25 février 2009

S'exiler en Ontario pour enseigner

Depuis quelques années, avec les modifications apportées au bac en enseignement (augmentation de trois à quatre années d'études avec impossibilité de «recycler» un bac dans une discipline enseignée à l'école), on a remarqué que certains étudiants allaient compléter leur formation en Ontario. Plus simple, plus rapide, moins de niaisage.

On a récemment modifié cette situation avec l'introduction de nouvelles formations (maitrise qualifiante à distance, par exemple).

Mais ce que l'on remarque surtout, c'est plusieurs Québécois vont également enseigner dans la province voisine. Le Soleil indique que ce nombre est passé de 1 868 à 2 775 en 10 ans, une augmentation de 50%.

S'agit-il de jeunes diplomés qui décident de rester sur place après leur formation ou d'enseignants déjà qualifiés qui s'exilent de la sorte? Pas de réponse.

Une pénurie d'enseignants francophones, une plus grande rapidité à obtenir un poste permanent et un meilleur salaire pourraient expliquer ce phénomène: «Selon les statistiques du ministère de l'Éducation, le salaire moyen des enseignants québécois était de 55 200 $ en 2004-2005 comparativement à 71 000 $ pour leurs collègues ontariens. Un écart de... 29%. Il faut toutefois préciser que les chiffres provenant de l'Ontario comprennent aussi les directeurs d'école et les professionnels travaillant auprès des élèves.»

Pendant ce temps, au Québec, nos potentats administratifs disent que les coffres sont vides pour payer correctement les profs ou les équiper mais s'offrent des petits plaisirs... comme le révèle cet article du Journal de Montréal.

Allez surtout à la fin du texte et tentez de ne pas hurler. Un décor pour le dernier CA d'un cégep... Il faut vraiment vivre sur une autre planète! Sans vouloir offusquer personne, on se croirait dans certains pays du Tier-Monde ou l'argent n'existe que pour les puissants.


Sources:
http://www.cyberpresse.ca/le-soleil/actualites/education/200902/24/01-830787-plus-de-profs-du-quebec-en-ontario.php
http://www.canoe.com/infos/quebeccanada/archives/2009/02/20090225-090900.html

14 commentaires:

Jonathan Livingston a dit…

Le propre de la gestion et les priorités...

Il y a quelques années, manquant de photocopies (mon compte était épuisé, arrivé en cours d'année, on ne m'avait pas informé de la limite personnelle pour faire du matériel) pour aider mes jeunes en difficulté en maths (le genre de jeunes avec qui il faut rebondir vite), je suis allé trouver le directeur de l'école pour trouver une solution. Il était absolument impossible qu'on m'alloue des photocopies de plus et j'ai alors sorti 20 $ de ma poche et l'ai présenté à ce monsieur bien propre pour lui expliquer que mes jeunes ont besoin de matériel adapté et que j'allais perdre un temps ridicule à sortir de l'école pour aller faire du montage. Il n'a pas voulu prendre mon 20 $, parce qu'il n'y a pas de poste comptable prévu pour ce genre de contribution volontaire... J'ai un peu insisté évidemment soulignant le ridicule de la situation... Il m'a suggéré de m'acheter un photocopieur. Il y a quelques années, la Chine et Bureau en Gros ne les donnaient pas encore... De toute façon, c'est toujours ridicule à mon sens de ne pas être capable de me donner quelques dollars de photocopies supplémentaires pour finir une année... alors que tout l'équipement est bien là sur place pour me permettre de faire mon ouvrage.

Voilà j'avais peut-être besoin de moins de 10 $ de budget pour finir l'année et ce monsieur bien propre chipotait pour des dépassements de photocopies, alors qu'il devait bien sûr se payer comme tous les autres ce genre de privilège à même d'autres enveloppes prévues pour la gestion.

Non, je n'ai pas couru comme un dingue, je n'ai pas acheté de photocopieurs, j'ai fait de mon mieux dans les conditions et oui j'ai sûrement envoyé au redoublement quelques élèves qui auraient pu être sauvé avec un peu plus de souplesse pédagogique qu'un accès au photocopieuses permets... Pour des groupes d'élèves en difficulté, c'est un besoin...

Bon bien sûr, le monsieur propre ne m'a pas rappelé pour finir le congé de maternité l'automne suivant... J'ai sûrement présenté trop d'échecs dans le dossier qu'on a majoré pour éviter des discussions avec des parents...

Je manque de souplesse parfois...

Anonyme a dit…

L'Ontario pour pratiquer son anglais, peut-être ? et ainsi pouvoir aller étudier aux USA après ?
C'est peut-être juste le fric....

bobbiwatson a dit…

Ils ne doivent pas avoir d'élèves "ordinaires" en Ontario: c'est probablement pourquoi les profs sont si attirés par cette province. Ils doivent avoir encore des élèves "regular".
J'ai appris aujourd'hui que le terme "élève régulier" a été changé pour "élève ordinaire" parce que régulier est un anglicisme. Plus catholique que ça tu meurs!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

Anonyme a dit…

Je crois tout simplement que les conditions de départ sont probablement plus intéressantes en Ontario (genre que tu peux choisir le niveau et la matière que tu VEUX enseigner et non pas qu'on VA T'IMPOSER).
Après mon bac en enseignement, je voulais pas me faire trimbaler d'une école à une autre, d'une matière à une autre (pour laquelle, bien sûre, je n'aurai pas étudié...).
J'ai décidé de passer un concours pour aller enseigner au Nunavut...Je n'ai pas été choisi et j'ai changé par la suite de profession...

Anonyme a dit…
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Anonyme a dit…

Ma soeur enseigne en Ontario, elle avait un Bacc en communication et après avoir eu quelques contrats elle a vécu une période de chômage. Elle est allé faire sont Teaching a Ottawa (au Québec, elle aurait dû faire un bacc de 4 ans). Elle a eu une offre de poste permanent dans une des écoles où elle avait fait un stage.

Pour revenir au Québec, il lui faut accepter de faire de ne pas avoir de permanence avant plusieurs années et un salaire moindre à ce quel à présentement de nombreuses années après qu'elle ait sa permanence.

Les nouvelles formations au Québec sont encore très jeunes. La formule de l'Ontario est éprouvé et le diplome est reconnu dans toutes les provinces.

Un autre facteur que vous ne mentionner pas et qui a mon avis joue un rôle majeur : le système semble fonctionner beaucoup mieux en Ontario. Pas de réforme baclé à mettre en place. Les professeurs ont plus de ressources pour faire des photocopies et autres.

bobbiwatson a dit…

J'imagine qu'au Nunavut aussi ils sont en manque de bons profs! Qu'est-ce qu'on attend pour récupérer la donne de l'Ontario? Sauf la langue anglaise :)

Étienne a dit…

Comme société, on ne valorise l'école que comme moyen de parvenir à une fin précise : la réussite professionnelle.

L'éducation, la culture, les arts (et je dirais la santé), on s'en moque, sauf si c'est obligatoire dans notre parcours.

Pourtant, on réussit mieux en droit si on fait du théâtre, les math sont faciles si on est initié à la musique et les arts plastiques permettent d'assimiler plus facilement des abstractions scientifiques. Sans oublier les sports qui nous remettent d'aplomp.

C'est bête : dans une perspective de réussite purement commerciale et corporative, l'éducation, dans une tradition humaniste, est un investissement qui rapporte beaucoup. Et dans une perspective purement gratuite, on gagne santé et sérénité à être plus éduqué. Les motifs de valoriser l'éducation sont donc doubles.

Notre société n'a aucune raison de se dévaloriser en rejetant l'éducation, sauf si elle ne s'aime pas. Un premier signal de la part de ceux qui oeuvrent en éducation pourrait consister à militer pour une reconnaissance significative de la scolarité sur le plan salarial et de l'ancienneté. Ça veut dire confronter le gouvernement à propos de son bac. en enseignement.

Ça serait un acte de foi : abrogeons l'échelle unique. Ça veut dire aussi de cesser de protéger les vieux membres. Le gouvernement préfère la situation actuelle, il sauve beaucoup, mais il massacre l'avenir de plus d'une génération : il est coupable du lent suicide la de la société.

Militer, comme prof, pour la reconnaissance d'une scolarité de deuxième et de troisième cycle (alternant pédagogie et discipline enseignée), dire que cette dernière vaut un salaire plus élevé. Exiger que l'État paie une part de ce perfectionnement, c'est affirmer que nous croyons en l'éducation, c'est gagner le respect des élèves et des parents en leur disant : regarde, ça vaut la peine d'étudier, je gagne plus avec un certificat, un peu plus avec un bac, encore plus avec une maitrise et beaucoup plus avec un doc. Si, acteurs dans ce milieu, nous ne croyons pas assez en la valeur des études, pour ne pas oser changer la mentalité fossile de nos syndicats (pour que ceux-ci se mettent à travailler pour cette reconnaissance) comment voulez-vous que le reste de la société nous prenne au sérieux? Nous ne nous respectons pas nous-mêmes. Si nous qui travaillons en éducation ne nous respectons pas, nous ne respectons pas non plus l'éducation. Si nous ne donnons pas l'exemple, comment voulez-vous que la société valorise l'éducation? Nous sommes les modèles, et nous courbons l'échine.

Tant que cette situation de mépris perdurera, nous aurons de graves problèmes. Le jour où nous nous respecterons un peu plus, les choses commenceront à bouger pour le mieux.

Jonathan Livingston a dit…

Bobbi, tiens voilà enfin l'explication pour la classe ordinaire. Wow ça doit bien faire plus d'un quart de siècle que les écoles utilisent un anglicisme malsain sans s'en rendre compte. Vive la bienséance!!!

J'étais, semble-t-il, hors sujet dans mon premier commentaire. Disons que je réagissais au second article sur les privilèges des administrateurs.

@ Étienne

Désolé, j'ai été élevé dans la logique des diplômes, mais j'ai déchanté depuis et je ne crois pas que plus de papiers va améliorer les choses dans nos écoles. J'ai constaté à l'évidence trop de vacuité systémique de la formation en éducation, pire qu'en psycho, c'est dire... pour penser qu'avec un doctorat on devient de meilleurs praticiens. C'est peut-être un préjugé, mais bon il est connu que les «doctorats» et les «maîtrises» sont souvent des profs qui n'ont souvent pas enseigné longtemps et qui finissent par nous dire comment enseigner...

L'enseignement est un art à apprendre en situation surtout. Sa qualité dépend surtout de celui qui nous le passe. Dans la loterie, on n'est pas toujours bien servi. Pour ma part, j'ai dû apprendre sur le tas... et c'est dans ma probation, à l'époque, qu'on m'a le plus aidé. Mais ce n'est pas ou plus dans les mœurs de demander au milieu de former les gens... On préfère refiler la facture et aussi on peut afficher un suspicion d'incompétence qui aide au rapport de force... Avec l'âge, on en voit...

Quant au problème de l'école, il vient plus à l'évidence d'un faille stratégique multi-factorielle cachée derrière une idéologie indiscutable que d'un manque de formation. On aimerait bien en plus qu'on adhère à l'idée de plus de formation et à d'autres idées bizarres comme l'ordre professionnel pour qu'on paie de notre poche nos formations continues et qu'en plus on paye pour se faire dévaluer et faire des examens de perfectionnement. C'est toujours du «management» de bas étage qui vise à gérer plutôt qu'à régler des problèmes. Je n'ai jamais compris en quoi mieux manier la langue de bois de l'idéologie me permettra de mieux enseigner... Mais dans un monde de bureaucrate ou de l'entreprise restructurée qui fait appel à la sous-traitance, c'est un facteur d'avancement...

Enfin, en éducation, j'en arrive à penser que l'avenir est dans la gestion du melting pot multiculturel, la tradition des humanités perdurera pour l'élite en privé bien sûr. D'ailleurs, cette mode de réforme vient des US... Évidemment, je vis de la détestation des autres comme tout sectariste qui se respecte dirait de moi un Sarcozy, bien conseillé par un Desmarais amis fédéraliste, mondialiste.

On croit que l'homogénéisation des cultures va pacifier le monde, espérons-le!

Mais bon, je suis une mauvaise langue et j'ai trop l'esprit critique, je m'en confesse...

Quant aux salaires, il est fonction de la richesse collective (elle baisse), des valeurs (contrôlés par l'endoctrinement médiatique de plus en plus) et des rapports de force (la classe moyenne perd pied) dans une société. Je ne suis pas optimiste... Depuis fort longtemps, on sait que les anglophones protestants plus en moyen mettent plus d'argent en éducation... Ca se vérifie dans des comparaisons budgétaires entre province...

Ici, on a encore le souvenir du clergé catholique dans l'image du prof, c'est dur pour la profession, surtout qu'on a plus sa poigne!

@ Karakorum: la polyvalence au Nunavut est un prérequis... Les écoles sont petites, les tâches multiniveaux et multimatières bien évidemment... ¨Ca ne pouvait pas coller...

Anonyme a dit…

On en fait du chemin : on commence par les profs québécois en Ontario et on est maintenant dans la recherche de moyens pour rehausser la profession.

@ Jonathan Livingston

J'ai envie d'approuver toutes vos nuances, mais je demeure convaincu qu'une part du respect de l'école qui s'est évanoui provient de ce que nous avons baissé les bras dans l'exercice du rapport de force que vous avez évoqué.

Si d'autres membres de la société luttent pour leurs intérêts, nous avons abandonné les nôtres et l'école s'en ressent. Si les diplômes ne sont que de la «pacotille», les connaissances et les talents qu'ils représentent le sont donc aussi. Alors si les diplômes universitaires ne valent rien, pourquoi un diplôme collégial vaudrait quelque chose et finalement pourquoi diantre se farcir l'enseignement secondaire?

Si l'enseignement tient d'un art, le baccalauréat permet d'appréhender la matière à transmettre, la maitrise à s'initier à ses arcanes et le doc, à y contribuer d'une manière significative. L'artiste saura donc avec brio communiquer et créer des situations d'apprentissage encore plus riches et profondes s'il comprend subtilement ce qu'il enseigne, pas seulement la manière d'enseigner.

Un médecin ne dit pas «il y a du sang qui coule à l'intérieur», non, il parle «d'hémorragie interne». Ce respect du médecin, nous en aurions des fragments si nous signifions fièrement, à l'aide d'un langage spécialisé, que nous détenons cet «art» dont vous parlez. Sinon, tout le monde peut être prof, et nous ne valons effectivement plus grand-chose. Enrichir notre pratique d'un vocabulaire et de concepts précis, c'est nous donner le moyen d'interventions plus vastes. C'est ce que l'on apprend justement aux jeunes, la maitrise du langage agrandit celles de la pensée. Et nous nous la refuserions?

Si nous ne faisons qu'étudier notre discipline, sans égard à la pédagogie, nous nous faisons dire quoi faire par des fonctionnaires ignares où par des conseillers suffisants. Quand vous devenez expert dans votre discipline ET en pédagogie, vous pouvez renvoyer le MELS, les directeurs et les commissaires à leurs devoirs.

Voilà pourquoi je pense que la valorisation de notre profession passe par la reconnaissance de la scolarité.

Je rêve que les profs administrent un jour eux-mêmes le ministère, les C.S., les cégeps et les écoles. Pour y arriver, nous devrons militer pour permettre à un prof de français de faire une maitrise à l'ÉNAP et de garder son poste.

Je vais être direct : on se plaint des ministres, des sous-ministres, des fonctionnaires et des patrons qui ne savent pas de quoi ils parlent, car ils ne sont pas dans nos classes. Cependant, on n'entre pas dans leur champ de compétences comme nous devrions le faire. On devrait se farcir quelques un de leurs diplômes et leur prouver qu'on peut désormais faire le travail à leur place. Ils commenceraient à nous craindre et s'ils nous craignaient, il nous écouteraient. S'ils nous écoutaient, nos écoles seraient moins pénibles à vivre et nos jeunes seraient moins mal en point.

Pour y parvenir, il faut d'abord qu'à l'interne nous reconnaissions l'expertise de nos membres les plus scolarisés et nous devons ensuite gagner la bataille pour que l'État reconnaisse la valeur ajoutée de leur travail. À terme il y aura un fort incitatif au perfectionnement et c'est ainsi que nous noyauterons l'enseignement supérieur et les centres décisionnels. Qu'un prof puisse consacrer une journée par semaine à l'obtention d'un autre diplôme et qu'on le remplace ce jour-là par un stagiaire (on les exploite de toute façon), ainsi nous n'aurons plus de prof au bout du rouleau.

Pour l'instant c'est impossible, mais ça le deviendrait si nous avions plus de pouvoir.

Dans 20 ans, j'aimerais qu'on véhicule l'idée qu'un véritable changement est survenu dans la société parce que les profs, écoeurés en 2010, se sont levés et ont exigé un peu de respect, qu'ils ont d'ailleurs commencé par se respecter eux-mêmes.

Je sais... je rêve.

Étienne

Le professeur masqué a dit…

Etienne: tu sais, il y a quelques années, on renégociait une convention collective et un des moyens de pression qui a été proposé a été de ne plus tolérer l'impolitesse et l'intimidation en classe de la part des élèves. Je suis allé dénoncé cette absurdité au micro, mais ce jour-là, j'avais compris à quel point les profs acceptaient des comportements inacceptables sans rien dire. Quand se faire respecter devient un moyen de pression...

Anonyme a dit…

Un peu tard, mais une précision intéressante sur le "pourquoi les enseignants bifurquent vers l'Ontario". Pour avoir enseigné en Outaouais et avoir été tenté de passer du côté obscur, ma principale raison qui me motivait à enseigner à Ottawa, ce n'était pas le salaire (qui aurait plus élevé), ni la permanence (plus facile à obtenir), ni la présence d'un Ordre (je suis plutôt pour), mais le simple fait que les enseignants sont respectés de la part des enfants et des parents... Oui, le respect... pathétique d'en arriver à choisir un emploi en fonction de cela.

Le professeur masqué a dit…

Maratre: je me permets cette anecdote. Tu sais que tu arrives en Ontario uqnd les automobilistes respectent les passages piétonniers. Au Québec...

Alors, je n'ai pas de difficulté à croire ce que tu dis.

Vincy a dit…

Le niveau des professeurs laisse à désirer, surtout dans les écoles francophones. Les québécois l'ont compris et viennent tenter leur chance en ontario et dans tout l'ouest du Canada. Pour dire vrai beaucoup d'enseignants en Ontario ne méritent pas d'enseigner.