10 janvier 2014

La CSEM ou l'art de jeter de l'essence sur un feu

Ouf! quand j'ai écouté cette entrevue à la radio à l'émission 15-18 sur les ondes de Radio-Canada Première, je n'en revenais pas (ici et ici).

La vice-présidente de la CSEM (Commission scolaire English Montréal), Sylvia Lo Bianco, recommande rien de moins que la désobéissance civile si le projet de loi 60 était adopté. Ce n'est pas seulement ce geste et ce qu'il implique qui m'interpellent mais aussi l'argumentation même mise de l'avant.

Mme Lo Bianco est en contre l'ensemble de ce projet de loi, même pour ce qui est des dispositions qui font l'objet d'un large consensus social et politique, dont celui de l'égalité homme/femme: «On ne peut pas appuyer une loi qui va à l'encontre de nos valeurs», avance-t-elle pour expliquer ce refus de la CSEM. Pourtant, elle-même affirme plus tard que «l'on peut être différent et égal en même temps». Où est la cohérence? Suivant cette logique, certaines communautés religieuses ou autres peuvent donc faire fi des lois, elles aussi, si elles ne correspondent pas à leurs valeurs.

Il faut écouter la réponse de Mme Lo Bianco sur le fait que la CSEM veut le rejet du projet de loi en entier, dont les mesures qui concernent les balises des accommodements raisonnables et l'égalité homme/femme: «On est pas là pour faire une nouvelle façon de (inaudible...) le temps, de dépenser l'argent des contribuables. On est là pour utiliser et améliorer la réussite.» Tiens, tout à coup, la mission «socialiser» devient moins importante que dépenser et qualifier... Changement de registre populiste.

À l'animateur qui lui dit qu'une entité gouvernementale ne peut pas appliquer les lois seulement quand elles font son affaire, Mme Lo Bianco ne répond pas à cette affirmation. Elle ne semble d'ailleurs pas comprendre que c'est aux tribunaux de décider de la validité d'une loi, comme si une commission scolaire avait tous les pouvoirs et étaient au-dessus du cadre légal existant. «On va se battre pour notre mission nos convictions et tout ceux qui représentent notre commission scolaire, notre mission et nos valeurs.» Quitte à dépenser de l'argent à cette fin? demande l'animateur. Réponse évasive de la vice-présidente de la CSEM à ce sujet. On ne peut quand même pas trop se contredire dans la même entrevue...

Mme Lo Bianco affirme que ce projet va trop loin «d'après notre avis» et  n'est pas cohérent avec les lois 118 et 56 contre l'intimidation. Pour elle, ce projet de loi incite à la violence: « Le gouvernement Marois, depuis qu'il est en poste, fait tout ce qu'il peut pour diviser les groupes ethniques et il sème de la haine. Pendant des années, nous n'avons eu aucun problème de vivre ensemble, mais maintenant il y a des femmes, dans des autobus, qui se font insulter et cracher dessus.»

«Nous considérons que le projet de loi 60 est une tactique d'intimidation. (...) Les intolérants parmi nous ont maintenant l'appui tacite du gouvernement d'imposer leurs volontés», peut-on lire dans le mémoire que déposera la CSEM en commission parlementaire.

On m'excusera mais un organisme gouvernemental peut être en désaccord avec un projet de loi, peut même le contester légalement quand il est adopté. Par contre, quand on affirme qu'on n'appliquera pas une loi à cause de ses valeurs, on est dans un autre monde.

Mme Lo Bianco a livré une entrevue très maladroite. Elle aurait pu simplement indiquer de façon calme et posée que l'organisme qu'elle représente est contre le projet de loi 60 et que, si ce dernier était adopté, elle demanderait le report de l'application de la loi, le temps que les tribunaux statuent sur la validité de celle-ci. 

À sa manière, elle attise le débat.



2 commentaires:

Siocnarf a dit…

Vous connaissez beaucoup de monde qui n'attise pas le feu. Parmi les premisers se trouve le gouvernement.

Siocnarf a dit…

Le gouvernement également attise le feu.