Que fait-on quand on est devant une baisse des résultats des élèves? Que fait-on quand la réussite scolaire devient un impératif politique et non pédagogique? On s'assure de travailler à la réussite du plus grand nombre. Mais il y a plusieurs façons d'y parvenir.
Comme en éducation, les administrations déterminent à la fois les examens, la façon de les corriger et de consigner les résultats, il est parfois tentant de prendre des raccourcis. Un exemple: les notes transformées en cote et retransformées en notes grâce à une table de conversion officielle pour effectuer les conversions nécessaires lors de l'établissement de la cote du bilan.
Il y a quelques mois, un collègue d'une CS recevait ladite table qui contenait certaines infos pour établir les notes. Ainsi,un élève ayant un résultat en pourcentage X obtenait la cote Y qui était reconvertie en en pourcentage Z. Cela donnait un tableau semblable à celui-ci.
0 à 28% = E = 28%
29 à 36% = E+ = 36%
37 à 44% = D = 44%
45 à 52% = D+ = 52%
53 à 60% = C = 60%
61 à 68% = C+ = 68%
69 à 76% = B = 76%
77 à 84% = B+ = 84%
85 à 92% = A = 92%
93 à 100%= A+ = 100%
On remarque que la conversion de la cote en pourcentage se fait presque toujours à la hausse. Cela vou surprend-il? Entre 53 et 60%, il y a un monde, je crois. Mais dans l'oeil de l'administrateur scolaire, à 53%, tu passes!
Récemment, ce même collègue a reçu une nouvelle directive modifiant les informations qu'on lui avait transmises. Tant pis pour celui qui s'était basé sur le document précédent pour effectuer sa correction!
Tout d'abord, on lui apprend qu'en juin 2009, l'épreuve de fin d'année est «pondérée». En langage clair, la direction de son école a la possibilité de faire varier cette pondération de 0 à 30% de la note finale de l'élève. Bref, la direction s'immisce dans l'évaluation professionnelle des enseignants. En se basant sur quoi? On ne le sait pas. S'assurer qu'il y ait le moins d'échecs possibles? Contrebalancer l'effet négatifs d'examens mal foutus?
Ensuite, on lui apprend qu'on a modifié la table de conversion officielle pour effectuer les conversions nécessaires lors de l'établissement de la cote du bilan. Et, vous le verrez, ces changements sont savoureux.
0 à 28% = E = 28%
29 à 36% = E+ = 36%
37 à 44% = D = 44%
45 à 57% = D+ = 57%
58 à 60% = C = 60%
61 à 68% = C+ = 68%
69 à 76% = B = 76%
77 à 84% = B+ = 84%
85 à 92% = A = 92%
93 à 100%= A+ = 100%
On remarque que ces changements tournent principalement aux résutats compris entre 45 à 60%. Ainsi, un élève qui a entre 45 et 57% se verra maintenant attribuer la cote D qui vaut 57%. Or, la magie de l'histoire, c'est qu'à 57%, l'élève peut bénéficier d'un jugement de maitrise qui lui permet de recevoir la note de 60%. L'enseignant peut s'opposer à ce changement qui se fait automatiquement, mais il doit se lever de bonne heure pour motiver cette décision.
Bref, vous l'avez compris: maintant, avec un résultat de 45%, un élève peut réussir son année. 45% et tu passes!
La réussite du plus grand nombre.
En passant, pour les ceuses qui me demandaient un document officiel pour appuyer un billet précédent, vous remarquerez que le zéro n'existe pas dans cette table de conversion. Un élève qui, au départ, a 0 reçoit une cote de E qui vaut 28%.
18 commentaires:
On ne manque pas d'invention! Ce qui est fabuleux, c'est qu'on trouve un peu de tout, vive les mesures folles!
C'est assez pathétique. Franchement, je pense de plus en plus quitter définitivement l'enseignement, tellement c'est n'importe quoi... ou simplement la garderie.
Les jeunes en plus savent tellement qu'on a de moins en moins de pouvoir avec ce mou évaluatif, alors ils te tombent dessus à dix quand tu remets des notes... Pis si tu ne discutes pas, t'es un dictateur. Tu prends trop ça au sérieux... Un précaire, et nous sommes nombreux partout ces années-ci, ne peut se permettre de mettre trop de notes litigieuses ou, de toute façon, on nous les majore pour éviter les troubles. Un précaire n'a pas de compétence, c'est le préjugé sauf si ces notes sont bonnes et ses élèves ont l'air heureux. Bref, des jeunes qui ne foutent pas grands choses et qui savent que ça ne portent pas à conséquence, il y en a des masses...
Excellent billet... qui explique fort bien cette triste réalité!
Disons que le processus de formation des cancres est bien enclenché!
Ce qui me pue au nez dans tout ça, c'est que, d'ici quelques années, il y aura un ministre ou une ministre de l'Éducation qui aura la chance (ou l'indécence) de se péter les bretelles en disant que le taux de réussite a augmenté!
Le problème, c'est que nos génies-à-venir seront incapables d'écrire 5 mots sans faire des erreurs ou de faire une addition ayant un résultat supérieur à 10 sans leur calculatrice...
Après on se demande pourquoi de plus en plus de profs décrochent... Difficile de survivre en observant ainsi la bêtise humaine...
Faudrait une médaille pour les jeunes qui arrive à obtenir C! Je me rends compte que ma CS, bien que pas toujours géniale n'est pas si mal en regard à l'évaluation... C'est le comité pédagogique qui fait l'échelle avec le cp (un vrai compétent pour faire changement). J'ai l'impression que les directions sont vraiment toutes puissantes dans votre coin cher Professeur Masqué...
Moi ce qui me rend folle, c'est que le slogan "la réussite pour tous" est inspiré de celui qui est utilisé en France: "Égalité des chances pour tous". Il faudrait que je retrouve ma source... Dans la version québécoise j'entends:"Viens mon pit, c'est pas grave si tu fais rien, tu vas passer pareil." Dans la version française, je comprends: "Viens ptit con, on a fait tout ce qu'on a pu pour favoriser ton apprentissage, montre-nous ce que tu as dans le ventre maintenant."
L'échelle utilisée chez nous diffère un tout petit peu :
A+ = 100 %
A = 94 %
B+ = 8 7%
B = 80 %
C+ = 73 %
C = 66 %
D+ = 57 %
D = 50 %
E+ = 41 %
E = 32 %
Quand quelqu'un a mentionné que le zéro n'existait plus pour l'élève qui ne fait absolument rien (Ça existe, on le sait), je n'ai pu m'empêcher de m'exclamer en assemblée que l'échelle était en Fahrenheit et que si on convertissait en Celsius, on l'avait le zéro...
Le fou rire passé, tous réalisaient le ridicule de la situation provoquée par Mme Courchesne qui voulait un bulletin chiffré. On a discuté ça en octobre-novembre 2007...
Et on a fini par pouvoir avoir une cote AT = 0%, où le AT = Absence de Trace...
Rien n'est parfait, mais on a eu ça, au moins... C'est peut-être une hérésie ministérielle, mais ça fonctionne un peu.
"Le monde est à pleurer"
Merci à Leloup pour la phrase synthèse...
Quand je suis devenu professeur à l'université en 1991, j'ai appris qu'il n'y avait plus de notes avec pourcentages.
D'abord surpris, j'ai compris la logique très pertinente derrière cette décision: au lieu de penser "quantité" quand on évalue nos étudiantes et étudiants, on pense "qualité".
En effet, on se demande si la "production" évaluée est excellente, très bonne, bonne, passable ou nulle.
Bien entendu, on pose ce jugementt qualitatif après avoir établi des critères. C'est pas toujours évident, mais c'est précisément le boulot du professeur. Une affaire de professionnel quoi.
À vrai dire, quand on y pense, cette pratique est courante. Quand on va voir un film, une pièce de théâtre, ou même quand on sort d'un restaurant, on pose ce type de jugement. On se dit: "c'était excellent", ou bien: "bon", parfois "nul".
D'ailleurs les journaux nous présentent leur évaluation des films de la même manière, avec des cotes.
Le minsitère du Tourisme fait la même chose avec les hôtels et on sait très bien qu'un cinq étoiles, c'est un palace et que dormir sous une étoile, ce sera passable! Les hôtels nuls n'ont pas d'étoiles ni de clients!
Cela dit, comme il faut faire des moyennes, on n'a pas le choix de convertir nos A, B, C, D, E en chiffres (de 4 à 1, avec les intervales qui permettent de raffiner le jugement) qui, je le répète, sont des cotes.
L'erreur de notre système est de noter avec ds pourcentages (100% de quoi, en passant?) plutôt que de parler d'une échelle à 100 degrés. C'est d'ailleurs trop. On n'a pas besoin de tant d'intervalles, comme on le voit avec les échelles pour les hôtels. On sait ce que cela veut dire.
En réalité, le choix de l'échelle de cotes qui est une construction utile n'est pas très importante.
Encore une fois, ce qu'il importe de savoir pour l'élève et ses parents est de savoir s'il est excellent, très bon, bon, passable ou nul.
Malheureusement, Mme Couchesne a succombé aux pressions de l'ADQ et des chroniqueurs qui refusent de voir évaluer la culture scolaire, comme dans "mon temps, où il y avait juste six clubs"!
En conclusion
Mesdames et messieurs les blogueurs et commentateurs, je compatis avec vous, mais je me réjouirais davantage si vous vous mettiez à la recherche de solution plutôt que de simplement dénoncer.
Dans la CS où je travaille, le plus bas que tu peux avoir c'est 32% qui égal E! Cela veut-il dire que mes élèves faibles le sont moins que les vôtres! Ma CS engendrerait-elle des génies?! LOL Comment cela se fait-il que tout cela ne soit pas uniforme à travers le système scolaire merde!
Justement, la Minicia vient de soulever un problème qu'on a vécu chez nous: C égalait 60%, mais d'après des recommandations du SRAM pour éviter trop de refus l'année prochaine au cégep, la direction vient il y a deux semaines de monter le C à 65%. Donc, en deux semaines, certains élèves qui étaient en échec ne le sont plus. Les parents sont aux oiseaux, la direction vient de couper de moitié le nombre d'élèves qui auront un cours d'été obligatoire (mais qui ne comprendront rien à la rentrée suivante) et nous, comme dit M. Proulx, que j'ai beaucoup apprécié comme professeur il y a 3 lustres, on cherche des solutions... pour inculquer un sens de l'effort à nos élèves. "Pas grave m'man, y vont monter ma note à la fin de l'année, j'va passer, tu vas wouère..." Changement de sujet: un de mes élèves est éberlué: "Hein, on peut couler ça, un oral????" Je suis méchante, hein, de ne pas le faire entrer dans le club de la réussite du plus grand nombre!
M. Proulx: un peu baveusement, vous me permettrez de vous souligner que je m'attendais que vous passiez plus de temps à commenter le fait que le zéro n'existe plus en éducation. Vous demandiez un document: j'en avais trouvé un et, en pitou fier de lui, je vous le rapportais comme un journal du matin. Vous demandiez qui avez pu se livrer à un tel exercice pédagogique d'abolir le zéro. Je vous ramenais quelque chose de tangible qui montrait qu'on n'était pas dans la légende urbaine. Je suis déçu...
Puisque vous parlez de l'université, certains de mes profs ont évalué mes travaux en cotes qui correspondaient à des notes. D'autres le faisaient en pourcentage directement. Je pouvais recevoir un zéro. J'en ai déjà eu un, je crois, avec Pierre Bourgault! Le tout était finalement converti en cote pour chaque cours pour être ensuite reconverti en moyenne chiffrée pour l'ensemble de mes cours. Donc, un nombre avec des décimales. N'est-ce pas ce que nous faisons un peu au secondaire actuellement?
Dans la même veine comparative, seriez-vous d'accord pour ne pas mettre zéro à un de vos étudiants sous prétexte qu'il n'a pas remis son travail et lui laisser autant de chances que nécessaires pour qu'il le fasse? J'aimerais bien vous lire là-dessus.
En poursuivant avec votre analogie universitaire et cinématographique, je vous signalerai que je n'ai que rarement compris comment mes profs évaluaient mes travaux à l'université et encore moins comment il se fait qu'un même film soit un chef d'oeuvre pour un critique et une pure merde pour un autre.
Quand est arrivée l'évaluation des compétences, vous devriez vous en rappeler, c'était un fouillis total. Les descriptifs de ces compétences consistaient en de longues phrases souvent incompréhensibles pour le commun des mortels. De plus, les niveaux de compétence relevaient de l'euphémisme. Ces façons de mesurer la compétence de nos élèves étaient l'oeuvre de nos sympathiques «ogues» scolaires.
Je passe par-dessus les bonhommes sourires et les maisons pour donner comme exemple «L'élève est en attente de succès» pour indiquer qu'il était en échec. Les mots «nul» ou «échec» étaient formellement interdits, contrairement à vos exemples cinématographiques.
À cette époque, je n'ai pas entendu grands partisans de la réforme condamner de telles dérives.
Je ne suis pas un fan fini de Mme Courchesne, mais vous avouerez qu'on nageait dans le monde du roi Ubu...
L'échelle de compétence actuelle abolit le zéro, estime le nul à 28% (même à 32% dans certains cas) et, dans les faits, comme le montre mon billet, tend à vouloir faire passer n'importe quel élève ayant D+.
Voilà les problèmes sur lesquels je me penche. Pas de 0 et 45% signifie «tu passes!»
Êtes-vous d'accord avec cette analyse? Avant de demander de trouver des solution et de lancer la pierre à Mme Courchesne, j'aurais aimé vous lire encore une fois là-dessus pour savoir si nous avions la même vision des chose.
Pour l'instant, je dirais que vous noyez le poisson en n'abordant pas ces points.
Ce matin, je n'ai pas le temps de vous répondre, mais je vais y revenir.
À bientôt,
JPP
Je voudrais vous transmettre mon commentaire, mais cela ne fonctionne pas.
Serait-il trop long?
JPP
Bon, je suis pour le 0 ou la mention échec si l'élève se défile de l'évaluation (avec souvent l'aide de nos jours des parents en plus).
Quant à la note de passage, il faudrait juste s'entendre. Et c'est une remarque générale sur toute l'évaluation d'ailleurs: on ne s'entend plus sur rien. C'est un véritable bordel. On ne peut plus l'expliquer aux élèves ni aux parents. Que de discussions et d'énergie perdue... Ça crée un tel mou qu'on a du mal à rester crédible... Comme si nous avions à tant en perdre!
Le système normalisé en pourcentage libre sans contrainte des critères avec une note de passage minimale donnaient au moins à tout le monde un repère clair sur lequel on pouvaient mettre les mots qu'on voulait pour l'interprétation. Un 70% signifiait différemment selon différentes perspectives, personne n'avaient besoin de justifier à pu finir le mot employé pour ne pas blesser personne.
Évidemment, comme pour le reste de la réforme, on a exporté une mode universitaire dans une contexte d'école scolaire sans évaluer les conséquences. Faut dire qu'à l'université, les travaux sont souvent corrigé par des correcteurs, pas par les profs eux-mêmes!
Quant à l'évaluation de la compétence au lieu d'un niveau de performance attendue minimal face à un programme, on ne s'est pas interrogé sur le côté praticable de la chose. Pour bien des raisons, il arrive bien souvent qu'un prof ne fasse pas tout le processus avec les élèves pendant une année. Comment se faire un portrait clair en quelques mois de trop d'élèves quand on a de la peine à les connaître tous par leur nom? Je vais encore faire des bilans de fin de cycle avec des données lacunaires, et on m'«interdit» de me fier aux notes des étapes...
Les pépins d'application de la philosophie actuelle sont trop nombreux...
Vous - M. Proulx: un peu baveusement, vous me permettrez de vous souligner que je m'attendais que vous passiez plus de temps à commenter le fait que le zéro n'existe plus en éducation. Vous demandiez un document: j'en avais trouvé un et, en pitou fier de lui, je vous le rapportais comme un journal du matin.
Moi – Je regrette. Un document non daté, non identifié, dont on ne sait le statut, ne mérite pas d’être commenté. Je vous redirai ce que j’ai déjà écrit sur ce blogue : en administration publique, tout est public sauf les dossiers personnels des élèves et des personnels. Je n’ai donc rien à dire de précis sur ce document.
Vous vous demandiez qui a pu se livrer à un tel exercice pédagogique d'abolir le zéro. Je vous ramenais quelque chose de tangible qui montrait qu'on n'était pas dans la légende urbaine. Je suis déçu... »
Moi - J'ai dû réécrire complètement mon commentaire lundi soir parce que celui que je vous ai fait dimanche soir est disparu dans le cyber espace, je ne sais pourquoi! Écrire deux fois à peu près la même chose, j’ai trouvé cela un peu long! Mais je veux bien poursuivre le dialogue.
Je prends d’abord une précaution : je ne suis pas du tout spécialisé en docimologie ou mesure et évaluation. Ce que j’en connais est né de ma pratique et des conseils fournis par mes collègues compétents en la matière.
Venons-en à ce qui nous préoccupe.
Je crois important de distinguer l’échec lui-même de la manière dont on en rend compte. Par exemple, dans le système universitaire, on indique l’échec par la lettre E ou F. E s’applique à celui qui a échoué aux travaux ou aux examens d’un cours, F à celui qui n’a pas présenté ses travaux ou n’a pas fait l’examen.
Vous connaissez bien l’échelle :
A, pour excellent, se traduit par un 4
B, pour très bon, par un 3
C pour bon, par un 2
D pour passable, par un 1
E pour faible ou échec, par un 0,5 ou échec
F pour nulle ou échec, équivaut à 0.
On remarque aisément, qu’entre chaque cote l’intervalle est de 1, sauf entre D et E.
Mais il est évident que si on choisit une échelle de 1 à 100 (j’évite ici le mot pourcentage qui m’apparaît inapproprié) et que l’on fixe la note de passage à 60, comme l’édicte le régime pédagogique, il reste 39 degrés pour différencier l’intensité du succès et 50 pour différencier l’échec. Mais c’est totalement illogique, puisque tout ce qui est en bas de passable (60%), ne peut être autre chose que l’échec! Bref, on est victime ici du choix d’une échelle inappropriée.
C’est pour cela que j’estime qu’il faut penser « qualitatif » plutôt que « quantitatif » et que l’échelle reflète cela le plus possible ! La réponse que vient de donner tel élève à telle question manifeste-t-il qu’il maîtrise ou non ce dont il est question? Si c’est non, c’est qu’il ne « passe » pas. Si c’est oui, on peut continuer de qualifier son degré de maîtrise.
(à suivre)
(suite)
Vous - Puisque vous parlez de l'université, certains de mes profs ont évalué mes travaux en cotes qui correspondaient à des notes. D'autres le faisaient en pourcentage directement. Je pouvais recevoir un zéro. J'en ai déjà eu un, je crois, avec Pierre Bourgault! Le tout était finalement converti en cote pour chaque cours pour être ensuite reconverti en moyenne chiffrée pour l'ensemble de mes cours. Donc, un nombre avec des décimales. N'est-ce pas ce que nous faisons un peu au secondaire actuellement?
Moi – J’ai connu effectivement des collègues qui compliquaient ainsi les choses. À leur décharge, il vous faut savoir que la plupart des profs d’université n’ont jamais fait d’études en éducation – c’est mon cas- et c’est hautement regrettable. Alors la mesure et l’évaluation…? Chacun se fit à la culture de son enfance, la culture commune qui n’en avait que pour les pourcentages. Mario Dumont s’en est fait l’apôtre et Mme Courchesne, hélas, l’a suivi.
Vous - Dans la même veine comparative, seriez-vous d'accord pour ne pas mettre zéro à un de vos étudiants sous prétexte qu'il n'a pas remis son travail et lui laisser autant de chances que nécessaires pour qu'il le fasse? J'aimerais bien vous lire là-dessus.
Moi – Je ne peux répondre par un oui ou par un non catégorique à votre dernière question. Mon but comme professeur a toujours été la réussite de mes élèves et non leur échec. Si en raison des circonstances à apprécier dans chaque cas, un tel n’a pas remis sa copie à temps, il peut être justifié de lui donner une chance, pas dix, assurément. Il m’est aussi arrivé à quelques reprises d’inviter un étudiant à reprendre son travail pour qu’il démontre sa compétence, ce qu’il n’avait pas réussi à faire du premier coup. Mais la mauvaise foi ne mérite aucune souplesse.
(à suivre)
(suite)
Vous - En poursuivant avec votre analogie universitaire et cinématographique, je vous signalerai que je n'ai que rarement compris comment mes profs évaluaient mes travaux à l'université …
Moi – Je vous plains. Ce n’est pas le cas de mes étudiants parce que je m’applique à leur expliquer longuement comment se fera leur évaluation et je reviens aussi souvent que nécessaire publiquement et privément pour les lunatiques! Et je ne suis pas le seul.
Vous - … et encore moins comment il se fait qu'un même film soit un chef d'œuvre pour un critique et une pure merde pour un autre.
Moi – Bien sûr, il y a de mauvais critique. Ma fille qui enseigne les arts plastiques au secondaire, enseigne précisément à ses élèves comment apprécier une œuvre. Cela s’apprend effectivement. Cela dit, avec le temps, les consensus se font autour des chefs-d’œuvre et on oublie les navets. L’école, soit dit en passant, veut faire cela : faire connaître et apprécier les grandes œuvres.
Vous - Quand est arrivée l'évaluation des compétences, vous devriez vous en rappeler, c'était un fouillis total. Les descriptifs de ces compétences consistaient en de longues phrases souvent incompréhensibles pour le commun des mortels. De plus, les niveaux de compétence relevaient de l'euphémisme. Ces façons de mesurer la compétence de nos élèves étaient l'œuvre de nos sympathiques «ogues» scolaires.
Moi – J’ai plaidé et je plaide encore 1) pour la clarté et la simplicité du discours en éducation; 3) pour le respect d’un discours professionnel spécialisé, mais sans jargon inutile; 3) pour que les programmes soient ouvertement et officiellement construits et révisés par les enseignants eux-mêmes. J’ai été surpris de n’être pas suivi par les enseignants sur cette dernière question. C’est toujours plus facile de râler sur les « ogues » anonymes que d’assumer ses responsabilités professionnelles. Désolé.
Vous - Je passe par-dessus les bonhommes sourires et les maisons pour donner comme exemple «L'élève est en attente de succès» pour indiquer qu'il était en échec. Les mots «nul» ou «échec» étaient formellement interdits, contrairement à vos exemples cinématographiques.
À cette époque, je n'ai pas entendu grands partisans de la réforme condamner de telles dérives.
Je ne suis pas un fan fini de Mme Courchesne, mais vous avouerez qu'on nageait dans le monde du roi Ubu...
Moi - Je n’avoue rien! Je constate depuis 41 ans de métier (je prends ma retraite en septembre après 18 ans de journalisme, 6 ans de fonction publique et 17 ans comme professeur) que l’éducation est, plus que tout autre, un monde où le changement est le plus difficile parce que tous les citoyens partagent en commun une culture formée dans leur jeunesse à partir de laquelle ils jugent des changements à venir. Le plus bel exemple est la difficulté qu’ont posée le bulletin et le débat sur les moyennes ou encore le faux et inénarrable débat sur les compétences transversales construit de toute pièce par la journaliste (excellente par ailleurs) Michèle Ouimet. Quelle horreur.
Vous - L'échelle de compétence actuelle abolit le zéro, estime le nul à 28% (même à 32% dans certains cas) et, dans les faits, comme le montre mon billet, tend à vouloir faire passer n'importe quel élève ayant D+.
Voilà les problèmes sur lesquels je me penche. Pas de 0 et 45% signifie «tu passes!»
Êtes-vous d'accord avec cette analyse? Avant de demander de trouver des solutions et de lancer la pierre à Mme Courchesne, j'aurais aimé vous lire encore une fois là-dessus pour savoir si nous avions la même vision des choses.
Pour l'instant, je dirais que vous noyez le poisson en n'abordant pas ces points.
Moi – À partir d’ici, je commencerais à me répéter. Ce serait abuser de votre tribune. J’ai tout dit précédemment.
J’ajouterai tout de même: entendez-vous entre enseignants sur les questions pédagogiques et battez-vous.
Mille mercis
Fin., Enfin!
M. Proulx: vous me permettrez de revenir avec un commentaire plus complet ce soir.
Évidemment!
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