19 avril 2019

À propos de la dictature de l'autobus scolaire

L'autre matin, j'écoutais le chroniqueur François Cardinal parler des deux périodes de récréation maintenant obligatoires au primaire. Il dénonçait la lourdeur des conventions collectives, mais parlait également de la fameuse «dictature des autobus scolaires».

Il faut peu connaitre le réseau scolaire pour utiliser cet argument éculé. Les autobus scolaires n'imposent rien en soi. C'est simplement une bête logique de marché qui gouverne les heures de classe au Québec. Je m'explique.

Certaines écoles ont besoin que les élèves qui y sont inscrits soient transportés par autobus chaque jour pour diverses raisons. Dans les faits, c'est plus de la moitié des élèves du Québec qui doivent avoir recours à ce service comprenant plus de 8000 autobus. Ces écoles font donc affaires avec des compagnies de transport scolaire qui utilisent des véhicules spécialisés à cette fin. Il existe un nombre limité de ces compagnies. Entre ces deux partenaires, on verra pourquoi, s'est installé au fil des années un équilibre entre leurs demandes et leurs besoins.

Pour faire des profits, les compagnies de transport scolaire doivent maximiser l'équipement qu'elles détiennent. Un autobus scolaire coute autour de 110 000$ et ne peut pas servir plus de douze ans. Aussi, un même entrepreneur va tenter de rentabiliser sa flotte de véhicules en les utilisant plusieurs fois par jour. Un même autobus servira alors à transporter les élèves de deux ou trois écoles ayant nécessairement des horaires de classe différents. C'est pourquoi il est important de bien coordonner ces horaires sur une base locale ou régionale. C'est d'ailleurs ce que semble avoir compris le ministre de l'Éducation et le premier ministre du Québec en indiquant que, même s'ils ont l'intention d'abolir les commissions scolaires, ils créeront des centres de services régionaux qui auront entre autres comme mission de s'assurer de la gestion du transport scolaire. Je ne sais pas si ces deux décideurs ont aussi compris que ces centres devront nécessairement «encadrer» les horaires des écoles, mais c'est une autre histoire.

De leur côté, les commissions scolaires, par le biais des Services de l'organisation scolaire et du transport, déterminent et coordonnent l'horaire de toutes les écoles afin de permettre la maximisation de l'utilisation des autobus pour bénéficier de couts de transport moindres. On comprend que si toutes les écoles fonctionnaient indépendamment les unes des autres, les couts facturés à celles-ci seraient nécessairement plus élevés.

 Ce n'est pas la «dictature de l'autobus scolaire» qui mène les écoles du Québec. Il est théoriquement possible que toutes les écoles de la province commencent les classes à la même heure, si on est prêt à en payer le prix. Bref, il serait plus juste si des chroniqueurs comme François Cardinal parlaient de la «dictature de l'argent».

03 avril 2019

Même le PM s'emmêle!

Dans le débat entourant le projet de loi sur la laïcité, on se serait attendu à ce que l'équipe du gouvernement Legault soit consciente de bien maitriser tous les éléments de ce dossier explosif afin d'éviter des dérapages nuisibles à la tenue de discussions saines et éclairées.

Mais on a assisté au cours des derniers jours à des cafouillages importants. Le dernier en lice provient du premier ministre lui-même lorsqu'il a affirmé que les étudiantes en enseignement devraient choisir entre garder leur voile ou changer de profession.

J'aimerais bien qu'on m'explique où il est écrit que le projet de loi sur la laïcité vise ces stagiaires. Je croyais qu'il s'adressait à certains employés du gouvernement, ce que n'est pas formellement une stagiaire. Si c'était le cas, tous les étudiants en enseignement seraient bien contents de recevoir un salaire et une protection légale et collective. De plus, à moins que je ne me trompe, ce projet de loi permet à des enseignants des écoles privées de continuer à porter un signe religieux. Rien n'interdit alors à un étudiant d'effectuer un stage dans une école privée et d'y travailler par la suite.

Au moment même où le gouvernement est incapable de préciser comment sera appliquée cette loi, on peut se questionner sur le degré de préparation du gouvernement Legault pour mener à terme une loi aussi polarisante.

02 avril 2019

La vice première-ministre récidive!

Après avoir déclaré qu'un enseignant contrevenant à la Loi sur la laïcité pourrait travailler à titre de directeur d'école (quel illogisme!), la vice première-ministre et ministre de la Sécurité publique, Geneviève Guilbault, y est allée d'une nouvelle perle aujourd'hui.

En effet, la députée de Louis-Hébert a indiqué que les forces policières pourraient débarquer dans une école ou une commission scolaire dans le cadre de la Loi sur la laïcité  : «La loi, c'est la loi. Les gens [en autorité] vont aviser les services policiers. C'est comme l'application de n'importe quelle loi.»

Il est consternant que cette ministre ne sache pas qu'il existe d'autres manières de faire appliquer la loi dans une institution publique. Cela en dit long sur ses connaissances en la matière et en droit du travail. On imagine les policiers effectuer une descente en pleine classe pour appréhender un contrevenant, mener une enquête en interrogeant différents élèves, etc. 

Finalement, Mme Guilbault est revenue sur ses propos plus tard en journée. Mais cela nous en dit beaucoup sur l'équipe de la CAQ en place mais aussi sur la vision que certains de celle-ci ont sur le  fonctionnement d'une société de droit. On voudrait nourrir les appréhensions des opposants au projet de loi 21 qu'on ne ferait pas mieux. L'équipe de François Legault, en ajoutant les enseignants à sa liste de postes où le port de signes religieux serait interdit a ouvert une véritable boite de Pandore.