26 juin 2010

Manuels scolaires: recours collectif

La Cour supérieure du Québec vient d'autoriser un recours collectif contre la Commission scolaire des Seigneuries qui aurait injustement facturé à des parents des frais concernant l'achat de manuels obligatoires. Il s'agirait, entre autres, de romans.

Il faut savoir que la Loi sur l'instruction publique permet aux écoles d'exiger des parents qu'ils défraient les coûts des documents sur lesquels l'enfant écrit ou dessine.

Pour François Paquet, président de la Fédération des comités de parents du Québec: «Parfois, c'est de l'ignorance, ce n'est pas nécessairement de la mauvaise volonté. Je pense que les directions d'écoles gagneraient à avoir des formations à ce sujet.» Désolé de le détromper, mais c'est dans l'interprétation de la loi que ces directions divergent d'opinion avec certains parents. Je m'explique.

Sous la pression des enseignants de français, mon école a déjà facturé aux parents l'achat de romans destinés aux élèves. Les raisons justifiant cette mesure étaient bien simples:
- on voulait que le jeune s'approprie le livre, qu'il apprenne à y surligner des passages importants, à y écrire des notes, à y placer des signets, à rédiger un bref résumé sur les pages de garde ou à la fin des chapitres, etc. Bref, on désirait que le livre devienne un matériau sur lequel il travaille plutôt qu'un objet qu'il doit lire mais sans le «détériorer», perpétuant ainsi le mythe du livre sacralisé. Au cégep, l'étudiant sera invité à agir de la sorte. Pourquoi attendre avant de le former adéquatement?
- on voulait également que chaque élève ait son propre exemplaire en main. Généralement, les enseignants doivent utiliser des séries de romans et, comme il y en n'a pas assez pour l'ensemble de leurs groupes, ils ne peuvent en laisser un exemplaire à chaque élève. La lecture se fait alors en classe, souvent à coups de 15 minutes ici et une période là. On brise constamment le rythme de lecture des jeunes. De plus, quant à moi, ce temps est mal investi puisque, après un accompagnement de départ, l'élève est souvent capable de lire de manière autonome ailleurs qu'en classe. C'est autant d'heures gagnées pour un véritable enseignement en classe. Faites le calcul et vous verrez combien d'heures on gagne ainsi pour un coût somme toute raisonnable.
- on ne se cachera pas la vérité: on voulait également compenser pour le sous-financement en ce qui concerne l'achat de romans dans nos écoles. On voulait aussi proposer aux élèves des oeuvres récentes, vivantes et différentes du vieux stock qui se couvre de poussière sur nos tablettes. Comment donner le goût de la lecture aux jeunes avec des oeuvres parfois dépassées?

La facturation de ces romans a donc été approuvée par la direction de mon école et le conseil d'établissement de celle-ci (qui regroupe des parents) comme étant l'achat de matériel où l'élève écrit.

Les enseignants, conscients de la capacité de payer des parents, ont pris soin de ne pas dépasser un montant de 20 à 25$ par année pour l'achat de trois romans. À titre comparatif, je signale qu'une sortie scolaire au théâtre coûte le même montant. J'ai même utilisé ces livres pour divers exercices de grammaire en demandant aux jeunes d'y analyser des phrases, d'y expliquer des règles de grammaire en contexte, etc.

Dans tout ce débat, je comprends que l'éducation doit être gratuite. C'est un principe de base au Québec. Mais elle doit aussi être de qualité. Et je ne crois pas que ce recours permettra aux enseignants d'offrir une formation adéquate en classe. il faut être complétement déconnecté pour penser que les écoles prendront la relève en matière d'achats de romans. On reviendra aux vieilleries sacralisées...

Je trouve regrettable que ce soit le seul point qui incite certains parents à entreprendre des recours judiciaires ou autres contre notre réseau d'éducation. On retrouve tellement de situations plus importantes qui nuisent au développement des jeunes. Mais certains parents ont une courte vue de la situation ou ne voient pas plus loin que le bout de leur... portefeuille.

8 commentaires:

Isabelle a dit…

jusqu'à cette année, nous faisions acheter un roman par année aux élèves.

Ça sera différent l'an prochain. Je trouve ça dommage, pour plusieurs, c'était le seul roman/livre acheté pour eux durant l'année.

Capitaine a dit…

Un recours du genre remet sur la place publique le fait que l'achat de volumes est sous financé. Je crois que ce n'est pas mauvais pour "la cause". Je pense que ce sera un bon moment pour exiger du MELS qu'il fasse mieux en la matière. Un peu idéaliste de ma part, mais bon, on peut toujours rêver.

Anonyme a dit…

Le MELS veut promouvoir la lecture chez les jeunes.

Contrairement à ce qu'on pense, peu de jeunes ont eu des contacts avec les livres autrement que par ceux qu'ils avaient dans leurs bibliothèques scolaires. Mais ces livres ne leur appartenaient pas: ils devaient les manipuler avec soin.

Pendant plusieurs années moi aussi je me suis battu pour que les livres "obligatoirement lus" soient indiqués sur la liste des achats scolaires. Mon point a été retenu deux années de suite. Les enfants étaient majoritairement content d'avoir enfin des livres à eux. Peu d'entre eux ont écrit et surligné dans leurs livres. Ces nouveaux outils étaient trop précieux pour qu'ils les abîment.
Pourtant, leurs cahiers d'exercices étaient fichuement massacrés :)

Le MELS a une politique pour promouvoir la lecture: ce n'est pas en laissant les écoles passer des séries insipides comme "E = MC 2" que nos enfants seront intéressés par lecture.

C'est aussi certain que ce n'est pas une bonne idée de laisser chaque élève choisir son livre de lecture: je l'ai vécu et j'ai fortement prié pour que la direction mette ses culottes. Malheureusement le prof a été obligé de se taper 30 livres différents (en une étape).

Que le MELS amende sa directive en permettant un achat de deux romans par les parents et les CS seront contentes, les parents accepteront et les enfants auront enfin deux livres à eux.

Lia a dit…

Est-ce que les parents qui chialent sont aussi ceux qui achètent un cellulaire et/ou un Ipod Touch à leur enfant? Un livre, c'est un dîner chez McDo.

Le professeur masqué a dit…

Isabelle: la loi gagnerait à être précisée. Selon l'utilisation qu'on en fait, c'est davantage un cahier d,apprentissage parce qu'on y écrit, quant à moi.

capitaine: vous avez raison, surtout quand vous affirmez que c'est idéaliste...

Anonyme que je reconnais: je partage votre avis.

Lia: d'après vous? : )

Charles Samares a dit…

@Lia: C'est tellement ça!

Ce que je déteste de cette «loi», c'est qu'elle n'est pas collée sur la réalité scolaire alors que les budgets alloués aux bibliothèques de nos écoles permettent aux enseignants d'acheter des romans en série 1 fois par 5 ans (si les astres sont, bien entendu, alignés correctement à ce moment-là!).

Difficile pour un enseignant d'intéresser ses élèves à l'actualité littéraire...

S. Deguise a dit…

(suite) Lorsqu`un montant réclammé dit "volontaire" et que celui-çi est calculé à même le total du montant facturé pour les effets scolaires de l`éleve, çelà me laisse perplexe. Je me demande combien de parents qui comme moi n`ont pas remarqué sur leur facture cette contribution "VOLONTAIRE". Il ne faut pas oublier qu`un recours collectif contre une commission scolaire s`est réglé par une entente qui a coûté plus ou moins $800,000. De ce montant plus de $200,000 on servit à débourser les honoraires d`avocat. À ce prix là je me dis que ça aura servis de leçon mais ça ne semble pas être le cas. C`est la première année de secondaire pour ma fille. Elle fréquente une école publique mais voilà qu`on me charge $150 de frais d`inscription ($150 X BEAUCOUP D`élèves = BEAUCOUP D`ARGENT!). J`ai fait des démarches à ce sujet et je reste surpris des réponses obtenues, qui après vérification ne font aucun sens. Par exemple, se faire dire que le secondaire régulier ça existe plus. A l`inscription je devais faire passer des tests d`admission pour chacun des programmes proposés. La secrétaire me suggère d`inscrire ma fille à plusieurs de ces test au cas ou elle ne serais pas accepter dans le programme choisi. C`est $10 du test qu`on me réclammait($10 PAR TEST X BEAUCOUP D`ÉLÈVES = BEAUCOUP D`ARGENT!). Je me disais que ça n`avait pas de sens car mon enfant avait complété son primaire avec succès. Alors pourquoi un test d`admission alors que tu viens de réussir les examens du ministère. Je n`y trouvais encore moins de sens de penser que si l`enfant échoue les tests d`admission il ne pourra fréquenter l`école alors que la loi l`y oblige. Un ami de ma fille avait posé la question à savoir ce qu`il arriverait si il échoue le test. Il c`est fait dire qu`il ira au "régulier". Alors pourquoi je me suis fait dire par la secrétaire de cette même école que "ça existe plus le secondaire régulier" en justifications des tests d`admission et frais demandé dans une école publique?
Personnellement c`est une facture de plus de $500. que j`ai acquitté en ce début d`année scolaire pour un élève de secondaire 1. Je trouve exagéré ce recours collectif de $300 millions intenté contre les 68 des 72 commissions scolaire du Québec car au final ceux qui en auront le plus bénéficié monétairement ce sont les avocats. Car rappelons-le, la poursuite exige que les frais illégaux facturés aux parents(900,000 élèves) depuis 2008 leur soient remboursés, en plus du paiement de 100$ par parent en dommages exemplaires. Pour ceux qui veulent comprendre la situation actuel il y à un rapport qui a été produit par la commission des droits de la personne et de la jeunesse. Donc en considérant la situation personnelle de chacun et des contraintres financières que c`est frais illégaux imposent à certains, c`est du cas par cas car pour certains c`est une question de principe et pour d`autres moins nantis comme moi, c`est bien plus que çelà.

Anonyme a dit…

Bonjour, j'enseigne au secondaire depuis de nombreuses années et je ne sais trop quoi penser de cette poursuite, si ce n'est que la loi devrait être modifiée. L'école secondaire publique devrait être entièrement financée par l'état et gratuite (livres, sorties, activités parascolaires, etc.). Malheureusement, ce n'est pas le cas et les coupures des dernières années ainsi que les contraintes administratives affectent les élèves et rendent le travail de l'enseignant de plus en plus difficile.

Monsieur Deguise, les tests pour les concentrations ou programmes offerts dans divers écoles (un programme et une concentration ce n'Est pas la même chose) sont faits pour essayer de sélectionner les élèves, car les places sont limitées pour l'un comme pour l'autre et les élèves sont sélectionnés en lien avec leurs intérêts ou leurs résultats. Ce que la secrétaire voulait sans doute mentionner en disant que le régulier n'existait plus, c'est que le régulier d'il y a quelques années (celui que vous avez connu) est très loin du régulier actuel. En effet, les élèves forts sont souvent inscrits soit au privé, soit dans les concentrations/programmes. C'est un peu désolant à dire, mais le régulier actuellement est principalement composé des élèves trop faibles pour aller ailleurs. Les élèves de 90% au régulier, ça n'existe plus, les élèves en haut de 75% dans un groupe de 30 se comptent sur les doigts d'une main, quand tu as une moyenne de 65% dans un groupe de régulier... tu es content... les résultats et les objectifs étaient plus élevés il y a quelques années.