Dans le Journal de Québec, on publie aujourd'hui un article indiquant que le MEES songe à permettre aux élèves d'utiliser un ordinateur et un logiciel de correction comme Antidote lors de l'épreuve d'écriture de cinquième secondaire. Une recherche a même été effectuée auprès de 300 élèves à cet effet. Certaines des conclusions de celle-ci rejoignent ce que l'on constate déjà depuis des années sur le terrain, soit que les élèves qui ont utilisé Antidote ont effectué moins d'erreurs et que ceux qui ont utilisé l'ordinateur sans correcteur, eux, en ont fait davantage que leurs confrères munis seulement d'un crayon et d'une feuille de papier.
La principale raison expliquant le deuxième constat est assez simple: des élèves qui n'ont pas l'habitude d'utiliser l'ordinateur sont «bousculés» dans leurs repères et leurs techniques de correction. Dans bien des cas, ils voient moins leurs fautes à l'écran que sur le papier parce que leur oeil, par un phénomène bien connu, a davantage tendance à «reconstruire» correctement un mot mal orthographié quand il est écrit à l'ordinateur.
Actuellement, il faut savoir qu'il est déjà permis d'utiliser un ordinateur sans logiciel de correction pour compléter l'épreuve du MEES. La principale condition pour ce faire, par contre, est qu'on doit démontrer que l'élève est habileté à le faire, c'est-à-dire qu'il a appris à utiliser l'ordinateur pour rédiger, ce qui est une bonne idée quand on pense aux résultats de la recherche mentionnée plus haut.
Ce que l'on remarque cependant est que ceux qui sont vraiment habiletés à utiliser l'ordinateur réussissent mieux, même sans correcteur, tout simplement parce qu'ils gagnent presque 40 minutes sur un examen qui en dure 195 parce qu'ils n'ont pas à retranscrire leur brouillon au propre. Personne ne soulève cet avantage indu dont bénéficient actuellement des élèves de certaines écoles où l'on exige l'achat d'un appareil électronique ou bien où l'on fournit ce dernier.
Plusieurs difficultés empêchent présentement l'utilisation à large échelle d'un appareil électronique lors d'évaluations en français. La première est bien sûr que les élèves n'ont pas un accès fréquent à un tel appareil afin de devenir habiletés à l'utiliser. La seconde est de s'assurer de la sécurité de la passation de l'épreuve afin d'éviter le plagiat ou la tricherie.
Sur la question de fond, à savoir si les élèves devraient utiliser ou non un logiciel de correction lors de leurs examens d'écriture, les avis sont partagés chez les enseignants. Ceux en faveur de cette idée indiquent qu'en 2018, il est temps qu'on apprenne aux élèves à utiliser un logiciel de correction en classe. Ils vont comparer cet outil à la calculatrice graphique utilisée en mathématique, par exemple. Ils souligneront aussi que ce logiciel peut favoriser l'apprentissage en indiquant à l'élève ses erreurs et comment les corriger. Ceux qui sont en défaveur se demandent plutôt si on aide vraiment l'élève à bien écrire en lui fournissant un tel outil. Ils donneront le même exemple de l'utilisation de la calculatrice qui a amené certains élèves à ne plus savoir multiplier ou diviser sans cet outil.
Selon mon expérience, l'utilisation d'un logiciel de correction à l'école avantagera les élèves déjà bons en français. Ceux-ci jouissent effectivement d'une bonne compréhension de la grammaire française et de sa logique interne. Ils n'en deviendront que meilleurs. Pour les élèves faibles et moyens, il est fort probable que leurs résultats s'amélioreront sans qu'ils comprennent pour autant ce qu'ils feront.
Pour ma part, l'utilisation d'un correcteur ne sera pas une panacée et ne remplacera pas l'enseignant, du moins pour quelques années encore si on se base sur l 'état actuel des programmes informatiques basés sur des concepts de l'intelligence artificielle. Il existe des limites à ce qu'un logiciel peut présentement expliquer à un jeune. Pour ce qui est de l'avenir, par contre, même avec une aide électronique plus développée, l'école et ses enseignants seront toujours aussi nécessaires, mais d'une façon différente. Ils devront mieux éveiller les jeunes à la logique, la beauté et les créations reliées à cette langue qui est la nôtre.
4 commentaires:
Tiens, nous avons été inspiré par le même article ce matin!
«Pour les élèves faibles et moyens, il est fort probable que leurs résultats s'amélioreront sans qu'ils comprennent pour autant ce qu'ils feront.»
Voilà exactement l'idée que j'étoffe de mon expérience.
Enseignant le programme de Secrétariat en formation professionnelle, je considère que les élèves doivent effectivement apprendre les règles de français et apprendre à rédiger et à corriger un texte « papier ». Toutefois, je considère également que si la maîtrise de ces règles est acquise et qu'ils ont accès à un aide technologique, ils ne pourront qu'en être gagnant.
Utilisant Antidote dans le cadre de mon travail, je peux aussi vous garantir qu'on ne peut se fier à ce logiciel les yeux fermés. En effet, il propose parfois des corrections erronées. Il est donc toujours important d'avoir une bonne maîtrise du français écrit.
L’usage de calculatrice est maintenant chose courante, pourquoi ne pas faire la même chose avec l’utilisation des technologies de révision linguistique mises à notre disposition? Quel enseignant n’a pas utilisé Antidote lors de ses travaux d’Université ? Cela l’a-t-il empêché de réussir le TECFÉE?
Finalement, merci cet article fort intéressant.
Dans le cadre d'un travail universitaire, je me dois de "publier publiquement" un travail. Le tout est dans le cadre d'un cours portant sur l'éthique. Comme mon travail porte sur le sujet de votre article de blogue, j'ai pensé partager ma rédaction ici. Votre blogue est une belle découverte pour moi! :) Voici une partie du travail en question : Est-ce juste et équitable de permettre seulement à certains élèves, particulièrement ceux en difficulté d’apprentissage, d’utiliser des outils technologiques ? Ne devrait-on pas offrir ces outils à tous ? Il est évident que certains élèves gagnent à utiliser des outils d’appoint en classe, on le verra d’ailleurs dans les prochaines lignes. Par contre, est-ce que cela ne devient pas injuste de ne pas l’offrir à tous les élèves ? Les enseignants doivent intégrer les TIC dans leur pratique. L’utilisation qu’en font les enseignants varie grandement d’une personne à une autre, d’un établissement à un autre. Afin de prendre position sur le sujet, il faut pratiquement faire du cas par cas, peser les avantages et les inconvénients que cela représente pour l’élève qui est devant nous. Par exemple, si l’on prend les élèves ayant des difficultés d’apprentissage, les outils technologiques peuvent devenir une aide précieuse. En effet, il semble que pour « les élèves ayant des troubles d’apprentissage, les technologies d’aide sont associées à de nombreux bénéfices, notamment une amélioration du rendement scolaire de même qu’une amélioration de la qualité de la situation scolaire qui se traduit par la qualité de l’expérience scolaire, l’enthousiasme pour l’école, une perception plus positive de soi, un sentiment de compétence accru et une augmentation du temps passé à la réalisation d’une tâche. » Certains enseignants se demandent par contre fréquemment comment être équitable envers ceux qui n’ont pas ce type d’outils supplémentaires. Cela semble parfois poser problème et quand on tente d’aborder la question d’un point de vue éthique, il semble que ce questionnement soit tout à fait légitime. On le sait, les élèves qui utilisent ces outils d’aide à l’apprentissage le font, car ceci se retrouve à leur plan d’intervention et qu’on a jugé que cela peut les aider. Dans ce cas, pourquoi ne pas le permettre à tous ? On peut aussi se questionner à savoir si d’autres élèves devraient avoir ce genre d’outils et ne peuvent le faire, car ils sont passés droit dans le système et n’ont jamais eu de diagnostic X et de plan d’intervention. Il faut savoir que rien n’est parfait et que pour créer des conditions gagnantes de l’utilisation de la technologie, plusieurs éléments sont nécessaires : bonne connaissance des problématiques de l’élève, support des intervenants du milieu scolaire, développement de l’autonomie de l’élève qui en fait l’utilisation, etc. De plus, il ne faudrait pas avoir la pensée magique. Ces outils sont des aides que l’élève peut utiliser, mais cela ne remplace en rien les efforts qui doivent être faits. On comprend rapidement que l’utilisation de la technologie peut être un bel outil, mais il faut mettre en place des conditions gagnantes. Cela peut être bénéfique pour les élèves, autant ceux d’un cheminement régulier que ceux présentant des problèmes d’apprentissage. Par contre, il ne faut pas non plus se leurrer et croire que c’est magique, que les efforts de part et d’autre seront moindres… au contraire. Cela est vrai pour les élèves et ce l’est aussi pour l’enseignant, qui doit adapter sa pratique s’il veut faire une utilisation positive de ces outils. Bref, je trouve ce débat tout à fait dans l’ère, je pense qu’il faut rapidement se questionner et statuer à savoir ce qu’on fait avec tout cela. La technologie dans les salles de classe demeure un enjeu, un défi pour plusieurs enseignants à l’heure actuelle.
Madame Pouliot: une des difficultés aussi est que bien des élèves ont accès à ces outils, mais n'ont pas été bien préparés quand vient le temps de les utiliser.
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