31 décembre 2012

Bilan de l'année 2012

Ouaip. Tiens. Voilà.

Une élection qui n'a pas changé grand-chose

Ce n'est pas l'élection d'un gouvernement minoritaire qui va amener de grands changements en éducation. Quoique bien des mesures peuvent être mises de l'avant sans devoir être soumises au vote de nos parlementaires.

Honnêtement, si je ne saute pas de joie à l'élection du Parti québécois, je suis résolument content que la CAQ n'ait pas pris le pouvoir si on se base sur sa plateforme électorale (ici). Analyse sommaire des problématiques en éducation. Trop d'improvisation, trop d'idées électoralistes et manquant d'analyse. Le monde scolaire a déjà donné dans ce domaine. Par contre, il va falloir prendre la formation de M. Legault au sérieux lors d'un prochain scrutin et contrer davantage certaines de ses idées avec des répliques poussées et bien étayées. Certaines mauvaises promesses ont la faveur populaire parce qu'elles sont séduisantes, pas parce qu'elles sont applicables ou efficaces...

Reste maintenant à savoir comment la formation de madame Marois va pouvoir mettre de l'avant certaines promesses électorales (ici et ici). Un gros bémol sur l'embauche de spécialistes qui sont, dans les faits, inexistants. La maternelle à temps plein à quatre ans est une avenue plus prometteuse.

Une idée à laquelle le MELS doit renoncer

En pleine canicule et en plein délire médiatique, la ministre de l'Éducation de l'époque, Michelle Courchesne, annonçait que l'école québécoise offrirait le programme Nager pour survivre (ici, ici, ici, ici, ici, ici, et ici). Je ne reviendrai pas sur le manque de pertinence de cette formation quant aux noyades chez les jeunes.

Simplement, je tiens à vous signaler qu'il y a six noyades de moins au Québec cette année que l'année dernière à pareille date. Qu plus est, depuis le mois de septembre, une seule noyade sur douze au Québec implique un jeune d'âge scolaire. Les autres incidents sont majoritairement reliés à  l'imprudence sur la glace, des véhicules automobiles et des VTT, l'alcool ou des circonstances non élucidées.

En bref

Les tableaux interactifs ont fait couler beaucoup de... craies (ici et ici).

Les «dangereux» qui enseignent à nos enfants (ici et ici).

Les poursuites des parents en éducation (ici, ici et ici).

L'anglais intensif au primaire (ici, ici, ici, ici, ici, ici, ici et ici).

Le SRAM qui démolit la planification pédagogique des profs de cinquième secondaire (ici et ici).

L'histoire de «L'enfant dans la cage» connait un dénouement judiciaire, mais certains ne semblent pas apprendre de cette saga (ici et ici).

Dépenses: les CS qui ne comprennent pas (ici).

Le cellulaire dans nos écoles (ici et ici)

À venir?

Honnêtement, comme ma boule de cristal est plutôt obscurcie par des préoccupations personnelles, je vois mal ce que l'avenir nous réserve pour la prochaine année. Une nouvelle campagne électorale? J'ai des doutes. Tant le PLQ que la CAQ, malgré leurs airs de matamores, ne sont pas enthousiastes à l'idée de repartir en élection.

Non, je prévois surtout le chaos habituel, Le Grand Chaos de l'éducation.








20 décembre 2012

Mesurer le décrochage scolaire

Titre inexact dans le Journal de Montréal ce matin: «Le décrochage scolaire serait à la hausse». Il n'est pas à la hausse. C'est la façon de le mesurer qui change le portrait qu'on en a. Miss Math pourrait s'amuser ici.

Rien de très neuf en soi. Il est connu que le MELS a changé sa façon de définir ce genre de statistiques sous les Libéraux. Il s'agit de savoir quelle mesure on veut véritablement: le nombre de diplômés en cinq ans ou le nombre de diplômés de moins de 20 ans. On ne fait pas trop cette distinction pour le collégial et l'universitaire en passant.

Veut-on noircir le tableau pour des fins politiques ou pour avoir une meilleur compréhension de la réalité scolaire?

La logique du bon docteur Barrette


M. Barrette ne veut pas que le salaire des médecins soit relié à la performance des hôpitaux, mais ne voyait aucun problème à être membre d'un parti politique qui liait salaire des enseignants et réussite scolaire...

19 décembre 2012

Une Guignolée masquée

Un peu sur un coup de tête, la semaine dernière, j'ai décidé, en convaincant quelques collègues, d'organiser une opération Guignolée pour une famille défavorisée d'une école avec laquelle nous avons des liens.

En si peu de temps, la réponse a été excellente: nous avons recueilli 15 boites de denrées non périssables. Et ce matin, fidèle à un engagement que j'avais pris avec ma personne bien lavée et rasée, je suis allé effectuer une mini-épicerie pour ajouter des produits manquants.

Néanmoins, je suis mal à l'aise devant de tels gestes relevant de la charité. Quand des familles doivent compter sur la générosité des autres pour nourrir les leurs, il y a manifestement un problème dans notre société. On peut blâmer certains parents pour leur manque de sens des responsabilités (ils fument, ils boivent, ils...), il n'en demeure pas moins que c'est le signe que ces derniers sont démunis à leur manière.

16 décembre 2012

Newtown et sécurité des écoles au Québec

La tragédie de Newtown va ramener dans l'actualité la question de la sécurité dans nos écoles. Enfin, peut-être. Car nous sommes à la veille des vacances des Fêtes et les médias risquent de s'intéresser à bien d'autres dossiers.

Les écoles québécoises sont-elles sécuritaires? La réponse est: parfois non. Nos jeunes sont-ils menacés? La réponse est: souvent non.

On ne se racontera pas d'histoire: la majorité des écoles du Québec ont été conçues à une époque où la sécurité n'était pas une préoccupation majeure parce que les tueries dont on parle aujourd'hui étaient inexistantes. On se retrouve donc avec des bâtiments scolaires comprenant une multitude de portes d'entrée, sans système de verrouillage automatique, etc. Au cours des années, divers reportages journalistiques ont d'ailleurs montré ces lacunes.

Il a fallu des années à mon école pour rendre celle-ci davantage sécuritaire. Je ne sais combien d'interventions j'ai effectuées avant qu'on adopte des mesures de sécurité appropriées et qu'on modifie physiquement certaines parties physiques de celle-ci. Même auprès de certains collègues, j'avais l'air d'un «maudit fatiguant». Les priorités sont ailleurs, on manque de budget...

Mais il n'y a pas que les édifices qu'il convient d'aménager. À quoi sert une porte fermée à clé quand un individu peut faire sauter la serrure avec un fusil d'assaut? Il y a aussi les mentalités qu'il faut changer. Au début de ma carrière, un élève pouvait apporter avec lui des armes à l'école dans le cadre d'un exposé oral sur la chasse, par exemple. Une telle chose est impossible aujourd'hui. De même, les enseignants et le personnel des écoles sont mieux informés des mesures à prendre dans le cas d'une irruption armée. Mieux, mais pas assez, croyez-moi.

Il s'agit notamment d'apprendre aux employés des établissements à pratiquer le confinement barricadé volontaire, une stratégie au cours de laquelle «les élèves et membres du personnel s'enferment dans des pièces afin d'empêcher un présumé tireur de pénétrer dans les salles où se trouvent des cibles potentielles.» Mais combien d'écoles font-elles systématiquement des simulations?

Dans les faits, nos jeunes sont peu en danger dans nos écoles, pas parce que les mesures de sécurité sont suffisantes, mais simplement parce que la menace est faible. Est-ce rassurant?

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Pour le plaisir, ayez la gentillesse de répondre à mon petit sondage.


12 décembre 2012

Agression d'une mineure et traitement médiatique (ajout)

Le traitement médiatique du cas d'une récente agression d'une jeune fille de la banlieue nord de Montréal soulève beaucoup de questionnements chez moi. En effet, de nombreux détails quant à cette agression ont été largement diffusés dans les journaux.

Je ne vois pas la pertinence d'avoir mentionné les écoles d'origine des jeunes impliqués dans cette  affaire. En aucun temps, cette variable n'était pertinente dans cette histoire survenue après les heures de classe dans une résidence privée. Qui plus est, on peut se demander pourquoi on a immédiatement précisé le nom de l'école publique de la jeune fille mais pas celui du collège du privé du garçon.

Également, des photos et des détails diffusés dans les médias permettraient d'identifier, après quelques recoupements, l'adresse de la maison de la jeune fille.

Un autre point délicat est de savoir s'il est pertinent de rendre publics autant de détails sordides entourant cette histoire reliée à des mineurs. A-t-on besoin de savoir la nature des gestes posés quand il s'agit d'une agression sexuelle d'une mineure? Le droit du public à l'information est-il mieux servi ainsi? Je comprends qu'il faut rapporter le déroulement du processus judiciaire afin de permettre aux lecteurs de bien comprendre comment il s'effectue, mais de divulguer la nature exacte des gestes posés?

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Par ailleurs, une autre question: les victimes d'agression sexuelle auront-ils (elles) envie de porter plainte si on étale autant de détails de l'acte criminel dont ils (elles) ont été victimes? 

08 décembre 2012

Pause 9: L'autobus de l'amour

Sitôt arrivé devant mon école secondaire faite de briques blanches et brunes, l'autobus de la STCUM ouvrit ses portes et cracha son flot d'écoliers bigarrés qui, eux-mêmes, crachaient leurs flots d'insultes et de bêtises à qui mieux mieux. Le brun véhicule repartit en crachant, lui aussi, une fumée infecte noire alors que nous nous apprêtions à entrer dans ce lieu terne où certains de mes enseignants nous cracheraient, à leur tour, vertement leur cours avec force de postillons. Dire que certains de ces êtres autoritaires nous noyaient sous le flot de leurs paroles ne relevait ni de la métaphore ni de l'hyperbole. Nous essuyions parfois littéralement leur colère sur nos visages.

Néanmoins, j'aimais l'école. C'était un lieu somme toute paisible. À cent mille lieux et exactement six kilomètres et demi de la maison familiale. La violence y était très peu présente. Des cris, des quolibets, du pousaillage, comme on dit, mais que des choses bénignes. Je pouvais m'y réaliser en oeuvrant dans les activités étudiantes. J'avais une valeur, des buts, une identité. Bien sûr, on me traitait parfois de «fif» parce que je réussissais en classe mais, là, au moins, je savais me défendre. À la petite école de mon quartier, comme j'étais parmi les plus grands, j'avais appris les rudiments de la lutte pour me débarrasser de tous ces petits teigneux napoléonniens qui s'en voulaient inconsciemment pour leur taille réduite et qui croyaient s'élever en s'abaissant à vouloir me foutre une râclée. J'avais simplement transféré ces acquis primaires au secondaire. Avec autant de succès.

Depuis la rentrée, les trajets autrefois monochromes en autobus avaient des couleurs différentes. Ils étaient blonds et bleus. Une ravissante fille d'à peu près mon âge montait maintenant à bord du collectif véhicule à quelques rues de chez moi. Je n'avais aucun mérite à la remarquer puisqu'elle était hautement remarquable. Là où par contre j'éprouvais une certaine gêne, c'était que je n'avais pas su masquer mon intérêt à mes camarades de classe qui voyageaient avec moi. Avaient-ils surpris un regard, un froncement de sourcils, une lèvre légèrement souriante, une joue rougissante? Jouissaient-ils de pouvoirs paranormaux et lisaient-ils dans mes pensées? Chose certaine, ils auraient mérité d'être immédiatement embauchés par une agence d'espionnage ou de rejoindre le trio des Champions dont j'écoutais les exploits chaque semaine à la télévision. 

Cette idylle rêvée qui ne dépassa pas le stade du rêve dura deux semaines. Pendant celles-ci, mes camarades me prodiguaient une foule de conseils sur la façon d'aborder la nouvelle venue. Ce qui les surprenait était que ma gêne et ma timidité étaient inébranlables, malgré leurs assauts répétés pour m'inciter à poser le premier geste. Dans l'autobus qui sautait à chaque cahot et où mon coeur tressautait à chaque regard de la belle, je restais figé comme la statue de plomb dans laquelle j'avais décidé de me réfugier depuis des années. J'étais un amoureux incompétent notoire. 

Puis, la mort de ma mère est venue troubler cette histoire. Pendant deux jours, je n'allais plus à l'école. Adieu l'autobus de l'amour, je funéralisais en famille. Le vendredi soir, au salon où on n'en finissait plus de mentir dignement, ce fut le choc: la belle blonde aux yeux bleus de mes transports quotidiens venait d'entrer dans la pièce où gisait la boite de bois contenant le corps cancéreux de ma mère. Que faisait-elle ici? Qui lui avait parlé de ce décès? Se pourrait-il que... Pendant trente secondes, j'analysais les milliers de scénarios qui venait à mon esprit, mais aucun ne semblait logique. Elle approcha de moi à côté d'un homme que je n'avais jamais vu auparavant et dont pourtant le visage me semblait familier. Comme s'il avait un air de famille.

Ma cousine Nathalie faisait partie de ces ressuscités apparus à la suite de la mort de ma mère. Elle demeurait à trois rues de chez moi. Depuis des années. Mais mon oncle et mon père, qui faisaient pourtant le même métier et étaient embauchés parfois par les mêmes employeurs, ne se parlaient plus. Depuis des années. D'une main molle, celle qui m'était maintenant apparentée m'offrit ses sympathies. Je ne savais si c'était pour ma mère ou pour mes espoirs amoureux qui disparaissaient tout à coup à cause des frontières inviolables qu'impose la génétique. 

Le lundi, après les funérailles de ma mère, j'étais de retour dans l'autobus de la STCUM. Mes camarades de classe savaient tout de mon histoire d'amour morte-née et avaient eu la gentillesse de ne pas me taquiner. Tomber amoureux de sa cousine. Pathétique. 

J'ignorais tout d'elle et il me fallut donc oublier celle qui fut l'objet d'un de mes premiers béguins au secondaire, ce que je fis. J'ignorais tellement tout d'elle que j'appris seulement des années plus tard qu'il s'agissait d'une enfant adoptée.