Comme on n'en parle pas à Montréal et que c'est la journaliste Daphnée Dion-Viens qui semble suivre le dossier (ici et ici), voici quelques nouvelles concernant le Test de certification en français écrit pour l'enseignement (TECFEE). Deux mesures ont attiré mon attention.
Ceux qui échoueront ce test pour la troisième fois ne seront pas suspendus ou expulsés du programme de formation des maitres comme annoncé. Ils pourront poursuivre leur scolarité sans faire leur stage, mais ne pourront donc pas détenir aussi rapidement le brevet d'enseignement (leur permettant d'être légalement qualifiés) que leurs confrères qui auraient réussi cette évaluation. Ils auront cependant accès à des cours de français qui les aideront lors d'une prochaine reprise de l'examen à laquelle ils ont droit un an plus tard.
Également, ceux qui ont échoué de justesse le test pour la troisième fois pourront le reprendre quelques mois après cet échec et non un an plus tard comme prévu.
Évidemment, vous avez compris que ces deux mesures visent à donner le plus de chances possible aux futurs enseignants de réussir ce fameux examen. Contrairement à ce que laisse entendre un titre des articles du Soleil, les étudiants universitaires, s'ils sont persévérants, pourront un jour, obtenir leur brevet, seulement cela prendra un peu moins de temps dans certains cas que le prévoyaient les mesures initiales.
Encore une fois, on ajuste en fonction des résultats. Ça coule: on ajuste. «On voulait leur donner plus de souplesse», explique Michel Laurier, doyen de la faculté des sciences de l'éducation de l'Université de Montréal. Plus de souplesse? Avec autant de reprises initialement prévues, avec autant d'encadrement?
Les universités sont en train, lentement, elles aussi, de tomber dans le piège dans lequel est englué le réseau de l'éducation. La preuve en est ces propos de Carole Fisher, responsable du centre d'aide en français pour les étudiants en enseignement: «Je ne suis pas sûre que la mesure de suspension était favorable aux étudiants. Il ne faut pas non plus que ces étudiants développent une perception négative à l'égard du français. Ils n'ont pas été habitués à des pressions de ce type-là dans notre système d'éducation.»
On parle ici d'étudiants adultes qui veulent devenir enseignants et être responsables de l'éducation de nos jeunes.
Je me permettrai une anecdote. J'ai enseigné à un jeune dont j'ai pu suivre le parcours de carrière depuis près de dix ans. À la fin de son secondaire, il écrivait bien, avait un style fluide et clair, mais je doutais que ses compétences grammaticales de l'époque lui permettent d'obtenir des emplois dans le domaine de l'écrit. Que s'est-il passé? Il a retroussé ses manches et maitrise aujourd'hui très bien la langue de Vigneault. Pensez-vous que le marché du travail lui a donné de la souplesse, des reprises, des chances? Non! Il a montré plus de sérieux que lors de ses études secondaires, il s'est botté le... et c'est chaque jour qu'il doit prouver qu'il écrit correctement. D'autres que lui, dans la même situation, ont dû se réorienter.
On veut des enseignants qui maitrisent mieux leur langue maternelle et on semble prêt à faire bien des compromis pour qu'ils satisfassent certains types d'évaluation. On fait preuve de plus de souplesse pour qu'ils passent. Et après avoir réingurgité tout le gavage qu'ils se seront imposé, il en restera quoi?
8 commentaires:
Je vous trouve un peu dur, professeur, plus que moi en tout cas, pourtant considéré comme un radical dans mon collège. Il se trouve que j'ai rencontré le côté pile, l'exemple exactement inverse de celui-ci. Cours 2, cégep, étudiante adulte (21-22 ans) de retour à l'école, entichée de littérature grâce à un prof. du secondaire qui lui a fait découvrir l'univers des livres et de la culture. Très intéressée par mon cours, pose plein de questions pertinentes, visiblement allumée. Arrive la première dissertation : la sienne est excellente, nuancée, pleine d'esprit, elle maîtrise bien les éléments, etc., sauf qu'elle est bourrée de fautes de toutes sortes : syntaxe, orthographe, grammaire, vocabulaire. Elle perd presque tous ses points en français écrit, mais ce n'est pas la note qui la désole : c'est qu'on ne lui avait jamais dit que son français était à ce point déficient ! Et elle voulait se diriger vers l'enseignement ! Ce fut donc une révélation catastrophique pour elle, avec des répercussions graves.
C'est un peut-être un cas atypique, je ne sais. Ce que je sais, c'est qu'à ce genre d'étudiant qui aime lire et s'intéresse à la culture, on a tendance à relâcher les normes, à se dire que c'est pas si grave puisque le contenu de leurs travaux est plein de bonne volonté. L'expression, n'est-ce pas, doit primer sur la forme. Reste qu'atypique ou pas, cette étudiante a franchi cinq années de secondaire en ne sachant pas que son français était déficient. Il ne me semble pas qu'aujourd'hui encore, ces conditions aient beaucoup changé à voir les chiffres des facultés d'éducation.
Qu'est-elle devenue ? Hélas, je n'en sais rien. Mon cégep est une usine surchargée d'étudiants, je ne l'ai jamais revue. A-t-elle abandonnée ? A-t-elle suivi mon conseil et fait du CAF (Centre d'aide en français) sa seconde demeure ?
L'autre question, plus grave : combien de profs du secondaire sont en mesure d'évaluer correctement le niveau écrit de leurs étudiants ? Ou encore : combien de profs., nourris de bonnes intentions, laissent une chance à leurs élèves pour ne pas tuer dans l'oeuf leur intérêt pour les livres et l'écriture ?
Je ne sais pas si c'est encore comme ça, mais en 1991, j'ai dû passer un test de français à la fin de mon secondaire pour entrer au collégial. Ensuite, un autre pour entrer à l'université et finalement, 1 examen de français dans chaque commission scolaire où j'ai appliqué. Aussi, j'ai dû en faire un, ici, dans ma province anglophone, pour enseigner le français à des adultes, au provincial.
Ces tests nous suivent partout.
Je ne sais pas si je pourrais avoir confiance dans un prof de français qui a reçu 70% (note de passage) à son 3e essai...
Je suis comme la fosse, je suis sceptique !
Coucou !
Demain, je passe la partie orale du TECFEE et le 12 septembre, la partie écrite... Je vous en reparle (si vous le voulez) !
Et s'il n'y avait que ça...
... j'ai vu dans les facultés d'éducation des choses bien tristes, bien bien tristes...
Satraperoi: je suis plus dur que vous, je crois. Je ne pense pas que l'expression doit primer sur la forme. Les deux doivent primer, simplement. Pourquoi un plus que l'autre?
Klassy: personnellement, je me demande si on ne devrait pas être testé aux cinq ans.
Future: biensûr! Il existe un cahier préparatoire à ce texte, tu le savais?
Miss: moi-z-aussi... et je ne parle pas de ce ques amis collègues ont vécu.
Bahhhhhh
J'ai échoué deux fois le Français pour Futurs enseignants, passé haut la main le SEL et je n'avais que louanges de mes profs d'université alors que bien de mes collègues qui avaient normalement réussi le merveilleux cours produisaient des travaux misérables sur la qualité du français (malgré les nombreux outils technologiques...)
Ce n'est pas un test truffé d'exceptions que ça prend, c'est l'évaluation au quotidien!
Oui, je l'ai rapidement acheté. Très complet, très bien fait. Mais je suis d'accord avec Mam'Enseignante, ce n'est pas un test truffé d'exception, mais une évaluation constante qu'il faut...
Si on maîtrise les exceptions on devrait normalement maîtriser le reste. Et on sera peut-être enclins à enseigner les exceptions qui nous gâchent la vie quelques fois. Nos élèves seront des érudits (ou presque).
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