14 novembre 2017

Le ministre Proulx et le Lab école: dire une chose et en faire une autre

La récente émission de TLMEP a ramené à l’avant-scène le dynamique trio de la révolution en éducation au Québec, MM Thibault, Lavoie et Larrivée. Ce choix du ministre de l’Éducation de confier à ces trois vedettes la possibilité d’imaginer, à nos frais, l’école du futur a suscité bien des débats. Un aspect de ce choix qui a été peu abordé cependant est qu’il montre à quel point M. Proulx manque de cohérence entre ce qu’il dit et ce qu’il fait.

Un premier élément à l’appui de cette affirmation est qu’on ne retrouve aucun enseignant dans cette équipe de choc. Pour un ministre qui affirme vouloir revaloriser cette profession auprès de la population, le message est contradictoire. En affirmant vouloir «penser en dehors de la boite», M. Proulx ne désavoue pas seulement tous les employés de son ministère, mais aussi tous ceux qui oeuvrent sur le terrain et ont une connaissance fine des difficultés qu’on y rencontre. Oui, mais le trio formé d’un architecte, d’un athlète et d’un chef cuisinier a proposé ses services bénévolement, affirme-t-on.  Combien d’enseignants, d’éducateurs et de professionnels de l’éducation font de même chaque année, croyez-vous? Pourquoi les offres de ceux-ci n’ont-elles pas été retenues? Sont-elles moins valables aux yeux du ministre que celles de ces trois vedettes?

Un deuxième élément qui montre bien une forme d’incohérence dans le discours du ministre de l’Éducation est le parti-pris qu’il semble manifester à l’effet que la réussite de l’école québécoise passe une meilleure alimentation, de beaux espaces et plus d’activités physiques. Or, c’est le même ministre qui souhaite la création d’un Institut national d’excellence en éducation afin de déterminer les pratiques gagnantes en matière de réussite scolaire. Pourquoi créer un tel institut s’il croit déjà avoir toutes les réponses? Qui dit que cette réussite ne pourrait pas plutôt passer par les arts, comme le démontrent de nombreuses études? Dans les faits, comment peut-on justifier d’investir dans une telle école du futur alors que les recherches actuelles démontrent que certaines actions existantes et documentées ont, à coût égal, un impact beaucoup plus important sur la réussite, notamment celles reliées à une meilleure maitrise de la lecture chez les jeunes issus de milieu défavorisé?  Qu’attend le ministre, nommé à ce poste depuis presque deux ans maintenant, pour investir massivement dans ce domaine? Est-on dans une fuite vers l'avant?


Pour ma part, MM Thibault, Lavoie et Larrivée devraient réaliser que leurs actions, aussi vertueuses soient-elles, ne constituent qu’un autre chapitre dans cette grande mascarade qu’est la réussite scolaire au Québec. Peut-être trouvent-ils eux aussi - qui sait - leur compte dans cette pédagogie de la distraction? Pourtant, s'ils veulent la réussite d'un plus grand nombre d'élèves, la solution est ailleurs que dans ce qu'ils préconisent, soit dans l'adoption de moyens pédagogiques efficaces. Mais au royaume de la pédagogie spectacle, l'éclat des fausses évidences fait de meilleurs reportages et a l'avantage de distraire les citoyens des véritables problèmes.

2 commentaires:

Lucie a dit…

Ils donnent de leur temps bénévolement pour repenser l'école!
Que cet exercice coûte 1,5 million aux contribuables, c'est un tout petit détail... (je suis sarcastique, ici).
Je serais curieuse de connaitre le parcours scolaire des enfants de ce trio (public vs privé), mais bon je suis probablement de mauvaise foi!

Toute critique est impossible, puisque dès qu'on se met à poser des questions ou à douter de l’exercice, on se fait taxer de personne négative et pessimiste.

Ceci étant dit, je décroche.
Ricardo qui affirme qu'on ne consulte jamais les enfants... vraiment? Pourtant, dans toutes les écoles où j'ai travaillé et où on a réaménagé la cour d'école (par exemple), on consultait les élèves (via le conseil d'élèves), on leur faisait faire des dessins, etc.
Ça montre l'étendue de ses (leurs) connaissances sur le monde de l'éducation. Heureusement qu'il est là pour rétablir la situation et enfin consulter les élèves...!

C'est en effet de la pédagogie spectacle, c'est vendeur et ça fait de la bonne télé.
Pas certaine que j'aurais l'oreille attentive du ministre (et le 1,5 million) si j'allais frapper à sa porte pour lui proposer de repenser l'école!

C'est drôle, mais mes réussites scolaires, mes souvenirs scolaires, sont reliés à des profs, pas au nombre de fenêtres, d'arbres, d'activités sportives ou culinaires que j'ai pu faire à l'école!

Anonyme a dit…

Une belle école, un bel environnement, de bons petits plats, du grand air et des activités physiques emballantes; qui pourrait s'opposer à ça? Mais personne! Tout ça est louable, mais en attendant ces extraordinaires écoles n'y a-t-il pas encore beaucoup à faire pour améliorer l'école? Et quand ces écoles verront le jour, elles abriteront des élèves et des profs qui sont, en ce moment même, souvent dans leurs écoles décrépites, les véritables acteurs du monde de l'éducation. Serait-ce trop demander que d'en tenir compte...maintenant.
L'école du futur est un beau rêve; l'école d'aujourd'hui, que des coupes successives dans les budgets ont saignée, il ne faudrait tout de même pas l'oublier,est la réalité!
Dans toute cette opération, je vois d'abord et avant tout un gouvernement en mal d'être réélu qui peut certainement séduire beaucoup de gens en les faisant rêver, peut-être aussi quelques acteurs du milieu de l'éducation pour les mêmes raisons, mais en ce qui me concerne(à moins de 5 ans de la retraite de ce milieu)un vrai projet de société dont l'éducation est le centre m'interpellerait. Autrement c'est beau, mais ça demeure un spectacle.