Égide Royer l'a dit: ça prend des hommes en éducation. Pourquoi? Pour donner des modèles masculins à nos jeunes garçons qui décrochent. Pour que la sensibilité masculine puisse enfin être vécue en classe. Pour plein de raisons qui relèvent du gros bons sens mais dont aucune n'a été démontrée.
Pourtant, la chose serait assez facile à infirmer ou confirmer: par exemple, combien y a-t-il d'enseignants dans les classes des pays où les garçons ne décrochent pas? Permettez-moi de parier un gros deux dollars que cette donnée n'a aucune incidence là-bas.
Je ne dis pas qu'il n'est pas souhaitable qu'on retrouve plus d'hommes en éducation. Mais qu'il en faille obligatoirement pour assurer la réussite des gars, c'est encore trouver des excuses à nos charmants petits poupons ainsi qu'à leurs géniteurs impénitents. Et les jeunes aiment les excuses quand c'est le temps de ne pas fournir d'efforts.
Alors, n'hésitez pas: remettez des bourses aux aspirants candidats en enseignement, augmentez le salaire des hommes déjà en poste tant qu'à y être. Je suis prêt à vous garantir que cela changera peu de choses. Pourquoi?
Tout d'abord, parce que l'éducation est davantage associée à un rôle féminin. À cet effet, on remarquera que, plus on avance dans le cheminement scolaire d'un jeune, plus les chances qu'on croise un homme augmente. Plus on s'éloigne du catinage et du mouchage des nez, plus la proportion d'hommes augmente.
Ensuite, parce l'enseignement est un job de femme et, tant qu'à vous entendre crier, je vais en rajouter une couche en vous disant qu'il s'agit même d'une job de bonne femme. Au cours de ma carrière, combien de fois ai-je compris que mes patrons aimaient plus la petite madame tranquille qui donne son programme et ne remet rien en cause, la petite madame sur laquelle on peut ambitionner et qu'on peut engueuler sans problème. Je généralise, mais l'enseignement est un job où les valeurs plus masculines et traditionnelles de leadership et d'affirmation de soi sont jugées embêtantes. Jamais certains hommes ne se laisseraient insulter et cracher dessus par des enfants ou des parents comme c'est le cas actuellement. Jamais certains homme n'accepteraient de se faire infantiliser par des autorités scolaires qui nient leurs compétences.
Si on retient la proposition d'Égide Royer, il faut aller logiquement jusqu'au bout, s'assurer d'avoir des vrais hommes en éducation, des hommes véritablement masculins. Pas des profs efféminés à qui nos garçons ne pourront pas s'identifier. Donc, je propose aussi des tests de virilité pour les futurs enseignants.
Personnellement, il faut que je vous confesse une chose: quand on peut pousser une idée jusqu'à ce degré d'absurdité, c'est qu'elle est fondamentalement conne.
Qu'il y ait une plus grande représentation d'hommes dans nos écoles pour illustrer la diversité sociale, je le veux bien. Mais avancer cette idée sous prétexte que cela favorisera la persévérance scolaire des garçons, je n'achète pas. La décrochage est une affaire de garçons ET de filles. En agissant ainsi, on stigmatise les garçons et oublie certaines filles. En cela, je me demande si ce remède n'est pas pire que le mal qu'il prétend soigner.
Je terminerai en disant aussi que, suivant cette logique, il faudrait s'assurer de la représentation de profs masculins haïtiens dans certains quartiers de Montréal. Le taux de décrochage dans cette communauté y est effarant. Mais c'est bizarre: on n'en parle pas. Tout comme on ne parle pas du taux catastrophique de décrochage dans les écoles autochtones. Mais c'est normal: ça ne compte pas.
**********
Au fait, les filles qui décrochent actuellement dans un réseau de l'éducation essentiellement féminin, elles sont de quel sexe?
8 commentaires:
Moi, féministe depuis longtemps, souhaitant la parité dans de nombreux domaines,( notamment dans les débats télévisée, en France la parole des femmes est souvent absente), je pense que le monde professionnel de la petite enfance notamment et de l'école est trop féminin...Mais pas pour les élèves décrocheurs. Tout à fait d'accord. Pour un équilibre de la société, des regards différents, des représentations multiples du monde et je rejoins totalement votre analyse.
Michelle Laurissergues
Wow! L'art de faire lever la sauce!
Je commençais vraiment à avoir peur...
Merci pour cette démonstration. Très éloquent.
Il se peut que ce débat ait cependant permis d'identifier une idée à examiner de près, soit celle de prévoir du temps pour des activités de gars et de filles sans remettre en question la mixité des classes
Propos d'un de mes éclopés la semaine passée sur mon cours de renforcement en français qu'il supporte tant bien que mal : "Au moins, les livres sont intéressants, c'est pas encore une maudite histoire d'amour plate." D'où il me semble qu'il s'agit moins d'un problème de quota des sexes que d'un problème de matantisation générale de l'enseignement. C'est fou ce que l'école suinte de bons sentiments, de vécu et d'histoires édifiantes. J'ai parfois l'impression que le Québec n'est sorti de sa chape de plomb catholique que pour se couvrir d'une gaine morale laïque tout aussi rigide que l'ancienne.
"Égide Royer l'a dit: ça prend des hommes en éducation"
Quel sage homme ce monsieur Royer!
L'apprentie, célibataire...
Je suis d'accord, et dans la classe de semi-professionnel dans laquelle j'enseigne, où ce sont des jeunes réchappés de peu du système d'éducation, il y a autant de jeunes hommes et de jeunes femmes... Mais peut-être est ce que ce ne sont pas de vraies femmes... ;) (pour M.Royer)
Mme Laurissergues: merci!
Renart: peur de quoi?
Gillac: honnêtement, je suis un peu tanné d'entendre parler de solutions alors que certaines écoles ont des projets intéressants déjà en oeuvre.
Prof: « D'où il me semble qu'il s'agit moins d'un problème de quota des sexes que d'un problème de matantisation générale de l'enseignement.» Parfaitement d'accord.
L'apprentie: les pères de vos élèves sont si moches?
Future: des mutantes à défaut de matantes?
Peur que tu sois sérieux dans ton propos...
Enregistrer un commentaire