La lettre de madame Gauthier m'a rappelé le premier contrat que j'ai obtenu en éducation. Sitôt après avoir complété mon bac en enseignement, j'avais envoyé une cinquantaine de curriculum vitae aux commissions scolaires de la région de Montréal et des horizons lointains: Trois-Rivières, Granby, etc. À l'époque, de l'emploi en éducation, c'était rare et on ne regardait pas trop si les opportunités nous obligeraient à déménager.
Certaines CS envoyaient des accusés de réception, d'autres pas. La CSDM, à l'époque, m'avait barré de sa liste d'embauche parce que je n'avais pas effectué mon dernier stage dans une de ses écoles. Une information qu'on s'était gardé de me donner avant mon dernier stage, bien sûr...
Bref, j'attends devant le téléphone. J'attends. J'attends. Puis est arrivé cet appel de la commission des écoles catholiques de Verdun. Une entrevue, yesss! Durant celle-ci, je me suis littéralement sabordé parce que j'avais pas envie de travailler pour une CS dont le directeur du personnel m'avait interrogé sur mes valeurs religieuses (Hey! c'est quoi le lien avec le français?) et sur comment j'avais obtenu 100% dans mon dernier stage. Poliment, je lui avais répondu: «Je ne sais pas. Il vaudrait peut-être mieux le demander à mon maitre-associé.» Dans ma tête, la réponse fusait: «Quoi? Tu penses que j'ai couché avec lui?»
Finalement, un autre appel, une autre entrevue. À Saint-Jérôme. Comme je demeurais à Montréal et n'avais pas de voiture pour des raisons religieuses (Les Dix Commandements du cycliste urbain, vous connaissez?), aussi bien dire à Saint-Glin-Glin-Des-Meuh-Meuh. J'ai facilement obtenu le poste. Un 85% de tâche en cinquième secondaire et en journalisme.
Matin et soir, jusqu'en novembre, j'ai effectué le trajet à l'école en autobus, le temps d'amasser de l'argent pour m'acheter une voiture usagée. J'en profitais pour corriger ou préparer mes leçons. Je devais enseigner de la grammaire que je n'avais pas vue depuis le secondaire!
Je demeure convaincu que ce poste m'a permis de décrocher l'emploi permanent que j'ai maintenant. Durant cette année-là, j'ai travaillé avec un des conseillers pédagogiques les plus incroyables du Québec et une équipe d'enseignants très motivés. J'ai été très chanceux de les côtoyer. J'ai aussi fait ma chance en acceptant de m'exiler aussi loin. Et ça, je ne l'oublie pas.
3 commentaires:
J'ai fini mon bac au moment où il n'y avait pas de job... Sur 35 finissants, on a été 2 à se placer quelque part.
Première proposition reçue: 50% de tâche en français 2e secondaire et 50% de tâche en sciences physiques 2e secondaire dans un collège privé de la rive-sud. J'ai demandé au directeur s'il avait le sens de l'humour: s'il ne riait pas de moi, il riait de ses élèves... "Avez-vous bien regardé mon CV? J'ai un DEC en sciences humaines et un Bac en enseignement du français. Vous pensez que je pourrais être compétente pour enseigner les sciences physiques?" Même s'il me voulait, j'ai osé dire non. Il m'avait même dit: "On n'a pas trouvé de prof de sciences physiques capable d'enseigner le français alors on cherche le contraire..." Misère.
Quelques jours après, entrevue à la CS des Laurentides. 25% de tâche en français 3e secondaire à Saint-Jérôme. J'habite à Montréal et, contrairement à toi, PM, j'ai un char... J'accepte de m'expatrier pour 25% de tâche. N'importe quoi pour enseigner!
Tâche que je n'ai finalement pas honoré: on m'a appelée, le lendemain, pour une entrevue dans un collège privé de Montréal: 60% de tâche en français 5e secondaire et 10% en Éducation et choix de carrière (c'était quand même mieux que sciences physiques pour un complément de tâche, non?).
J'ai enseigné là pendant 3 ans, pris une année sans solde pour aller étudier à l'étranger et, depuis mon retour (il y a 17 ans), je sévis au cégep. J'ai donc lâché une job permanente au secondaire pour une job de précaire au cégep... parce que j'ai été précaire pendant 13 ans au cégep. Comme quoi, la précarité, ce n'est pas le lot des profs du secondaire, lesquels "appartiennent" à une commission scolaire (qui compte plusieurs écoles) alors que les profs de cégeps "n'appartiennent" qu'à un seul cégep. S'ils veulent avoir un salaire décent (je ne parle pas d'une tâche décente), ils doivent professer dans deux cégeps (comme je l'ai fait au début), choisir d'apparaitre sur 2, voire 3 listes d'ancienneté et faire un choix, un jour, en pesant le pour et le contre d'un cégep, d'une liste d'ancienneté, d'un département et de toutes sortes d'autres affaires qui n'ont rien à voir avec le plaisir d'enseigner.
Tellement enrichissant de connaître vos histoires... Merci de partager. Je sais que ce qui m'attend n'est pas la tâche de rêve... dans deux ans. Mais je garde espoir. Et puis, j'ai le temps de m'y faire, puisque vous avez écrit de bonnes mises en garde.
La seule chose que je déplore... c'est le mensonge éhonté vendu par les responsables des ressources humaines de la CSDM lors de séances d'engagement massives : pénurie, pénurie, pénurie, jobs assurés pour tous!! à 100%!!
Pauvre de nous, petite recrues jeunes et naïves!! Grâce à vous, au moins, on sait à quoi s'en tenir!
Julie: ouains, il n,y a pas de chemin direct en enseignement.
Lud: je suis en tab... On peut botter le cul à ces bonzes de la CSDM. Pénurie dans certains champs et certaines matières seulement. Et puis, les patrons font tout pour éviter des contrats à temps plein. Un prof avec 92% de tâche, j'ai vu ça!
Enregistrer un commentaire