Je recopie ici un long commentaire que j'ai fait sur le blogue du
Prof maudit portant sur la lecture. Comme je me proposais d'aborder ce thème bientôt...
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Dans son prochain programme de français lecture au deuxième cycle du secondaire, le MELS veut que les élèves lisent cinq oeuvres par année. Cinq, rien de moins!
Ayant eu le bonheur d'avoir une haut fonctionnaire secteur lecture sous la main, je lui ai demandé ou allait-on trouver le fric pour acheter tous les romans qu'il faudra pour atteindre cet objectif. J'attends encore sa réponse, mais j'ai compris qu'on nage dans l'illusion la plus réelle. Quand on est rendus à croire ses propres mensonges, il n'y a qu'un pas pour verser dans la folie.
Par ailleurs, je n'ai jamais cru à l'équation «lire aide à mieux écrire». J'ai des élèves qui ont toujours un roman dans les mains (certains en lisent deux par semaine) et ils sont mes derniers de classe en écriture. Orthographe et grammaire aléatoires, comme je dis.
La différence entre AIMER lire et SAVOIR lire est fondamentale et vous l'exprimez bien, cher PM.
Peut-être suis-je naïf, mais je ne crois pas qu'il existe des élèves qui n'aiment pas lire. Il existe plutôt des élèves qui n'ont pas TROUVÉ ce qu'ils aiment lire. Comme je leur dis parfois en boutade: «Ce n'est pas parce que la première fille que tu as embrassée puait de la gueule que tu en es resté là. Il t'a fallu trouver la bonne. C'est pareil pour un livre.» Et le rôle d'un enseignant est à la fois d'être un modèle, un guide et un pusher.
UN MODÈLE en montrant qu'il lit et qu'il aime lire. Je parle souvent des livres que j'aime à mes élèves. Ils me voient souvent avec un livre à la main ou sur mon bureau. Je lis. J'incarne cette action. Et je ne méprise jamais ceux qui ne partagent pas ce goût.
Quand je pense que j'ai des collègues qui ne lisent pas ou ne lisent plus, je comprends pourquoi ils n'arrivent pas à partager cette passion aux jeunes. Dans la même veine, je n’ai jamais obligé ma fille à lire. Par contre, il y a des livres partout à la maison. Du livre de poche au livre d’art de grande valeur, j’en ai honte, qu’on touche seulement avec les yeux tellement on a peur de l’abîmer…
Quand je veux m’évader un peu, elle me voit lire. Pour elle, lire est une activité au quotidien parce que ses parents le vivent de cette manière. Dans la même veine, ma fille s’est tapé des livres sur l’histoire des Canadiens de Montréal qui traînaient chez moi parce qu’elle trouvait que leur gardien était cute, simplement.
UN GUIDE en les dirigeant vers des oeuvres susceptibles de leur plaire. Pour ce faire, il faut discuter livres avec eux, mais aussi lire de tout pour pouvoir leur indiquer des oeuvres qui répondront à leurs espérances. Je me suis déjà tapé des biographies de joueurs de hockey par curiosité. Eh bien, le premier livre qu'un de mes élèves a lu de sa vie a été la biographie du hockeyeur Dave Morissette. On ne parle pas de grande littérature, mais de fierté d'avoir lu un GROS livre AU COMPLET et d'en avoir parlé à d'autres. Par la suite, l'élève a pris goût à la biographie en général et, avoir eu plus de temps avec lui, on aurait pu parler écriture et psychologie.
À travers son anecdote des romans Bionicle (racontée sur le blogue du Prof maudit), Renée-Claude illustre bien ce principe. J’ai des élèves qui sont passés des cartes à collectionner et à jouer à Amos d’Aragon pour finir par se taper le Seigneur des Anneaux et même le Smirillion.
UN PUSHER en fournissant à ses élèves rapidement une façon de combler leur besoin en livres. Visite rapide à la médiathèque, prêt fait à même ma bibliothèque personnelle, commande en librairie avec une amie complice. Tous les moyens sont bons. Cette année, le même livre a accroché quatre élèves d'un même groupe qui se le sont passé l'un à l'autre. Rien n'interdit aussi les cadeaux littéraires. Et je crois beaucoup à la bibliothèque de classe, même dans ma classe de grosse école secondaire.
Bref, il existe divers moyens d'inciter à la lecture. Je voulais simplement ajouter les miens à votre liste, cher PM.
Pour consulter le billet du Prof maudit: