12 avril 2009

Ma classe: des vrais animaux!

Il arrive parfois que nos élèves soient de vrais animaux, que nos classes soient un zoo. Ça crie, ça bouge, ça père, ça rouspète... Il arrive aussi que le prof soit un chien, une vache... Mais, au rythme ou vont les solutions pour contrer le décrochage scolaire au Québec, on risque bientôt d'avoir de vrais animaux dans nos classes.

À preuve, cette «initiative» de la polyvalente Massey-Vanier de Cowansville. «Je crois aux bienfaits des animaux sur les élèves. Ils contribuent à améliorer leur sentiment d'appartenance et à les raccrocher à l'école», explique Manon Brien, technicienne de laboratoire.

Elle permet donc aux jeunes de venir caresser les animaux à l'heure du midi et de s'occuper d'eux. Jusque-là, je n'ai pas de problème: je crois aux bienfaits de la zoothérapie. Mais là ou je décroche, c'est quand je lis le passage suivant:

«Quand ils ne reçoivent pas la visite de jeunes, le midi, les animaux de Manon Brien sont flattés par d'autres ados à tout moment de la journée. Leurs cages sont dispersées dans deux classes, ainsi qu'au local des services aux élèves. « Les lapins se promènent toute la journée dans les classes, dit Mme Brien. Les jeunes peuvent prendre les animaux avec eux, pendant que le prof enseigne la théorie. Ça leur donne une autre raison d'aimer l'école. »

OK pour la bébitte dans une cage au fond d'une classe, mais de commencer à la promener et laisser les élèves la caresser pendant le cours à leur place? Qui gère les risques de morsure? les allergies? les dégâts des lapins? les chicanes de «Moi, je le veux!»

Depuis des années, on entend vraiment n'importe quoi à propos du décrochage scolaire.

On a changé la façon d'enseigner parce qu'elle n'était pas bonne. Or, plusieurs pays avec la vieille manière inefficace ont un taux de décrochage moins catastrophique que le nôtre.

On a blâmé le fait que le personnel enseignant ne soit pas assez masculin au Québec. Comme s'il y avait plus d'enseignants dans les autres systèmes d'éducation dans le monde.

On a suggéré qu'il fallait donner plus de pouvoir à l'école et aux directions d'école.

Nenni... c'est pas de directeurs plus puissants qu'on a besoin: c'est d'animaux! Quoi se le dise.

La prochaine étape: les crystaux. J'en ai parlé avec mon ami Raël et on croit que, si chaque élève se promenait avec un crystal lui permettant de capter les ondes extraterrestres...

Quant à moi, si j'avais des animaux dans ma classe, je choisirais des cobras. «Allez, mon p'tit tannant. Ouvre la cage et mets-ton bras dedans...»

Et vous?

8 commentaires:

Jonathan Livingston a dit…

Toujours plus de la même chose. Le problème est la solution. On veut intéresser les gens à l'effort intellectuel par... la distraction...

Or, penser, comprendre, vraiment apprendre suppose justement le retrait par la concentration...

Aussi, il faut commencer à soupçonner un détournement de la mission de l'école.

Les principes d'apprentissage sont fort simples et évidents. Déjà en 1993, quand j'étais sur les bancs de l'Université, on les noyait dans de trop longues listes d'épiceries de lois imbéciles pensées par des imbéciles qui ne se confrontent jamais à la réalité...

La distraction plaisante est la plupart du temps en contradiction avec l'effort d'apprentissage. Tout enseignant attentif l'aura remarqué. Aujourd'hui, où la distraction est maître, on oublie que l'école a toujours été en quelques sortes un effort de s'isoler de la société et des distractions pour développer la faculté intellectuelle qui permet de lire et d'écrire et de compter...

Comme l'a dit Foglia dans un récent billet. Vouloir faire aimer l'école est probablement le problème. La solution au décrochage est souvent simple: un parent qui dit: "va à l'école". Qui valorise l'école. Le reste, c'est du grand «niaisage» encore qui finit par empirer le problème.

unautreprof a dit…

Je prendrais des singes que j,entraînerais à bien écouter et je dirais aux élèves : allez-y, mimer!

Coccinelle a dit…

Ben ouin! C'est donc ben du n'importe quoi!

Je vais dire comme Jonathan : même un élève brillant avec aucune chance de décrochage va avoir de la misère à écouter un prof s'il vit dans un zoo! D'autant plus, si le prof parle de grammaire! Me semble c'est juste logique...

bobbiwatson a dit…

Pas besoin d'avoir des animaux dans une classe quand les élèves qui y sont se comportent et piaillent comme des mouettes!

Anonyme a dit…

J'abonde dans le même sens que M. Livingston : de plus, les programmes de formation du corps enseignant sont aussi pensés par des imbéciles.

Qui est en charge de l'arrimage entre les théories novatrices et la praxis?

Règle générale, ce sont les départements de psychoéducation qui contaminent par après les diverses strates des autres départements en éducation.

En gros, les départements de psychoéducation reprennent des théories de psycho en les tronquant pour les rendre «vulgarisables». Ils font ensuite des expériences dans des contextes précis pour démontrer la validité de leur modèle. Finalement, ils engraissent le résultat d'un lexique qui leur est propre.

C'est ainsi qu'ils ont créé leurs poutines pédagogiques. L'ennui, c'est que que les modèles théoriques de psycho ou des sciences cognitives qu'ils empruntent ne sont pas toujours plébiscités par la communauté scientifique et leur transfert, dans le champ pédagogique n'est pas fiable non plus.

Par exemple, je suis sûr que le Prof Masqué était résolument «réforme avant la lettre», plutôt que de le lui signifier en démontrant que cette réforme consistait simplement à populariser ce qui se faisait de mieux (enseigner des connaissances auxquelles on ajoute des tâches de plus en plus complexes, de manière à rendre les élèves autonomes), qu'en somme elle ne le concernait pas (puisque la réforme cherche simplement à reproduire l'esprit des conditions d'une classe qui fonctionne), on a fait tabula rasa des pratiques déjà contemporaines à la réforme, comme si ce qui était fait sans le jargon ne valait rien.

On cherche ensuite à imposer le lexique ministériel, sur lequel personne ne s'entend, et on s'étonne de la cacophonie qui en résulte?

Ce lexique crée lui aussi l'écran de fumé qui empêche d'autres spécialistes de critiquer les modèles.


On se retrouve donc avec des étudiants en éducations qui prennent pour acquis des théories qui n'ont pas de véritables assises.

Jetez un oeil sur un programme d'éducation secondaire, cherchez le cours qui permet à l'étudiant d'être critique par rapport aux courants qu'on lui enseigne, je ne l'ai pas trouvé.

Je ne suis donc pas surpris de cette histoire d'animaux. Je suppose que ça permet aux enfants de développer des «savoirs-être».


Étienne

Anh Khoi Do a dit…

Quelle farce de la part de la polyvalente Massey-Vanier! Essayer d'encourager les gens à l'effort intellectuel au secondaire, c'est comme croire que l'eau ne mouillera rien sur son passage. Qu'on se le tienne pour dit: il y a certes des élèves au secondaire qui sont très bons. Cependant, la raison pour laquelle je n'irais pas enseigner au secondaire (en tant que gars), c'est parce que le secondaire, c'est le prolongement de la garderie. Tant qu'à enseigner à des étudiants dont je sens qu'ils n'ont aucun avenir (i.e. des décrocheurs potentiels)... Bref, avec animaux ou pas d'animaux, j'ai de sérieux doutes sur la capacité des étudiants à rester concentrés.

genevieve a dit…

Contrairement à ce que j’ai pu lire dans les commentaires précédents, je ne peux pas dire que je suis totalement contre l’idée des animaux en classe. Des lapins mis à la disposition des élèves du secondaire pour qu’ils puissent aller leur donner de l’affection dans le but d’éviter le décrochage, c’est un peu idéaliste, non? Les adolescents n’iront certainement pas à l’école uniquement pour aller voir leurs lapins. Je suis également de l’avis que ces bêtes pourraient être une source de distraction plus qu’autre chose s’ils se promènent librement dans la salle de classe lors des cours. Le professeur masqué a également raison lorsqu’il parle des dégâts, des allergies et des chicanes. Il doit être quasi impossible de gérer le tout.

Par contre, je crois que c’est une excellente idée pour une classe de primaire. Que ce soit un lapin, un hamster ou des poissons rouges, les élèves pourront développer leur autonomie et se responsabiliser en s’en occupant. Les chicanes pour s’en occuper? Pas de problème! Il ne suffit que de nommer un élève responsable de l’animal pour la semaine. En prime, après sa semaine de corvées, l’élève aura le privilège d’amener l’animal à la maison pour la fin de semaine. Par contre, il est important d’établir des règles strictes afin d’éviter de perturber la concentration des élèves. En fait, il faut se servir de l’animal intelligemment.

La présence d’un animal peut être très bénéfique dans une classe, que ce soit au niveau de la responsabilisation des élèves ou en s’en servant comme élément déclencheur pour de nombreuses situations d’apprentissages portant sur des thèmes comme l’environnement, la biologie, les animaux, etc.

Plus haut, M. Livingston a dit : « on oublie que l'école a toujours été en quelques sortes un effort de s'isoler de la société et des distractions pour développer la faculté intellectuelle qui permet de lire et d'écrire et de compter... ». Voici ma réponse : la société est en continuelle évolution et il faut s’y adapter. L’école ne sert plus uniquement à apprendre le français et les mathématiques. Elle sert plutôt à former de futurs citoyens en leur donnant tous les outils nécessaires afin de développer leur pensée ainsi que leurs aptitudes dans différents domaines. En fait, l’école ne doit surtout pas se limiter à enseigner uniquement les langues et les mathématiques. Qu’est-ce qu’il y a de plus ennuyant que d’apprendre des mathématiques pour la simple et bonne raison qu’il faut apprendre les mathématiques si on veut faire quelque chose de notre vie. De plus, qui a dit qu’un lapin ne permettait pas de faire des mathématiques ou du français? Au contraire, je crois que c’est une excellente source d’inspiration pour des activités stimulantes qui donneraient un sens aux apprentissages.

Bref, je me questionne sur la pertinence des animaux au secondaire. Par contre, si c’est bien fait, l’expérience peut être très enrichissante. Je crois que l’organisation d’une classe de primaire et l’âge des élèves permettrait une meilleure « exploitation » des animaux en classe.

Le professeur masqué a dit…

Anh: tu serais surpris par le cégep...

Geneviève: pour le primaire, pas de problème. Comme vous le soulignez si justement.

Pour le reste de votre commentaire, ce qui me désole, c'est que l'école devrait tout d'abord s'assurer que les élèves savent lire, écrire et compter. Et bien souvent, on perd de vue cet objectif pour le subordonner à d'autres.