Ce matin, deux séries de textes à mettre en relation.
La première (ici et ici) explique, et il n'y a rien de nouveau là-dedans, que certains élèves peuvent aller au secondaire sans réussir leur sixième année du primaire. En effet, selon la Loi sur l'instruction publique, un élève qui a échoué une année au primaire ne peut doubler une seconde fois. Il suit alors la cohorte à laquelle il appartient jusqu'à la sixième année. Cet élève travaille idéalement avec du matériel et des évaluations modifiés. Bref, c'est au prof de s'occuper de l'élève en difficulté intégré dans son groupe. De l'élève? Non, des élèves, devrait-on dire. Et tant pis si les ressources manquent et que le groupe devient ingérable.
Dans certaines écoles de ma commission scolaire, on a quelque peu triché en regroupant ces élèves dans les mêmes groupes quand cela était possible pour des raisons d'homogénéité et de fonctionnement. On a alors créé deux catégories de classe: les «correctes» et les «autres», un peu comme si on revenait à des cheminements particuliers. Le hic, c'est que, pour des raisons mathématiques, des élèves sans difficulté se retrouvent parfois dans ces classes «spéciales». Imaginez leur année...
Le père d'un élève ayant un retard académique s'interroge: «Le système scolaire permet à notre enfant de poursuivre un cheminement scolaire régulier malgré le fait qu'il soit continuellement en situation d'échec. Mais ce n'est pas grave, selon la commission scolaire, car notre garçon sera en cheminement particulier au secondaire. Alors pourquoi ne pas lui offrir tout de suite ce cheminement, afin qu'il consolide dès maintenant ses apprentissages?»
Ce que ce père ne comprend pas, c'est qu'officiellement, son enfant est supposé être «en cheminement particulier» au sein même d'une classe régulière grâce au prof qui adopte une pédagogie et une évaluation différenciées ainsi que grâce à des ressources spécialisées. Or, les ressources spécialisées manquent...
Là où cela devient rigolo, c'est que certains élèves ayant les acquis de ceux de quatrième année du primaire réussissent à entrer au secteur régulier au secondaire. Rigolo, mais pourquoi? Lisez la suite.
Dans une deuxième série de textes (ici et ici), on apprend que certains enseignants du secondaire se disent victimes de pression pour qu'il y ait moins d'échecs dans leur classe. Il faut savoir qu'avec la loi 88, adoptée en juillet 2009, les commissions scolaires composer avec les «conventions de partenariat» où elles se sont engagées à atteindre un certain niveau de réussite. Selon le syndicat d'enseignement de la région de Québec (SERQ), les enseignants dont les groupes présentent un taux d'échecs plus élevés seraient alors rencontrés pour trouver une solution à cette situation.
«On entend beaucoup de profs raconter qu'ils se sont fait dire de baisser leurs exigences. On leur dit qu'ils peuvent rencontrer des conseillers pédagogiques pour voir comment ils peuvent réduire les exigences lors des évaluations. C'est pas nouveau, mais ça va être encore pire avec les conventions de gestion. Ça inquiète énormément les profs», a indiqué le président de la SERQ, Denis Simard.
Bernard Tremblay, directeur des relations de travail à la Fédération des commissions scolaires du Québec (FCSQ), affirme: «Quand on gère le changement, il y a toujours des résistances. Mais les appréhensions des enseignants reposent davantage sur des perceptions que des réalités. Ça ne devrait pas être vu comme quelque chose de négatif ou menaçant, il ne faut pas que le prof se sente mis au banc des accusés. Mais la direction a un rôle de supervision à jouer là-dedans.»
Plusieurs remarques:
- comment atteindre des objectifs de réussite au secondaire avec des élèves qui, on l'a vu, ne devraient même pas être dans une classe régulière?
- comment atteindre des objectifs de réussite au secondaire sans l'ajout de nouvelles ressources?
- comment se fait-il que les directions d'école rencontrent souvent les profs dont les groupes ont de nombreux échecs et pas ceux où tous les élèves passent alors qu'ils n'ont rien appris sous la férule complaisante d'un prof qui a compris comment éviter les rencontres avec la direction? Parce que le message qu'envoie très clairement le système d'éducation actuellement est aux profs celui-là: «Fais-les passer et refile le problème au suivant!»
Je plains mes collègues de cinquième secondaire qui se ramassent avec toute cette merde et la pression pour faire réussir les élèves aux examens du MELS.
8 commentaires:
Le prof d'université: mes étudiants sont mal préparés. Le CEGEP a pas fait la job
Le prof de CEGEP: mes étudiants ne savent rien. Le secondaire a pas fait la job
Le prof du secondaire: mes étudiants ont trop de retards d'apprentissage. Le primaire a pas fait la job
Le prof de primaire: mes élèves sont pas prêts à pousser un crayon. Le préscolaire a pas fait la job.
Le prof du présco: mes élèves sont pas prêts à vivre une entrée réussie à l'école. Les parents ont pas fait la job.
La mère: j'ai fait mon gros possible. Le père a pas fait la job
Le père: j'ai toujours su qu'y était pas de moé c't'enfant là.
Tout le monde ensemble: c'est la faute au ministère pis aux commissions scolaires
C'est ça que j'appelle de l'irresponsabilité revendiquée. On est loin du mot de Françoise Dolto: "C'est à celui qui voit d'agir".
M. St-Pierre: je suis en partie d'accord avec vous. Chacun a un effort à fournir.
Par contre, que peut faire une prof du secondaire avec une classe de 32 avec plusieurs cas intégrés? Il veut bien agir mais avec quel moyen? Voilà une limite dont on doit tenir compte. Et s'il doit agir contre l'avis de ses supérieurs qui nient les problèmes auxquels il fait face, il fait quoi?
Ici, on ne parle pas d'individus mais d'un système qui finit par structurer du décrochage.
C'est tellement ce qui se passe! C'est mongol comment on nous demande de diminuer nos exigences, de prendre tous les moyens possibles pour faire réussir le plus grand nombre d'élèves possible.
Le problème, c'est que ça nuit plus souvent qu'autrement. Un élève qui suit difficilement le rythme d'un groupe continuera à éprouver des difficultés tout au long de son cursus et ça, ce n'est pas lui rendre service. En bout de ligne, il réussira peut-être sur papier, mais dans les faits, il croulera sans doute sous le poids du retard académique accumulé avec le temps.
"C'est mongol...". Mongol est le nom des personnes vivant en Mongolie. On a aussi attifé de ce nom péjoratif, les enfant souffrant de trisomie. Si j'avais un enfant dans cette situation, je n'apprécierais pas le qualificatif,
"Je plains mes collègues de cinquième secondaire qui se ramassent avec toute cette merde et la pression pour faire réussir les élèves aux examens du MELS. "
Oui, je les plains aussi, PM, et je me plais comme enseignante, mais je plains surtout les élèves qui ont été pris et qui sont encore pris dans ce foutu système. Quel gâchis...
Monsieur Proulx : ah bon!? Heureuse de l'apprendre, je croyais que le nom des habitants de ce pays était mongolais ou encore mongolinois...
Par chance : la seule nomenclature que connaisse et utilise pour définir les gens atteints de trisomie est : trisomique.
Ce qui est bien dans le monde de la gestion et de la gouvernance, c'est de décréter des lois, des règlements, des réformes, maintenant des conventions de gestion urgentes et immuables,avec lesquelles il va falloir vivre. Ça simplifie les discussions.
C'est bien tout ça, au final, on a biffé le premier des trois mandats de la mission de l'école: instruire, socialiser, qualifier.
Le D.E.S. devient un beau diplôme de participation et l'école, une belle garderie éducative.
Question de perception!
Évidemment, on avait tous choisi ce métier pour faire les clowns qui se font varger dessus de cette comedia del arte.
Pas juste les jeunes qui vont décrocher...
On va finir s'expatrier en Mongolie où le gazon est sûrement plus vert avec cette école toute gentille pour diplômer les trisomiques!
Un Mongol en devenir!
@ Mère au foyer.
Je ne vous suis pas!
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