l'absence de leur fils. Et ce n'était pas la première fois depuis sa disparition. Pas fort pour la crédibilité comme insitution quand ensuite tu affirmes avoir tout fait comme prévention dans ce dossier...

Mon propos d'aujourd'hui ne vise pas à défendre de telles bêtises organisationnelles. Cependant, j'aimerais davantage indiquer à quel point il est difficile aujourd'hui d'intervenir dans les cas d'intimidation, même si cela demeurera toujours une obligation et un devoir.

Depuis le début de l'année, j'ai eu à gérer deux cas de harcèlement. Chaque fois, ce sont les parents des enfants intimidés qui m'ont joint pour me révéler - à mon grand étonnement - ce qui se passait.

Je suis reconnu pour être un prof proche de ses élèves. Je les sens, je les devine assez bien. Je travaille aussi beaucoup à l'intégration de chacun dans mes groupes, à l'acceptation de l'autre, à établir un lien prof-élève chaleureux. Mais dans les deux cas, je n'ai rien vu à la fois parce que le harcèlement peut être subtil et insidieux mais aussi parce que l'élève victime n'est pas venu m'en parler, parce qu'il ne manifestait pas, à mes yeux, des signes de détresse.

Je ne me sens pas coupable. À l'impossible, nul n'est tenu. Je vois 96 élèves par jour. Mon radar a des limites. Par contre, à cause de ces événements, je me sentirai davantage concerné et plus attentif.

Car l'élève harcelé a honte de ce qu'il est et de ce qui lui arrive. Point à la ligne. Il ferme les yeux, serre les dents et endure en espérant que ça passera. Parfois, cette technique marche mais à quel prix et au nombre de combien de blessures douloureuses? Aller dénoncer ce genre de situation le confirmera encore plus comme un looser à ses yeux et aux yeux des autres. Il restera une victime.

Dans les deux cas, j'ai rencontré l'élève intimidé en lui demandant de m'indiquer ce qui n'allait pas. Par la suite, j'ai immédiatement fait une petite enquête rapide et discrète auprès des autres jeunes afin de vérifier l'exactitude de cette situation. Je n'ai pas trainé. Fuck le diner et la période libre à l'horaire!

Être proche des élèves m'a bien évidemment aidé. Mais comprenez-moi bien: j'avais la chienne parce que des fabulateurs, ça existe. On ne sait jamais dans quoi on met les pieds dans ce genre de situation sauf qu'on doit agir. Même si on n'a pas le droit à l'erreur. Parce que des parents outrés qu'on suspecte leur petit chéri de ne pas être conformes à une image angélique, ça existe.

Sois prudent, serre les dents et espère (tiens, tiens...).

Malheureusement, j'ai pu facilement confirmer le tout. Malheureusement, parce que cela revient à dire qu'un jeune souffrait et que des corniauds dans mes groupes les faisaient souffrir. Parce que cela revenait à dire qu'il fallait que j'agisse, que le plus dur restait à venir.

Mon premier réflexe: avertir vers un collègue plus expérimenté et rempli de sagesse ainsi que l'adjoint concerné pour convenir d'un plan de match. À mon avis, dans un tel cas, la gaffe à faire est de vouloir gérer le tout seul.

Puis, retour avec le jeune harcelé pour établir la suite des choses. Nous avons privilégié une rencontre tripartite: jeune harcelé, harceleurs et deux profs. Deux profs, pour se protéger l'un l'autre au cas en cas d'un éventuel recours parental. Joyeux, hein?

Suit la rencontre avec les harceleurs. On ne perd pas de temps: exposition de la situation et job de bras. Comme dans les flics. Un flic gentil et un flic méchant. Dans un cas, les corniauds ont écrasé tout de suite. Dans l'autre, il a fallu intervenir de façon plus énergique et sèche du genre: «Me prends-tu pour un cave?» Là encore, la relation personnelle établie avec les jeunes a joué à mon avantage. Un rouleau-compresseur, ça fait moins mal quand il est gentil...

Puis, ce fut ce que j'appelle la confrontation. Quel courage il faut pour une victime pour dire le traitement qu'on lui fait subir mais, en même temps, ça fait partie de la nouvelle dynamique à instaurer: qu'elle parle, qu'elle dénonce. Devant les harceleurs. Qu'elle reprenne du pouvoir.

Dans un cas, ce fut une justice de compréhension et de dialogue. Des petits cons qui voyaient maintenant la portée de leurs gestes. Dans l'autre, ce fut le rapport de force bête. Bêtes comme les deux imbéciles qui ne comprendront jamais avec leur tête. Sauf que la victime n'avait pas à savoir qu'on avait préalablement passés les imbéciles au tordeur.

Puis, la sanction est tombée. La récidive n'existera pas. L'intolérance ne sera pas tolérée. Ce que vous ferez de mal à cet élève, on le prendra très personnel et les conséquences vous toucheront aussi très personnellement.

Finalement, on prend les jeunes à part. On rassure le jeune harcelé, on lui salue son courage on lui indique qu'on sera là pour lui si la situation se répétait. On rencontre aussi les harceleurs et, là, je leur réserve ma remarque intitulée «matière à réflexion».

- Pourquoi tu portes un chandail de ce groupe-là?
- Ben, je l'aime.
- Tu t'identifies à ce groupe-là?
- Ben oui.
- Plutôt poche comme musique. Pas capable de faire plus qu'un accord.
- C'est pas vrai: ils jouent bien.
- Ok. Ok.

...

- Hey, tu peux m'expliquer une chose, au fait?
- Quoi?
- Pourquoi vous autres, les jeunes, passez votre temps à nous dire, nous les adultes, que vous êtes comme vous êtes et qu'il faut vous accepter de même et que, dès qu'on tourne le dos, vous vous bitchez entre vous? Pourquoi vous me dites «Hey, prends-moi comme je suis et respecte-moi» et que, deux minutes plus tard, vous ne pouvez pas vous empêcher de dire «As-tu vu le fif là-bas?» Je ne comprends pas. Tu pourrais m'expliquer, questiion que j'apprenne mieux à te respectuer.

J'attends encore la réponse, mais je m'en moque pas mal: j'ai deux jeunes qui ont la paix depuis.

Qu'on se comprenne: je ne suis pas en faveur de la justice Passe-Partout. Mais l'école est un lieu d'éducation. J'essaie d'éduquer le plus souvent possible. C'est mon rôle. Mon devoir. À long terme, on gagne plus par l'éducation que par la répression. Sauf que, quand c'est nécessaire, je ne suis absolument pas géné de parler pour me faire comprendre clairement.

Deux dernières remarques.

Dans ces deux démarches, on a pris un risque important: celui de ne pas avertir les parents des élèves intimideurs. Celui de régler à l'interne. Pourquoi? Parce que souvent, ils sont pire que leur enfant. Et qu'on assez d'élever des gamins. On ne se mettra pas à élever leurs géniteurs en plus.

C'est un risque. On n'a pas perdu sur ce coup-ci, je crois.

Commentaire bitch que j'assume en terminant.

J'ai pris le risque de ne pas fermer les yeux sur ces deux situations. D'aller au front.

Aujourd'hui, j'en suis bien content. Parce que, à Alma, il existe peut-être quelqu'un quelque part qui a de la difficulté à fermer les yeux avec tout le battage médiatique entourant la disparition du jeune Boutin. Quoique, à force de pratique, certains arrivent sûrement à fermer les yeux depuis longtemps.

En passant, deux beaux textes de Foglia à lire sur le sujet.

http://www.cyberpresse.ca/opinions/chroniqueurs/pierre-foglia/200902/24/01-830454-les-rejets-les-lettres.php
http://www.cyberpresse.ca/opinions/chroniqueurs/pierre-foglia/200902/20/01-829700-des-pervers.php

Sources pour le cas de David Fortin:
http://lcn.canoe.ca/lcn/infos/faitsdivers/archives/2009/02/20090224-075044.html

23 février 2009

Profs qui décrochez: on a besoin de vous!

Avec un pareil titre, vous croyez sûrement que je vais tenter de vous raisonner et de revenir sur votre décision. Eh bien non! Oubliez ça!

Dans les faits, TVA est à la recherche de profs qui ont quitté la profession. Voici ce qu'on recherche:


Vous étiez enseignant au Québec et vous avez décidé de quitter la profession? TVA veut vous entendre.

Cliquez ici pour nous raconter pourquoi vous avez renoncé à enseigner. Quelles sont les difficultés que vous avez rencontrées? Est-ce les classes surpeuplées, l'augmentation du nombre d'élèves à problèmes ou encore la réforme qui vous a convaincu de quitter l'enseignement?

Nous attendons vos témoignages.

Comme Blogger va plutôt mal ces temps-ci, voici l'adresse pour rejoindre la personne rattachée à ce projet: marie-anne.lapierre@tva.ca .

Faut éviter de lire: ça donne de mauvaises idées

Même si je n'écris plus de billet à propos de mes lectures, je lis beaucoup. Des choses parfois étranges, parfois surprenantes, parfois ennuyantes. Des polars chinois, finlandais, british. Vraiment de tout.

Je suis présentement en train de traverser le dernier Dennis Lehane, dont le titre est Un pays à l'aube. Ce livre raconte l'Amérique après la Première Guerre mondiale, la lutte des Noirs, la syndicalisation, la montée des groupes anarchiques et bolchéviques.

Une phrase comme ça, que j'ai notée: «T'as jamais remarqué que quand ils ont besoin de nous, ils parlent de «devoir» mais que quand on a besoin d'eux ils parlent de «budget»?»

Brûlant d'actualité!

19 février 2009

Absentéisme, service d'aide aux employés et compagnie

Paraitrait que le personnel s'absente de plus en plus dans les écoles: enseignants, professionnels comme employés de soutien. 46% des absences des enseignants seraient reliées à des causes psychologiques.

Mes raisons personnelles pour m'absenter sont les suivantes: corriger, être épuisé ou être en dépression en même temps que je suis en épuisement professionnel (mon ex a eu l'idée géniale de me plaquer alors que, médicalement, n'importe quel médecin m'aurait retiré du boulot, alors il m'arrive de cumuler ces deux motifs d'absence...).

Surtout, je m'absente parce que je me fous de cumuler des journées de maladie alors que je suis déjà fatigué et que je serais peut-être mort avant d'en profiter tellement cette tâche est parfois épuisante. Comme bien des collègues, je ne pense plus à l'avenir: la dégradation du réseau de l'éducation me pousse à penser au présent de façon urgente. Cueillez des aujourd'hui les congés de la vie, dirait Ronsard.

Et puis, il y a aussi la conscience professionnelle qui fout un peu le camp. Je pense plus à moi. Je suis déjà rentré au travail avec des bronchites, des pneumonies, convaincu que je ne pouvais pas laisser tomber mes jeunes. Aujourd'hui, j'ai compris que j'étais le dindon de la farce parce que le MELS va faire réussir mes gamins en autant qu'ils fassent moins d'une faute aux 15 mots. Le système se fout de mon professionnalisme et de la qualité réelle de mon travail.

Une phrase m'a fait réagir dans l'article de Cyberpresse: «En 2002-2003, les commissions scolaires avaient pourtant réussi à faire diminuer l'absentéisme en mettant en place des méthodes de gestion plus sophistiquées, comme des programmes d'aide aux employés et le retour progressif au travail.»

J'ai bien ri. Des profs aux prises avec de la détresse psychologique, j'en connais des tas. À ma CS, le programme d'aide aux employés permet trois consultations gratuites. C'est tout. Aucun véritable suivi n'est exercé par la suite. On est automatiquement guéri.

Alors que je suis médicamenté et suivi par un psychologue, j'ai un adjoint qui veut me voir relever de nouveaux défis, un autre que j'ai dû menacer d'un grief parce qu'il se livrait à de l'intimidation au travail (alors qu'il connait parfaitement mon état) et un directeur nouvellement arrivé qui ignore tout de mon cas et qui a la plus haute estime pour mon engagement professionnel.

Quant au retour progressif, nos conventions collectives prévoient un mécanisme de retour au travail unique comme si tous les cas étaient identiques. À ma connaissance, pour bénéficier d'un retour au travail, il faut cesser d'avoir été en psésence d'élèves pendant deux ou trois mois. Après, on peut espérer un retour. Un prof qui pète les plombs en juin, comme c'est fréquent, devra se tourner les pouces chez lui parfois jusqu'en octobre pour revenir au boulot alors que son traitement lui demanderait de recommencer à travailler bien avant parce qu'il devient fou à force de tourner en rond.

Qui plus est, un membre de ma famille qui travaille au suivi du personnel pour de grandes entreprises privées a été purement scandalisé de la façon dont les cas de détresse psychologique et d'épuisement professionnel étaient gérés en éducation. Quant à la notion de retour progressif, elle l'estimait tout simplement inefficace. Elle avait la ferme conviction qu'en éducation, on scrappait purement et simplement de bons enseignants, ce qui entrainait des coûts encore plus élevés par la suite et une moins bonne qualité du service offert.

17 février 2009

École privée: quand Facal rime avec bancal...


Dans une chronique parue dans le Journal de Montréal et sur son blogue, Joseph Facal tente d'expliquer pourquoi il ne faut pas couper les subventions aux écoles privées. Alors que j'ai souvent admiré la clarté de sa pensée, son raisonnement ici est particulièrement échevelé, pour ne pas dire faux, tout simplement.

Tout d'abord, disons-le crûment: M. Facal vit sur une autre planète si on retient ce passage: «Précisément parce qu’elle est subventionnée, l’école privée coûte autour de 4000 $ par année par enfant. C’est accessible à la grande majorité de la population (...)» La grande majorité de la population? Ah bon? De plus, remettons en question ce chiffre de $4 000$ auquel il faut rajouter le coût de l'uniforme, du matériel scolaire, des manuels et des activités parascolaires, entre autres.

Bon prince, M. Facal y va de suggestions d'économie familiale toutes simples: «C’est accessible à la grande majorité de la population, si elle se dit qu’une auto de 16 000 $ roule aussi bien qu’une de 20 000 $, ou qu’un écran plat n’est pas indispensable. Un carton de cigarettes Player’s coûte 66,99 $ avant taxes. Question de valeurs, j’imagine.»

Plus loin, M. Facal voit poindre le drame: «Mais coupez les subventions aux écoles privées et qu’arrivera-t-il ? Elles devront exiger des frais à la hauteur du coût réel de la formation. Les parents qui n’en auront plus les moyens devront retourner leurs enfants dans le secteur public qui verra ses coûts augmenter. Et nombre d’écoles privées fermeront faute de clientèle.»

Premièrement, quels sont les coûts réels de la formation d'une école privée? À 36 élèves par classe avec des conventions collectives moins généreuses que le secteur public, comment se fait-il qu'il en coûte aussi cher d'étudier au privé si cette formation est subventionnée à 60%, que les élèves présentent moins de problématiques lourdes et dispendieuses, que les manuels et autres matériels scolaires n'ont pas à être fournis par l'école et ce, en calculant tous les frais connexes mentionnés plus haut? Privé égale profits. Si ce type d'école n'était pas aussi rentable, croyez-vous que cette forme d'entreprise serait aussi populaire actuellement?

Deuxièmement, est-ce que les coûts du réseau scolaire public vont véritablement augmenter? Des élèves performants coûtent moins cher qu'un élève ordinaire. Pour avoir une réponse juste à cette question, il faudrait savoir quels profits dégagent les écoles privées, comment sont dépensés les frais exigés aux parents (salaire des directeurs et de certains cadres, par exemple), etc.

Si on veut comparer, il faudrait avoir tous les chiffres, non? Or, actuellement, on discute avec du vent, du sable, de l'air.

Là ou le raisonnement de M. Facal quitte définitivement la route, quant à moi, c'est lorsqu'il écrit: «L’école privée sélectionne, c’est vrai. Mais elle sélectionne sur la base du mérite académique des enfants et non du portefeuille des parents. (...) Les écoles privées restantes seront alors réservées non plus aux enfants talentueux, d’où qu’ils viennent, mais aux parents qui en ont les moyens, peu importe les mérites de leur enfant. C’est ça qu’on veut ? Le message qu’enverrait la fin des subventions est que même si un enfant travaille fort, il n’aura pas accès à l’institution de son choix parce que ses parents n’en ont pas les moyens. Lamentable.»

Désolé M. Facal, mais je ne vous suis plus du tout. C'est davantage votre raisonnement qui est incohérent et lamentable. L'école privée sélectionne sur les mérites académiques des enfants ET sur le portefeuille des parents. Parfois même uniquement sur ce seul dernier critère. Chose certaine, je n'ai jamais vu une école privée admettre un enfant génial... pauvre. Il doit payer. Ses performances, aussi éblouissantes soient-elles, ne lui ouvriront aucune porte.

M. Facal explique que le succès de certaines écoles publiques actuelles reposent sur «Des directeurs à poigne, de la discipline, des enseignants qui aiment leur métier, des parents qui s’occupent des enfants. Comme par hasard, on y livre souvent un combat quotidien contre les conventions collectives soviétiques, les bêtises des commissions scolaires et les théories fumeuses des intégristes de la psychopédagogie.» Plus simpliste que cela, il ne reste plus qu'à viser la chefferie de l'ADQ.

Dans mon milieu, je vois davantage d'enseignants livrer des combats pour leurs élèves contre la bêtise pédagogique et l'illogisme administratif que pour le respect de leur convention collective.

Dans les faits, M. Facal, un des principaux facteurs de réussite d'une école (ce n'est pas le seul, je tiens à le préciser) est le milieu socio-économique dont sont issus les jeunes qui y étudient.

Le fric, le même fric qui sert parfois à les inscrire à l'école privée, tiens. Le même fric qui permet aux jeunes de manger à la maison et d'avoir un lunch décent le midi. D'avoir un environnement décent et calme. D'avoir accès à des livres. À une certaine culture. De ne pas être stressés par des parents qui se demandent de quoi sera fait demain.

Dans les quartiers moins nantis, on le sait, tous les tenants de la droite se tuent à le répéter sans malheureusement en mourir, les parents préfèrent tous une auto à 20 000$ même si une à 16 000$ roule aussi bien, un écran plat et un carton de cigarettes Player’s à 66,99 $ avant taxes.

Parents indignes...

PS: Ce billet, avec de légères modifications, a été envoyé à M. Facal.

16 février 2009

S'équiper pour partir à la guerre (modifié)


Ce matin, La Presse nous expliquait que certains soldats des Forces armées canadiennes amélioraient leur équipement en payant de leur poche.

Bon, mon coeur a été ému, mais je me suis demandé quand un journaliste allait écrire un papier sur ce que les enseignants payaient pour faire convenablement leur travail.

Allons-y avec quelques petits exemples tirés de mon vécu professionnel.

Des dictionnaires Larousse et Robert;
Deux éditions du Précis de grammaire Grevisse (version longue et abrégée);
Un dictionnaire des synonymes;
Un Bescherelles;
La douzaine de romans que mes élèves lisent en classe pour pouvoir les annoter et les travailler;
Des romans que je lis pour agrandir ma culture littéraire;
Des stylos (rouges, bleus et verts)
Des surligneurs (couleur variée);
Des cahiers à anneaux;
Un porte-craie.

Il y a aussi cet ordinateur PC que j'ai acheté quand mon Mac est devenu désuet. Un PC, parce que mon école fonctionnait avec des ordis de ce type.

Et vous, que payez-vous pour exercer votre métier convenablement?

PS Petite vacherie en passant: à un cégep de ma connaissnce, l'uniforme des profs d'éducation physique est payé. Vivent les muscles!

15 février 2009

Une belle caricature


Les lock outés du Journal de Montréal ont leur site: rue Frontenac.

Et voici, ma foi, une belle caricature de Beaudet.

14 février 2009

Retour masqué sur une petite semaine d'actualité (ajout)

Je me suis promis, une fois de temps en temps, de publier un billet qui fait un retour sur quelques événements de la semaine. Ça permet d'avoir un peu de recul mais aussi l'occasion de relire l'actualité avec un regard plus éclairé. J'y vais cette fois-ci avec quatre scandales qui ont ému les coeurs et déclenché les passions.

Jouer au hockey au parc est dangereux pour le portefeuille

On a fait grand état de cette mère qui sera obligée de payer 44 000$ (en fait, ce sont ses assurances qui paieront) pour dédommager un jeune victime d'un accident de hockey survenu sur une patinoire extérieure. Mme Bombardier, sur laquelle il faudra bien revenir un jour tellement elle fait un mauvais travail sur les ondes de 98,5MF, en déchirait sa chemise en hurlant qu'on démotiverait les jeunes à pratiquer des sports et que la judiciarisation déresponsabilisait notre société.

À cet égard, je vous invite à lire ce magnifique texte d'Yves Boisvert dans La Presse qui remet les choses en perspective: «Quoi qu'il en soit, c'est un jugement archiclassique, une archisimple application du Code civil qui n'a rien de particulier, sinon d'avoir comme décor une patinoire. 9...) Et que les inquiets vérifient leur assurance... et s'achètent un casque.»

J'aimerais ajouter ici un argument tout simple.

Vous êtes au volant de votre voiture en route vers la maison. Pas dans une course automobile. À un feu rouge, une voiture s'immobilise dans votre pare-chocs (...). Devrez-vous rembourser de votre poche les dommages qu'elle vous a causés? Bien sûr que non, puisque vous n'êtes pas à l'origine de cet accident et que vous avez des assurances.

Le hockeyeur qui en a blessé un autre avec son lancer frappé est à l'origine de cet accident. Il n'a pas voulu qu'il survienne, mais il demeure responsable du résultat de ses actions. Le jeune blessé, quant à lui, n'était pas impliqué dans une joute sportive. Il n'avait pas indiqué son consentement à ce qu'il puisse être malencontreusement blessé dans le feu de l'action comme c'est légalement le cas dans une joute sportive.

Tout comme un automobiliste, il est alors en droit de demander qu'on lui rembourse les frais occasionnés par cet accident. C'est d'ailleurs pourquoi on a souvent des assurances en responsabilités civiles dans la vie. Pour rembourser quand on est responsable d'un accident. Que celui-ci survienne lors d'un jeu ne change rien à la chose, à moins qu'il y ait eu acceptation des risques de blessures de part et d'autre. Ce qui n'est pas le cas ici.

Si l'on prend une joute de hockey, jamais un joueur ne pourra en poursuivre un autre pour blessure dans le cadre normal du jeu, à moins bien sûr qu'il démontre que ce dernier a posé des gestes qui allaient à l'encontre des règlements régissant ce sport. C'est le cas de Steve Moore qui poursuit Ted Bertuzzi, par exemple. C'est le cas du fils de Patrick Roy qui fait face à des poursuites criminelles pour ses talents pugilistiques.

Bref, on se calme le pompon et on vérifie qu'on a des assurances qui couvrent ce genre de situations. Après tout, vous ne prendriez pas le volant sans être assuré, hein?

Le matériel pédagogique avec le Canadien pour thème est un sport extrême

Gros émoi cette semaine quand on a découvert que matériel pédagogie subventionné par le MELS et ayant pour thème le Canadien de Montréal était mis à la disposition des enseignants et utilisé dans nos belles écoles québécoises.

Tout d'abord, s'agit-il de publicité déguisée? C'est à l'Office de la protection du consommateur de le décider. Chose certaine, ce matériel, qui n'est pas obligatoire en classe, faut-il le préciser, dépeint le club de hockey Canadien sous un jour positif et vient assurer une visibilité de l'équipe auprès des jeunes, une clientèle cible très intéressante.

On voit de plus en plus de familles au centre Bell et des produits dérivés de toutes sortes sur les tablettes des magasins. Bien sûr, on ne vend pas directement des billets pour assister aux matchs des Glorieux, mais on inscrit cette équipe un peu plus encore dans l'imaginaire de nos jeunes. Les textes de Réjean Tremblay et de Michèle Ouimet de La Presse illustrent bien le caractère pernicieux de cette entrée du Canadien à l'école.

Sauf que si c'est là que réside le scandale, on s'époumone et on oublie les caisses populaires étudiantes Desjardins et autres matériels pédagogiques aussi disponibles pour les enseignants, sans bien sûr mentionner les concours de gestion de portefeuille boursier dans le cadre du défunt cours d'économie, les visites (de promotion?) des joueurs des Alouettes dans nos écoles, l'amphithéâtre McDonald'S de l'école secondaire de Valleyfield (Oui! oui! vive la malbouffe!), les rabais de L'Actualité pour utiliser leur magazine en classe et j'en passe!

Un autre volet de ce scandale est que ce matériel ait reçu une subvention de 253 000$ du ministère de l'Éducation du Québec. Sur quels critères verse-t-on de l'argent à ceux qui veulent produire du matériel scolaire facultatif ? Pourquoi le Canadien et pas les écoles vertes, par exemple? Ici, les questionnements ont leur raison d'être.

On sait que la ministre Courchesne aime beaucoup le hockey, mais elle a raté une occasion d'être prudente dans ses actions pour encourager les jeunes à aimer l'école: «J'ai pensé qu'il serait au de rejoindre les jeunes garçons; on parle beaucoup des difficultés des jeunes garçons, et les pédagogues que j'ai consultés voyaient d'un bon oeil qu'on puisse les rejoindre avec ce support pédagogique qui présente le Canadien de Montréal.»

Quoi qu'il en soit, il semble que les jeunes aiment travailler avec ce matériel et que les profs qui l'emploient en soient satisfaits. De plus, Benoit Aubin, du Journal de Montréal, se demande si ce matériel ne vend pas plutôt des modèles positifs, principalement aux garçons?

On oublie aussi que le Canadien est un citoyen corporatif qui, contrairement à bien des entreprises privées, rend à la communauté avec sa Fondation des Canadiens pour l'enfance.

Comme on a la mémoire courte (c'est loin le 20 janvier), rappelons que celle-ci a payé 800 000$ des 1,1 million nécessaires à une patinoire communautaire extérieure réfrigérée du parc François-Perrault, dans l'arrondissement montréalais de Villeray/Saint-Michel/Parc Extension. Pierre Boivin, président de la fondation, explique: «On a décidé de se concentrer sur les milieux moins bien nantis, sur les jeunes, et de promouvoir l'activité physique et les saines habitudes de vie, par l'alimentation et la saine pratique du sport.»

Non, le véritable scandale dans cette histoire, c'est qu'on prenne encore les enseignants pour des cons, des demeurés qui utiliseraient du vulgaire matériel de promotion dans nos classes. Comme disait un collègue: «Hey chose, si c'était si pourri, je le prendrais pas!»

L'école privée: oui aux subventions gouvernementales mais non aux responsabilités sociales

Michèle Ouimet, de La Presse, a encore fait rager bien des gens avec une chronique prônant l'abolition du financement public des écoles privées. Son texte fait suite à un article ou l'on montre que la CSDM vit des moments difficiles, notamment au niveau d'une baisse importante de la clientèle vers le privé.

D'ailleurs, cette commission scolaire a décidé de réagir en augmentant le nombre des écoles ou seront offerts les programmes d'étude internationale. Quand on connait les positions égalitaristes et non élitistes de la présidente de la CSDM, Diane De Courcy, on comprend que la situation est alarmante.

Dans son texte, madame Ouimet écrit entre autres: «Le privé est en train de tuer le public. Tant que le gouvernement va subventionner les écoles privées, ce cercle vicieux va exister. Pire, il va s'accentuer. Diane De Courcy sait que le privé joue dans ses platebandes et mine ses écoles. C'est pour ça d'ailleurs qu'elle milite en faveur de l'abolition des subventions au privé. En janvier, la CSDM a annoncé qu'elle voulait ouvrir de nouvelles écoles internationales.»

La question des écoles privées est très délicate au Québec. Dans la majorité des provinces canadiennes, elles ne sont pas subventionnées. Point à la ligne. Ici, en les finançant, on croit réduire les inégalités sociales entre les parents aisés et ceux de la classe moyenne. En fait, je me demande si on n'accentue pas les inégalités entre les parents de la classe moyenne et ceux de milieu défavorisé.

Si tu as du fric, du moins assez, l'état va te permettre d'envoyer tes enfants ailleurs qu'au déplorable réseau public. Mais si tu es pauvre, croupis dans ta misère. Or, l'éducation est un des principaux moyens d'accession sociale.

Ce qui est le plus inqualifiable encore, c'est que des institutions qui se disent des lieux d'éducation subordonnent leur mission éducative à des impératifs économiques ou de visibilité sociale. On en sait peu sur les salaires des directeurs des écoles privées. Sont-ils comparables à ceux du secteur public?

Et puis, que penser des écoles privées qui expulsent des jeunes en difficulté? N'ont-elles pas une responsabilité éducative quant aux jeunes et une responsabilité sociale quant à l'État? Toucher le fric et se débarrasser du problème, est-ce là le modèle de réussite scolaire du privé alors que le réseau public doit accueillir tous les élèves? Est-ce là un véritable lieu d'éducation?

Et ces subventions à hauteur de 60% du coût de l'éducation d'un jeune ne sont-elles pas trop élevées pour de pareilles écoles? D'ailleurs, l'école privée qui met un jeune à la porte conserve-t-elle cette subvention?
La bataille sur la Bataille des Plaines d'Abraham

On fait beaucoup de cas de la reconstitution de la Bataille des Plaines d'Abraham (ici, ici et ici )Pourtant, ce n'est pas la première fois qu'une telle reconstitution a lieu.
Qu'est-ce qui cloche cette fois-ci en 2009? Qu'est-ce qui fait que tous les Falardeau de la province ont promis de saborder cet événement? Regardez cette affiche ou l'on voit Wolfe et Montcalm se serrer la main: y croyez-vous vraiment? Ne verse-t-on pas dans l'angélisme en résumant ce affrontement armé à un sport entre gentlemen?

Simplement qu'on a décidé d'en faire un événement festif. Célébrons la défaite des Français aux mains de l'Angleterre! Renforçons la visibilité du gouvernement fédéral au Québec! Malhabile, très malhabile.

André Juneau, président de la Commission des champs de bataille nationaux, est reconnu pour avoir géré parmi les plus belles manoeuvres de propagande fédérale. Il reconnait qu'il a commis un impair : «Nous avons fait une erreur (...) nous n'étions pas prêts à présenter tout le contexte.»

Pas prêts? Permettez-moi un doute quand je lis dans un autre article que «le Réseau de résistance du Québécois a obtenu des documents, grâce à la loi d'accès à l'information, qui démontrent que l'événement s'inscrit dans un plan de visibilité du fédéral au Québec.»

Mettons les choses au clair: si paradoxalement, d'un côté, le passage sous la couronne britannique a permis aux habitants de la Nouvelle-France de s'émanciper de la tutelle de la métropole française, comme le reconnaissent de nombreux historiens, il n'en demeure pas moins que l'envahisseur anglais a toujours voulu assimiler les paysans ignorants qu'étaient nos ancêtres (et que nous serions encore selon certains Canadiens anglais).

D'ailleurs, à la lumière des propos du premier ministre fédéral Stephen Harper, on comprend que la Bataille des Plaines d'Abraham, tout comme la fondation de Québec, appartient maintenant à l'histoire canadienne et non québécoise: «Pour la grande majorité des Canadiens, on parle ici d'une bataille historique, un moment important dans notre histoire, mais une bataille historique. C'est seulement pour le Bloc que c'est une bataille actuelle, une bataille qui continue parce que le Bloc est un parti qui veut diviser la population et notre gouvernement.»

Quand un peuple se fait tranquillement déposséder de ses moments historiques importants, c'est sa mémoire qu'on tente de s'approprier. Voilà la véritable menace, quant à moi.

Célébrer la Bataille des Plaines est un non-sens, à moins d'être Canadien anglais ou con comme le maire de Québec, Régis Labeaume ou la ministre des Affaires intergouvernementales Josée Verner qui affirme: «Ce que j'en ai, c'est contre la violence et les menaces et par leur silence, le Bloc et le PQ cautionnent ça.» Bien oui, madame Verner. Et Shannonville, vous avez cautionné cette situation par votre silence combien de temps, au fait?

Célébrer la Bataille des Plaines est un non-sens pour quelqu'un pour qui le Québec est important comme entité francophone. Jamais on ne verra le gouvernement fédéral célébrer les victoires des Patriotes, à ce que je sache. Pourtant, ce sont des moments historiques, à ce que je sache.


J'ajoute à ce commentaire deux textes intéressants (ici et ici)publiés aujourd'hui dans le Journal de Montréal.

11 février 2009

Pourquoi le réforme ne marche pas? (ajout)

Un texte de La Presse nous apprendra demain que seulement 47% des profs du primaire de la CSDM appliquent totalement la réforme. De grâce, ne justifiez pas ce pourcentage en invoquant qu'on l'implante progressivement. Ça fait cinq ans qu'on a fini de l'implanter au primaire!
Reste à savoir si les profs ne l'appliquent pas parce qu'ils croient qu'elle ne marche pas ou bien qu'elle ne marche pas parce que les profs ne l'appliquent pas.
Combien on parie que les adeptes du Renouveau vont invoquer la deuxième hypothèse?
Qoui qu'il soit, la réforme est le programme de formation obligatoire au Québec. Les profs qui ne l'appliquent pas ne peuvent le faire en invoquant l'autonomie professionnelle. Ils sont donc en pleine désobéissance civile. Des genres de Gandhi de l'éducation ou, selon certains, des ensiegnants qui refusent d'assumer un statut de professionnels et qui ne relèvent pas les nouveaux défis de leur profession?


Tiens, lu dans La Presse cette semaine:

L'application partielle de la réforme - seuls 47% des enseignants du primaire la mettent totalement en oeuvre selon la CSDM - n'a pas étonné un prof qui a contacté La Presse. «On est plusieurs dans ce bain: pleins de bonne volonté, voulant l'appliquer, mais sur le terrain, c'est une évidence que de larges aspects sont juste impossibles à appliquer», a-t-il témoigné.

Maux d'élève

Dans un texte d'un gamin ce matin:

Marie, une élève de première secondaire, était très fertile car elle rencontrait Paul pour la première fois ce soir.

Côté vocabulaire, on peut se demander si cela fera des enfants forts...

10 février 2009

La baisse des résultats des enfants au primaire enfin expliquée!

Cliquez ici pour le découvrir.

Je reviendrai sur ce sujet plus tard...

09 février 2009

Plan Courchesne sur le français: l'arrivée des inspecteurs?

Dans Le Soleil d'aujourd'hui, Daphnée Dion-Viens indique que le plan Courchesne sur le français est lent à être appliqué.
Rien d'étonnant quand on connait le chaos qui règne en éducation depuis quelques années. On a un peu l'impression que ces 22 mesures agrémentées d'un budget de 40 millions $ risquent de ne pas avoir les impacts promis.

Éloge de la lenteur
  • Le comité responsable du suivi de ce plan d'action est lui-même en retard sur l'échéancier qu'il s'était fixé. Il faut dire qu'il ne se réunit qu'une fois par mois.
  • Des mesures prévues en 2008-2009 seront déjà reportées à l'année prochaine.
  • L'ancienne présidente de l'AQPF, Arlette Pilote, a même démissionné de ce comité cet automne pour protester contre son dysfonctionnement.
  • Le comité pour réviser les programmes de français au secondaire n'est pas encore formé alors qu'on soulignait l'urgence de celui-ci.

Des mesures ministérielles contestées

Deux mesures de la ministre ne semblent pas susciter l'adhésion des écoles et des enseignants, soit une période de lecture obligatoire quotidienne et l'écriture d'un texte par semaine.

J'ai déjà souligné toutes les difficultés reliées à ces deux mesures qui sont le fruit de la ministre, et non pas du comité Ouellon qui s'est penché sur l'état de l'enseignement du français au Québec (ici, ici et ici). Peut-être faisables au primaires mais impossibles à appliquer au secondaire.

Et puis, ça vient torpiller l'autonomie professionnelle des enseignants pas à peu près. Mais ça, c'est un langage syndical de gauche communiste. Ouach!

Les lunettes roses de certains décideurs

Bien évidemment, certains ne vivent pas dans la même réalité que les gens moyens. Par exemple, le sous-ministre adjoint qui préside le comité de suivi, Alain Veilleux, croit que tout se déroule normalement: «Un an plus tard, le plan est en bonne voie d'implantation.»

Même son de cloche (et on parle de cloche ...) du côté de la Fédération des commissions scolaires ou tout va comme prévu.

Les inspecteurs pour bientôt?

Là ou on peut tiquer un peu, c'est lorsque le sous-ministre Veilleux assure qu'une «vérification» quant à la lecture quotidienne et à l'écriture hebdomadaire sera faite d'ici la fin de l'année scolaire dans nos écoles.

Enverra-t-on des inspecteurs dans les classes ou confiera-t-on le soin aux directions de recenser ces pratiques en classe? Je vois la scène d'ici.

Inspecteur: Bonjour, monsieur Masqué. Je viens voir si vous faites des dictées chaque semaine dans votre classe.
Prof Masqué: Bonjour! Avez-vous aussi apporté les dictionnaires qui manquent dans ma classe en même temps?

C'est le temps des vacances!

Entendu ce matin dans une salle de profs.
  • Patrick, mon élève parti en voyage deux semaines en Floride, est revenu ce matin et il a coulé son test de ...
  • Oui, mais qu'est-ce que va en penser sa mère?
  • Rien. Elle lui a formellement interdit d'étudier durant ses vacances.
Deux semaines de vacances. Pendant l'année scolaire. Alors que le calendrier est connu. Interdiction d'étudier. Des vacances.

Moi, à la place de l'enseignante, je décrocherais de cet élève et j'indiquerais l'incident au dossier du jeune. Et combien on parie que la mère sera la première à se plaindre si ma collègue prenait un congé?

Une vraie honte. Et, après, on nous demande de travailler à faire réussir ce genre de ti-pit.

08 février 2009

Décrochage scolaire; j'décroche! (ajout)

Parait-il que le décrochage scolaire a augmenté de 3% depuis l'accession des Libéraux au pouvoir, passant de 26% en 2000 à 29% en 2008. Personnellement, je trouve que ce raccourci qu'on retrouve dans le texte de Jocelyne Richer est un peu rapide.

Bien des facteurs peuvent expliquer le décrochage scolaire: les conditions socio-économiques dans lesquelles sont élevés les enfants, la situation de l'emploi (on décroche plus quand on trouve facilement un travail peu spécialisé), etc.

La journaliste de la Presse canadienne souligne que la «performance» québécoise est la pire au Canada, après celle du Manitoba, tandis que l'Ontario a connu une baisse de 7%. Faut-il faire le lien avec le fait que cette province a réduit le nombre d'élèves par groupe? Je ne crois pas puisque cette mesure est somme toute assez récente.

Par contre, on peut souligner certains points:

  • le budget de l'éducation au Québec occupe une partie importante des dépenses
    gouvernementales;
  • les enseignants québécois sont les moins bien payés au
    Canada;
  • les enseignants ontariens ont un ordre professionnel, pour le
    meilleur et pour le pire;
  • les jeunes enfants ontariens voient le matériel
    scolaire de base fournir par l'État, ce qui n'est évidemment pas le cas au
    Québec.

Évitons de blâmer bêtement le Renouveau pédagogique puisque les effets de ceux-ci ne peuvent s'être vraiment fait sentir durant cette période.

Dans tout ce débat entourant le décrochage, plusieurs aspects me font suer au plus haut point. Et je me lâche pêle-mêle sans trop de cohérence peut-être. Mais à vous de m'aider à mieux clarifier ma pensée ou à l'affiner.

Primo, peut-on arrêter de parler de décrochage scolaire et plutôt parler de persévérance scolaire?

Secundo, c'est fou l'argent qu'on consacre aux décrocheurs! On est là à calculer combien coûte un jeune qui décroche pour mieux légitimer l'argent investi pour le raccrocher. J'ai visité «une école pour adultes». Peut-être était-elle une exception, mais le mobilier et l'état général des classes étaient de loin supérieurs à ce que je peux trouver dans mon école. Je pense aussi à ce Café Internet, au fric claqué dans des spectacles de motivation de début d'année avec Martin Deschamps... et je m'interroge.

Tertio, je pense à ces décrocheurs qu'on paie pour qu'ils parviennent à décrocher (...) une attestation d'études secondaires. Décrocheurs dont on paie aussi les cours, le matériel, la gardienne, le transport, les frais d'examens...

Quatro, je pense à tout ce fric qu'on investit après le décrochage, pas avant. Et je me demande d'ou vient cet argent: du provincial ou du fédéral? Le gouvernement québécois fait-il des économies en laissant décrocher les jeunes?

Quatro et demi, je pense à tout ce fric qu'on investit après le décrochage, pas avant. Et je me dis que ceux qui se font chier à être de bons étudiants sont les rois des cons de notre système scolaire. À quand des encouragements pour leur effort, leur persévérance?

Quatro et trois-quarts, je pense à tout ce fric qu'on investit après le décrochage, pas avant. Et je pense à tous ces profs qui ont des projets stimulants pour garder les jeunes à l'école mais qui se battent chaque fois pour trouver un financement adéquat.

Quatro et sept-huitièmes, je pense aussi à ces sondages qui montrent que l'éducation est plus loin dans les priorités des Québécois que dans celles des Canadiens. Et je me dis qu'on a les élèves qu'on mérite.

Quatro et des poussières, je pense aussi à quel point on banalise le décrochage en offrant dix mille façons de raccrocher et de materner les jeunes. Combien de fois ai-je entendu cette phrase: «C'est pas grave. M'a allé le finir aux adultes mon DES.»

Alors, à tous ces intervenants scolaires, si vous voulez parler de décrochage, je ne vous suis plus. Je m'intéresse à la persévérance et à ce qui garde les jeunes à l'école. À tous ces projets motivants de sport-études, à ces idées régionales, à ces budgets de transport qui permettent aux jeunes de rester après les classes à l'école pour de la récupération ou du parascolaire.

Je m'intéresse aussi à ce projet fait dans la région de Sherbrooke ou on a travaillé avec succès sur les causes extra-scolaires du décrochage.

Pour le reste, essayez de m'expliquer pourquoi on dépense autant au Québec avec de moins bons résultats qu'ailleurs?

Le fric ne se rend jamais dans les classes. Le fric ne se rend jamais jusqu'à l'élève. On ne dépense pas pour prévenir. On dépense pour réparer ce qui a été cassé.

Comme en santé. Comme sur les routes.

*******

Ce matin, à Arcand, on parlait d'un projet visant à mieux encadrer les jeunes à l'école: suivi des absences, suivi des retards, devoirs après l'école, encouragement scolaire. Ça ressemble beaucoup au travail des parents, non?

Je veux bien que l'école fasse sa part, mais ou sont les parents? les services sociaux? les entreprises? Met-on les priorités au bon endroit?

07 février 2009

Des directions et des vacances

Je ne sais pas si le phénomène est nouveau ou s'il s'est simplement amplifié, mais depuis quatre ans, je remarque que j'entends de plus en plus parler de directions d'école qui s'absentent durant l'année scolaire pour gôûter aux joies des vacances.

N'y voyez pas de jalousie, même les profs, eux, ne peuvent quitter de la sorte, mais je comprends mal qu'on puisse laisser le navire alors qu'on bénéficie autant de jours de congé déjà prévus.

Ce qui est enrageant aussi, c'est que, dans le merveilleux et lent monde de l'éducation, les choses trainent déjà en longueur si en plus il faut en rajouter... Et ce, c'est sans compter toutes ces réunions, ces perfectionnements qui font qu'on commence même à être heureux de voir un directeur à l'école! je ne parle pas non plus du message implicite qu'un tel comportement passe quant à la motivation au travail.

Un prof agirait de la sorte...

05 février 2009

Enseignants prolétaires, unissons-nous!

Lentement mais sûrement, le Journal de Montréal semble parfois verser dans la droite la plus absurde que l'on puisse trouver sous la férule de PKP.

Passons sous silence les chroniques de Nathalie ElGraby qui condamne le plan de sauvetage socialiste de Barack Obama pour nous intéresser aujourd'hui aux propos délirants du chroniqueur J. Jacques Samson pour qui j'éprouvais un respect, respect qui vient de connaitre un sérieux coup.

Dans un commentaire sur le fait qu'on retrouve Françoise David dans un cahier d'exercice du cours d'éthique et de culture religieuse, M. Samson se paie une véritable tartine de mépris sur le dos des enseignants et de l'école publique.

«...mais le ministère de l'Éducation donne à répétition son imprimatur à du matériel qui fait la promotion d'orientations gauchistes ou du syndicalisme.

Les parents du Québec constatent depuis longtemps avec impuissance le lessivage de cerveau que les enseignants font subir à leurs enfants. Ce phénomène n'est d'ailleurs pas étranger à la montée de popularité des écoles privées. Outre l'encadrement plus serré que celles-ci offrent, de nombreux parents veulent soustraire leurs enfants de l'emprise idéologique des enseignants du réseau public et leur permettre de se développer dans un milieu où les valeurs mises de l'avant correspondent davantage aux leurs.»

Force est de remarquer que le monsieur ne verse pas dans la subtilité. Pourtant ...

À ce que je sache, le MELS encourage et valorise l'esprit d'entrepreneurship dans son programme de formation. Il remet même des prix et des bourses à des élèves à ce propos. Or, l'entrepreneurship, c'est bien une maudite valeur capitaliste, non? J'ai tellement hâte qu'il fasse de même pour le français, les maths...

Quant aux enseignants, désolé, mais je ne vois pas comment je pourrais lessiver le cerveau des élèves québécois qui peinent à connaitre leurs participes passés, mais sont des boulimiques de toutes les cochonneries que notre belle société de consommation a à leur offrir et qui négligent même leurs études pour se les payer.

Pour ce qui est de l'idéologie des enseignants du Québec, M. Samson vit manifestement dans un autre millénaire. Je n'ai jamais autant d'individus parler de consommation, d'économie, de fonds de retraite, de chars, d'émissions à la Loft Story que dans une salle de profs. Parfois, c'en est à me faire regretter mon choix de carrière.

Les assemblées générales syndicales des enseignants sont vides et, fort de cette inaction, le gouvernement a eu beau jeu de tondre la laine des moutons que nous sommes depuis quelques années.

Enfin, affirmer que c'est à cause du lessivage idéologique qu'exercent les enseignants du secteur public sur les élèves que certains parents envoient leurs enfants au privé est tout simplement n'importe quoi. En passant, au privé, on utilise aussi le cahier d'exercice ou l'on retrouve Mme David.

Définitivement, M. Samson aurait dû tourner son clavier sept fois dans sa bouche avant d'écrire de telles conneries.

03 février 2009

Les ayatollas de la bonne bouffe et le retour de la prohibition (ajout)

Le Journal de Montréal rapportait hier que nos jeunes mangeaient encore mal aux abord de nos écoles. Maudite jeunesse!

Trouvant la nourriture offerte dans les cafétérias scolaires «dégueulasse», ceux-ci se rendraient plutôt dans des établissements de restauration rapide situés non loin de leur école respective.

Il s'agissait, quant à moi, d'un des effets prévisibles des politiques antimalbouffe dans les écoles.

Cependant, il faut noter que le JdeM exagère un brin quand il affirme que l'école secondaire de Chambly est «encerclée» de commerces de restauration rapide. Il suffit d'observer l'illustration fournie par ce journal pour s'en apercevoir.

Ce n'est pas ce qu'on peut appelé être «encerclée» à ce que je sache.
Quoi qu'il en soit, il n'en fallait pas plus pour que les ayatollas de la santé montent aux barricades et suggèrent rien de moins que de mieux encadrer la vente de malbouffe aux abords des écoles.
Pour Isabelle Huot, la docteure en nutrition et chroniqueure au JdeM, le mieux «serait une loi qui interdirait les commerces de restauration rapide trop près des écoles.» Même son de cloche (et je parle ici de cloche) du côté de la Fédération des commissions scolaires du Québec: «Les municipalités devraient revoir leur zonage», affirme le porte-parole de la FCSQ, Denis Pouliot.
Yo les gourous du tofu, allez-vous aussi fermer aussi les dépanneurs et les postes d'essence à proximité des écoles parce qu'on y retrouve des croustilles ou que des jeunes respirent des vapeur de gaz?
En plus de la liberté de commercer, du fait que la malbouffe est un produit légalement vendu aux mineurs et de bien d'autres complications juridiques, avez-vous pensé que vous voulez fermer des commerces qui desservent des quartiers entiers? Pensez-vous que les résidents du boulevard Périgny vont apprécier de voir le Mike's devoir s'établir ailleurs?
En plus, je remarque que, dans le cas de trois des commerces mentionnés (Subway, Tim Horton et - étonnamment Mc Donald's), il est possible d'y acheter un menu santé ou, à tout le moins, assez équilibré.
Je pensais que les écoles étaient un lieu d'éducation. Là, au nom de la bonne santé, on veut étendre la répression jusqu'aux abords de celles-ci.
Quant à moi, si on veut interdire la malbouffe auprès des jeunes, il serait plus logique qu'on commence donc par réglementer les épiceries faites par les parents élevant des enfants, qu'on nomme des inspecteurs jouissant de pouvoirs extraordinaires leur permettant de perquisitionner le domicile des parents indignes et qu'on interdise en tout temps l'accès des jeunes à des commerces de restauration rapide. Là, on sera plus efficace!
Et puis, simplement, pourquoi ne pas bannir la malbouffe, tout simplement? Une prohibition. Rien de moins.
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À propos de prohibition, un autre effet de la politique anti-malbouffe a commencé à apparaitre à mon école. Un jeune, qui a compris la loi de l'offre et de la demande, s'en met plein les poches grâce à la revente de gâteaux Vachon. Il achète une boite de type familial au dépanneur du coin et revend les petits gâteaux à l'unité, moyennant profit.
Voilà un bel esprit d'entrepreneurship et d'application concrète de notions reliées à l'économie! Nul doute que cet élève fait preuve de solides compétences dans ce domaine. À quand une bourse pour lui permettre d'aller aux HEC?
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A lire: la réaction de l'Union des municipalités du Québec qui fait passer la FCSQ et Mme Huot pour de joyeux zozos.

Dans l'actualité hier

Trois morts lors de l'opération déneigement à Montréal.

«De grâce, ne déneigez plus. On a moins de chances de se tuer sur des trottoirs glissants.»

- Les piétons de Montréal


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Vous voulez conduire en toute impunité et tuer des gens à volonté? Droguez-vous et devenez non criminellement reponsable.

Voilà la morale qu'on peut tirer de ce jugement: «Le juge a conclu que Pelletier n'était pas dans son état normal lors de l'accident qui avait été capté par une caméra de surveillance. Selon un psychiatre, l'accusé souffrait d'une psychose toxique liée à sa très forte consommation de cannabis. »
À quand un accusé en état d'ébriété qui tuerait un automobiliste et qu'on innocenterait parce qu'il était paqueté à mort et en proie à un délire éthylique?


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01 février 2009

Ô Canada!

Vous avez peut-être lu cette nouvelle dans Le Devoir de samedi sinon dans Le Journal de Montréal ce matin. Une école primaire du Nouveau-Brunswick s'est vu contrainte, sous une certaine pression sociale, de ramener le traditionnel chant du Ô Canada au début de la journée après avoir cessé celui-ci en septembre 2007.

L'affaire a même fait l'objet d'un débat à la Chambre des Communes. Des conservateurs voudraient rendre obligatoire le chant national au début de chaque journée de classe. Le ministre d'État responsable de l'Agence de développement économique du Canada atlantique, Keith Ashfield, croit que le patriotisme canadien y a sa place à l'école. Ce dernier a cependant préféré le silence quand on lui a demandé si une telle mesure devrait s'appliquer au Québec.

Même opinion du côté du ministre de l'Éducation du Nouveau-Brunswick, Kelly Lamrock: «J'ai dit très clairement que je crois que les écoles devraient faire jouer l'hymne national.» Celui-ci base son opinion sur le fait qu'avec « la diversité religieuse, culturelle et politique que nous avons, il est nécessaire que nous préservions un sens partagé de la nationalité».

Le Ô Canada comme ciment de l'unité nationale? L'école comme lieu intégrateur à l'espace canadien? L'école comme lieu de bataille politique? Rien de nouveau, quant à moi.

En terminant, un intervenant internaute affirme qu'il «est même chanté une fois par semaine dans les écoles du Riverside School Board, sur la rive-sud de Montréal.»

Et dans votre école, votre cégep?