25 septembre 2007

Pénurie des enseignants et incohérence du MELS

Depuis 1997, le réseau de l'éducation est aux prises avec une pénurie des enseignants. Au départ, on a cru que ce phénomène était ponctuel et relié au programme de mises à la retraite anticipée du gouvernement Bouchard. À l'époque, les facultés universitaires affirmaient même qu'elles suffiraient à la demande... Quelle blague! On sait ce qui est arrivé.
Et cette pénurie qui devait se terminer, selon le MELS, en 2001 devait finalement se terminer, toujours selon le MELS, en 2005 pour finalement peut-être se terminer, encore une fois selon le MELS, en 2007, mais récemment le MELS a annoncé que cette pénurie se terminerait... Bref, n'importe quoi, comme d'habitude.
Il y a deux ans, le ministre de l'Éducation de l'époque, Jean-Marc Fournier, annonçait un programme pour remédier à cette pénurie temporaire. En effet, il annonçait en grandes pompes qu'on faciliterait la qualification pour devenir enseignant. Fallait-il y croire?
Si vous lisez cette lettre publiée dans Le Devoir aujourd'hui (et je vous invite fortement à la faire), vous verrez qu'il n'en est rien et que les beaux discours de nos politiciens et leurs politiques ministérielles ne passent pas toujours le test de la réalité. Patrick Letendre enseignait depuis onze ans, mais n'était pas légalement qualifié. Même avec les assouplissmeents (?) du MELS, il lui faudrait retourner quatre ans sur les bancs de l'université pour obtenir son brevet d'enseignant.
En plus de remettre en question les récentes politiques du MELS, la lettre de M. Letendre questionne fortement la formation nécessaire pour enseigner. Faut-il un bac en enseignement pour être prof? Avec le règlement de l'équité salariale, vous comprendrez que je sois mordant et que je vous réponde que les études ne comptent absolument pas pour notre syndicat ou le gouvernement. Sauf qu'il y a un double discours une fois qu'on parle des nouveaux enseignants non légalement qualifiés. Si j'ai une collègue qui enseigne le français depuis 14 ans alors qu'elle n'a qu'un bac en sexologie, le petit nouveau, bardé de diplômes pertinents, doit absolument avoir complété des études universitaires en éducation. Pour ce qu'elle vaut cette formation et certains jeunes qui en sortent!
Il est de bon ton de parler des jeunes enseignants qui quittent la profession. On aime bien les victimes au Québec. Et les jeunes enseignants sont victimes des conventions collectives, des attributions de postes anarchiques, d'une formation universitaire déficiente et j'en passe!

Mais, quant à moi, et mes propos risquent de vous choquer, je ne m'inquiète pas trop de ce phénomène parce qu'il s'apparente à une forme de sélection naturelle et parce qu'il faut l'avouer, il y a plusieurs jeunes étudiants en enseignement qui n'ont pas les ressources personnelles pour travailler en éducation. À ce propos, saviez-vous que c'est notamment dans les facultés d'éducation qu'on retrouve les étudiants avec la cote R la plus faible? De même, il faudrait comparer ce phénomène de départ des jeunes enseignants avec d'autres professions avant de s'alarmer. Sauf que, pour notre syndicat, il s'agit d'une façon de démontrer que la profession est bien malade.

Si le malaise est bien réel, je suis en désaccord avec cette façon de faire qui risque surtout d'avoir l'effet pervers de remettre en cause l'attribution des postes au lieu de s'attaquer aux véritables problèmes en éducation. Je repense au dossier de l'équité et je me rappelle que l'enfer est pavé de bonnes intentions. Au delà des beaux discours, notre syndicat est doué pour toujours faire porter sur les épaules de ses membres ce qui devrait appartenir à d'autres.

On manque de profs, ceux qui choisissent cette profession ne sont pas toujours à leur place, on les forme parfois très mal à la réalité de nos écoles et on prive des candidats émérites de postes qu'ils combleraient aisément.

8 commentaires:

Marie-Piou a dit…

Je dois reconnaître que j'endosse votre propos. Cependant, je crois qu'un minimum de formation est nécessaire avant de confier une classe à un individu. Pour avoir été parachuté un peu par hasard dans le système : de suppléante plus qu'occasionnelle je devenais prof avec 3 groupes et titulaire d'un quatrième. J'avais des élèves extraordinaires et je dois avouer que si je n'avais pas eu le support du prof qui quittait (un passionné j'vous dis) je ne suis pas certaine que cette expérience aurait été aussi positive. J'aimerais enseigner. J'en suis la première surprise. Mais lorsque j'aurai complété ma maîtrise l'été prochain, je ne suis pas prête à me relancer dans un bacc... même de deux ans. Pourquoi ne pas rétablir le certificat en enseignement secondaire?

Bacc spécialisé + certificat + instinct.. la combinaison n'est pas parfaite, mais ce serait un bon début!

Anonyme a dit…

J'ai lu la lettre et j'en suis aussi bouleversée... Mais j'avais le goût de dire à cet enseignant (car c'est comme tel qu'il faut le considérer) de vérifier auprès de son université s'il ne peut pas se faire créditer son expérience auprès de son (éventuel) programme en enseignement.
Ma soeur, détentrice d'un diplôme en Technique de design de mode, s'est fait créditer plusieurs de ses cours du collégial (oui, oui, à l'université), si bien que ça lui a sauvé près de 2 ans d'université.
En d'autres mots, ce n'est pas le MELS qui reconnaît l'expérience, mais bien l'université.
Y a moyen de lui faire savoir ? Ça peut pas rester comme ça ! :0)

A.B. a dit…

À ma deuxième année à ton école, une collègue enseignant depuis plusieurs années au secondaire, excellente mais pas légalement qualifiée (bac. en arts, cinéma et littérature), s'était carrément fait mettre dehors un peu avant la fin de la première étape parce qu'on l'avait engagée en attendant ue l'on trouve quelqu'un de qualifié. On avait ainsi sorti des boules à mites une enseignante avec un brevet comme dans le bon vieux temps. Elle n'avait pas tenu le coup; quelques semaines sans plus (elle arrivait du privé; ça fesse, la réalité, parfois!) Une jeune diplômée est finalement arrivée et a fini l'année avec maintes difficultés alors que la première, les jeunes l'aimaient, elle était appréciée de ses collègues et avait une discipline de fer doublée d'excellentes compétences en français. C'est n'importe quoi. Mais on manque de profs... C'est la même chose avec les médecins et infirmières venus d'ailleurs, sauf que la tolérance d'engagement n'existe pas dans leur cas. On en fait rien pour s'aider, au Québec.

Anonyme a dit…

Au sujet de la cote "R", il faut noter que c'est différent pour chaque programme. Je conviens aisément qu'il ne faut pas une cote comparable à celle des étudiants en médecine pour accéder au bac, mais il ne faut pas oublier que le bacc. en édu. préscolaire et en enseignement primaire demeure contingenté. Oui oui, vous avez bien lu, on refuse des candidats lors du processus d'admission.

Anonyme a dit…

Je possède un Bac en littérature...et une maîtrise en histoire...j'enseigne depuis 3 ans au secondaire (depuis 2 ans en secondaire 2)...je suis une NLQ...je suis mère de 4 enfants (10 ans, 9 ans, 7 ans, 6 ans), ancienne animatrice et directrice de camp de jour...ancienne employé de bibliothèque...bref...j'adore mon nouveau travail...je n'ai pas de problèmes de gestion de classe...c'est mon expérience d'animatrice et de maman...mon instinct et mon gros bon sens qui font de moi une bonne enseignante...c'est ma passion pour les livres qui accroche les élèves, ma passion pour la langue qui fait de mon cours un des meilleurs de leur journée...je suis une prof populaire...appréciée de ses élèves...j'ai des évaluations élogieuses...mais je demeure une NLQ...je me suis inscrire à un genre de programme de maîtrise pour éventuellement me "qualifier"...programme conjoint UDM et UQAM...un vrai chemin de croix pour trouver ce programme...des appels au MELS...aux universités...des courriels...bref...la maison des fous des 12 travaux d'Astérix!!...première étape: avoir au moins 6 crédits pour obtenir une autorisation provisoire d'enseigner à la place de la tolérance actuelle..ensuite continuer le programme de maîtrise en espérant que mon autorisation provisoire perdure durant tout le temps du programme et en continuant de veiller à ce que le directeur de mon école se souvienne de moi lors des attributions des remplacements...une chance que dans mon école ils sont nombreux!!

Laurence (qui aime utiliser les points de suspension..;-))....)

Le professeur masqué a dit…

Poussière: pourquoi pas, en effet? mais ça doit être trop simple ou pas assez payant pour les universités. Je ne sais pas.

Renée-Claude: par une source très fiable, patrick letendre était un prof purement génial et sa démission est le signe que le système scolaire est d'une incroyable connerie! En éducation, les universités sont plutôt chiche côté reconnaissance.

Safwan: on est doué pour se mettre les pieds dedans.

Anonyme: heureusement!

Laurence: votre commentaire illustre bien l'absurdité de ce système et des solutions de nos technocrates.

Anonyme a dit…

Tout à fait justes tes remarques.

Je me demandais : que'est-ce que la cote R? (Résilience? Hihihi! Mais sérieusement, c'est quoi?)

À mon avis, bémol à mettre au sujet des médecins et infirmiers/ières... Notamment la langue, mais aussi les approches. Arrimage intelligent à faire.

Zed ;-)

Le professeur masqué a dit…

Zed: en bref, la cote R est un peu comme la moyenne générale qu'on attribue aux étudiants à la fin du cégep et dont les universités se servent pour les départager lors des inscriptions.