26 décembre 2013

Légendes pédagogiques et incurie ministérielle (ajout)

Je viens de finir de lire Légendes pédagogiques - L'autodéfense intellectuelle en éducation de Normand Baillargeon. Il est évident que, pour éclairer les idées qui y sont avancées, il serait intéressant de pouvoir consulter une ou des contreparties écrites par des tenants des pratiques qui sont analysées dans cet ouvrage. Mais, aussi bien l'avouer: ce livre me conforte dans mon scepticisme et dans certaines de mes intuitions.

Baillargeon n'hésite pas à questionner (le mot est faible) la pédagogie de la découverte, les intelligences multiples, les styles d’apprentissage (visuel, auditif...), les NTIC, la programmation neurolinguistique (PNL) et j'en passe...

Légendes pédagogiques devrait être obligatoire pour tout éducateur. Pas  parce qu'il s'agit d'une façon de se tenir loin de certaines bêtises que certains aimeraient voir instaurer dans nos écoles, mais parce qu'il insiste sur la rigueur que l'on doit mettre de l'avant quand il s'agit d'implanter de nouvelles idées en éducation.

Sur le blogue de Michèle Pourpore, on s'interroge à savoir si un enseignant devrait recourir à certaines approches non scientifiques. Si on se base sur la Loi sur l'instruction publique, on remarquera que ce dernier a le doit «de prendre les modalités d’intervention pédagogique qui correspondent aux besoins et aux objectifs fixés pour chaque groupe ou pour chaque élève qui lui est confié». (article 19.1) Par contre, comment concilier ce droit avec le devoir «de conserver un haut degré de compétence professionnelle» (article 22.6)? Pour ma part, la réponse est assez simple: les méthodes expérimentales n'ont pas leur place dans nos écoles à moins d'être mises de l'avant dans le cadre d'un projet d'évaluation scientifique rigoureux.

À ce propos, faut-il pleurer quand on voit que le MELS permet que se déroulent dans nos écoles des pratiques dont la validité scientifique n'a jamais été démontrée?  Isabelle Boucher, de Saint-Jean-sur-Richelieu, a lancé une pétition l'automne dernier contre l'implantation des techniques et des pédagogies expérimentales dans les écoles primaires, comme le Brain Gym et les massages. Si je ne connais pas cette personne, le texte de cette pétition est très intéressant:

CONSIDÉRANT QUE des techniques et des pédagogies expérimentales s’implantent dans les écoles primaires alors que plusieurs sont classées à risque par des organismes d’études des sectes;
CONSIDÉRANT QUE l’exercice de telles pratiques en milieu scolaire constitue une atteinte à la liberté de conscience et de religion;

CONSIDÉRANT QUE les enfants devraient recevoir une formation basée sur la pensée critique et non la pensée magique;
CONSIDÉRANT QUE l’État ne doit pas financer des groupes faisant la promotion de techniques et d’approches pédagogiques non approuvées par le ministère de l’Éducation du loisir et du sport;
CONSIDÉRANT QUE les enfants ont droit à une éducation de qualité et ne devraient pas servir de cobayes;

Nous, soussignés, demandons que le ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport, adopte des dispositions afin que les techniques et pédagogies expérimentales telles que massage en classe, Brain Gym, programmation neuro-linguistique, yoga, Racines de l'empathie, etc. ne puissent être utilisées dans les écoles publiques québécoises et que les enseignants soient formés et informés en ce sens.


Comment ne pas être consterné par la réponse de la ministre Marie Malavoy: selon elle, c'est aux conseils d'établissement de «déterminer les services et activités les plus adaptés pour le mieux-être des élèves.» À quoi sert le MELS dans ce cas? Si je comprends bien, on ne peut pas enseigner le créationnisme dans nos écoles, mais on peut par contre demander aux jeunes de se frotter les oreilles avec les doigts dans le but de «stimuler la conformation réticulaire du cerveau pour rendre inaudibles les sons distrayants et non pertinentes et rendre audible le langage.» Du grand n'importe-quoi!

Enfin, comment ne pas s'interroger sur la carences  quant à la formation des maitres et sur les facultés des sciences de l'éducation qui ne semblent pas si scientifiques finalement? Jamais en médecine on n'accepterait ce qui se passe actuellement en éducation au Québec.


Ici, la table des matière et un aperçu de Légendes pédagogiques
Ici, l'introduction de Légendes pédagogiques


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Juste comme on en parle, cet article de Radio-Canada sur l'effet Mozart.

À noter, aucune étude sérieuse n'a prouvé que l'écoute ou la pratique de la musique, de quelque nature que ce soit, améliore le développement cognitif des enfants. Ce mythe a la dent très dure.

17 décembre 2013

Bientôt un cours de criminologie dans une école secondaire près de chez vous

Dans la foulée de la publication du rapport du coroner sur ce qu'il est convenu d'appeler l'«Affaire Villanueva», certaines recommandations s'adressent spécifiquement au MELS. Les voici:

À la ministre de l’Éducation, du Loisir et du Sport :
·         de promouvoir, dès le début du secondaire :
  • - l’enseignement de la façon adéquate de se comporter avec un policier lors d’une interpellation pour une infraction criminelle ou pénale et la façon de contester une accusation criminelle ou un constat d’infraction;
  • - l’enseignement de la façon adéquate de se comporter en cas d’interpellation ou d’arrestation d’un tiers, en insistant sur les risques d’intervenir et sur la perception que les policiers peuvent avoir d’une telle intervention;
  • - l’enseignement des conséquences pour une personne qui refuse d’établir son identité à la demande d’un agent de la paix qui l’informe qu’elle a commis une infraction.
Après vouloir leur montrer à ne pas se noyer dans une piscine avec un gilet de sauvetage, il faudra maintenant inculquer aux jeunes des notions de droit et de respect des forces de l'ordre.

Pas de problème. Peut-on faire des examens pratiques?

14 décembre 2013

À propros des jeunes et de l'écriture

On reproche souvent aux jeunes d'écrire des textes bourrés d'erreurs. Ce que je remarque de plus en plus, c'est cette situation existe pour deux raisons.

Un manque d'effort certain quant à l'idée de se corriger. Se doter d'une méthode de correction efficace, chercher l'orthographe d'un mot au dictionnaire... Tout cela est trop exigeant pour des élèves qui se contentent de réussir avec un score moyen que leur permettent d'atteindre des grilles de correction complaisantes.

Et puis, il y a cette incompréhension complète quant aux mécanismes de la langue. Je ne parle pas de toutes ces opérations de la nouvelle grammaire! Mes jeunes sont des professionnels du repérage des GNs, des GV et des GFCP, à condition qu'on ne mélange pas l'ordre de ces constituants d'une phrase. Non, ils ne savent pas différencier un adjectif d'un nom ou d'un verbe. Ils écrivent «Ils sont servient» parce que «servient» est un verbe selon eux.

Voilà. La classe des mots et des groupes de mots.

10 décembre 2013

Lire à ses enfants égale réussite?

Parfois, dans les journaux, on nous rapporte les résultats de certaines études en éducation et il est difficile de les commenter justement, n'ayant pas accès directement à celles-ci.

Le dernier cas en lice est cette étude dont traite cet article du Soleil. Selon des chercheures de l'Institut de la statistique du Québec, lire des histoires en bas âge donnerait aux jeunes de bons résultats en français mais aussi en mathématiques:

«Les résultats de leur enquête sont probants : les élèves du primaire à qui un adulte faisait la lecture quotidiennement vers l'âge d'un an et demi «sont proportionnellement plus nombreux à avoir réussi l'épreuve de mathématique [du ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport] que les autres enfants», concluent les auteurs. Cette proportion est de 82 % contre 74 % pour les jeunes dont les parents ont moins souvent tourné les pages d'un livre avec eux.»

Là où j'ai un problème, c'est que je me demande si c'est le fait qu'on ait lu des histoires à ces jeunes qui explique leur réussite. C'est le danger de ces relations de cause à effet basées sur deux variables. Ce succès ne serait-ce pas plutôt causé par le fait d'avoir des parents prêts à consacrer du temps à leur enfant? Le fait de lire des histoires ne montre-t-il pas un engagement significatif de la part de ceux-ci? A-t-on mesuré l'effet d'autres formes d'engagement parental? Par exemple, qu'en est-il d'un parent qui fait du sport quotidiennement avec son enfant?

Une autre partie de cette étude me laisse songeur. Il faut lire tout ce paragraphe pour comprendre mes interrogations:

«Si la télévision et les jeux vidéo n'ont pas d'impact sur la performance des élèves de sixième année en mathématique, en revanche, les heures passées à naviguer sur Internet peuvent faire la différence. C'est du moins ce que concluent les chercheuses de l'Institut de la statistique (ISQ) Karine Tétreault et Hélène Desrosiers, dans un fascicule publié lundi. Cette dernière explique que l'analyse a permis de démontrer que les enfants qui passent moins d'une heure ou plus de six heures par semaine devant l'ordinateur pour autre chose que des activités liées à l'école sont moins nombreux à avoir réussi l'épreuve obligatoire de sixième année. «Ça sonne une petite cloche», lance Mme Desrosiers, affirmant que cela signifie probablement que les jeunes consacrent ainsi probablement moins de temps à la lecture ou peut-être même à leurs devoirs. Contrairement à la croyance populaire, ses analyses n'ont cependant pas pu démontrer que la télévision et les jeux vidéo avaient un impact négatif sur la réussite en mathématique.»

J'aimerais ça entendre le son de cette cloche. Est-ce à dire qu'un enfant peut passer des heures et des heures devant la télé ou des jeux vidéo sans aucun problème? En quoi l'effet d'internet est-il différent?


07 décembre 2013

Tests PISA: qui dit vraiment vrai?

Les résultats des PISA 2012 sont sortis tout récemment (PISA: Programme international pour le suivi des acquis des élèves de l'OCDE). Et il n'en fallait pas plus pour qu'Alain Dubuc de La Presse y aille avec son analyse intitulée Est-ce vraiment vrai? en affirmant: «Le système d’éducation québécois est clairement un des meilleurs au monde.»

Euh? M. Dubuc a-t-il seulement lu avec attention le document À la hauteur: Résultats canadiens de l'étude PISA de l'OCDE (ici) du Conseil des ministres de l'Éducation du Canada et du gouvernement canadien? Si le Québec s'en tire encore généralement très bien en 2012 au niveau international, il en va autrement de la performance québécoise au fil des années comme le montrent ces chiffres:

Maths:     536 points en 2003, 540 points en 2006, 543 points en 2009 et 536 points en 2012. (p. 77)
Lecture:   536 en 2000, 525 points en 2003, 522 points en 2006, 522 points en 2009 et 520 points en 2012. (p. 91)
Science:   531 en science 2006, 524 points en 2009 et 516 points en 2012. (p. 91)

Alors qu'il écrit «Depuis que le PISA a été lancé, en l’an 2000, le Québec ''pète des scores''», M. Dubuc a-t-il réalisé que le Québec connait en 2012 une baisse dans les trois volets évalués? Quand il souligne que les scores des élèves québécois sont ceux des élèves de la réforme, réalise-t-il que ce sont ces derniers qui ont généralement obtenu les moins bons scores depuis 12 ans? On dirait bien que non. Dans les faits, à part les mathématiques, le Québec connait des baisses plus importantes que la moyenne canadienne.

Plus préoccupant encore, dans la conclusion du document que j'ai précédemment cité, on peut lire: «Les résultats du PISA 2012 confirment la réussite de nos système d'éducation d'un point de vue international. En effet, le Canada demeure dans le petit groupe des pays les plus performants, et atteint ce classement tout en ayant, dans l’ensemble, des résultats équitables. Cependant, la tendance relative à la diminution des scores moyens notés dans les cycles passés du PISA se confirme en 2012.» (p. 49)

En conclusion, M. Dubuc ne voit pas l'urgence d'adopter des changements importants en éducation: «Pour l’améliorer, nous ne sommes pas dans les déchirements existentiels, mais dans le fine tuning* Ah bon?  Pourtant, selon les mêmes experts, cette tendance canadienne à la baisse «pourrait signifier clairement le besoin, pour les ministère de l'Éducation et les partenaires de l'Éducation, de travailler ensemble pour valider les politiques actuelles en éducation. les résultats d'apprentissage, les méthodes et les stratégies pédagogiques ainsi que d'affecter les ressources nécessaires pour s'assurer de continuer de satisfaire aux besoins de notre société.» (p. 50)

Qui dit «vraiment vrai» finalement?

* Fine tuning? J'imagine que c'est la pauvreté du vocabulaire de M. Dubuc qui l'oblige à cet anglicisme...

28 septembre 2013

Pourquoi ne pas proroger les conseils des commissaires?

Quand le gouvernement Harper ne veut pas faire face à l'opposition, il proroge tout simplement le Parlement. On ferme la shop et plus de problème avec les députés adverses et les journalistes! C'est un peu ce à quoi doivent rêver certains décideurs de la commission scolaire Val-des-Cerfs, si on se base sur ce texte paru dans le journal La Voix de l'Est et que je reproduis intégralement ici.

Chose certaine, il y a quelque chose de malsain chez les Cervidés.

Le cirque des guignols

Guy Gaudord a bien raison : les administrateurs de la commission scolaire Val-des-Cerfs ont l’air « d’épais ». Le terme guignol collerait également, si je peux me permettre une suggestion de quolibet.
Le commissaire de Granby a lancé cette affirmation mardi soir après qu’une séance publique se soit transformée en séance à huis clos en l’espace de quelques minutes en pleine période de questions du public. Il est clair que les questions dérangeaient les élus et la direction générale de l’organisme.
(Petit aparté ici : exiger que les personnes souhaitant poser une question aux élus scolaires doivent non seulement d’abord s’inscrire sur une liste, mais aussi indiquer le sujet qu’ils veulent aborder est excessif en démocratie. Ce contrôle revêt un caractère d’intimidation en ce sens qu’il décourage les gens de se présenter au micro.)

Le président de la commission scolaire, Guy Vincent, a suspendu la partie publique de la séance jusqu’à 21 h 30, deux heures plus tard. Quand on veut s’assurer que personne n’assiste aux délibérations des commissaires et que l’heure de tombée des journalistes est passée, impossible de mieux s’y prendre.

Une organisation publique peut siéger à huis clos lorsque certains points sensibles sont discutés. Mais quand une poignée de commissaires se lèvent en même temps et quittent la salle ensemble en pleine période de questions, du coup brisant le quorum, difficile de ne pas y voir l’orchestration d’un coup monté. Surtout que le président du Syndicat de l’enseignement de la Haute-Yamaska, Éric Bédard, était au micro. Le syndicaliste a le don de toujours poser des questions embarrassantes sur les décisions de la direction générale. Le journaliste de La Voix de l’Est qui assurait la couverture de l’assemblée, Jean-François Guillet, était le deuxième prévu au micro. Sa question allait porter sur la série de démissions chez les cadres de la commission scolaire. Aucun des deux n’a pu s’exécuter.
C’est une honteuse mascarade de la part d’administrateurs scolaires dont la pertinence est remise en question. Qu’elle vienne de gens élus pour gérer 170 millions de dollars de deniers publics ajoute à son invraisemblance.

Il y a quelque chose de pourri à la commission scolaire Val-des-Cerfs, dirait sans doute Shakespeare de ce qui se trame dans cette organisation.

Plusieurs cadres ont démissionné ces dernières années pour poursuivre leur carrière sous d’autres cieux. Aucune explication sérieuse n’a été donnée. Des sanctions ont été imposées contre des directeurs d’école. Encore ici aucune explication crédible n’a été offerte. Des dizaines de milliers de dollars ont été dépensés dans des affrontements avec le syndicat des enseignants. Le directeur général de la commission scolaire, André Messier, exercerait un « leadership dans ta face » envers des membres du personnel. Des sources parlent d’ambiance d’intimidation concernant le plus haut fonctionnaire de la boîte.

Intimidation. Le mot est lancé. Mes enfants ont encore reçu cette année à leur école la politique de la commission scolaire sur l’intimidation. Elle décrit ce qu’est l’intimidation et les conséquences qui pèsent sur leurs auteurs.

Les commissaires scolaires devraient peut-être lire cette politique et confronter le directeur général sur son style de gestion des ressources humaines. Ça ressemble en tout point à de l’intimidation.
Qu’attendent les commissaires pour s’informer de ce qui se passe dans leur organisation — pas seulement en se contentant des informations véhiculées par la direction générale ? Qu’attendent-ils pour poser de vraies questions à la direction générale ? Qu’attendent-ils pour lui exiger une reddition de compte ? Qu’attendent-ils pour faire preuve de sens critique ? Qu’attendent-ils pour agir ? Qu’attendent-ils pour faire leur travail ?

Ils ont été élus — et sont payés — pour représenter les citoyens. Pas pour fermer les yeux devant un tel cirque !

24 septembre 2013

Lysiane Gagnon et le port de signes religieux: une analyse décevante (ajout)

J’ai longtemps admiré le travail de Lysiane Gagnon. Puis, avec le temps, ses analyses m’ont désenchanté par leur manque de rigueur ou de connaissance du quotidien. Ma dernière déception en lice a trait à sa prise de position contre l’interdiction du port de symboles religieux ostentatoires chez les enseignants lundi dernier.

Pour madame Gagnon, le pouvoir d’un enseignant sur un élève  serait moindre que les professions chez qui la commission Bouchard-Taylor souhaitait voir afficher une neutralité certaine, soit les juges, les policiers et les procureurs de la Couronne. Également, l’enseignant n’incarnerait pas l’État et ne serait plus aujourd’hui une figure d’autorité. Enfin, il existerait davantage de recours possible contre des comportements arbitraires d’un enseignant que pour un juge, par exemple.
Pourtant, Mme Gagnon sait-elle que, légalement, un enseignant est en quelque sorte le dépositaire de l’autorité parentale des enfants qui lui sont confiés ? Qu’un enseignant peut procéder à des actions s’apparentant à celles exercées par des policiers, par exemple à des fouilles dans le cas de ventes de drogue ?
Soutenir qu’il est inutile d’exiger des enseignants qu’ils affichent une image neutre parce qu’ils ne sont plus aujourd’hui des figures d’autorité vient simplement amplifier ce phénomène qu’elle dénonce pourtant fréquemment.
Par ailleurs, Mme Gagnon se questionne à savoir quelle influence pourrait avoir le port de signes ostentatoires sur les jeunes? Dans son analyse, elle semble manifestement ignorer que, dans de nombreuses études, on identifie la relation maitre/élève comme un facteur déterminant dans la réussite scolaire des jeunes. Je ne dis pas que le fait qu’un enseignant porte une kippa fera décrocher des jeunes, loin de là. Simplement, je comprends mal qu’une spécialiste de l’éducation ne sache pas ce fait ou ne le mentionne même pas.
De plus, cette chroniqueuse écrit : «Dans ce foisonnement d'influences diverses, que pèse la présence d'un enseignant dévot, sur la dizaine d'enseignants auxquels un élève aura affaire chaque année?» Encore une fois, Mme Gagnon semble oublier des réalités toutes simples. Ainsi, au primaire, chaque année, les enfants n’ont de contacts directs qu’avec un enseignant tuteur et parfois deux ou trois spécialistes.
À la question maintenant de l’influence des signes ostentatoires sur les jeunes, si elle est si inoffensive, pourquoi certaines communautés refusent-elles systématiquement que leurs enfants soient en contact avec des individus n’affichant pas leurs valeurs ?  
Concernant sa référence à l’ouverture préconisée par le cours d’Éthique et culture religieuse pour justifier le port des symboles religieux ostentatoires par des enseignants, Mme Gagnon gagnerait à lire le programme concernant celui-ci. Ainsi, on peut y lire que l’enseignant donnant ce cours doit manifester un devoir de réserve dans l’exercice de sa profession. Ainsi, on indique que:
  • l’enseignant «ne doit pas faire valoir ses croyances ni ses points de vue;
  • «il lui faut comprendre l’importance de conserver une distance critique à l’égard de sa propre vision du monde, notamment de ses convictions, de ses valeurs et de ses croyances.t« pas faire valoir ses croyances ni ses points de vue»;
  • «pour ne pas influencer les élèves dans l’élaboration de leur point de vue, il s’abstient de donner le sien.»
Je crois qu’il existe des différences importantes entre des fonctionnaires travaillant dans un bureau au complexe G et des individus oeuvrant auprès de nos jeunes. Pour cette raison, il y a lieu de s’interroger sur le port de symboles religieux ostentatoires par ces derniers. Si Mme Gagnon a su débattre de ce point avec respect, contrairement à bien d’autres commentateurs depuis quelque temps, il n’en demeure pas moins que sa prise de position, en tout respect, me semble par moment plutôt faible.

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Dans Le Devoir ce matin, on peut lire cette lettre de Paul Inchauspé, qui voit dans ce projet de charte la continuité du mouvement entrepris pour «compléter la laïcisation du curriculum» de l'école québécoise.

23 septembre 2013

«Générosité professionnelle» et décrochage des enseignants: ça fera!

Parfois, j'ai du mal à garder mon calme quand je lis certains articles. Ma plus récente montée de pression est survenue à la suite de ce texte publié dans La Presse. Il rapporte les propos, parfois intéressants, de Johanne Patry, directrice adjointe à la pédagogie au Collège Français de Longueuil.

Alors que cet article parle de décrochage des jeunes enseignants, je remarque qu'on oublie de mentionner, quant à moi, deux facteurs primordiaux par rapport à ce phénomène: la formation universitaire déficiente des enseignants et le fait qu'on ne devrait même pas avoir permis à certains de s'être rendus jusque là. Ces deux causes sont le reflet d'un système inefficace qui se reproduit et on n'en parle que très peu. Allez savoir pourquoi. 

Un autre point abordé dans ce texte concerne les profs drop in. Je cite:

«Les drop-in, selon elle, sont ces enseignants qui demeurent en poste, mais font le strict minimum. Ils ont perdu la passion du métier, ne sont pas motivés et ne participent pas aux activités de formation continue offertes.

«Ils manquent d'engagement et de ce que j'appelle la «générosité professionnelle», en se limitant strictement à leur définition de tâches, dit-elle. On parle ici de cas extrêmes, mais malheureusement, ces cas extrêmes font des dommages dans le système scolaire. Les élèves en souffrent.»


Pour Mme Patry, le ressourcement, la formation continue et la communication sont trois solutions à ce problème.

Que cette analyse est réductrice et culpabilisante! Tout semble réduit à l'enseignant. Et ce concept de «générosité professionnelle»... Désolé, mais on dirait que cette dame a oublié certaines choses.

Tiens, si on parlait des directions d'école qui coupe 15 minutes à un enseignant en retard alors qu'il fait bénévolement trois heures de récupération par cycle de neuf jours? Quelle belle façon de motiver les troupes, n'est-ce pas!

Tiens, si on parlait de l'absence de moyens et de ressources pour permettre aux enseignants de travailler efficacement avec les élèves qu'on leur confie?

Tiens, si on parlait de tous ces profs qui paient du matériel pédagogique ou de classe à même leur salaire? D'ailleurs, comme le dit cette blague, l'enseignement est sûrement un des rares métiers où l'on vole des choses à la maison pour les amener au travail...

Ma liste s'arrête là simplement pour des raisons de santé. Je dois éviter de m'emporter.

La «générosité professionnelle»? Ça entre où dans mon horaire de travail qu'on me demande de mettre par écrit et pour lequel je dois justifier chaque minute? Cette année, je déborde de partout en activités avec les élèves et on veut m"imposer en surplus de surveiller la retenue de temps en temps. Ma réplique, je la transmettrais avec joie à Mme Patry: «Est-ce que je peux au moins choisir mon bénévolat, s'il vous plait?»

Cette dernière dit à propos des professeurs drop in: «On parle ici de cas extrêmes, mais malheureusement, ces cas extrêmes font des dommages dans le système scolaire. Les élèves en souffrent.»

Veut-elle la liste des facteurs qui ne sont pas extrêmes et qui font beaucoup plus de dommages dans le système scolaire? 

«Générosité professionnelle». Un euphémisme signifiant «piège à con», oui.



22 septembre 2013

Les écoles doivent faire plus de...

C'est fou combien de fois par mois on relève ce que l'école devrait faire de plus. Juste aujourd'hui:
  • Selon le directeur du centre Portage, François Bourdon, les écoles devraient faire davantage de prévention [en ce qui a trait à la toxicomanie]. 
  • Raynald Hawkins, directeur général de la Société de sauvetage, espère que le gouvernement instaure rapidement le programme de prévention Nager pour survivre dans les écoles primaires. 
J'ai hâte au jour où l'on demandera à l'école de s'occuper de montrer à lire, à écrire et à compter aux enfants qui lui sont confié. Je suis vieux jeu, hein? Ce n'est pas que je ne sois pas capable de marcher et de mâcher de la gomme, mais je suis un peu tanné de constater qu'on me demande aussi de jongler avec dix cerceaux et de sauter à cloche-pied en même temps.

J'ai aussi hâte à une manif de parents qui réclameraient du matériel scolaire dans les classes. mais ça, c'est un rêve...


14 septembre 2013

Symboles religieux: un débat mal lancé


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Délicat comme sujet. Et mon opinion n’est pas affirmée ni confirmée. Beaucoup de questionnements. Beaucoup trop de préjugés encore. Et de moins en moins de certitudes.
Une chose est certaine : les mots sont des pièges et des traîtes et, si j’ai longuement hésité à écrire sur ce sujet, c’est par la peur du jugement de l’autre, quel que soit ce jugement et qui que soit cet autre.

Un point essentiel avant de commencer. Je crois que je suis agnostique et, si je respecte les gens qui pratiquent une religion, j’ai beaucoup de difficulté intellectuellement et émotivement à comprendre comment on peut croire en un ou des dieux. Il faut la foi, parait-il. Je n’ai pas cette ambition personnelle. Je préfère plus simplement travailler à rendre l’humain meilleur. C’est déjà tout un défi. Mais je suis aussi animé d’idéaux basés sur le respect, le mieux vivre ensemble et la pérennité de l’espère humaine.

Y-a-t-il un problème?

À cette question, la réponse est complexe. Ce n’est pas parce qu’on n’est pas en crise qu’une situation ne mérite pas qu’on se penche sur cette dernière. D’ailleurs, souvent, les crises sont le résultat d’une cécité bien volontaire. J’y reviendrai.

Chose certaine, il y a  un certain malaise plus qu’un malaise certain. Et – ne soyons pas hypocrite - celui est davantage exacerbé par la présence de certains musulmans au Québec. Prenez note : je n’ai pas écrit dans la société québécoise. Simplement, parce que le débat est là : immigration, intégration, assimilation, identité nationale, valeurs québécoises.  

À ceux qui seraient tentés de dire qu’il s’agit simplement d’une lubbie du PQ, une majorité de Québécois seraient en faveur de cette Charte. Pour moi, un nombre n'est pas un argument et je me méfie de la tyrannie de la majorité. Par contre, ici, on doit tenir compte de la présence de ces derniers si on veut s’assurer que cette situation ne dégénère pas.

Amateurisme et hypocrisie

Tout le débat actuel sur les signes religieux ostentatoires est un cocktail explosif que nos politiciens, quels qu’ils soient, semblent manipuler comme des apprentis sorciers.  M.Drainville  ignore manifestement que la Révolution tranquille n’a pas engendré la déconfessionnalisation du réseau scolaire québécois. M.Couillard peine à faire la différence entre interculturalisme et multiculturalisme dans une métaphore arboricole. Bref, on n’est pas sorti du bois.

Certains intellectuels ne sont pas en reste. Je pense à MM Bouchard et Taylor partis en commission itinérante avait des volontés d’éduquer les ignorants ne partageant pas leur point de vue. Sur ce point, la récente sortie poutinesque de M. Taylor me pousse à penser que ce dernier devrait descendre de sa tour universitaire et avoir le courage de ses convictions en se lançant en politique. 

Et puis, il y a cette hypocrisie ambiante.

Celle du PQ :
  • qui refuse d’enlever le crucifix de l’Assemblée nationale, un endroit qui devrait être profondément neutre, dans le but sûrement de ne pas s’aliéner certains catholiques et tous les «Lala Tremblay» qui veulent une prière avant un conseil municipal.
  • qui parle d’état laïc tout en continuant de subventionner les écoles de confession religieuse.
Celle du PLQ :
  • qui qualifie d’opportunisme ce geste du PQ de lancer le débat autour d’une charte des valeurs québécoises. C’est bien par opportunisme politique que le gouvernement Charest a volontairement oublié le rapport Bouchard-Taylor sur une tablette.  
  • qui ne veut pas offusquer une base électorale issue d’une immigration récente ou ancienne.
  • qui cite la mémoire de René Lévesque alors que cette formation le présentait comme un liberticide avec la loi 101.
Celle de divers intervenants comme :
  • l’hôpital Juif de Montréal qui annonce qu’il se soustraira à la chartre par respect pour les libertés de ses employés mais qui s’est déjà fait condamner par la Commission des droits de la personne pour avoir manqué à son devoir d’accommodement raisonnable.
  • le Centre Culturel Islamique de Québec (CCIQ) qui craint rien de moins que le projet de Charte des valeurs québécoises ne porte atteinte aux droits des femmes, et particulièrement aux droits des femmes musulmanes, comme si cet organisme était un porte-étendard de l’égalité des sexes.

Et en éducation?

Pour ce qui est du monde de l’éducation, devrait-on interdire le port de signes religieux ostentatoires aux enseignants? Le PQ le demande dans une volonté de laïciser l’État. La CAQ, elle, prend appui sur la position d’autorité qu’occupent les enseignants. Pour le PLQ, il ne faut rien faire dans ce dossier. Dans les deux premiers cas, les positions de ces  formations politiques sont incohérentes. Dans le troisième, cette position va à l'encontre de ce qu'avançaient MM Bouchard et Taylor.

Pour le PQ, si l’État est laïc, qu’il cesse de financer les institutions d’éducation ayant un projet éducatif confessionnel. Quant à la CAQ, dans une école, il n’y a pas que les enseignants qui occupent une position d’autorité. Tous les éducateurs qui y vivent ont aussi ce statut. Je pense notamment aux surveillants d’école, mais aussi à la bibliothécaire ou au TES qui sera peut-être appelé à intervenir dans les corridors dans le cas d’une situation conflictuelle.

En ce qui concerne la commission Bouchard-Taylor, les auteurs recommandaient d'interdire les signes religieux aux représentants de l'État exerçant une fonction d'autorité comme des juges ou des policiers. Ce qui rejoint jusqu'à un certain point l’idée de Daniel Baril :«Pour qu’il y ait neutralité, il faut qu’il y ait apparence de neutralité». Or, si on impose cette contrainte à un juge ou à un policier, pourquoi cela ne le serait-il pas aussi pour un enseignant?  L'enseignant ne jouit-il pas d'un statut d'autorité légalement? Ne lui a-t-on pas délégué une certaine autorité parentale? Ne devrait-il pas être neutre pour l'exercer?

Bien sûr, l’habit ne fait pas le moine et, en éducation, un individu ne portant pas de signe religieux ostentatoire peut très bien se révéler le pire des manipulateurs religieux.
Par ailleurs, le MELS lui-même marche sur des œufs quand on parle des convictions religieuses. Prenons le cours d’Éthique et culture religieuse. Le MELS exprime clairement que l’enseignant doit avoir un devoir de réserve dans l’exercice de sa profession, pour ne pas dire plus :

  • (...) Puisque ces disciplines renvoient à des dynamiques personnelles et familiales complexes et parfois délicates, un devoir supplémentaire de réserve et de respect s’impose au personnel enseignant, qui ne doit pas faire valoir ses croyances ni ses points de vue.
    (...) Dans ce contexte, il lui faut comprendre l’importance de conserver une distance critique à l’égard de sa propre vision du monde, notamment de ses convictions, de ses valeurs et de ses croyances.
    (...) Pour favoriser chez les élèves une réflexion sur des questions éthiques ou une compréhension du phénomène religieux, l’enseignant fait preuve d’un jugement professionnel empreint d’objectivité et d’impartialité. Ainsi, pour ne pas influencer les élèves dans l’élaboration de leur point de vue, il s’abstient de donner le sien.
Le fait de porter des signes religieux ostentatoires va-t-il à l’encontre de ce programme?

Le débat est lancé et mal lancé, je crois. Dans ma tête, plusieurs questions tournent en boucle. Le port de certains symboles religieux est-il vraiment obligatoire?  Le devoir d’accommodement ne doit-il être réservé qu’à ceux qui accueillent? Qu'en est-il de ceux qui sont accueillis? Doit-on revoir certains critères de sélection en immigration parce que les écarts entre les valeurs de la société québécoise et certains arrivants sont trop grands?

Je ne sais pas. Mais ça tourne.  Par moment d’un côté. Par moment, de l’autre. 

Tiens, un sondage. Sur le côté droit.

Le port des signes religieux ostentatoires en éducation.
Pour
Contre
Ne sais pas

13 septembre 2013

Intimidation et Internet: un rappel aux parents

J'aime bien le message de cette directrice. Je recopie l'article intégralement ici.


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Intimidation: une directrice d'école rappelle aux parents leur responsabilité


(Québec) «Vous autorisez votre enfant à utiliser les médias sociaux, vous gérez les situations conflictuelles pouvant en découler.» En ce début d'année scolaire, une directrice de deux écoles primaires à Lévis a décidé de mettre les choses au clair avec les parents qui permettent à leurs jeunes de clavarder ou d'avoir une page Facebook même s'ils n'ont pas l'âge requis.


Depuis quelques années, Line Martin reçoit des appels à son bureau de parents qui se plaignent que leur enfant a été intimidé par des pairs sur Internet.

Souvent, raconte-t-elle, il s'agit de fillettes qui «se blastent entre elles». Même si la plupart des cas concernent des élèves au troisième cycle, soit en cinquième ou sixième année, elle rapporte en avoir eu en troisième année alors que les enfants n'ont que sept ou huit ans.

Pour faire face à ce problème qu'elle qualifie néanmoins d'«isolé», elle a fait parvenir en début de semaine une notice aux parents de ses écoles La Ruche et du Tournesol à Saint-Rédempteur pour les informer de la politique de l'école au sujet des médias sociaux.

Mme Martin y rappelle notamment que, selon la loi, les enfants doivent avoir 14 ans et plus pour ouvrir une page Facebook ou un compte Twitter, par exemple.

«Compte tenu que ces sites ne sont pas autorisés à l'école et qu'il n'est pas permis aux enfants de les utiliser, nous vous avisons que nous ne pourrons gérer les situations conflictuelles pouvant découler de l'utilisation de ces sites», prévient la missive.

Actions limitées

En entrevue, la directrice se veut plus nuancée et explique qu'elle est loin de se laver les mains des chicanes virtuelles contrairement à ce que la communication laisse entendre.

«On est limités dans nos actions», fait-elle cependant valoir, rappelant que les gestes sont posés à la maison et non pas à l'école. Par exemple, Line Martin dit rencontrer les enfants concernés pour tenter de régler la situation.

Les élèves sont aussi sensibilisés chaque année au sujet de la violence à l'école et sur les médias sociaux par le personnel et les policiers qui leur rendent visite.

«Mais les parents me demandent de faire fermer les comptes Facebook. Je n'ai pas ce contrôle», s'exclame la directrice.

D'ailleurs, elle le dit clairement dans la lettre. «Si votre enfant vit une situation conflictuelle, nous vous demandons de fermer son site. Si la situation persiste, veuillez contacter le service de police de Lévis.» Line Martin ajoute qu'il est de la responsabilité des adultes de surveiller leur progéniture pour qu'ils utilisent adéquatement ces sites.

À sa connaissance, Mme Martin est la seule directrice de la commission scolaire des Navigateurs à avoir prévenu les parents de la sorte. Mais plusieurs de ses collègues souhaitent l'imiter, confie-t-elle.

07 septembre 2013

Frais facturés aux parents: la saga continue

Le sujet n'est pas nouveau, mais il faut avouer que de poursuivre des CS pour 300 M$ parce qu'elles auraient exigé des parents des frais auxquels elles n'avaient pas droit, ça me fait toujours sourire.

Sourire parce que ça pose une première question quant à la compétence ou au jugement de certaines directions.

Sourire parce que, moi, je les poursuivrais conjointement avec le MELS parce qu'elles forment souvent des élèves au bagage académique douteux.

Sourire parce que je n'en reviens pas qu'on ne puisse pas demander à des parents d'acheter des romans à leurs enfants, à un cout raisonnable, afin qu'ils puissent les annoter et les travailler de manière efficace. Le moindre gamin a un iQuelquechose, mais oubliez l'idée de faire acheter un roman à ses parents. Comme je l'écrivais dans un autre billet, le tout est d'autant plus paradoxal «que le MELS lui-même nous invite à amener les élèves à annoter et à marquer avec des repères les oeuvres qu'ils lisent. On leur enseigne tout cela pour ensuite leur remettre dans les mains un roman qu'ils ne doivent pas toucher. Et devinez ce qu'ils font: ils les annotent quand même et on doit les punir parce qu'ils le font!»

Ah oui: en passant, ce genre de volonté que tout soit gratuit fait aussi que certains enseignants et certaines écoles n'organisent plus de sortie et d'activité. Les parents en ont alors pour leur argent.

J'ai déjà écrit sur ce sujet. Je ne radoterai donc pas comme un vieux sénile, mais je vous invite à lire ces billets antérieurs. Rien ne change fondamentalement en éducation. Et ce n'est pas pour le mieux.

- Frais exigés aux parents: un scoop?
- Lire, ça coute cher!
- Frais exigés aux parents: des disparités planétaires
- Le matériel scolaire du Journal de Mourial
- Matériel scolaire gratuit en Ontario


06 septembre 2013

Libaâârté!

Au nom de la liberté et du respect de sa vie privée, un parent d'un enfant inscrit dans une école alternative refuse de compléter un formulaire sur ses antécédents judiciaires. Pourquoi demande-t-on à ces parents de remplir un tel formulaire?

«Nous sommes tenus par la loi de vérifier les antécédents judiciaires des personnes qui oeuvrent auprès des élèves. À l'école Élan, il y avait eu du laxisme et nous n'avions pas ces informations. Comme dans les autres écoles alternatives, le projet éducatif favorise une grande participation des parents. Nous devons vérifier qui ils sont afin de leur ouvrir nos portes», a expliqué M. Perron, porte-parole de la CSDM.

Si je comprends bien, selon ce parent, au nom de la liberté individuelle, on devrait ne pas prendre les moyens nécessaires pour éviter de laisser des pédophiles entrer en contact avec les jeunes ou des alcooliques condamnés pour conduite en état d'ébriété les reconduire en voiture à une activité.

On parle beaucoup de liberté ces temps-ci avec l'idée de Charte des valeurs québécoises proposée par le Parti québécois. Or, voici un très beau cas d'arbitrage des différents droits: liberté versus sécurité.

Quant à moi, ce parent serait le premier à hurler que l'école n'aurait pas pris ses responsabilités si son enfant était agressé par un pédophile durant une activité de fin de semaine ou blessé lors d'un trajet automobile par un parent sous l'effet de l'alcool. Mais SA liberté vaut bien la sécurité de nos enfants.


04 septembre 2013

Petite dictée cruelle et révélatrice

Tradition et conservatisme aidant, quoi de mieux qu'une petite dictée diagnostique en début d'année scolaire. Voici donc la torture à laquelle j'ai soumis récemment mes élèves de première secondaire. 
  1. Je les regarde et je m'aperçois qu'elles ont oublié de fermer la porte en descendant.
  2. Je vous trouverai de beaux légumes verts et vous me ferez une belle salade.
  3. Une boite (*boîte) d'allumettes trainait (*traînait) sur la table de la chambre.
  4. Rendus à Montréal, mes amis sont convaincus de pouvoir acheter un ordinateur à bas prix.
En moyenne, 5,5 fautes par copie.  En général, un bon résultat, étant donné que les élèves n'avaient pas droit à des ouvrages de référence (grammaire, dictionnaire, etc.) et qu'on retrouvait le participe passé avec l'auxiliaire avoir oubliées  dans la première phrase, une notion mesurée généralement en deuxième secondaire. Il y avait également le mot allumettes dont l'accord demandait un certain sens logique.

Les mots les plus souvent mal orthographiés ont été aperçois, descendant et convaincus. Je m'y attendais. Même chose avec l'accord des verbes regarde et trouverai devant lesquels j'avais placé sciemment des mots-écran (les et vous). La surprise a été le verbe sont écrit s'ont.  Je ne comprends pas.

Ce que je remarque le plus, c'est tout d'abord l'écart existant entre des élèves ayant pourtant été soumis au même processus de sélection. Certains élèves n'ont fait aucune erreur; d'autres, plus de seize en 54 mots. Ensuite, lors d'un retour effectué en classe, c'est une absence quasi généralisée de vocabulaire grammatical, de métalangage. Peu de connaissances quant à la classe et à la fonction des mots. Peu de compétence et même de connaissance quant aux manipulations syntaxiques. Là aussi, les écarts sont considérables.

Bref, ils écrivent, accordent mais, pour plusieurs, ils ne savent pas quoi avec quoi ni comment. J'ai même eu droit aux adjectifs renduent et convaincuent...  Du travail en perspective, mais rien de bien effrayant. Tout dépendra de leur volonté d'apprendre et... de travailler.


 


01 septembre 2013

Sondage auprès de mes élèves

J'ai demandé à mes élèves de première secondaire de m'indiquer deux qualités importantes que doit posséder un bon enseignant.

Je vous indiquerai ci-dessous les résultats plus complets de ce petit sondage, mais ne soyez pas étonnés de réaliser que c'est davantage la personnalité de leur prof et sa capacité à établir une bonne relation avec eux qui les intéressent que ses connaissances ou sa capacité à maitriser les TIC...  Dans l'ordre, l'humour, la patience, la gentillesse, le dynamisme, l'attention, l'aide et l'organisation sont sept des qualités recherchées par mes élèves.

Faut-il en conclure que mes élèves ont des attentes qui n'ont pas grand chose à voir avec l'éducation? Non, de ce que je sais, ils rejoignent pas mal ce que disent les études quant à la réussite scolaire. La relation avec l'enseignant est le principal facteur de réussite scolaire chez les plus jeunes.

J'ai rapproché certains termes qui me semblaient désigner des réalités similaires.

30 drôle              
  5 humour          
  2 enjoué            
20 patient            
12 gentil              
  4 sympathique  
  2 amical            
  5 intéressant     
  4 passionné      
  3 dynamique   
   2 motivant      
  1 déterminé     
13  attentif          
11 aidant            
 8 organisé         
  1 ordonné        
  5 respectueux  
  5 sérieux          
  2 compréhensif
  1 indulgent      
  3 clair              
  2 juste             

 Qualités mentionnées une seule fois.
  1 intelligent
  1 créatif
  1 poli
  1 généreux
  1 ultra cool
  1 calme
  1 ponctuel
  1 éducatif
  1 responsable
  1 persévérant
  1 constant
  1 modeste
  1 donne des défis 
 

29 août 2013

Touchant, ce portrait d'une jeune enseignante dans Le Devoir aujourd'hui.

Deux phrases m'ont fait sourire:

«J’ai plus appris dans mes quatre stages que dans mes quatre années à l’université. C’est incroyable, le nombre de fois où je me suis demandé ce que je faisais là», lance Jessica.

Est-ce le lot de certaines formations, de certaines professions? Peut-être. Mais je m'aperçois que j'ai dit les mêmes choses il y a plus de vingt ans.

«Il y a plusieurs choses que je vais payer de ma poche».

Ça me rappelle ce vieux gag de prof: «L'enseignement est la seule profession où tu piques des choses de la maison pour les apporter au travail.»

Bonne rentrée, madame Jessica! La passion, c'est encore le plus important.


27 août 2013

Éducation physique n'égale pas activité physique

Petite lettre publiée sur le site Internet de La Presse:

Saines habitudes secondaires

Je suis actuellement au secondaire et je ne peux plus supporter cette situation alarmante. On ne nous fait pas bouger! Il n'est point rare que lors d'une semaine normale de cinq jours nous n'ayons qu'une seule période d'une heure d'éducation physique. Ajoutez à cela des menus de cafétéria qui se prétendent « santé », mais qui offrent des salades à des prix exorbitants et donnent pratiquement les hamburgers, on ne peut être surpris de savoir qu'un jeune sur trois a un problème de poids. Il serait temps qu'on se réveille si on ne veut pas avoir des files d'attente longues jusqu'à Québec dans les hôpitaux de Montréal.

Philippe Morin-Aubut, Montréal


En tout respect, j'en ai marre de ce lot d'âneries. La présence à l'école représente environ 35 heures par semaine pour un élève. Il lui reste donc 133 heures pour bouger et faire des activités sportives.  Au Québec, il est impossible de décoller un jeune d'un écran, peu importe sa taille (de l'écran ou du jeune...). Bien des parents n'incitent pas leurs enfants à bouger et, à voir ce qu'on retrouve généralement dans les chariots d'épicerie, il n'est pas dit qu'ils les nourrissent sainement.

On n'a pas besoin d'un cours spécialisé pour prendre une marche, faire du vélo ou frapper un ballon. Vient un temps où l'on doit arrêter de demander ce que les autres peuvent faire pour nous pour se demander ce que l'on peut faire pour soi.

26 août 2013

Les enseignants: des professionnels qu’on ignore


Lorsque le Renouveau pédagogique a été mis de l’avant, ils ont été nombreux les enseignants qui ont affirmé que cette réforme ne tiendrait pas la route et se casserait les dents au secondaire pour des raisons logistiques et pratiques. On ne les a pas écoutés avec les résultats que l’on sait. Bien sûr, ici et là, on a accusé certains syndicats d’avoir tout fait pour torpiller cette initiative, mais il n’en demeure pas moins qu’elle était véritablement inapplicable au secondaire.

Il y a deux ans, le premier ministre du Québec, Jean Charest, en mal de publicité, lançait un programme d’installation de tableaux blancs interactifs dans toutes les écoles du Québec. Encore une fois, des voix enseignantes se sont élevées pour dénoncer cette mesure improvisée et dont la pertinence pédagogique restait à démontrer. On constate aujourd’hui que les «empêcheurs de tourner en rond» avaient malheureusement raison.

L’année dernière, voilà que les services régionaux d’admission des différents cégeps du Québec décidaient que, pour la cinquième secondaire, seules les notes du premier bulletin serviraient à établir la sélection des jeunes. Ce fut la consternation dans les écoles secondaires, surtout chez ceux qui enseignaient aux finissants. Mais peu importe les raisons  logiques et fondées qu’ils invoquaient, rien n’y fit et la machine administrative alla de l’avant (ici, ici et ici).

Aujourd’hui, sans aucunement justifier leur décision, j’apprends que ces mêmes services régionaux d’admission au collégial changent d’idée et recommandent que «les écoles transmettent dans les délais fixés par les organismes concernés, les résultats des deux premiers bulletins.» Plusieurs questions méritent d’être posées, dont celle concernant les raisons qui ont amené un pareil changement. Ainsi, des élèves auraient-ils été pénalisés par cette façon de procéder?    

Pour ma part, ce que cette série d’évènements tend surtout à démontrer au fil des ans est que, non seulement les autorités administratives en éducation écoutent peu les enseignants, mais que cette attitude entraine des prises de décisions parfois couteuses et inefficaces. Quelle place fait-on véritablement aux enseignants dans le système éducatif québécois? Ceux qui siègent sur les divers comités ministériels sont-ils si représentatifs des enseignants de la base et des différentes réalités vécues sur le terrain? Dans les hautes sphères du pouvoir, comment se fait-il que les interventions des professionnels que sont les enseignants soient si souvent écartées?

Les années passent et rien ne semble avoir changé, surtout pas les lacunes du système scolaire québécois. De façon incompréhensible, on continue d’ignorer l’avis des gens qui sont souvent les mieux placés pour comprendre les défis auxquels il fait face. On veut que les enseignants soient des professionnels, on souhaite qu’ils agissent comme des professionnels mais on continue pourtant de les mépriser comme si leur avis ne provenait pas de professionnels.

25 août 2013

Rate my teacher...

Les sites de quotation sont sur la sellette depuis qu'un hôtelier de Québec a bêtement décidé de poursuivre un client insatisfait pour une mauvaise critique sur le site TripAdvisor.

Aujourd'hui, Le Journal de Montréal traite de ce qui constitue selon moi un dinosaure en éducation: le site Ratemyteachers.com. Pourquoi dinosaure? Parce que celui-ci date de plus de cinq ans et a perdu sa nouveauté auprès des jeunes.

À l'époque, certains mes collègues méritants étaient ulcérés des propos difammatoires et parfois haineux qu'on retrouvait sur ce site jusqu'à ce qu'un jour, ils voient apparaitre sur leur profil des tonnes et des tonnes de compliments, des mots gentils, des évaluation démentiellement positives et des commentaires très fantaisistes. Oui, pendant deux jours, je me suis amusé à remplir leur profil de la sorte en passant d'un ordinateur à l'autre dans mon école.

Ratemyteacher.com est un site qui ne comprend pas de filtre et qui accepte les commentaires anonymes. Niveau de fiabilité très faible. Aussi bien en profiter. L'art de contrer la bêtise par la bêtise.

Pour ma part, j'ai toujours rêvé d'un site du genre Ratemystudents.com. J'imagine les commentaires négatifs que les enseignants pourraient y laisser:
- aurait besoin de se laver.
- est rendu à cinq grand-mères mortes.
- son chien est mal nourri puisqu'il mange des devoirs.
- a des parents intimidateurs et harcelants.
- simule les crises de larmes à la perfection.

Mais un tel comportement, aussi jouissif puisse-t-il être, ne serait pas professionnel.


21 août 2013

Les cauchemars de la rentrée

«Je perds le contrôle de mes groupes.»

«Ma classe est située à côté de la fournaise.»

«Le directeur a décidé de changer ma tâche sans m'en parler.»

«Les moisissures entrainent la fermeture de mon école et ont mangé mon matériel pédagogique.»

Ces quelques phrases résument les cauchemars que vivent actuellement la nuit certains de mes collègues. La rentrée, avec son lot d'inconnu, suscite habituellement plusieurs appréhensions et des sommeils agités.

J'ai longtemps connu ces moments désagréables. Ne pas dormir la veille de la rentrée. Ne pas dormir avant le premier jour de classe. Ne pas dormir tout court. Plus maintenant. Je vieillis. Ou je suis devenu sage. Ou les deux à la fois.

On pourrait croire que ce comportement est le lot d'individus qui manquent de confiance. Pourtant, je suis convaincu que ce n'est pas le cas. Un enseignant est un être émotif, sensible et je suis toujours surpris de constater toute l'émotion, toute la fébrilité que peut engendrer ce retour au travail.

Contrairement à ce que l'on peut penser, être enseignant n'est pas un petit boulot routinier. Chaque année entraine sa part d'insécurité et, pour vivre une bonne année au travail, il y a une foule de facteurs qui entrent en compte. Un changement de local peut bouleverser tout un quotidien. Et il y a les élèves: comment seront-ils? Hériterais-je de cas-problèmes?

Alors, on ne dort pas parce qu'on est trop occupé à anticiper le pire.

Zen. Sois zen. Et respire.

Et vous, vous en faites des cauchemars de rentrée?


19 août 2013

Cellulaire en classe: on radote en Ontario

La Fédération des enseignants de l'élémentaire de l'Ontario (FEEO) a demandé l'interdiction des téléphones cellulaires en classe. Est-ce moi ou, en éducation, on radote pas mal?

Tout d'abord, je savais que le Québec ne partageait pas plusieurs points avec les autres provinces canadiennes, mais les jeunes ont des cellulaires au primaire en Ontario? Autour de moi, après quelques vérifications, les cellulaires au primaire sont exceptionnels pour ne pas dire inexistants. Pourtant, dans ce texte, on affirme: «Aujourd’hui, à 10 ans, un enfant sur quatre possède un téléphone portable. Ils sont huit sur dix à l’adolescence.» Un sur quatre? Vraiment?

De plus, au Québec, je ne connais pas d'école primaire ou secondaire qui accepte l'utilisation du cellulaire en classe, à moins d'une permission spéciale basée sur des considérations pédagogiques. Certains gérants d'estrade sévissant sur les plateformes Internet ou dans les médias l'ignorent ou confondent cette situation avec ce qui se passe au cégep ou à l'université. Au secondaire, un cellulaire utilisé de façon fautive est aussitôt saisi et remis à la direction. Généralement, c'est le parent qui doit venir chercher l'appareil confisqué. Parlant de parents, il faut souligner que l'école ne bénéficie pas toujours du vaillant support de certains d'entre eux. À mon école, pour régler le problème, chaque parent signe en début d'année un avis indiquant qu'il a pris connaissance des règlements qu'on y retrouve et qu'il s'engage à les respecter. Ça règle certaines choses...

Par ailleurs, la FEEO s'inquiète des rayonnements électromagnétiques et des points d'accès WIFI. «Il y a des raisons de s'inquiéter pour la santé et la sécurité des membres, surtout des femmes», affirme Sandra Wash, une représentante du district de Peel.

Jusqu'à présent, la majorité des recherches n'établit pas de lien entre ce rayonnement et des problèmes de santé. Je ne dis pas qu'il faut cesser de s'intéresser à cet aspect de certaines nouvelles technologies mais, même si on interdisait de façon préventive sans base scientifique rigoureuse les cellulaires et les WIFI dans les écoles, celles-ci sont déjà noyées par d'autres réseaux que ceux établis par des réseaux scolaires. On enlèverait une goutte d'eau ou deux dans l'océan. Je déteste ce genre d'argument mais, par moment, il faut être pragmatique.

Je vous invite à aller lire les commentaires des internautes à la suite de cet autre texte. Certains sont affligeants:

-  «Ça serait bien aussi ici mais c'est mission impossible,les carrés rouges feraient une grêve et empecheraient la majorité des étudiants d'avoir acces aux cours.»
- «Mission impossible dans la Belle Province qui est controlée par le syndicat des enseignants.»
- «il est grandement temps que les professeurs se reveillent et ne tolerent pas le cell en classe....ronnn...ronzzzz...zzzz»