01 mars 2011

Discours inaugural: le désastreux abattement

Peu de réactions finalement aux annonces contenues dans le discours inaugural du gouvernement Charest. Des commentaires le soir même ici et là de la FSE, de la FCSQ, de la FQDE, puis plus rien sinon que quelques lettres d'enseignants qui s'insurgent contre le manque de cohérence de ces mesures en regard des  problématiques qu'ils vivent sur le plancher des classes. Oublions le Parti québécois dont on peut questionner le rôle à titre d'Opposition officielle en ce qui a trait au dossier de l'éducation. Cette formation politique dort au gaz de schiste.

Faut-il y voir le fait que les intervenants en éducation soient devenus à ce point habitués à ce que le haut de la pyramide décrète ce qui est bien, même quand cela ne constitue en rien une solution aux problématiques vécues sur le terrain?

Ce n'est quand même pas commun qu'un premier ministre improvise tout un programme de mesures qui couteront des centaines de millions en éducation, mesures qui devront se payer à même les budgets actuels, ou s'immisce dans les codes de vie des écoles québécoises en ignorant carrément l'existence de la Loi de l'instruction publique.

Autour de moi, bien des collègues sont devenus carrément cyniques. Au fil des années, ils ont appris à ne plus accorder de crédibilité à tout ce qui vient du MELS, des commissions scolaires ou du gouvernement. Pour ma part, cette forme de décrochage, révélatrice du peu de considération que les enseignants estiment qu'on a d'eux et de leur expertise, montre bien que notre système d'éducation vit des moments difficiles.

Qu'on me comprenne bien: je ne suis pas contre les portables ou les TBI, par exemple. Mais la façon dont le gouvernement entend implanter ces technologies a des allures de désastre potentiel. On aurait cru qu'on aurait tirer les leçons du passé avec le Renouveau pédagogique... mais encore une fois, un politicien utilise l'éducation pour se faire du capital politique. J'espère que les partisans des NTIC se rendront compte du mauvais tour que M. Charest est en train de leur jouer.


Une petite consolation, cette lettre de Danielle Boucher, présidente de l'Association québécoise du personnel de direction des écoles (AQPDE), et de Gaétan Neault, président de l'Association montréalaise des directions d'établissement scolaire (AMDES), publiée dans Le Soleil aujourd'hui. Le titre de cette dernière dit tout: Des solutions accessoires pour des problèmes de fond.


Il est regrettable que le monde de l'éducation soit si divisé entre enseignants, syndicats, directeurs d'établissement et commissions scolaires. Pour une fois, il aurait été bon de le voir refuser de se faire imposer un mode de fonctionnement et une panoplie de solutions qui ne répondent pas à ses véritables préoccupations.

4 commentaires:

Marc St-Pierre a dit…

Bonjour Masqué,

Si demain les tartes aux bleuets devenaient un enjeu politique et économique, on en parlerait dans le discours inaugural. Et M.Ménard écrirait là-dessus. Et il y aurait toutes sortes d'annonces en lien avec ça. Tellement d'annonces, de recettes nouvelles, que les faiseux de tartes arrêteraient d'écouter pour se concentrer sur la pâte à pétrir et à rouler. Je pense que c'est ce qui se passe avec l'éducation. Et je pense que c'est bien ainsi. On a tellement le tour et la façon de rouler avec le changement. Comme un bon boxeur sait rouler avec les coups. On est tellement bon en éducation pour changer les mots sans changer les choses. Ce "on" là est inclusif. Complètement: profs, gestionnaires,administrateurs... Et vous savez pourquoi Masqué ? Parce que le cadre scolaire est celui qui, sur la planète, ressemble le plus à un enseignant.Et l'enseignant celui qui ressemble le plus à un cadre scolaire. Ils ont en commun , dans la grande majorité des cas, de ne jamais être sortis de l'école depuis que leurs mères les y ont conduits pour la première fois , vers l'âge de cinq ans. Enseignants et cadres scolaires sont des êtres profondément attachés les uns aux autres, des êtres très superficiellement différents, mais très profondément semblables et solidaires. C'est sans doute cette solidarité sans faille, bien qu'inavouée, qui rend l'école si difficile à changer et l'éducation quasi-impossible à refonder. Enseignants et cadres scolaires sont des êtres fortement institutionnalisés, marqués à vie par les modèles auxquels on les a exposés depuis leur tout jeune âge. Quand on sort les cadres et les enseignants du monde qu'ils ont connu, qu'on les coupe de leurs références culturelles,on risque que certains deviennent presque aussi désemparés que ces pauvres bougres que la désinstitutionnalisation a expulsé loin de la sécurité institutionnelle.

Le monde de l'éducation n'est que superciellement désuni. Il est en réalité profondément solidaire, attaché à ses traditions et à sa culture.

Le professeur masqué a dit…

M. St-Pierre: votre commentaire me semble très pertinent à certains égards. Oui, le cadre et l'enseignant reproduisent souvent les modèles qu'ils ont connu. Mais je vous dirais - à tort peut-être - que l'enseignant, étant plus près de la réalité et des élèves, a une vision plus correcte de la réalité.

Tous deux ont vécu et cherchent à reproduire une école d'une autre époque, jusqu'à un certain point, mais le cadre n'a pas toujours une bonne vision de ce que sont les problématiques de l'école actuelle parce qu'il pense constamment en termes d'autrefois. L'enseignant, lui, voit quotidiennement le nouveau visage du décrochage, par exemple, ou de l'hypersexualisation. Le cadre reste avec ses souvenirs et ses chiffres.

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gillac a dit…

Il faut d'abord savoir comment travaille notre PM. Il s'entoure surtout de spécialistes de la communication et parfois aussi de gens de contenu. Il recherche alors des choses à dire au peuple pouvant s'exprimer dans des images ou phrases simples qui feront de bons clips à la tv. Puis il se demande comment répondre aux objections par d'autres bons clips. Ensuite il s'en retourne profiter des avantages de sa fonction en se disant que ses promesses seront soit oubliées, soit empêchées d'être réalisées par la mauvauise volonté des autres. Il arrive parfois qu'elles mises en force en sacrifiant d'autres besoins essentiels par manque de budgets. Un exemple récent: son discours énonce le principe de bien vieillir à la maison et la semaine suivante on coupe le budget d'une superbe popote roulante pour les personnes âgées dans le centre sud de Montréal.

Jean-Pierre Proulx a dit…

"Il est regrettable que le monde de l'éducation soit si divisé entre enseignants, syndicats, directeurs d'établissement et commissions scolaires."

Mettons.

1- Mais comment changer cet état de choses?

2- Il est encore plus regrettable que les enseignantes et les enseignants refusent toujours d'avoir collectivement une parole professionnelle proférée par une organisation d'abord professionnelle.