17 juillet 2009

Les subventions à l'école privée...

Le Journal de Montréal revient, dans la chronique Un faux problème de Benoit Aubin, sur l'éternel débat des subventions à l'école privée. Ce dernier affirme que la société, en subventionnant l'école privée, offre la possibilité aux parents de choisir le type d'école pour leur enfant, à condition de «payer le reste s'ils le veulent. Ou le peuvent.» Il affirme que de cesser de subventionner l'école privé serait un nivellement par le bas.

Si, pendant une partie de sa chronique, M. Aubin fait la part des choses en indiquant qu'il existe de bonnes écoles publiques et des écoles privées avec des lacunes, la fin de son texte ne peut s'empêcher de retomber dans les clichés dans lesquels les premières en ressortent inévitablement écorchées. En voici quelques-uns.
-Affaiblir le privé pour qu'il cesse de concurrencer le public, c'est un peu, comme au hockey, envoyer un plombier sur la glace pour accrocher le meilleur patineur de l'équipe adverse, non?
- Cesser de subventionner un secteur de l'éducation qui a le vent dans les voiles pour mieux faire paraitre l'autre découle de la même vieille approche du nivellement par le bas (...)
(...) pour rendre les écoles publiques aussi souples, efficaces, adaptées et responsables que celles du secteur privé.

Difficile de lire ce texte sans penser en effet que, dans l'esprit de M. Aubin, l'école publique est moins bonne que l'école privée.

Dans tout ce débat, il y a des arguments, de part et d'autres, qui m'écoeurent profondément.

Du côté de pro-privé, il y a des phrase que je ne suis plus capable d'entendre. De façon générale, l'école privée n'est pas accessible à tous. Il faut cesser d'affirmer que tous les parents peuvent y envoyer leur enfant s'ils le veulent vraiment. De même, il est méprisant d'affirmer que l'on va niveller par le bas si on abolissait les subventions au privé. Cela revient à dire qu'il y a de bons élèves au privé et que de la marde au public. Et qu'il ne faudrait pas contaminer ces chers enfants performants...

Du côté du pro-public, je ne suis plus capable d'entendre certains porte-paroles se tirer dans le pied en affirmant qu'il faut ramener les «bons» élèves dans les classes. Les autres, ceux à qui j'enseigne, sont quoi? Des débiles? Dire qu'on veut rehausser le niveau des élèves, ramener la performance dans le secteur public revient à indiquer qu'actuellement, la situation du public est pitoyable.

Je suis tanné que ce débat se fasse en termes de bons et de mauvais élèves, de bonnes et de mauvaises écoles.

La première véritable question, quant à moi, est: est-ce le rôle de l'état de subventionner une partie de ces services privés qu'il devrait normalement offrir à tous les jeunes? Si on reportait cette situation dans un autre domaine d'activités, on verrait tout de suite que la réponse serait non pour bien des Québécois.

Par exemple, seriez-vous en faveur que l'État paie 60% des frais médicaux de ceux qui ont les moyens de faire appel à des cliniques privées en payant 40% de la facture? Pourquoi la réponse est-elle différente en santé d'en éducation alors qu'au fond, on est devant un contexte identique?

La deuxième question a déjà été posée il y a quelque temps lorsqu'on a parlé de ghettoïsation de l'éducation. Certains parents choisissent le privé pour éviter que leur enfant aille à l'école publique. Est-ce normal que l'État subventionne cette pratique ségrégationniste? Les termes en italique sont un peu forts, je le concède, mais pas insignifiants. Encore une fois, si on reporte cette question dans une autre, la réponse est non pour plusieurs Québécois.

Par exemple, êtes-cous d'accord avec le fait que l'État québécois subventionne des écoles religieuses? Oui, je sais, les écoles religieuses sont liées à des valeurs et des croyances personnelles et les écoles privées sont assez laïques. Mais les parents qui envoient leur enfant au privé ne le font-ils pas au nom de certaines valeurs? L'État doit-il subventionner les choix personnels des individus?

Bref, je réfléchis. Je suis ouvert à la discussion, pas à l'injure.

12 commentaires:

simpledream a dit…

Dans le domaine de la santé, si tu choisis des soins au privé, tu paies de ta poche. Ce privé-là n'est pas subventionné.

Dans le milieu scolaire, si tu choisis d'envoyer ton enfant au privé, paies de ta poche aussi. Et cessons de subventionner ce privé-là.

Parents, assumez-vos choix!

bobbiwatson a dit…

La définition no 4 du mot PRIVÉ dans Le Petit Larousse 2009 est savoureuse: "Qui ne dépend pas directement de l'État (par oppos. à public, à étatique). École privée. Secteur privé."

QUI NE DÉPEND PAS DE L'ÉTAT: ais-je besoin d'en dire plus ? A-t-on besoin de s'étendre sur le sujet?

On aurait peut-être avantage à fournir des dictionnaires récents à nos décideurs!

Mam'Enseignante a dit…

Bobby: Fournir des dictionnaires récents?? Ben voyons, ils préfèrent nettement les chaises neuves et confortables! C'est important leur confort pour bien travailler... dictionnaire? c'est pour les secrétaires voyons!

Prof Malgré Tout a dit…

C'est cruel de parler de dictionnaires récents à un prof de français au public.

bobbiwatson a dit…

PMT : Voilà une bonne raison pour qu'on cesse de financer le privé! Les pauvres profs de français du public pourront enfin avoir les dictionnaires qu'ils espèrent depuis la nuit des temps et les désirs de Prof Masqué ainsi comblés.

Jonathan Livingston a dit…

En tout cas, si on coupe les subventions au privé, bien de ces écoles deviendront publiques! A voir comment il est impossible d'élever les frais dans le privé pour palier à certaines difficultés budgétaires réelles de certaines qui aboutissent toujours à des concessions salariales des profs du privé... A moins que ce ne soit qu'une rhétorique pratique pour les négos!

Dans certaines écoles privés, je ne suis pas sûr que les parents paient le 40% supplémentaire... vraiment pas. Mais quand on fait le ménage en fin d'année, on trouve des dictionnaires de l'année abandonnés!

Bon, d'un point de vue prof, les écoles privées que j'ai faites contiennent un peu moins de groupes difficiles qu'au public... A peine moins fainéants... Des petits cons et des petites connes pour cochonner l'atmosphère de classe, il y en a aussi là... Bref, faut aussi jongler sur une patte souvent pour gérer sa classe... On a un peu plus les parents dans les pattes ou des directions nerveuses... autant de politique bref et pratiquement partout la hantise de fermer boutique... et une peur de se retrouver dans l'horreur du public... Donc faut donner du service, de la plus-value... J'ai un peu de mal avec le clinquant de certains galas et l'esprit élitiste manifeste dans certain milieu. Je ne suis pas de ce monde.

En même temps, parfois ça donne des moyens à certains dévoués admirables de la profession qui ont des ailes de mégalos, moins de contraintes administratives peut-être... Enfin, tant que ça parait bien, c'est tout ce qui compte ici ...

Personnellement, on paie des impôts et des taxes pour recevoir un certain service de l'état jugé nécessaire pour le bien de tous. L'école gratuite pour tous est de ceux-là.

Mais bon la privatisation de l'État est la vision à la mode d'une certaine minorité aux commandes des affaires... Au public, c'est plus difficile de se remplir les poches en étant gestionnaire, on a un code d'éthique à suivre... tandis qu'au privé, c'est privé!

Anonyme a dit…

J'ai été étonné de trouver à Trois-Rivières une concentration fabuleuse d'école privée pour une ville pas si grosse que ça. Rien de trop beau pour la classe ouvrière...

Je ne signe pas!

L'engagé a dit…

J'admire l'effort du PM pour recadrer le débat sur le rôle de l'État.

Toutefois, j'aimerais simplement ajouter que les parents qui envoient leurs enfants à l'école privée payent déjà leur part d'impôts pour financer le système public. Le privé offre en quelque sorte une « plus value » qu'il serait déraisonnable de faire payer à l'ensemble de la population québécoise si l'école privée disparaissait.

Si l'État cesse de subventionner le privé, il n'aura d'autre choix que d'offrir un crédit d'impôt pour soulager les familles qui paient déjà leur dû en terme de taxes, sauf que ce faisant, la masse globale d'argent alors disponible pour financer le public s'en trouvera diminué (car en définitive un diplômé du privé coute moins cher à l'État).

Le système actuel ne permet donc pas au public de faire l'économie «d'élèves à problèmes», mais permet à l'État une certaine économie monétaire en ne finançant que partiellement certaines écoles dites privées. On est donc dans une impasse, car une part importante de la population juge l'éducation trop importante pour confier ses jeunes à un système en laquelle elle n'a simplement pas confiance, or cette crise de confiance provient de ce que la majorité de la population ne se préoccupe pas d'éducation. Cette querelle dissimule donc une fracture civile importante.

Une grogne généralisée forcerait l'État à financer correctement l'éducation et à opérer des changements pour améliorer le système. Les gouvernements achètent donc la paix en offrant à ceux qui sont le plus susceptibles de grogner de subventionner leurs écoles. Ce « marché » lui revient moins cher.

Sous cet angle, le problème n'est donc pas l'école privée, mais l'incapacité de la population à reconnaitre l'importance de l'éducation. En ce sens, même si 70% des écoles étaient privées, avec une population vigilante et soucieuse de l'éducation des jeunes, l'État devrait quand même offrir un système de grande qualité.

En conclusion les parents qui se soucient de l'éducation de leur progéniture campent devant les écoles publiques particulières ou se saignent pour l'envoyer au privé. La population ,en général, s'en fout, alors les seuls qui peuvent constater que le système public a besoin de plus de ressources sont justement les acteurs du système public. Toujours parce que la population s'en fout, ces acteurs ne sont pas écoutés, on tire des «unes» catastrophiques à l'occasion puis on enterre le débat.

Le problème de l'éducation au Québec, c'est donc que ce n'est pas assez le problème des Québécois. Le privé est le palliatif pour ceux qui voudraient que cela le devienne, mais qui, dans l'intervalle, veulent ce qu'il y a de mieux pour leurs enfants.

Charles

Le professeur masqué a dit…

Charles: «Le problème de l'éducation au Québec, c'est donc que ce n'est pas assez le problème des Québécois.» Mauditement vrai!

bobbiwatson a dit…

"Toutefois, j'aimerais simplement ajouter que les parents qui envoient leurs enfants à l'école privée payent déjà leur part d'impôts pour financer le système public."

Mais les impôts payés n'équivalent pas à 60% du budget des écoles privées. Une juste mesure s'impose!

Loulouanthropo a dit…

Le public en tant que tel ne devrait pas exister. Il faut simplement donner l'argent aux parents selon le nombre d,enfants et qu'ils choisissent la meilleure école. Il n'y a pas de Monopole de l'Alimentation pourquoi faudrait-il qu'il y ait un Monopole de l'Éducation avec un pouvoir disproportionné et des résultats décevants.

Il faut séparer l'État et l'école.

cendrillon a dit…

Loulouanthropo

Vous vivez sur quelle planète? Nous, on est sur la terre!