21 février 2012

CAQ et salaire des enseignants: qui dit vrai?

Dans Le Devoir, j'ai retenu ce passage à propos de François Legault:

Il [François Legault] assure que «jamais la coalition n'a proposé de telles mesures», et que ce sont tous les enseignants qui toucheraient cette augmentation de salaire de 20 $ (sic - on parle de 20%) en échange d'une évaluation de leur travail, selon la coalition.

Retenez cette phrase. J'ai quelques petites recherches à effectuer.

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Recherche faite.

Il faudrait que M. Legault explique ce passage du Devoir et le mette en lien avec celui de TVA où l'on dit:

En contrepartie, François Legault propose de revaloriser la profession d'enseignant et de majorer leurs salaires en moyenne de 20 %. Une telle mesure coûterait 950 millions $ au trésor public et l'argent proviendrait notamment des quelque 2000 postes qu'il souhaite supprimer dans la bureaucratie des commissions scolaires.

Ces augmentations de salaire seraient modulées selon la charge de travail confiée aux enseignants, a expliqué François Legault.

La présence d'élèves en difficultés dans les classes de même que les milieux socio-économiques où sont situées les écoles seront parmi les principaux critères qui serviront à chiffrer les niveaux de salaires des enseignants.

Les deux passages sont très différents, on le reconnaitra. Alors, où se situe la vérité là-dadans?

19 commentaires:

Anonyme a dit…

Voici la réponse probable qu'aura François Legault si un jour il doit répondre à cette question: "J'ai été mal cité".

C'est une réponse tellement facile. Encore faudrait-il que la question lui soit posée.

Juillet a dit…

Une augmentation de salaire de 20$? Moi, j'appelle ça rire du monde! :)
(il doit y avoir une petite erreur au début de votre article..).

Le professeur masqué a dit…

Juillet: erreur du Devoir. J'ai mis une remarque entre parenthèses.

Mario Asselin a dit…

Prof masqué, je milite à la Coalition et je peux témoigner que ce qui se discute à l'interne est à l'effet de trouver un moyen de reconnaître financièrement le travail des enseignants qui oeuvrent auprès d'élèves « plus demandant ». Ce n'est sûrement pas la seule chose à faire que de bonifier le salaire de ceux qui enseignent dans des classes où il y a beaucoup d'élèves en difficultés (il faut aussi les supporter au niveau « ressources »), mais il faut agir pour valoriser ce travail.

Je n'ai vu circuler à aucun moment l'idée de lier la rémunération des profs aux résultats scolaires des élèves.

Le professeur masqué a dit…

Mario, je conclus de ta réponse que la CAQ n'augmentera pas le salaire de tous les enseignants mais seulement celui de certains enseignants. Donc, il est faux d'affirmer que les enseignants troquent la possibilité d'être évalué contre une augmentation de salaire. Certains enseignants seront évalués tout en n'ayant aucune augmentation de salaire.

Honnêtement, Mario, toute cette question de rémunération à géométrie variable des enseignants est une véritable boite de Pandore.

Ainsi, qu'est-ce que des élèves «plus demandants»? J'ai souvent enseigné auprès des élèves doués parce que personne ne voulait de ce genre de poste. Et crois-moi que j'en ai rushé un bout. Aucun élève ne risquait d'être en échec mais des cas de dépressions, de burn out, de mutilation, d'anorexie et j'en passe.

Actuellement, j'enseigne auprès d'élèves PEI. Ils sont demandants, crois-moi. Je ne fais pas plan d'intervention, mais on a des réunions de coordination d'activités, de correction de projets personnels, de formation PEI. De plus, on organise des activités, des sorties et la direction de mon école nous dit de ne pas trop compter notre temps parce que nous avons l'avantage d'avoir de bons élèves. Résultat: il arrive que certains collègues ne veulent pas du PEI parce que la charge de travail est trop lourde. Moins de gestion de classe, mais beaucoup plus de tout le reste.

Boite de Pandore toujours, mais un prof d'éducation physique va gagner un salaire supérieur à celui d'un prof de français parce qu'il oeuvre auprès d'élèves «plus demandants» alors qu'on sait tous que la charge de travail du premier est généralement loin d'équivaloir à celle du deuxième. Pffff...

La CAQ ne semble pas comprendre une chose: les profs ne veulent pas d'une augmentation de salaire. Ils veulent de meilleures conditions de travail. Qui plus est, cette mesure, et je cite ton chef, vise à rendre «les enseignants plus responsables». Or, faire porter la réussite scolaire des jeunes aux seuls enseignants est odieux.

Enfin, je veux bien qu'on congédiasse des enseignants, mais encore faut-il qu'il y ait des gens pour les remplacer! Or, les conditions actuelles du métier d'enseignants (charge de travail, violence dans les écoles, dévalorisation non pas par le salaire mais par le manque de reconnaissance du travail des enseignants de la part des décideurs scolaires) font que les candidats d'envergure et les candidats tout court ne songent pas à cette profession.

Il y a des problèmes en éducation. Les idées de la CAQ sont loin d'être des solutions efficaces et viables.

Mario Asselin a dit…

« Mario, je conclus de ta réponse que la CAQ n'augmentera pas le salaire de tous les enseignants mais seulement celui de certains enseignants. »

Conclusion qui n'est pas juste.

Ce n'est pas ce que j'ai écris.

De ce que je comprends de ce qui a été annoncé par M. Legault, l'augmentation des salaires touchera tous les enseignants.

Je ne doute aucunement du mérite de tous les enseignants, mais l'expression « les plus demandants » ne vise pas les élèves du PEI.

La mesure du 20% d'augmentation des salaires visent à s'assurer que de plus en plus de jeunes femmes et de jeunes hommes considèrent de joindre la profession d'enseignants et qu'un jour prochain, les facultés d'éducation doivent sélectionner « les meilleurs » candidats. Depuis longtemps, tout le monde est accepté dans les facultés d'éducation. Actuellement, entre ingénieur, avocat, médecin ou autre professionnels, trop peu d'excellents candidats choisissent une autre carrière que celle de l'enseignement et nous considérons que le salaire est en cause.

Lors du congrès du mois d'avril, d'autres propositions en éducation viendront toucher les points que vous soulevez. Aussi, des détails plus pointus sur la nature des mesures déjà annoncées viendront avec ce congrès. Notre parti est né le 14 novembre dernier. Normal qu'un programme complet ne soit pas encore disponible.

On s'entend... il y a des problèmes en éducation.

L'école autonome, le fait de ramener le plus de pouvoir possible près de l'action, la valorisation du travail de l'enseignant et l'élimination de la bureaucratie me paraissent être de bonnes pistes pour s'y attaquer.

À suivre.

Le professeur masqué a dit…

Mario, on jase... faque on n'est pas obligé d'être d'accord.

Je ne partage pas la prémisse suivante: «Depuis longtemps, tout le monde est accepté dans les facultés d'éducation. Actuellement, entre ingénieur, avocat, médecin ou autre professionnels, trop peu d'excellents candidats choisissent une autre carrière que celle de l'enseignement et nous considérons que le salaire est en cause.»

Avez-vous fait un sondage, une étude pour valider cette idée! Sur quoi s'appuie-t-elle concrètement? Moi, j'appelle cela une fausse «bonne idée» non vérifiée.

Pour ma part, le salaire n'est pas ce qui éloigne bien des gens de l'enseignement. Tout d'abord, l'enseignement est perçu comme du «maternage». Exit les hommes. Ensuite, l'enseignant n'a pas un statut de professionnel et ce n'est pas un ordre qui règlera cela. L'enseignant est infantilisé par tout un système de gestion. Enfin, les conditions actuelles de travail des enseignants sont telles que certains candidats ne veulent pas d'une profession dont on dit (à tort ou à raison) qu'elle mène à l'épuisement professionnel.

Enfin, pour avoir jasé avec bien des collègues que je considère comme très bons, ils n'iront pas vers des élèves plus «demandants». Quant à moi, cette idée de «prime» va surtout attirer ceux qui aiment les primes...

Mario Asselin a dit…

« trop peu d'excellents candidats choisissent une autre carrière »

Je suis désolé... En me relisant ce matin, je réalise que cette formulation peut porter à confusion. Si je peux corriger : « d'excellents candidats choisissent trop souvent une autre carrière »...

Marc St-Pierre a dit…

Dans un tout autre registre, réflexe de gestionnaire direz-vous, croyez-vous vraiment que les gens de la CAQ aient vraiment mesuré l'impact d'augmenter subitement de 20% la masse salariale d'un groupe d'employés de l'État ? Les impacts anticipés ne sont pourtant pas anodins: remet en question l'équilibre fragile des mesures d'équité salariale pour tous les salariés; rompt les liens de cohérence entre le traitement des différents groupes de professionels. Quel enseignant voudrait accepter une réduction de salaire de 20% pour aller occuper un poste de professionnel ? Je pense aux conseillers pédagogiques ou aux orthopédagogues professionnels. Que diront les psy, cisep, co, psycho-éducateurs, et tutti quanti qui verront subitement les écarts se creuser entre eux et les profs;qui voudra occuper un poste de direction adjointe dans une école alors que le salaire actuel d'un adjoint est moins élevé qu'un salaire d'enseignant éventuellement majoré de 20%; a-t-on mesuré les impacts actuariels de ces éventuelles augmentations sur les fonds de retraite des enseignants? Non, je n'ai rien lu là-dessus, et laissez-moi vous dire que ça témoigne d'une absence de vision systémique. Tiens, une dernière, juste pour Mario: La CAQ prévoit geler les subventions au privé et ainsi récupérer autour de 60M$ si je me rappelle. Que feront nos anciens collègues qui ont pour plusieurs, dans leurs conventions collectives ce qu'on appelle des clauses-remorque ? Pour les non-initiés, il s'agit de clauses qui font en sorte que les hausses de salaire consenties aux enseignants du public s'applique mutatis mutandi aux enseignants du privé. Ça va être plaisant à gérer avec des subventions gelées... remarque que je ne tirerai pas une p'tite larme là-dessus.

Je sais. Vous êtes un jeune parti. Et il y a un un congrès à Victo. Mais admets que ce genre de propositions de tient pas la route.

Mario Asselin a dit…

Je dirais simplement Marc que depuis plus de vingt-cinq ans que je gère le changement, les gens qui apportent des arguments opposés aux miens me font avancer et au final, les propositions s'améliorent... Les itinéraires sont multiples et négociables, c'est la destination qui m'importe.

Marc St-Pierre a dit…

Mario: t'es vraiment zen.

Prof Malgré Tout a dit…

Quand on est payé le même salaire pour enseigner à Drummondville qu'à Pointe-Saint-Charles, on parle peut-être d'équité salariale, mais pas d'équité.

Le professeur masqué a dit…

PMT: en enseignement, l'équité n"existe pas. Il n'y a aucun rapport entre un prof d'éduc et un prof de français. Et ils ont le même salaire. Désolé de l'écrire.

Prof Malgré Tout a dit…

Je suis d'accord. Mais prof de français à Drummondville et à Pointe-Saint-Charles, ce n'est pas non plus la même chose.

En musique, je dirais que c'est plus exigeant au primaire qu'au secondaire, car l'horaire est plus chargé et nous sommes presque qu'exclusivement en magistral, tandis qu'au secondaire, les élèves peuvent souvent répéter dans des cubicules. Mais je parle à travers mon chapeau, car je ne connais que ma réalité.

gillac a dit…

Il faut savoir que le programme initial du CAQ a été concocté par une poignée d'individus qui par hasard plus que par cpmpétence se sont trouvés dans la ligne de mire de Legault. La recette de base du CAQ est fort simple pour ne pas dire simpliste: pour faire des gains en éducation et en santé, payons plus les profs et les docs et finançons cela par l'abolition de postes dans les organisations moins populaires dans l'opinion publique, soit les commissions scolaires, les agences de santé et Hydro-Québec. Tout un programme!

Louise a dit…

Cette conversation est importante. J’espère qu’elle est diffusée et répétée ailleurs. Malheureusement, je constate dans mon propre lieu de travail, que ces discussions éveillent des frustrations et qu’elles grattent trop le bobo. Pour tenir le coup, mes consœurs préfèrent mettre des lunettes roses. Je peux affirmer sans aucuns doutes, qu’elles préfèreraient largement avoir de meilleures conditions de travail et, enfin, la reconnaissance qu’elles méritent plutôt qu’une augmentation de salaire.
Cela me fait penser à mes foutus assemblées ou réunions syndicales où certains d’entre nous ne cessions de dire que ce n’est une grosse paye que l’on veut, mais du respect. J’ai hésité avant d’utiliser ce terme mais nous ressentons même du mépris de la part de nos directeurs (j’en aurait gros à dire sur cette espèce), surtout dernièrement. C’est rendu grave.
En tout cas, moi, si je tough, c’est pour mes élèves. Je suis très sincère et ils (mes élèves) le savent.

Anonyme a dit…

Compléter un BAC en enseignement est plus long qu'avant (4 ans comparativement à 3) et est extrêmement exigeant (ex.: 4 stages non rémunérés). Avez une petite idée de l'impolitesse avec laquelle les jeunes s'expriment de nos jours? Des problèmes de délinquance? Avez-vous une idée de la fréquence du burn-out parmi le personnel enseignant d'une école à Montréal et de la tâche enseignante qui s'alourdit constamment? Je suis moi-même enseignant nouvellement formé. Évidemment criblé de dettes, voilà un an que j'accumule les petites tâches de suppléance dans le but de m'arracher une vie d'ici quelques années. Je n'ai pas les moyens d'avoir une voiture, je n'ai pas les moyens d'investir sur les voyages (contrairement à certains universitaires qui se font encore entretenir par leurs parents passé vingt ans). Une hausse de salaire ? OUI, ABSOLUMENT, ET LE PLUS TÔT SERA LE MIEUX. Merci.

Le professeur masqué a dit…

Anonyme: juste une perspective historique pour montrer que le passé n'est pas si différent du présent.

1- Quand j'ai fait mon bac de trois ans au début des années 1990, aucun stagiaire ne pouvait faire de la suppléance rémunérée comme aujourd'hui. J'ai regardé une suppléante boire du café dans mes classes et dans le local des profs pendant mes trois mois de stage alors que, manifestement, elle n'avait rien des compétences d'un prof.
2- J'ai fini ce bac de trois ans sans même savoir si je passerais ma probation de deux ans, probation nécessaire pour que je puisse être un véritable enseignant alors qu'aujourd'hui, le brevet vient automatiquement avec le bac. La probation, c'était de l'esclavage déguisé parce que le patron pour qui tu bossais avait un énorme pouvoir entre les mains.
3- Je me suis tapé Montréal-Saint-Jérôme (lieu de mon travail) pendant une année en autobus parce que je n'avais pas les moyens d'avoir une voiture et que c'était un poste (le seul qu'on m'a offert et il était à temps partiel) qui avait de l'allure.
4- Il n'y avait aucun débouché en enseignement, Aucun. Dans aucun champ. Pour le poste que j'ai obtenu par la suite, j'ai dû quitter la ville, mes amis, mon milieu. Pour ce poste, il y a eu deux journées pleines d'entrevues.
5- L'impolitesse et la délinquance ne sont pas l'apanage des années 2000. J'ai choisi d'enseigner dans un milieu moins difficile que celui montréalais. Ce fut un choix où j'ai gagné certaines choses et en ai perdu d'autres en devant m'éloigner de mon milieu de l'époque.
6- La tâche s'alourdit pour tout le monde.
7- Une hausse de salaire ne changera en rien les conditions d'exercice du métier: impolitesse, délinquance, matériel désuet, classe infecte. Ne règlera rien aussi aux burn out.

En passant, vous êtes le premier à employer les majuscules pour exprimer votre pensée. C'est inutilement agressant.

Anonyme a dit…

@ Loulou
Ce sont des commentaires comme le tien qui font en sorte que nous gagnons en fin de carrière près de 30 000$ de moins qu'un avocat (moins scolarisé que plusieurs de mes collègues). Je pense que dans un sens, c'est ce que M. Legault désirait maladroitement souligner lors de sa déclaration sur les distinctions entre les hommes et les femmes. Je pense que la problématique réside dans le fait que pour certains, enseigner continue d'être une vocation, mais moi je ne désire pas me voir comme une Émilie Bordeleau. J'ai pas envie de passer toutes mes soirées à travailler et même certains jours de fin de semaine pour de la reconnaissance. Pour moi, c'est une profession et contrairement à plusieurs de mes collègues qui semblent aimer se voir en martyr, je ne vie pas pour mon travail, je travaille pour vivre. Je suis une jeune professionnelle et si cette profession ne me permet pas de réaliser mes rêves alors j'irai voir ailleurs. Mon institution aura donc payer un beau diplôme en enseignement pour rien...