15 avril 2011

Éducation: un coup d'oeil sur l'exemple américain

La CAQ (coalition pour l'avenir du Québec) s'inspire passablement du modèle américain dans sa conception de ce que devrait être l'école québécoise: des établissements déresponsabilisés, autonomes, soumis à des évaluations périodiques. Un peu dans la veine de ce que nous présentait le Journal de Montréal à propos de l'Iowa.

Je relevais à l'époque, et il faut quand même le faire avec quelques réserves, que le modèle américain ne donnait pas des résultats très probants en ce qui a trait aux test PISA, par exemple (30e place en mathématiques, 23e en sciences et 17e en lecture comparativement à la 10e, 8e et  6e place respectivement pour le Canada).

Une amie intellectuelle qui lit un journal intellectuel m'a envoyé un lien vers ce texte publié dans Le monde diplomatique. Il s'agit d'une lettre écrite par Diane Ravitch, autrefois vice-ministre de l'Éducation sous George Bush. Cette dame approuvait alors des mesures semblables à ce que propose le groupe de M. Legault. Or, aujourd'hui, elle a radicalement changé d'avis.

Elle remarque que, dans certains cas, les États ont abaissé leur niveau d'exigence et connaissent des écarts importants avec les évaluations imposées par les instances fédérales: «...le Tennessee chiffrait à 90 % la part de ses élèves ayant atteint les objectifs de l’année 2007, l’estimation du NAEP — 26 % — s’avéra moins flatteuse.»

L'ancienne vice-ministre relève également:


«Dans nombre d’écoles, les enseignements ordinaires s’interrompent plusieurs mois avant la tenue des examens pour céder la place à la préparation intensive qui leur est consacrée. De nombreux spécialistes ont établi que tout ce travail ne bénéficie pas aux enfants, lesquels apprennent davantage à maîtriser les tests que les matières concernées.


Malgré le temps et l’argent investis, les scores au NAEP n’ont guère augmenté. Parfois, ils ont tout simplement stagné. En mathématiques, les progrès étaient même plus importants avant l’adoption de la loi NCLB qu’après. En lecture, le niveau se serait amélioré pour l’équivalent du CM1. Pour l’équivalent de la quatrième, les scores de 2009 sont les mêmes que ceux de 1998.


Cependant, le problème principal, ce ne sont pas les résultats eux-mêmes ni la manière dont les Etats et les villes manipulent les tests. La véritable victime de cet acharnement, c’est la qualité de l’enseignement. La lecture et le calcul étant devenus prioritaires, les enseignants, conscients que ces deux matières décideront de l’avenir de leur école et… de leur emploi, négligent les autres. L’histoire, la littérature, la géographie, les sciences, l’art, les langues étrangères et l’éducation civique sont relégués au rang de matières secondaires.»

Quant aux charter schools, qui ressembleraient un peu aux écoles autonomes de la CAQ, elle souligne: «seuls 17 % de ces établissements affichent un niveau supérieur à celui d’une école publique comparable. Les 83 % restants obtiennent des résultats similaires ou inférieurs.»

Enfin, elle montre jusqu'où peut aller la dérive de faire porter aux enseignants le fardeau de la supposée réussite des jeunes:

«Leur modèle de fonctionnement repose sur un fort taux de renouvellement du personnel, car les enseignants doivent travailler énormément (parfois soixante ou soixante-dix heures par semaine) et laisser leur téléphone portable allumé afin que les élèves puissent les joindre à tout moment. L’absence de syndicats facilite de telles conditions de travail. (...)


Lorsque les autorités de l’Etat de Rhode Island ont annoncé leur intention de licencier tout le personnel enseignant du seul lycée de la ville de Central Falls, leur décision a été applaudie par le secrétaire d’Etat à l’éducation, M. Arne Duncan, et par le président démocrate lui-même. Récemment, le personnel a été réembauché, à condition d’accepter de faire de plus longues journées et de fournir davantage d’aide personnalisée aux élèves. (...)


La Floride vient de voter une loi qui interdit le recrutement d’enseignants débutants, fait dépendre la moitié de leur salaire des résultats de leurs élèves, supprime les budgets alloués à la formation continue et finance l’évaluation des élèves en prélevant 5 % sur le budget scolaire de chaque circonscription. (...)»

Je ne sais, mais tout cela me laisse un arrière-goût en bouche.

1 commentaire:

Dominique Brassard a dit…

"Quant aux charter schools, qui ressembleraient un peu aux écoles autonomes de la CAQ, elle souligne: «seuls 17 % de ces établissements affichent un niveau supérieur à celui d’une école publique comparable. Les 83 % restants obtiennent des résultats similaires ou inférieurs."

Et ça prouve quoi ? Combien de similaires ? Toutes ?

Dans de nombreux États (voir Washington D.C), ces écoles sont en fait des écoles pour enfants défavorisés, ces écoles à charte sont moins bonnes que les écoles publiques nationales, mais pas des écoles publiques de la même région.

http://pouruneecolelibre.blogspot.com/2009/07/fascination-francaise-pour-l-dobama-et.html

Et Franchement, les États-Unis ne sont pas du tout un exemple de liberté scolaire.

Tiens, voyez les écoles libres d'Angleterre :

http://pouruneecolelibre.blogspot.com/2011/02/ecoles-libres-en-grande-bretagne.html

Ça c'est différent.

Non, franchement, les propositions Legault sont timides en comparaison.