(Précision: je ne suis absolument pas croyant en quelque religion que ce soit. Même si je suis un fervent partisan de la Sainte Flanelle, j'ai parié il y a deux semaines avec un collègue que la troupe de Claude Julien ne serait pas des séries éliminatoires. On peut donc me décrire comme étant plus un individu lucide que naïf.)
Dans une récente déclaration, le ministre de l'Immigration, Simon Jolin-Barrette, décrit le projet de loi 21 comme étant «pragmatique et applicable». Pour ma part, il m'apparait polarisant et incohérent. Et voici pourquoi.
La polarisation des points de vue
Ce projet de loi est-il bien nécessaire en éducation? Si on s'intéresse à cette question en se basant sur des valeurs et des principes personnels et généraux (laïcité, valeurs québécoises, etc.), on pourrait toujours répondre que oui. Mais si on se base davantage sur des constats pratiques, la réponse est davantage non. Pourquoi?
La première raison est que le nombre d'enseignants portant des signes religieux serait relativement faible. On est très loin d'une obscure mouvance religieuse menaçant l'intégrité psychologique des élèves dans les écoles publiques. Si on voulait véritablement contrer les «dangers» que peuvent représenter certaines religions sur les jeunes, on devrait davantage s'attarder aux écoles illégales et au financement des écoles privées offrant un projet éducatif à valeur religieuse. Sur ce point, le présent gouvernement se trompe manifestement de cible et on peut même se demander comment il continue à financer certains établissements scolaires! On nage ici dans la dissonance cognitive la plus évidente.
La deuxième raison qui me pousse à me questionner sur la nécessité de ce projet de loi est qu'on n'a aucune indication d'une influence réelle du port de signe religieux sur les élèves.
Avant tout, il faut savoir qu'une telle loi ne ferait rien de plus pour empêcher des cas de «prosélytisme actif». Soulignons également qu'il existe déjà la possibilité d'appliquer des mesures disciplinaires quant aux enseignants dont le comportement aurait manqué de professionnalisme. Dans les faits, on ne relève aucun cas documenté de «prosélytisme actif» provenant d'enseignant portant des signes religieux dans une école publique. Le seul cas de comportement douteux dont j'ai eu personnellement connaissance dans une école était relié à un intervenant scolaire de religion catholique qui portait une chainette avec une discrète petite croix au cou. Ses conseils religieux à une jeune fille venue lui parler d'avortement étaient pour le moins déplacés. Au contraire, j'ai davantage connu des individus portant des signes religieux et à qui on demandait d'en parler afin de mieux comprendre leurs motivations personnelles. Je pense aussi à cette collègue voilée dont la fille était une de mes élèves qui n'avait aucunement l'intention de porter le hijab, contrairement à sa mère. Il s'agit d'exemples anecdotiques, me dira-t-on, mais telle est la réalité que j'ai vécue.
Reste la question de l'influence de ce que j'appelle le «prosélytisme passif», c'est-à-dire la possibilité qu'un élève en vienne à adopter des valeurs religieuses semblables à celles de son enseignant portant des signes qui sont au coeur du débat actuel. J'ai beaucoup de difficulté à adhérer à un pareil argument pour lequel on retrouve peu - soyons à la mode - de données probantes. Et je souris toujours quand certains commentateurs présentent les enseignants comme étant des modèles d'autorité alors que ce sont les mêmes qui dénoncent le manque de discipline qu'ils exercent dans leur classe. Si d'aventure on souscrit néanmoins à cette thèse, il faudrait alors être conséquent et couper immédiatement les subventions de toutes les écoles religieuses privées de la province, ce que la CAQ ne fera pas. Au contraire, le ministre de l'Éducation, Jean-François Roberge, défend celles-ci alors que les jeunes ne partagent peut-être pas le choix de leurs parents de les y envoyer.
Bref, je ne suis pas convaincu que le Québec soit devant une situation pressante et urgente qui nécessite la suspension d'une liberté fondamentale et je m'interroge à savoir si l'actuel projet de loi ne va pas plutôt braquer les esprits dans un débat démagogique qui renforcera les antagonismes.
Un projet de loi incohérent
Le projet de loi 21 corrige certaines incohérences récentes véhiculées par les ténors de la CAQ, notamment lorsqu'on indiquait que les membres de la direction d'une école étaient libres de porter ou non un signe religieux. Pensons aux propos de la ministre de la Sécurité publique et vice première-ministre du Québec, Mme Guilbault, qui affirmait qu'un enseignant contrevenant pourrait être déplacé à un tel poste. Mais voilà, soudainement, le monde de l'éducation se révèle bien plus complexe que certains semblaient le comprendre.
Une des failles de ce projet de loi est évidemment qu'il ne vise pas tous les intervenants scolaires du réseau public avec lesquels les élèves seront en contact. Soyons au minimum logique! La présence d'une clause d'antériorité permettant à certains enseignants de porter des signes religieux est en elle-même une contradiction flagrante des principes qu'on entend défendre. Mais en plus d'individus bénéficiant de cette clause, un élève pourrait être sous la responsabilité d'une surveillante, d'un psychologue ou d'une technicienne en éducation spécialisée (une TES) portant un signe religieux. Comment, au nom de la laïcité et de la «protection» de la jeunesse, peut-on interdire le port de tels signes aux enseignants et le laisser à tous les autres membres du personnel d'une école? Ainsi, au cours d'une même journée, un jeune pourrait avoir un enseignant portant la kippa à la première période, rencontrer une TES voilée à la deuxième, être apostrophé par un surveillant portant le kirpan à l'heure du diner, se retrouver avec un enseignant et un orthopédagogue portant la croix dans la même classe à la troisième pour finalement être assis devant un suppléant à qui on interdit de porter un signe religieux à la quatrième. Et dans les écoles alternatives, il pourra même côtoyer des parents portant un signe religieux et qui font du co-enseignement avec un prof!
On réalise encore plus à quel point nos dirigeants ne comprennent pas tout le fatras qu'ils sont en train de créer quand on analyse, par exemple, certains propos du premier ministre, François Legault. Appelé à expliquer pourquoi un même enfant devrait avoir une enseignante non voilée durant la classe tout en étant sous la supervision d'une éducatrice du service de garde voilée après les heures d'école, le député de L'Assomption a indiqué que le service de garde était facultatif, contrairement au service offert par l'enseignante. Pourtant, le surveillant, la psychologue, la technicienne en éducation spécialisée et l'orthopédagogue d'une école que j'ai précédemment mentionnés ne sont pas des services facultatifs et pourront continuer à porter un signe religieux.
Ce n'est pas la première fois, en passant, qu'un représentant important de la CAQ y va d'une réponse improvisée de la sorte. À quoi peut-on s'attendre d'un gouvernement qui propose d'interdire tout signe «de caractère visible ou non» et qui tente de se montrer rassurant en indiquant qu'il n'y aura pas de fouille à nu? Comment interdire l'invisibilité? Il est embêtant aussi de constater qu'il s'agit parfois de maladresses provenant soit du premier ministre et ancien ministre de l'Éducation, soit de la vice première-ministre, soit du ministre de l'Éducation actuel. Le dernier cas en lice: le bureau du ministre Jolin-Barrette qui a indiqué que les stagiaires en enseignement ne pourront pas porter de signes religieux. Ils ne sont pourtant pas des employés de l'État visés par ce projet de loi. Oups. De plus, qu'arrivera-t-il s'ils veulent effectuer un stage dans une école privée?
Et puisqu'on parle d'écoles privées, comment l'État qui les subventionne jusqu'à 70% peut-il les soustraire à cette loi? Est-on en train de verser dans la laïcité à deux et même à trois vitesses? Donne-t-on une fois de plus des privilèges aux plus nantis? Une partie de la réponse se trouve-t-elle dans le fait qu'il s'agit surtout d'écoles catholiques?
On comprend, à la lumière de cette analyse rapide et incomplète, que le gouvernement de la CAQ vient de créer davantage de problèmes que d'en résoudre. Comment fera-t-on maintenant pour identifier les employés qui auront le droit ou non de porter un signe religieux? Utilisera-t-on un signe visible ou invisible?
30 mars 2019
11 mars 2019
Et si on réinventait l'école? Un livre de contes pour adultes
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Quand
Jean-François Roberge a écrit «Et si on réinventait l’école?», il était déjà prévisible
qu’il serait ministre de l’Éducation, un poste qu’il espérait de toutes ses
forces. Il ne peut avoir l’excuse d’avoir été surpris de sa nomination par
François Legault ou de ne pas avoir pensé qu’un jour, ses écrits seraient lus
ou relus par différents analystes.
Je
me suis donc attelé à cet exercice de lire cet ouvrage qu’il a publié en
octobre 2016, ouvrage que mentionnent parfois certains chroniqueurs pour asseoir
la crédibilité de cet homme à la tête de l’éducation au Québec mais dont on
peut douter qu’ils l’aient vraiment lu.
Avant-propos
«Pourquoi
réinventer l’école?», se demande JF Roberge. Ses réponses sont simples :
-
Le
Québec peut faire mieux. Il faut avoir de l’ambition.
-
Le
Québec est une société vieillissante où chaque jeune est important.
-
L’éducation
est la meilleure solution contre la pauvreté et l’exclusion sociale.
-
Il
faut un réseau scolaire performant pour relancer l’économie.
-
Une
situation alarmante en ce qui a trait aux faibles taux de littératie, de
diplomation scolaire et de rétention des jeunes enseignants
Le ministre conclut son avant-propos en
affirmant : «[…] comme l’a si bien dit Albert Einstein «La folie consiste
à refaire sans cesse la même chose, mais en espérant un résultat différent». 11
Seul petit problème si on se base sur un
article de Normand Baillargeon : le mot n’est pas d’Einstein mais de la
scénariste et romancière états-unienne Rita Mae Brown, dans Sudden Death
(1983).
Et ce
premier petit impair illustre bien le défaut général de cet ouvrage : il
s’agit d’un condensé de lieux communs, de clichés et d’anecdotes personnelles
sans toujours de cohérence et de références crédibles pour appuyer un propos
qu’auraient pu tenir bien des enseignant ayant le même nombre d’années
d’expérience du réseau scolaire québécois. Si M. Roberge soulève parfois les
dérives de notre système d’éducation, les solutions qu’il préconise demeurent
floues, évasives, naïves, approximatives tellement elles versent dans la
candeur. Pis encore, comme si ce livre éparpillé avait subi un travail
d’éditeur douteux, on se demande quels liens ont certains chapitres avec le
titre de celui-ci. Qu’ont à voir avec l’école québécoise, par exemple, les
propos du ministre sur la pertinence de nommer des jeunes à des conseils
d’administration de sociétés d’État?
Il m’a
fallu m’y prendre à deux reprises pour terminer la lecture de l’épitre de notre
actuel ministre. Deux reprises pour constater que je perdrais mon temps à en
analyser le contenu. Est demeuré un premier jet recensant quatre chapitres. J’ai
préféré m’arrêter là.
Chapitre 1 – Le pouvoir
d’inspirer
La réalité de la scolarisation de
M. Roberge semble très différente du Québécois ordinaire. Il décrit ainsi des enseignants
qui l’ont marqué, entre autres un prof qui restait après la classe et dont la
porte de son bureau individuel – une rareté dans une école publique - n’était
jamais fermée ou un autre qui invitait ses élèves à son chalet la fin de
semaine.
Il s’intéresse ensuite aux
qualités que devrait posséder un bon enseignant. Pour lui, il existe un trop
grand nombre de candidats qui choisissent cette profession pour de mauvaises
raisons, soit parce qu’ils ont été refusés dans d’autres programmes soit qu’ils
veulent profiter de deux mois de vacances l’été.
Mais sur quoi se base le ministre
pour appuyer une telle affirmation? Qu’est-ce qu’«un grand nombre»? Et ce
propos n’entre-t-il pas en contradiction avec tout l’intérêt qu’il accorde aux
pages 11 et 19 aux jeunes enseignants qui quittent après cinq ans, décrivant
ces départs comme une «véritable hémorragie»? S’ils sont là pour de mauvaises
raisons, ne n’est-il pas mieux qu’ils quittent la profession, non?
Chapitre 2 – Pour en
finir avec la médiocrité
Pour
Jean-François Roberge, le nivellement par le bas encourage la médiocrité.
Ainsi, pour éviter de décourager les élèves plus faibles, des enseignants ont
«pris l’habitude de remonter artificiellement les notes de toute la classe», ce
qui démotive également les élèves plus doués. 23 Certains parents, qui
reprochent aux enseignants d’être trop sévères et de donner trop de devoirs,
sont aussi complices de cette médiocrité.
Pour M. Roberge, les enseignants et les directeurs d’école ont le
«devoir de résistance». Il cite le professionnalisme d’une enseignante qu’il a
connue lors de son dernier stage universitaire et dont l’approche était fondée
sur une base scientifique. Sa rigueur exemplaire faisait que «Si un élève
méritait 59%, elle ne lui donnait pas 60%.» 23
Et
pour montrer à quel point le nivellement par le bas est remis en question, le
député de Chambly cite… Grégory Charles. Je n’ai rien contre cet artiste
émérite dont l’expérience de vie est fort éclairante (élève doué, il a arrêté
ses études après la cinquième secondaire), mais n’y aurait-il pas eu un expert
plus pertinent sur cette question?
Encore
une fois, nous sommes devant une analyse réductrice et incomplète. Le ministre
semble oublier que ce sont souvent – pour ne pas dire presque toujours - des
enseignants qui luttent contre le nivellement par le bas devant les demandes
des directions d’école, des commissions scolaires et du ministère qui veulent
de plus beaux pourcentages de réussite à inscrire dans leurs rapports
annuels.
Et
que dire de sa solution à ce problème : des examens ministériels uniques à
chaque cycle du primaire et à chaque année du secondaire en ce qui a trait aux
matières de base (anglais, français, mathématiques, sciences et histoire). Passons
sur le fait que le ministre – qui a été enseignant pendant 17 ans - ne sache
pas que le cours d’histoire est devenu celui d’univers social. Ces examens
seraient conçus uniquement par des enseignants en exercice (les mêmes qui
encouragent le nivellement par la bas?) et corrigés par des enseignants d’une
autre école de celle où sont inscrits les élèves pour éviter toute «tentation
de tricher» car, on l’a compris, le problème, ce sont les profs. 27
Le
ministre fait ici encore une fois la preuve de sa méconnaissance de la réalité
scolaire en écrivant : «Il n’y aurait aucune surcharge pour les
enseignants, puisque le travail de correction serait de même nature qu’à
l’accoutumée.» 27 Or, il est facile d’estimer qu’il y aura surcharge pour
l’enseignant qui recevra plus de copies à corriger qu’il a d’élèves dans ses
classes. Et surtout, comment ce système complexe va-t-il fonctionner? Va-t-on
mettre sur pied un gros «Tinder scolaire» pour arrimer enseignants et copies à
corriger? M. Roberge a-t-il idée de la
complexité de la logistique à mettre en place pour ces cinq examens
ministériels chaque année quand on sait qu’il y a près de 900 000 élèves
du primaire et du secondaire au Québec?
Chapitre 3 – Un
capitaine à la barre
M.
Roberge a compris, dès sa première année en enseignement, que les écoles du
Québec n’étaient que de «simples succursales des commissions scolaires qui leur
imposent un pouvoir bureaucratique étouffant.» 29 On peut sourire quand on sait
qu’il s’agit de la même personne qui a récemment décidé d’imposer deux
récréations à toutes les écoles primaires sans même consulter les enseignants,
les commissions scolaires et… les directions d’école. Surtout quand il écrit: «Nous avons conçu un
système qui privilégie la norme au détriment de la singularité.» 33
Le
ministre actuel entend donc donner davantage de pouvoir aux directions d’école qu’il
compare maladroitement à un «président d’entreprise qui n’aurait pas de voix au
conseil d’administration de son entreprise.» À ce que je sache, une école n’est pas la
propriété d’un directeur. Celle-ci lui est confiée. 32
De
plus, le député de Chambly, appartenant à la CAQ, transformerait les
commissions scolaires en centres régionaux de services à la disposition des
écoles. Encore ici, M. Roberge montre une certaine méconnaissance du
fonctionnement scolaire à quelques occasions. Tout d’abord, quand il écrit :
«Les écoles ont besoin d’être épaulées sur le plan administratif tandis que la
répartition des élèves doit se faire dans une perspective régionale.» 35 Mais
comment un centre de services peut-il avoir le pouvoir décisionnel de
déterminer la répartition des élèves? Je vois déjà la foire d’empoigne entre
écoles concurrentes, à moins que ce soit le ministère lui-même qui procéderait
à cette répartition. Combien d’autres arbitrages inter-écoles finiront ainsi dans
les bureaux des sous-ministres? Ensuite,
M. Roberge croit que la transformation des commissions scolaires entrainerait
d’«importantes économies». 35 Très bien, mais sur quelles études se base-t-il
pour arriver à une telle conclusion? L’expérience nous montre tout le contraire
si on pense à la fusion des municipalités, à la fusion des commissions scolaires
et à l’abolition des directions régionales du ministère de l’Éducation.
Par
ailleurs, le ministre Roberge affirme «sans crainte de se tromper» 35 qu’après
avoir discuté avec de nombreux directeurs d’école, la majorité d’entre eux sont
d’accord avec son idée de transformer les commissions scolaires en centres de
services. Ah bon. C’est particulier car, dans mon cas, c’est tout à fait
l’inverse! De nombreux directeurs doivent me mentir car, après tout, ils vivent
sous le règne de l’«omerta», comme prend la peine de l’indiquer le député de
Chambly.
Pour
M. Roberge, les commissions scolaires sont de mauvais gestionnaires. C’est un
peu ironique quand on pense que les membres des directions générales de
celles-ci sont presque toujours composées eux-mêmes d’anciens directeurs
d’écoles, ces fameux «capitaines à la barre». Il cite plutôt en exemple les
écoles privées qui, elles, sont évidemment administrées, et je le cite, par des
«gens responsables», la preuve étant que leurs bâtiments ne manquent pas
d’équipement, n’ont pas de toits qui coulent et ne sont pas gangrénés par la
moisissure. Comme si les habiletés de gestion de leurs dirigeants étaient la raison
de ce fait…
Chapitre 4 – Pour un
ordre professionnel pour les enseignants
Dès
le début de sa carrière, notre ministre était d’avis que les enseignants
devraient être régis par un ordre professionnel. Il explique qu’un ordre
professionnel détermine la formation initiale permettant d’accéder à la
profession (ce qui est déjà prescrit par la Loi sur l’instruction publique),
s’assurer que ses membres suivent une formation continue de qualité et traite
les plaintes provenant du public (ce qui est déjà fait par les directions
d’école et les commissions scolaires).
Il
cite ensuite une anecdote personnelle pour traiter du manque de
professionnalisme des enseignants. Alors qu’il était un élève de troisième
secondaire, il a été confronté à un enseignant ayant manifestement des
problèmes reliés à la consommation d’alcool. Malgré une plainte formelle des
parents du futur ministre, le prof «éméché a continué de sévir sans que la
directeur prenne les mesures nécessaires.» Mais que peut savoir réellement de
cette situation un adolescent de 14 ans à l’époque? N’y a-t-il eu vraiment
aucune mesure de prise? Et si c’est le cas, cela ne montre-t-il pas également
une certaine incompétence ou un désintéressement de la direction, ces fameux
«capitaines»? À la page 41, il estime que les directions, à qui il confierait
davantage de pouvoirs, manquent de formation, de leadership, de temps et de
latitude pour gérer adéquatement leur personnel. Alors, à quand un ordre
professionnel des directions scolaires, on se le demande?
M.
Roberge voit un ordre pour les enseignants comme un chien de garde, un gendarme,
un protecteur de l’élève. Nulle part, il ne semble comprendre la logique première
de ce qui doit guider la création d’un tel organisme : la volonté claire
des membres d’une profession de se doter d’une telle structure. Il ne cite
aucun exemple des ratés entourant l’imposition d’un ordre professionnel à des
enseignants au Canada. En guise d’argument,
il énumère les vertus qu’apporte l’Ordre des infirmières et infirmiers du
Québec : ratio infirmières-patients protégeant les malades, bonne qualité
des soins offerts, heures de travail limitées. Décidément, le ministre n’aurait
pas pu choisir pire exemple, n’est-ce pas, quand on connait la situation des hôpitaux
québécois? Il aurait pu aussi citer les bienfaits du corporatiste Collège des
médecins, de l’incorruptible Ordre des ingénieurs… et j’en passe.
Voilà.
J’ai arrêté ici mon analyse. J’ose espérer que cet exercice incomplet saura
vous indiquer la pertinence du propos de M. Roberge. Pour ma part, relire un tel livre m’a
suffi.
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