06 janvier 2008

Noël sanglant

Je l'avais promis dans un billet le 24 décembre dernier: voici comment je me suis ramassé à l'urgence en installant mon premier sapin de Noël il y a vingt-cinq ans.

Tout d'abord, il faut savoir que je venais de fuir quelques semaines plus tôt un foyer familial assez dysfonctionnel. Ma mère était décédée depuis plusieurs années et mon père était très violent verbalement. Après un charmant échange de coups de poing de part et d'autre, une première dans la maison, j'avais décidé que je ne voulais pas de ce genre de relation entre lui et moi. Conscient que je ne pourrais le changer et que je ne changerais pas non plus, je suis donc parti voler de mes propres ailes.

Mon premier appartement était un magnifique demi-sous-sol en préfini rustique et, par les fenêtres de celui-ci, j'avais une vue impénétrable sur le doberman du propriétaire. Bouclant les fins de mois de peine et de misère (vive le foie de veau et le Kraft Dinner!), j'avais dormi plus d'un mois sur le plancher avant de pouvoir me procurer un lit.

Bref, Noël arrive et je me refuse à le passer dans mon morne ordinaire, d'ou la folle idée de me procurer un sapin pour égayer mon intérieur locatif et psychologique. Encore fallait-il trouver le résineux festif et le ramener dans mon logement par mes propres moyens, c'est-à-dire à pied.

Une fois celui-ci entré dans mon logis, un constat s'imposa immédiatement: il était trop grand. Il me fallait donc me résoudre à le couper, mais avec quoi? Je me munis alors du plus grand couteau avec des dents que je possédais et je m'attelai à la tâche. Bêtise incommensurable: j'avais pris un couteau à pain, pas à sapain, et ce qui devait arrivé arriva: je me coupai profondément entre le pouce et l'index.

Je vous passe les détails sanglants, mais tout cette scène me rappelait mes cours de dissection en biologie, à la différence que j'étais maintenant la bébitte charcutée.

Après quelques heures d'attente à l'hôpital, la preuve que rien n'a bien changé depuis, je me suis résolu à retourner chez moi et à me ratisfioler tout seul. Plus chanceux qu'autre chose, je ne garde aucune séquelle de cet incident ni de mon traitement maison, sinon qu'à chaque Noël, quand vient le temps de couper le sapin pour qu'il soit de la bonne taille, la scie dans mes mains tremble un peu...

C'est l'émotion du temps des Fêtes, j'imagine.

6 commentaires:

Anonyme a dit…

Cher Prof,
Comme dans un sapin de Noël, c'est l'aspect symbolique qui compte, pourquoi ne pas te contenter une petite branche qui tiendra facilement dans ton salon, sans devoir être recoupée.
Le nombre de boules à accrocher étant proportionnel à la taille de l'objet, tu économiseras aussi sur le travail de décoration.
Enfin, les écologistes (très nombreux au Canada) te remercieront, en installant gratuitement dans ta cuisine une superbe cellule photovoltaïque qui fera la fierté de toute la famille!
Amitiés

unautreprof a dit…

Nous avons donc été assez sages:)

Merci!

Anonyme a dit…

Je n'ai rien à dire de pertinent sur cette histoire, mis à part le fait que le petit jeu de mot boiteux sur le couteau à pain qui n'était pas un couteau à "sapain", je l'ai trouvé bien drôle en ce lundi matin ;)

Une femme libre a dit…

Prof masqué, vous n'avez pas compris les trucs pour qu'on s'occupe rapidement de vous à l'urgence. Les blessures sanglantes, il ne faut pas les masquer, Professeur Masqué! En fait, dégoutter de tout son sang devant l'infirmière du tri après avoir fait une trace sanglante sur le plancher et secouer un peu cette main pour qu'il en revole vous aurait probablement valu l'honneur de voir un médecin.

Le professeur masqué a dit…

Une femme libre: vous m,avez donné une idée. La prochaine fois, j'écrirai la phrase «je vais mourir» avec mon sang. Le médium sera aussi le message. C,est marshall MacLuhan qui sera content!

Noisette: content de vous avoir fait sourire. Sachez qu'il est quand même difficile de distinguer un pain d'un sapin.

Un autre prof: de rien!

Armand: la tradition du sapin de Noël est pas mal plus complexe. J'essayerai d'y revenir. Sinon, ça me fera un sujet pour l'année prochaine.

A.B. a dit…

M'est arrivé quelque chose du genre lorsque j'étais étudiante à temps plein et que je ne possédais qu'un seul «couteau qui coupe». Au lieu d'un tronc, c'était un bagel. Ayoye.