27 septembre 2017

Un autre mythe en éducation: l'innovation synonyme d'efficacité

Dans un éditorial publié dans La Presse, Alexandre Sirois montre à quel point l'opinion de certains chroniqueurs traduit parfois leur profond manque de compréhension du monde de l'éducation et de son histoire des vingt dernières années, pour ne pas dire plus. Ceux-ci reprennent, comme dans ce texte, des mythes qui sont nuisibles quant aux apprentissages de nos jeunes.

M. Sirois explique que le ministre de l'Éducation, M. Proulx, ne pourra pas se défiler quand viendra le temps de «moderniser» l'école québécoise. Il cite à cet effet de nombreux exemples de pratiques innovantes. Mais voilà: manifestement, M. Sirois ne semble pas savoir que l'école québécoise a justement eu son lot de d'idées innovantes mais peu ou pas efficaces au cours des années. Qu'on souligne la dernière réforme qui n'a pas réussi à motiver davantage les élèves, ne les a pas amené à réussir davantage ou à mieux écrire. Pour tenter de redresser le tout, on a d'ailleurs connu des tentatives de rapiéçage ici et là, entre autres concernant le programme d'histoire, d'éducation financière et j'en passe tellement la liste serait longue.

Parmi les pratiques innovantes que suggère cet éditorialiste, on retrouve celle d'une école danoise avec une multitude d'espaces de travail et de détente. Très bien, mais quels ont été résultats de cette initiative? Sur combien de temps? Avec quelles ressources? Où sont les données probantes, pour reprendre une expression à la mode? Bref, il serait grand temps qu'on cesse de demeurer en surface et qu'on soit plus critique quand il s'agit de commenter ce qui concerne l'éducation de nos enfants.

Pour M. Sirois, il semble que seules les pratiques nouvelles sauront «donner le gout d'apprendre» aux jeunes. Moi qui ne suis qu'un modeste enseignant, je me permets de lui dire une chose : les jeunes aiment apprendre quand ils comprennent ce qu'ils font, quand on les rend capables et autonomes. Or, trop souvent, notre école québécoise se contente de faire réussir des élèves qui maitrisent peu ce qu'ils font. Comment peut-on aimer les mathématiques, par exemple, quand on est rendu en troisième secondaire, comme certains élèves, et qu'on n'a pas réussi ce cours depuis la cinquième année du primaire? Où trouver la soif d'apprendre et la motivation quand l'élève sait qu'il ne doit sa réussite qu'à des tours de passe-passe administrative?

Au lieu d'être rigoureuse dans ses pratiques, honnête avec les jeunes et de leur donner les ressources additionnelles quand elles sont nécessaires, notre école se glorifie de statistiques ronflantes en promouvant des élèves qui n'ont pas toujours les acquis nécessaires à leur véritable réussite. Et les beaux murs de M. Lavoie, les bons repas de M. Ricardo, les amusantes activités de M. Lavoie, les pratiques innovantes de M. Sirois n'y changeront rien. Le mal est bien plus profond. Et certains textes - adressés au ministre de l'Éducation - contribuent à maintenir une pensée magique dangereuse. Il ne reste qu'à espérer que celui-ci saura y résister.

* Ce texte a été modifié depuis sa première publication le 27 septembre 2017


2 commentaires:

Lau a dit…

Je suis présentement une étudiante en enseignement des Arts visuels au secondaire. J’ai pu vivre l’expérience de travail d’une enseignante lors de mon stage. Je suis très consciente que les jeunes ont besoin que l’on capte leur attention s’ils veulent être en mesure de bien comprendre ou de bien participer aux activités proposées. C’est pourquoi il est important que les enseignants aient en main les bons outils et les bonnes techniques pour être en mesure de bien capter leur attention. Je suis en accord avec ce que vous dites dans votre article, qu’il est important de penser au bien être de l’élève lorsque des modifications sont faites dans le programme scolaire. Les ministres peuvent bien apporter des idées et du changement, mais ce ne sont pas eux qui expérimentent ces changements, ce sont avant tout les élèves et les enseignants. Je ne dis pas que toutes les idées qui sont proposées sont mauvaises, simplement parfois elles peuvent ne pas fonctionner de manière adéquate et ce sont les élèves qui peuvent en subir les conséquences. Le but premier de l’éducation est d’enseigner et d’encadrer les élèves afin de les préparer au monde du travail et des adultes. Cependant, il ne faut pas oublier qu’ils ne sont pas encore des adultes et que parfois il peut être difficile pour eux de tout comprendre. Il ne faut pas les traiter comme des incompétents qui ne comprennent rien, mais il faut également penser à utiliser des concepts qui sont de leur âge. Je crois que les enseignants doivent en quelque sorte se battre pour le bien être de leur élèves, ils sont en quelque sorte leur porte-parole qui vont pouvoir défendre leurs intérêts. Je suis également en accord avec le point que vous faites sur le fait de simplement donner les notes de passages. Les jeunes ne vont pas pouvoir s’améliorer s’ils sont toujours un laisser-passer sur leur études. J’ai été une élève qui avait beaucoup de difficulté au secondaire, mais mes enseignants ne m’ont pas simplement donné la note de passage pour faire en sorte que je passe mon secondaire, ils m’ont donné des outils qui allaient m’aider à m’améliorer et à bien comprendre ce que je n’arrivais pas à bien saisir du premier coup. Je les remercie aujourd’hui de ne pas m’avoir simplement fait passer sans aucune explication, puisque je comprends maintenant l’importance de la persévérance et de prendre le temps de bien comprendre ce qui m’est montré. J’ai l’impression que de nos jours plus personne ne veut vraiment prendre le temps d’expliquer, car il est plus simple de juste prendre le chemin facile. Je trouve cela bien dommage puisque les élèves d’aujourd’hui vont se dire que c’est comme cela que ça marche à l’école mais aussi dans la vie, et ils vont simplement emprunter la voie facile pour arriver à leurs fins. Cependant, on doit se le dire, cela ne marche pas de cette façon-là sur le marché du travail et si les jeunes apprennent à l’école qu’ils peuvent prendre le voie facile, lorsqu’ils arriveront sur le marché du travail, ils vont avoir une dose amère de réalité et vont peut-être avoir de la difficulté à s’y adapter. C’est pourquoi à l’école il est important de leur enseigner les modalités de la vie.

Étudiante à l'Université Téluq

Le professeur masqué a dit…

:)