Pour satisfaire certaines ambitions électorales, le gouvernement Charest a décidé d'implanter l'apprentissage de l'anglais sous forme intensive en sixième année du primaire.
Si on semble être généralement d'accord avec cette idée, il faut lire ce matin le nombre d'interrogations qui surgissent dans les médias quant à ce projet pour réaliser à quel point cette idée est totalement improvisée.
Rima Elkouri, dans La Presse, résume assez bien le courant de pensée général: «Après des années de débat et de tergiversations autour de cette question toujours épineuse au Québec, on peut dire, en français comme en anglais, qu'il s'agit d'une bonne idée. À condition bien sûr que l'on réussisse à la mettre en pratique correctement.»
Mais elle pose aussi de saprées bonnes questions:
- Où trouvera-t-on les profs d'anglais correctement formés?
- Réussira-t-on à attirer des enseignants hors des grands centres?
- Les commissions scolaires anglophones, étant donné leur taille réduite, suffiront-elle à combler la demande?
- Ce programme doit-il être obligatoire pour tous si l'on prend en compte les élèves éprouvant des retards scolaires?
La ministre de l'Éducation indiquait ce matin qu'elle envisageait même d'aller chercher des enseignants qualifiés en Ontario. Croit-elle sérieusement que ceux-ci viendront travailler au Québec en acceptant une diminution de salaire? Une autre solution de la ministre est tout aussi incongrue: compter sur la hausse des inscriptions de futurs enseignants d'anglais. La ministre sait-elle que la durée d'un bac dans ce domaine est de quatre ans?
La meilleure preuve de l'improvisation gouvernementale demeure la réaction de la présidente de la Fédération des commissions scolaires du Québec (FCSQ), Josée Bouchard: «On a été surpris par cette annonce. C'est complètement nouveau. Il faut vraiment parler de modalités. On sait qu'il manque déjà de professeurs d'anglais dans les écoles anglophones. Où ira-t-on chercher les enseignants? Il y a beaucoup de questions sans réponse.»
Quant à moi, le gouvernement Charest vient d'annoncer des années d'improvisation en éducation au primaire. Alors qu'on est encore englué dans le Renouveau pédagogique, les changements de bulletin, il en rajoute une autre couche. Et cela, sans consulter le milieu scolaire ou tenir compte de ses véritables besoins.
10 commentaires:
Si la ministre pense à aller chercher des enseignants d'anglais en Ontario j'ose imaginer qu'elle sait très bien qu'elle ne peut leur offrir une baisse de salaire! Voilà donc une bonne occasion pour vous, profs, de revendiquer une amélioration de vos salaires.
Mais encore une fois on mélange des pommes avec des carottes.
Je suis d'accord avec ton commentaire. Des mots, des mots qui cachent vraiment mal le désir de capital politique...
Aux interrogations, j'ajoute...
Je suis enseignante de 6e dans une toute petite école où il n'a qu'une seule classe de 6e. Que ferais-je entre le 25 janvier et le 23 juin. Traîner mes pénates dans un autre milieu de travail? Vraiment, pour moi, c'est peu intéressant.
Aussi, dans ma commission scolaire, des programmes de ce genre se vivent déjà. Quand les enfants admis dans ces programmes d'anglais intensif éprouvent des difficultés scolaires ou démontrent un manque d'autonomie, leurs résultats tombent en chute libre. Il ne faut pas oublier que malgré que cette idée peut contenir des aspects intéressants, l'enseignant qui assure la partie «francophone» de l'année a le même nombre de compétences, composantes et savoirs essentiels à voir qu'en dix mois. Et, il ne faut pas les examens ministériels obligatoires qui durent plus ou moins un mois et que ces élèves doivent aussi «subir»...
Pour moi, c'est encore un moment où les intérêts du politique passent avant les élèves. Grrrrrrr!
Isamiel: Je lis ton commentaire et plus que jamais je constate qu'on improvise totalement...
Lors de ma 6ème année, il y a trois ans de cela, j'ai participé à une de ces « bains linguistiques » . Franchement, j'ai vu une grande amélioration chez tous les élèves. On faisait des projets, c'était super. On voit vraiment la différence entre les étudiants qui y sont passés et ceux qui n'en ont pas eu la chance lorsque l'on arrive en première secondaire. Bien sûr, les directeurs d'écoles révisaient les résultats scolaires des nouveaux arrivants en 6ème année. Cependant, si le projet s'applique à tout le monde, on a d'immenses problèmes.
Par conséquent, les nombreux problèmes engendrés devraient sauter aux yeux des ministres! Peut-être que ceux-ci se disent que le temps arrange les choses...
On verra, mais c'est parti tout croche!
Félix: les bains linguistiques sélectionnent les élèves. Ici, on parle d'un programme intensif, universel et obligatoire.
Parti tout croche et c'est même pas commencé.
L'anglais intensif: plusieurs questions en suspens.
En voici deux qui me tracassent:
L'arrimage avec le secondaire et la formation des maîtres.
Voir mon billet:
http://helenejsblog.blogspot.com/2011/02/anglais-intensif-en-6e-annee-beaucoup.html
Je me méfie de toute mesure qui s'applique à l'ensemble d'une population. Quel le gouvernement ait annoncé qu'il rendrait l'apprentissage intensif de l'anglais à la 6e année du primaire plus accessible, je m'en serait réjouie. Mais de le rendre par une loi, partout obligatoire ne prend pas compte des réalités propres aux régions, aux écoles à vocation particulière, etc. me semble irresponsable.
Mamzelle; de l'anglais intensif pour tous. Actuellement, on l'offre aux élèves doués qui n'ont aucun retard scolaire et on constate que la formule peut nuire à certains malgré tout. Alors, imaginez pour l'ensemble des élèves.
Peut-être que la prof qui a enseigné en Ontario et qui a fait la Une du JDM sera contente? Est-ce qu'on fera passer autant de tests aux profs approchés qu'à cette enseignante?
Autres temps autres moeurs?
Monsieur le professeur masqué,
Je suis en accord lorsque vous affirmez que « Ici, on parle d'un programme intensif, universel et obligatoire. »
C'était mon idée, ai-je mal formulé?
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