27 novembre 2012

(Un pas hors de la pause) Tableau interactif : Pensée magique et inexactitudes


 Le 24 novembre dernier, La Presse publiait la lettre d’une enseignante, Marie-Ève Archambault, consternée par la suspension par le gouvernement Marois du programme d’achat de tableaux interactifs dans les écoles. Cette dernière défend ce programme d’une façon qui illustre bien la pauvre qualité des arguments de certains de ceux qui se disent en faveur de cet outil technologique.

Tout d’abord, contrairement à ce qu’affirme cette enseignante, qui se base surtout sur son expérience personnelle, il n’existe aucune étude indépendante exhaustive qui conclut aux effets positifs de l’utilisation des tableaux interactifs sur la réussite scolaire (ici).

Mme Archambault associe également les TBI à l’«évolution de la vie» et au «monde moderne».  Or, cet argument des supposés bienfaits du progrès technologique est souvent un leurre qui relève de la pensée magique Combien de fois avons-nous vu des supposés nouveaux outils technologiques ne pas tenir leurs promesses ou encore se révéler carrément des méfaits?

Un autre aspect de l’argumentation de Mme Archambault, qui montre bien la faiblesse de celle-ci, est lorsqu’elle affirme que les tableaux interactifs sont plus écologiques. Ainsi, ces tableaux génèreraient moins de documents imprimés. Or, a-t-elle tenu compte de l’empreinte écologique des TI avant d’affirmer une telle chose? Tient-elle compte des ressources nécessaires en énergie pour alimenter de tels appareils? Sait-elle que seulement 8% des appareils électroniques au Québec sont recyclés? Quant à son idée que les TI n’occasionnent aucune poussière de craie associée aux tableaux conventionnels, «ce qui améliorerait la qualité de l’air», qu’attend-on pour déclarer toutes les écoles québécoises comme étant des zones sinistrées devant un tel danger pour l’environnement?

Contrairement à ce qu’affirme Mme Archambault, ce qui est inquiétant pour le Québec, ce ne sont pas quelques enseignants qui auraient «peur du changement» et «ancrés dans leurs vieilles habitudes,» mais bien ceux qui démontrent un si faible sens de l’analyse et de l’argumentation devant les choix qui s’offrent à eux comme éducateurs.  Voilà la véritable menace qui plane sur le réseau de l’éducation.

Il est enfin très indicatif, selon moi, que cette jeune enseignante termine sa lettre en s’interrogeant sur le genre d’avenir qu’on veut «pour nos enfants et nos futurs travailleurs». Pour ma part, ayant l’esprit moins programmé par le «progrès technologique» et la «marchandisation de l’éducation», je me préoccupe davantage de l’avenir de ceux que je considère comme nos citoyens de demain.

12 commentaires:

Anonyme a dit…

Pour ma part, le retrait des TBI me semble une bonne idée . Certaines écoles ont fait état de problèmes techniques importants dans la dernière année. Entre autres, les lumières ont une courte durée de vie et les remplacer coûte autour de 250$ l'unité... Il ne faut pas oublier non plus que la mesure gouvernementale ne prévoit pas de budget pour l'entretient des tableaux ni pour le remplacement des portables. Je pense que ce temps d'arrêt est important et que les écoles devraient en profiter pour évaluer avec objectivité les avantages et les inconvénients de ce nouveau jouet à la mode.

Je ne suis pas contre le progrès mais quand un parent vient me rencontrer pour me dire qu'il est déçu que son enfant soit dans une classe sans TBI, je me questionne.
;)

Anonyme a dit…

Le problème, c'est qu'il ne faut pas voir les TNI comme un outil magique... C'est un outil, au même titre qu'un tableau noir, qui peut être utile à l'enseignant technologique. Pour l'utiliser adéquatement, il faut être prêt à donner beaucoup de temps pour monter des leçons sur le TNI, se former et découvrir ses possibilités. Malheureusement, plusieurs enseignants utilisent ce couteux outil comme projecteur... Aberrant. Par contre, pour avoir vu certains enseignants faire des leçons extraordinaires, l'utiliser de façon hyper pratique, je peux en voir l'utilité.

Mais entre utilité et nécessité, il y a une différence.

J'adorerais avoir un TNI dans ma classe pour son utilité. Par contre, je préférerais de loin avoir des IPAD pour chaque élève...

marâtre

Anonyme a dit…

Je suis content de profiter de ce genre d'outil de travail depuis un an. Néanmoins, je suis d'accord avec ton analyse PM, ce n'est pas magique. Je trouve l'outil très intéressant pour montrer des processus complexes, des stratégies de travail, dans mon cours de français. Je reste très préoccupé de faire bouger cependant l'élève dans sa tête et l'abus de démonstration finit par l'endormir.

Anonyme a dit…

Avec tout ce que je fais depuis 4-5 ans avec mon TBI, je ne retournerais pas en arrière!

J'ai aussi la chance d'utiliser des portables et des Ipad pour les élèves, mais j'utilise beaucoup plus le TBI.

C'est un outil fort pratique autant pour l'enseignant que pour l'enfant. Je l'utilise quotidiennement en classe et j'utilise aussi mon portable pour monter mes cours tranquillement à la maison. Je n'ai jamais eu de formation, mais je fouille, je trouve et je m'amuse!

Oui, à l'occasion, je l'utilise comme projecteur, par exemple dans mes cours d'univers social quand je montre des cartes à mes élèves.

À l'occasion aussi, il est utilisé comme un simple tableau vert, mais je peux enregistrer toutes mes leçons et y revenir n'importe quand ou imprimer les notes pour un élève absent.

Le TBI est un outil efficace, motivant et aidant. J'adore y créer mes leçons et mes projets. C'est certain qu'on peut fonctionner autrement, mais sincèrement, je ne m'en passerais plus car j'y trouve trop de belles opportunités pour mes élèves et moi!

Charles Samares a dit…

Quel bon billet!

Tu résumes fort bien ce à quoi je pensais à la lecture de cette lettre! :)

Le professeur masqué a dit…

À tous: outil pédagogique, facilitant le travail du prof, je veux bien, mais les impacts sur la réussite des jeunes, les mesure-t-on?

Charles Samares a dit…

Parfois, on semble oublier que l'humain est au coeur de la réussite des jeunes: pas les trucs technologiques!

Tu peux bien avoir toute la technologie du monde entre les mains, il n'en demeure pas moins que celle-ci peut devenir lassante pour un élève si elle est au centre de son quotidien et qu'il n'y a aucune enrobage lui permettant de développer un peu de curiosité intellectuelle!

Le professeur masqué a dit…

M. Samares: cette enseignante est donc incompétente sans TI? Moins bonne, moins efficace? Voilà ce me racontait une directrice qui lisait sa lettre.

Quand je pense que mes élèves me disent que mes cours sont super et que je n'ai qu'une craie cancérigène et un tableau vert...

Anonyme a dit…

Imagine ce qu'ils diraient si tu avais un tableau interactif! :)

Sérieusement, c'est vrai que ce n'est pas le tableau qui fait le prof.

Un enseignant incompétent le restera, mais il augmentera l'intérêt de ses élèves s'il se donne la peine d'utiliser le TBI autrement que comme tableau vert ou projecteur.

Un bon enseignant verra qu'on peut aller vraiment plus loin en utilisant cet outil. Les ressources sont riches et nombreuses. Il faut par contre prendre le temps.

J'ai la chance de travailler avec un TBI, des portables et des Ipad, mais je ne me fis pas sur ça non plus. Mes cours sont cependant plus complets car je peux en montrer beaucoup plus qu'avant. Je vois la motivation dans les yeux de mes élèves. Ça ne m'empêche pas d'aller visiter la bibliothèque municipale, de consulter des revues, des encyclopédies, etc. avec mes élèves. Je continue à travailler en ateliers et en projet. J'ai une classe-cycle... ça bouge! C'est motivant!

Il faut l'avoir essayé pour bien comprendre, peut-être... Certaines personnes ne savent même pas reconnaître qu'il y a des avantages. C'était mon cas quand mon école a décidé d'équiper les classes il y a 4-5 ans. Depuis, ma vision a changé parce que je l'utilise bien sûr, mais surtout parce que je l'utilise comme il se doit. Sans prétention.

En passant, mes élèves sont très favorisés et ne sont aucunement lassés par la technologie que nous avons à l'école. Je parle souvent avec eux des limites des bébelles électroniques ainsi que de leur utilité et de leur effet néfaste.

Anonyme a dit…

Honnêtement, ça me fatigue un peu de voir qu'on recule dans le dossier...

Selon les études, le TBI ou TNI n'augmenteraient pas la réussite scolaire des élèves.

Peut-être... même si je vois que cela a un effet bénéfique dans mon milieu. Mais bon... ça semble différent d'un milieu à l'autre.

Cependant, j'aimerais qu'on questionne les enseignants. Ceux qui en ont. Les anciens profs qui n'en avaient pas et qui en ont un maintenant. Les jeunes profs qui sortent de l'université. Que pensent toutes ces personnes?

Je suis consciente que l'achat de ces tableaux prend une bonne partie du budget et qu'on est en période de compressions budgétaires. Néanmoins, je trouverais juste que le programme d'achat se poursuive.

J'aimerais qu'on pense aussi aux enseignants. Ce n'est évidemment pas la première chose à faire pour faciliter notre travail, mais ça en fait partie aussi. Je travaille plusieurs heures par semaine et bien au-delà de ma tâche depuis toujours. Depuis l'arrivée du tableau interactif, je sauve du temps, même si j'ai eu à en prendre pour apprendre à connaître les outils. Ce n'est pas à négliger non plus...

Missmath a dit…

PM, tu sais que lorsque tu écris des billets comme ça j'ai envie de t'épouser.

N'importe quel support est un catalyseur vers la réussite pour l'enseignant qui sait l'utiliser pour faciliter les apprentissages de ses élèves. C'est d'imposer les supports qui ruinent tout.

Le professeur masqué a dit…

Miss: laissons tomber le mariage et unissons dans la pédagogie.