20 septembre 2007

Un autre mauvais test révélateur

Le mauvais journalisme est comme la bêtise humaine: il est universellement répandu. Ce matin, c'est Cyberpresse qui mérite la palme avec son quiz intitulé: «Êtes-vous plus brillant qu'un jeune de premier secondaire?»

Notons tout d'abord l'emploi du terme «brillant». Dix petites questions pour déterminer si vous êtes «brillant» ou non. Pas de grande marge d'erreur, on en conviendra. On sent aussi une petite volonté de concurrence avec le Journal de Montréal avec son sondage sur les parents et les devoirs.

Ensuite, on découvre que les questions posées proviennent d'un livre visant à préparer les jeunes aux tests d'entrée des écoles privées ou des programmes d'études internationales. On ne parle plus de n'importe quel élève du secondaire, mais pourquoi ne pas sombrer dans la confusion des genres tant qu'à y être!

Mais ou Cyberpresse se surpasse, c'est dans la qualité orthographique de ce test. On jugera.

  • Le titre lui-même soulève des interrogations. À la page d'accueil de Cyberpresse, on indique correctement : «Êtes-vous plus brillant qu'un jeune de 1re secondaire?» Mais à la page même du test, celui-ci devient: «Êtes-vous plus brillant qu'un jeune de premier (sic) secondaire?»
  • Corrigé de la question 1 : «La forêt boréale. La forêt boréale est composée de pins, de sapins, de mélèzes et dépinettes (sic) noires.» Les dépinettes, une nouvelle sorte d'arbres? Je vous ai épargné toutes les autres fois ou on ne retrouvait pas d'apostrophe, mais j'en ai compté plus de 18 autres.
  • Question 2 : «Qui a prouvé que la terre (sic) était ronde?» La «Terre» avec une majuscule quand on parle de la planète dans un contexte astronomique.
  • Question 3 : «Qui était Charles Perreault (sic)?» Dans Le Petit Robert, on écrit «Perrault», mais est-ce si important de mal orthographier le nom d'un auteur aussi célèbre?
  • Corrigé de la question 4 : «Depuis al (sic) fin du 19e siècle...»
  • Question et corrigé de la question 5 : manifestement, les concepteurs de ce texte ne savaient pas écrire le titre du recueil de contes arabes des Mille et Une nuits. Alors, ils n'ont pas pris de chance: ils l'ont écrit de deux façons différentes : «Milles et une nuits» et «Mille et Une Nuits».
  • Corrigé de la question 5 : «... dont la porte souvre (sic) à ses (sic) mots : «Sésame, ouvre-toi! ». (sic)» On devrait écrire à «ces» mots et le point est inutile à la fin de cette citation.
  • Corrigé de la question 10 : «Deux adversaires déplacent chacun leurs pièces, de valeur différentes (sic) ...»
Mais plus que ce manque de respect anecdotique de la langue de la part d'une institution médiatique, ce qui m'enrage quelque peu est de croire qu'on peut mesure un individu avec un test de 10 questions.

Également, ce test est l'écho d'une réalité triste des programmes d'études internationales: on y sélectionne les élèves en fonction de leurs connaissances. Point à la ligne. Ceux-ci sont actuellement ni plus ni moins des ghettos scolaires pour élèves bollés et pour profs qui fuient les élèves réguliers. Or, les valeurs propres à ces programmes vont à l'encontre même de cette de sélection et de clivage.

En fait, outre le peu de cas qu'on fait du français au Québec, ce test montre bien que les PEI sont, dans notre province, des programmes de douance déguisés.

6 commentaires:

Le Prof a dit…

C'est bien triste parce que, oeuvrant au PEI moi-même cette année pour une 3e fois, je sais que les connaissances ne sont pas la base du programme. Il faut bien sûr que les élèves puissent suivre le rythme parfois accéléré et l'enrichissement proposé dans certaines matières. Cependant, ce sont les attitudes qui devraient constituer la base de ce programme. Je préférerais cent fois avoir au PEI des élèves à 70-75% mais ouverts d'esprit et altruistes qu'une bande de chialeux égoïstes qui pètent des 90%. C'est dommage que ce programme soit présenté quelquefois aux parents comme un programme strictement enrichi, alors qu'il vise en fait un développement global de la personne en l'ouvrant à ce qui l'entoure.

J'ai probablement l'air de prêcher pour ma paroisse ou de me défendre personnellement, mais je tenais à exposer mon opinion en me basant sur ce que je sais.

A.B. a dit…

D'après ce que certains enseignants du P.E.I. de mon école m'ont expliqué, le P.E.I. est une chose et ce sont en fait les diplômes supplémentaires qui viennent s'y greffer - ceux de l'I.B.O. et de la SÉBIQ - qui encourageraient la performance à tout prix. Il y a donc quelque chose comme 3 «papiers» ou diplômes différents pour les élèves qui «subissent» de programme jusqu'en 5e secondaire et le complètent.

Sylvain a dit…

En passant, dans une autre école (Je ne sais pour celle de "Le Prof") l'enrichissement n'est pas proposé, mais bel et bien imposé.

Quand on parle des attitudes au PEI, et qu'on tente de les "évaluer" avec un document que l'élève remplit, ça sonne faux d'un bout à l'autre quand on voit le genre d'individus qui composent souvent cette "clientèle"...

*Natacha* a dit…

Juste comme ça, le test à été corrigé... une petite gêne pour cyberpresse....

*Natacha* a dit…

oups... pas corrigé, modifié... ou OGM... je ne sais plus... :P

Le professeur masqué a dit…

Le prof: vous avez bien raison. On le vend souvent aussi en disant que c'est du «privé» au «public».

Safwan: c'est la sélection que je mets en cause et l'esprit de performance. Des valeurs, il faut des diplômes pour ça?

Sylvain: effectivement, il y a comme une contradiction.

Natacha: je n'ai pas remarqué de changement.