Mme Marois a défendu sa décision de pousser à la retraite des milliers d'employés de l'État, dont des enseignants.
Jean-Robert Sansfaçon réplique à cette dernière dans un texte des plus clairs. En voici un longextrait pour vous montrer qu'en plus de créer des pénuries de personnel dans l'appareil gouvernemental, cette décision fut un échec budgétaire.
Rappelons les faits: quelques semaines après le référendum, en janvier 1996, Lucien Bouchard succède à Jacques Parizeau comme premier ministre et convoque un sommet des partenaires sociaux pour septembre suivant. La conclusion centrale de ce sommet, c'est qu'il faut s'attaquer au déficit chronique qui afflige les finances du Québec. Quelques mois plus tard, M. Bouchard menace d'adopter une loi d'exception si les négociations n'aboutissent pas à la récupération de 6 % de la masse salariale des employés de l'État.
Une entente intervient in extremis: les salaires ne seront pas réduits, mais on puisera 1,6 milliard dans les surplus de la caisse de retraite, la moitié prise à même les contributions de l'employeur, l'autre dans celles des syndiqués. Grâce à cette cagnotte, on pourra réduire de 16 500 le nombre de fonctionnaires à qui on offre de prendre une retraite immédiate, sans pénalité.
Le programme est si populaire -- 33 000 personnes acceptent l'offre -- que ce ne sont pas 800 millions que l'État devra payer, mais... 2,3 milliards, en plus des 800 millions de la partie syndicale, selon les chiffres du vérificateur général. Et comme Québec n'a pas cette somme, il l'ajoutera à sa dette à long terme. En d'autres mots, les contribuables paient encore aujourd'hui au moins 150 millions par année pour un programme de départs volontaires aux conséquences majeures sur le réseau de la santé.
Contrairement aux prétentions du gouvernement d'alors, les mises à la retraite n'ont pas permis de réduire le nombre d'employés et la masse salariale sur une base permanente. Ainsi, alors que l'on affirmait que les départs allaient faire économiser 900 millions par année de façon récurrente, le vérificateur général en est arrivé à la conclusion que les économies réelles n'ont été que de 553 millions la première année, 435 millions la deuxième année et 371 millions par la suite. Au total: 10 milliards de moins que les prévisions à long terme! Et la cerise sur le sundae: à peine 6200 des postes abandonnés par leurs titulaires en 1997-1998 n'avaient pas été remplacés seulement deux ans plus tard, alors qu'on visait l'objectif de 16 500!
Aux 1500 médecins qui ont quitté le navire, on a offert jusqu'à 300 000 $. Le programme ne devait causer aucune pénurie, nulle part au Québec. Pourtant, dès l'année suivante on implorait les «jeunes» retraités de reprendre le collier à coup de primes d'exception.
Dans sa réponse aux journalistes, dimanche, Mme Marois a soutenu sans en démordre que le gouvernement n'avait pas le choix. Faux! Si la plupart des Québécois étaient d'accord avec l'objectif du déficit nul, rien n'obligeait Québec à devancer d'une année son propre plan d'action. L'Ontario a agi différemment et a aussi atteint le déficit zéro quelque temps plus tard. En outre, il y avait le choix des moyens: un programme ciblé aux seuls employés en trop dans les hôpitaux fermés, par exemple, comme au fédéral où 45 000 salariés sont partis en douceur, aurait été beaucoup plus approprié. Même l'ancien premier ministre Lucien Bouchard a reconnu son erreur, comme M. Charest s'est empressé de le rappeler.
Que s'est-il passé dimanche dernier pour que Mme Marois adopte un point de vue contraire au bon sens? Voilà qui est de mauvais augure pour le reste de cette campagne déjà difficile pour le Parti québécois.
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