29 février 2008

Le leadership de Stéphane Dion

On remet beaucoup en question le leadership du chef du Parti libéral du Canada, Stéphane Dion.
Je regarde cette photo et je me dis qu'il est bien capable de se pendre tout seul...

Éducation des enfants: faisons des liens

Beaucoup de nouvelles qui semblent disparates et qui sont pourtant reliées à un thème commun: l'éducation des enfants au Québec. Allons-y tout de go.



Tout d'abord, il y a tout plusieurs manchettes entourant les centres de la petite enfance CPE. On se rappellera que ceux-ci ont été créés dans la foulée des États généraux sur l'éducation afin de s'assurer que les jeunes enfants québécois reçoivent une certaine éducation préscolaire afin de maximiser leurs chances de réussite à l'école et dans la société.


Or, si l'accès à ce service est assez compliqué en raison d'un manque de places, voilà qu'on restreint encore plus la possibilité aux familles pauvres ou des classes moyennes en instaurant des frais connexes. Ainsi, au début de la semaine, un juge a autorisé les garderies à exiger plus que les 7$ prévus par la loi. Aujourd'hui, le Centre de la petite enfance Funville, situé dans Verdun, demande à la cour de légaliser ses frais de membership annuels de 50 $, obligatoires pour tous les parents. On laissera les magistrats débattre de cette question sur le fond, mais force est de constater qu'on est rendu loin des garderies à 5$.


En même temps, on constate que la plupart des centres de la petite enfance de Québec et de Chaudière-Appalaches inspectés en 2006-2007 ont contrevenu à divers règlements relatifs à la sécurité et à l'hygiène. Un établissement était tellement poussiéreux qu'il présentait un risque pour la santé des enfants.


Enfin, une étude (ici, ici, ici et ici) effectuée par la Direction de santé publique de Montréal (DSP) et intitulée En route pour l'école! démontrait que plus du tiers des enfants de cinq ans de l'île de Montréal n'avaient pas le degré de préparation nécessaire pour commencer l'école. Pour être dans ce cas, l'enfant devait éprouver des difficultés dans au moins un des cinq critères suivants:
  • santé physique et bien-être;
  • compétence sociale;
  • maturité affective;
  • développement cognitif et langagier;
  • habiletés de communication et connaissances générales.
Si l'on compare les résultats montréalais à ceux d'études similaires au Canada, cette ville est néanmoins au-dessus de la moyenne canadienne. Règle générale, les quartiers défavorisés s'en tirent moins bien que les voisins plus aisés. Qu'on pense à Mercier-Est/Anjou, Saint-Laurent, Montréal-Nord, Parc-Extension et Hochelaga-Maisonneuve.


Résultat surprenant également: des quartiers ou les conditions socioéconomiques sont favorables s'en tirent parfois moins bien que d'autres moins nantis. C'est le cas du territoire du CLSC Saint-Laurent comparé à celui du quartier Saint-Michel, dont on connaît les difficultés reliées au phénomène de la pauvreté. On explique ce phénomène par l'engagement des divers intervenants dans ce domaine comme le démontre ce texte: «On sait que dans ce quartier, depuis plusieurs années, il y a une concertation locale organisée et très efficace. Plus une collectivité locale se prend en charge, meilleurs sont les résultats», explique le Dr Lessard, directeur de la Santé publique de Montréal.


C'est généralement en lecture, en écriture et en mathématiques que les petits Montréalais présentent les lacunes les plus évidentes. Et ces dernières peuvent avoir des conséquences importantes pour le futur scolaire de ces jeunes.


«Quand l'enfant vulnérable arrive en première année, il apprend moins bien que les autres, il ressent les difficultés, il a de la misère à communiquer avec les autres, affirme le directeur de la Santé publique de Montréal, le Dr Richard Lessard. Les études autres que la nôtre qui ont suivi ces enfants-là démontrent qu'ils sont condamnés à l'échec scolaire et, éventuellement, au décrochage.»


«L'intervention de zéro à cinq ans est capitale. Quand l'enfant est vulnérable dans un domaine, comme la lecture, il y a une contamination rapide dans les autres domaines», déclare Nathalie Goulet, chercheuse à la Direction de la santé publique.


Parmi les moyens pour corriger cette situation, les chercheurs soulignent le rôle primordial des garderies subventionnées et les pré-maternelles.


Or, seulement 16 des 60 écoles très défavorisées de l'île de Montréal offrent le service de la pré-maternelle.«Depuis 2000, l'implantation des maternelles 4 ans est bloqué dans les milieux défavorisés», souligne Nathalie Morel, présidente de l'Alliance des professeurs de Montréal.


Quant aux CPE, on ne retrouve qu'une place pour deux enfants à Montréal. Et ce sont dans les milieux défavorisés que ces places font le plus défaut. «Les familles à faible revenu, celles pour qui la fréquentation est particulièrement bénéfique, ont-elles un accès équitable à ces places?», questionne le rapport de la Direction de la santé publique de Montréal. Et devinez dans quel secteur de Montréal le nombre de places disponibles est le plus bas? Que ceux qui ont répondu Verdun (Oui, oui, Funville est justement située dans ce quartier!) se donnent un morceau de robot!


Enfin, je m'en voudrais de ne pas terminer en soulignant ces informations tirées de ce texte d'Isabelle Hachey:
  • Selon une enquête réalisée en 2006, la grande majorité des familles utilisatrices des services de garde à 7$ sont biparentales, et près de la moitié ont un revenu familial de 60 000$ et plus.
  • À peine le quart des 45 000 enfants issus de familles prestataires de l'assistance-emploi sont accueillis dans les services de garde du Québec.
  • «Dans une famille où les parents travaillent, la mère appelle aussitôt qu'elle tombe enceinte pour inscrire son futur enfant sur les listes d'attente, explique Gina Gasparrini, présidente du Regroupement des CPE de l'île de Montréal. Les familles vulnérables ou en crise sont moins organisées. Elles ne penseront pas tout de suite à inscrire leur enfant sur les listes. Donc, leurs chances d'avoir une place sont moindres.»

L'ordre public

En lien avec le billet précédent, voilà que la notion d'art et d'ordre public fait surface dans l'actualité avec cette nouvelle (ici et ici) le gouvernement Harper promeut un projet de loi qui restreindrait que le financement public des films et des émissions de télévision aux oeuvres qui ne contreviennent pas à l'ordre public, c'est-à-dire des oeuvres qui «contiennent, de l'avis du ministère, des scènes sexuellement explicites, de la violence excessive ou de la propagande haineuse.»

Allez lire les textes en lien: vous verrez des aspects absolument inquiétant. Par exemple, la décision de priver une oeuvre de financement public serait laissé à la discrétion d'un seul fonctionnaire. Ou encore le fait qu'il ne s'agisse pas de censure, selon la directrice générale adjointe aux industries culturelles de Patrimoine Canada, Annette Gibbons:. « La censure, c'est quand on dit qu'une production ne peut pas être montrée au public. Ce n'est pas ce qu'on fait. On dit que l'on ne veut pas financer certaines choses qui pourront être réalisées [sans subventions]. Le rôle de l'État est de bien gérer les fonds publics.»

Doit-on préciser qu'il existe déjà une sélection des films quant au financement public qu'on leur accorde et des lois quant à la propagande haineuse, par exemple? Doit-on faire la liste des films qui ont connu le succès sur la scéne international et qui n'auraient pas été financés avec de telles dispositions?

Bref, Patrick Senécal n'a qu'à bien se tenir s'il souhaite qu'on porte d'autres de ses romans au grand écran. Ça doit être un complot.
En complément ce texte.

27 février 2008

Un petit mot à certains visiteurs

Monsieur A, Zed, Hortensia, anonyme, Sylvain, Une femme libre, Bobbiwatson, Bibco, Mia, Blogue l'éponge, Noisette, Détracteur, Souimi, Un autre prof, En saignant, Malou, Safwan, Catherine, Laurence:

Je m'excuse du délai que j'ai pris pour répondre à vos commentaires dans des messages précédents. Sachez que j'apprécie votre visite dans ce chez-moi virtuel et que vous êtes toujours les bienvenus!

Sur ce, je vais me coucher. Il est tard et un bon livre m'attend.

26 février 2008

De l'éducation préventive?

On a un tout nouveau bibliothécaire-technicien-responsable-queuque-chose-du-genre-là à la bibliothèque de mon école secondaire.

Un de ses premiers gestes a été de retirer des tablettes deux oeuvres de Patrick Senécal: Le vide et Aliss. Celles-ci avaient été achetées par la bibliothécaire-technicien-responsable-queuque-chose-du-genre-là précédente. Un égarement, sans doute. Heureusement qu'elle est partie à la retraite, sinon quels dommages pyschologiques elle aurait pu causer chez les tout-petits à qui on enseigne!

Aucune explication n'a évidemment été donnée pour expliquer ce geste puisque le tout s'est fait sans qu'on n'en soit informé. Je l'ai plutôt su par une enseignante au secteur des adultes, secteur qui a hérité des volumes maudits et qui accueille pourtant des élèves de l'âge des miens. Le plus ironique est que Patrick Senécal donnait justement une conférence aux élèves de ce secteur la semaine dernière et qu'il a même autographié les ouvrages honnis!

On présume que le contenu dépravé et pervers de ces oeuvres ne convenait pas à des lecteurs du secondaire ou qu'il pourrait leur donner des idées suicidaires. Pourquoi accompagner les élèves et les guider dans leurs lectures quand on peut simplement restreindre les romans qu'on leur offre? Pourquoi les éduquer quand on peut les maintenir dans une ignorance littéraire? Le monde te fait peur? Ferme fort les yeux, mon tout petit!

Dans la même veine, qu'attend-on pour retirer des tablettes de la bibliothèque de mon école les livres suivants?

Si vous avez d'autres suggestions, n'hésitez pas à me les transmettre. Youppie! On se croirait de retour au bon vieux temps de la mise à l'index! Farenheit 451, nous voici!

Il ne manque plus que le petit frère du nouveau bibliothécaire-technicien-responsable-queuque-chose-du-genre-là soit embauché aux ressources informatiques de ma CS. Fini l'accès à YouTube et à toutes ces cochonneries qu'on trouve sur le Net! Quand je pense qu'on peut prendre connaissance du site du Parti marxiste-léniniste du Canada à partir d'un ordi de mon école, il est grand temps que quelqu'un mette ses culottes et interdise tout cela. Protégeons nos jeunes!

Oh! en passant, ma bibliothèque de classe renferme tous ces titres dangereux pour notre saine jeunesse. Je sens que je vais faire un petit Hervé Jodoin de moi d'ici la fin de l'année.

25 février 2008

Tant qu'à se relâcher...

Une petite nouvelle insolite. Saviez-vous que le ministre de l'Éducation du Meghalaya, un petit état du nord-est de l'Inde, se serait déjà appelé... Frankenstein Momin. C'est pas chez nous qu'on aurait du plaisir comme ça!
Vous ne trouvez qu'il y a une ressemblance avec la photo du dessous?

22 février 2008

21 février 2008

Des nouvelles masquées

À la veille de la semaine de relâche, j'en profite un peu pour donner quelques nouvelles de mon monde. Certaines sont scolaires, d'autres plus personnelles.

Ma bibliothèque de classe

Comment tuer une idée permettant de faire lire davantage des élèves? En n'appuyant pas les initiatives des enseignants. L'exemple de ma bibliothèque de classe illustre bien à quel point certains gestionnaires de l'éducation gestionnent et ne manquent des occasions de donner un coup de pouce aux initiatives significatives.

Résumons. Au début de l'année, je commence à prêter des livres aux élèves de mes classes. Je les range dans mon armoire à dictionnaires, un vieux truc en métal tout rouillé et pas du tout invitant. Comme j'ai quelques jeunes assez curieux, je réussis à leur faire lire du Orwell, du Baillargeon, du Carroll, du Sénécal, du Pelletier, du Werber, du Zemiatine... et ils en redemandent! Sauf que l'emballage manque d'attrait et de fini.

C'est dommage, mais il est plus facile d'attraper des mouches avec du miel qu'avec du vinaigre. Alors, je fais la demande à ma direction si elle peut trouver une bibliothèque vitrée dont on peut barrer les portes quand je ne suis pas là. Elle me répond que mon projet est intéressant et qu'elle tentera de satisfaire ma demande.

Le temps passe et j'accumule les livres dans des boites de carton en attendant d'avoir un meuble ou les ranger. Le temps passe et rien ne se passe. Rien ne se passe sauf le temps. Je ne refile plus maintenant mes bouquins qu'à quatre ou cinq élèves alors qu'en début d'année, l'intérêt était plus grand.

Il y a quelques semaines, j'ai renouvelé ma demande en parlant dans le vide. Dans le vide sidéral du gestionnaire qui punche comme un employé syndiqué dans une shop de saucisses.

Hier, au hasard de mes promenades dans ma grande école, devinez quelle vision s'offre à mon regard d'épieur professionnel? Celle d'une bibliothèque aux portes vitrées qui traîne dans le fond d'un local administratif. Vide. Vide comme l'espace qu'on retrouve dans la tête de certains gestionnaires. Couverte de poussière. Inutile. Tout aussi inutile que mon projet de bibliothèque de classe, je le comprends maintenant.

Bordel d'inefficacité organisationnelle!

Un de moins en classe

La semaine dernière, nous étions un de moins en classe. Et ce n'était pas un de mes élèves qui était absent.

Vous vous souvenez de Maude, cette élève qui était venue me demander son aide parce qu'elle était tombée enceinte? Elle s'est fait avorter. Solide, battante. Avec une formidable capacité à amener les gens à la surestimer...

Je me suis informé sans m'imposer. La travailleuse sociale suivait le dossier, le père de l'enfant l'a accompagnée. Je me suis informé sans insister. La délicatesse me demandait de la laisser faire les premiers pas tout en montrant que j'étais là pour elle.

Ses parents ont appris la nouvelle quelques jours avant l'avortement. Après quelques instants de déception et de colère, ils ont compris les craintes de leur fille et ils l'ont épaulée. Imaginez vivre une pareille épreuve sans pouvoir partager avec sa mère et son père.

Maude prend du mieux. Comme il s'agit d'une élève très faible en français, je la couve, je la réconforte et je la guide pour qu'elle puisse réussir son année. Solide. Battante. Travaillante.

Elle a le meilleur prof du monde. Celui qui fera tout pour qu'elle puisse réussir. Elle le mérite. Comme tous mes élèves, d'ailleurs.
Prof masqué au concert

Hier soir, Prof masqué était au concert des Glorieux de l'Orchestre symphonique de Montréal. Je ne sais pas pourquoi, mais je pensais à Prof malgré tout. Et en écrivant ce billet, je comprends pourquoi. Je parle musique classique pour une rare fois sur ce blogue!

Trois oeuvres étaient au programme, mais la foule n'en avait que pour la dernière au programme: Les Glorieux de François Dompierre. Les musiciens de l'OSM aussi, il faut croire, puisque l'interprétation des deux premières oeuvres étaient plutôt décevantes, surtout dans le cas de Satie que j'apprécie grandement.

La soirée a véritablement pris son envol avec ce récit symphonique et la présence de certaines des légendes du Canadien de Montréal. Des musiciens qui font la vague, Kent Nagano qui dirige ses musiciens avec la Sainte Flanelle sur le dos: l'atmosphère était sympathique et bon enfant. Quand deux institutions montréalaises s'unissent pour célébrer un événement important, on ne peut que se réjouir.

J'ai assisté au concert avec mon chandail blanc du Canadien. Blanc, comme le veut la tradition, parce que nous étions à Montréal.

Ein Heldenleben opus 40 (Une vie de héros) de Richard Strauss
Sports et divertissements d'Érik Satie
Les Glorieux de François Dompierre

Relation paternelle dans la tourmente

Je devais assister à ce concert avec Fille masquée, mais rien ne va plus depuis deux semaines. Quand une relation avec sa fille est viciée par une mère possessive et centrée sur elle-même, il ne reste pas toujours beaucoup de place pour un père qui a dû toujours faire des compromis au risque de perdre sa propre crédibilité aux yeux de son enfant.

Sauf que Père masqué a décidé de cesser de faire des compromis et que sa fille ne comprend pas pourquoi, ne comprend pas cette attitude nouvelle, ne comprend pas pourquoi son père préfère ne pas la voir que de se faire engueuler par une mère qui ne songe qu'à sa personne.

Et puis, Fille masquée, si elle a les défauts de son père, a aussi ceux de sa mère. Incapable de souplesse. Douée pour se mentir à elle-même.
On oublie l'idée d'aller au hockey ensemble. J'irai avec le beau-père. Il saura apprécier.

Je ne peux ni ne veux tout expliquer. Mais j'ai le coeur triste, vide et inutile. Je pense aller le poser dans une bibliothèque que je connais.

20 février 2008

Il y en a qui ne comprendront jamais! (modifié)

Drôle de coïncidence: alors qu'on se penche sur l'avenir des commissions scolaires à Québec, le Journal de Montréal publie une série de reportages sur les dépenses des commissaires scolaires (ici, ici, ici et ici) Vin, foie gras, sculpture inuite, je vous épargne le reste... rien n'est trop beau pour la classe ouvrière!

Notons qu'à Montréal, ce sont les élus qui ont payé les boissons alcoolisées de leur poche. C'est déjà un début! La présidente de la Commission scolaire de Montréal, Diane de Courcy, explique:
«L'alcool, c'est un luxe. Si on veut en prendre, on se le paie soi-même.»

Quoi qu'il en soit certains ne comprendront jamais. Il y a aussi eu une lieutenant-gouverneur comme ça. Qu'attend André Caron, président de la Fédération des commissions scolaires du Québec (FCSQ), pour mettre un frein à de telles dépenses? Que les institutions que regroupe sa fédération soient totalement discrédités? Il a l'occasion rêvée de passer un message clair et fort.
Voici la réaction de M.Caron ce matin dans le Journal de Montréal:
Mais la Fédération des commissions scolaires a plutôt estimé, hier, qu'il est «tout à fait normal» de souligner de la sorte l'arrivée et le départ de commissaires

«Il va de soi, dans notre société, que l'on souligne le départ ou l'arrivée d'élus ou de personnes oeuvrant dans nos organisations», a affirmé André Caron, président de la FCSQ, dans un communiqué.

Ce dernier juge qu'il est normal que des organismes publics remercient ou accueillent correctement des personnes qui ont décidé de s'engager dans le développement du système d'éducation.

18 février 2008

Après moi le déluge!

Mme Masquée me le dit assez souvent: «Tu n'aimes pas Pauline Marois.» Le constat est clair, brutal, sans appel. Madame Marois, pour moi, aime la politique, aime le pouvoir, aime ses idées. Bref, Mme Marois semble follement s'aimer. Comme tous les politiciens, d'ailleurs. C'est pour cela qu'on les élit.

Hier soir, on a pu constater sur le plateau de TLMEP que, selon la grande Dame de l'ile Bizard, la réforme scolaire a connu des ratés à cause des Libéraux. Ce matin, Mme Marois en rajoute une couche dans Le Devoir sur ce qu'elle pense de certains membres de son parti à l'époque et le constat est révélateur. Pour quelqu'un qui se plaint des interventions des Landry et compagnie qui mineraient l'unité de sa formation politique, vous verrez qu'elle ne donne pas sa place.

Dans un entretien qu'elle livrait dans le cadre de la publication du livre intitulé Les Deux Principales Réformes de l'Éducation du Québec moderne (Presses de l'université Laval), la chef du Parti québécois critique à peu près tout le monde qui a occupé le poste de ministre de l'Éducation au cours des 20 dernières années, sauf elle, bien sûr.

Ainsi, elle reproche à François Legault d'avoir retardé l'application de la réforme d'un an: «Je pense que ce n'était pas justifié. Il n'avait qu'à dégager du personnel et quelques ressources pour accompagner les enseignants et pour prendre les quelques décisions de base qu'il restait à prendre. Je trouve ça dommage.» Bref, François aurait «choké» alors que la situation ne demandait que quelques ajustements. Le printemps s'annonce beau sur les banquettes de la deuxième opposition officielle entre ces deux politiciens.

Pour qui se souvient de ces folles années ou les bulletins comprenaient des «bonhommes sourire», il est évident que «quelques ressources pour accompagner les enseignants» auraient été suffisantes. Pensez à toute l'improvisation qui accompagne encore la réforme aujourd'hui, au retard dans la création des programmes et des manuels et dites-vous que, sous Mme Marois, rien de tout cela n'aurait existé grâce à sa gestion avisée et magique.

Elle égratigne aussi au passage (peut-être à juste titre) son prédécesseur Jean Garon qui aurait mal défini le mandat des États généraux sur l'éducation: «Quand je suis devenue ministre de l'Éducation, j'avais l'impression que cette commission n'irait nulle part [sic].» Mais nul doute que la vaillante Pauline a redressé les choses.

Quant à son chef Lucien Bouchard, elle déplore son pessismiste quant au réseau de l'éducation à l'époque: «Il pensait que ça n'allait pas bien du tout en éducation. Je crois qu'il se trompait d'ailleurs, mais enfin, cela étant, il m'avait demandé de lui proposer des avenues pour agir, pour corriger la situation qu'il percevait.» Donc, si on comprend bien ce savoureux passage et si on est un peu de mauvaise foi, Mme Marois a corrigé quelque chose qui n'allait pas si mal...

L'actuelle chef du PQ raconte ensuite comment, partie de son expérience personnelle, elle a su, au gré des États généraux sur l'éducation, se doter d'une vision quant à la chose éducative: «Je ne connaissais rien d'autre que mon expérience personnelle, je n'avais pas réfléchi à l'éducation. Alors, je me suis plongée corps et âme dans ça. Et puis, les états généraux, c'était une chance extraordinaire pour moi. J'y faisais mon apprentissage en même temps.»

Enfin, Mme Marois témoigne de son profond attachement à la réforme actuelle : «Si on retenait quelque chose de moi concernant mon apport au gouvernement, j'aimerais que l'on retienne ça, le préscolaire et la réforme au primaire et secondaire.» Cet attachement, quant à moi, la rend aveugle et on comprend mieux pourquoi ce sont les autres qui sont responsables de tous les déboires du Renouveau pédagogique.

Bien sûr, depuis cet entretien, elle a nuancé ses positions en indiquant que le Renouveau pédagogique a connu des difficultés. Il «a bifurqué en cours de route [...], il y a eu quelques dérapages [...], et je crois que ça prend certains redressements». Mais mon impression est que madame Marois reviendrait à ce qu'était la réforme à ses tout débuts.

Chose certaine, ce n'est pas avec de tels commentaires que madame Marois saura se faire aimer des gens de son propre parti et il ne faudra pas se surprendre si on assiste à quelques règlements de comptes bientôt.

Quant à moi qui pensais voter Parti québécois aux prochaines élections, madame Marois commence sérieusement à me faire douter de lui accorder mon vote.

17 février 2008

Pauline Marois à TLMEP (ajout)

Entrevue toujours complaisante de Guy A. Lepage à Tout le monde en parle ce soir. Sur le plateau, Pauline Marois. (compte-rendu de La Presse ici)

Pour madame Marois, les fondements de la réforme sont solides et valables, mais elle croit que celle-ci a besoin qu'on y apporte certaines corrections. Elle estime que les ministres qui se sont succédé à l'éducation devraient se sentir plus responsables de celle-ci et impute aux Libéraux les difficultés que le Renouveau rencontre actuellement. Elle blâme notamment l'ex-ministre Reid d'avoir retardé d'un an son implantation sans avoir consulté ses hauts fonctionnaires.

Un des moments forts de cette émission fut l'échange entre Mme Marois et l'écrivain et peintre Sergio Kokis. Lorsque ce dernier lui indique que l'état du français est lamentable au Québec et ne s'améliore pas, Mme Marois lui a répliqué qu'on partait de loin et qu'on a fait des pas de géant, que les choses s'améliorent.

Quelques petites observations.

Si mesdames Marois et Courchesne s'entendent toutes les deux pour affirmer que la réforme a besoin de correction, il est évident que la première croit davantage aux bases de celle-ci que le seconde.

Par contre, s'il est normal que Mme Marois blâme ses adversaires pour ce qui va mal en éducation, elle aurait pu avoir l'honnêteté de reconnaître certains points:
  • Le Parti québécois a été responsable de nombreuses coupures en éducation qui ont mis à mal le réseau tout entier. De plus, c'est sous sa gouverne qu'on a supprimé de nombreux postes de conseillers pédagogiques et incité des enseignants à prendre leur retraite (d'ailleurs, on est en pénurie de personnel enseignant depuis ce temps).
  • Actuellement, le réseau de l'éducation, même avec un délai de deux ans dans l'application de la réforme, nage toujours en pleine improvisation quant à des programmes comme les maths, par exemple. Imaginez le désastre si Pierre Reid n'avait pas retardé les choses.

Enfin, je ne suis plus capable qu'à chaque fois qu'on parle de la situation actuelle du français au Québec, on réponde toujours que c'était pire dans le temps et qu'on a fait des bonds de géant.

Les comparaisons avec le passé sont faciles et trompeuses. De plus, si on veut comparer, on entre actuellement dans une ère ou les enfants n'écrivent pas mieux que leurs parents. Qu'on lâche la période d'avant le rapport Parent et qu'on constate que le MELs dépense 11 miliards par année pour diplômer des jeunes qui peinent à écrire dans un français convenable.

Mais - et c'est peut-être vache ce que je vais écrire - il ne faut pas trop en demander à des politiciens qui ont connu une autre époque et dont les références sont toujours un passé qui n'existe plus depuis longtemps.

Tiens, tiens.. Pierre Reid commence à en avoir soupé des attaques de madame Marois. Dans un texte publié dans La Tribune, on peut lire: «Pierre Reid lui reproche d’avoir été elle-même une mauvaise ministre de l’Éducation, alors qu’il était recteur de l’Université de Sherbrooke. Mme Marois avait sabré dans les budgets du ministère, notamment dans le soutien aux élèves en difficulté.»

Encore un jour ou deux et quelqu'un va resortir le fait qu'elle avait dépensé une véritable fortune pour réaménager ses bureaux ministériels et qu'elle aimait beaucoup les toilettes silencieuses. Dénoncer la culture du fric n'empêche pas d'aimer le luxe.

16 février 2008

Les maths en pleine confusion

Vous vous souvenez de mon billet sur les mathématiques au secondaire. Une journaliste de La Presse, Isabelle Hachey, a creusé le dossier pour en faire ressortir les points suivants (ici et ici).

Le programme se divise en trois séquences qui ne sont pas basées sur le résultats des élèves, mais leurs intérêts personnels. Fini les 416, 426 et 436! Résultat: on risque de se retrouver avec des groupes hétérogènes ou l'élève très faible côtoyera l'élève très fort.

Certaines écoles, généralement petites ou en régions éloignées, ne pourront ou voudront pas offrir toutes les séquences. «Elles sont si différentes les unes des autres qu'on ne pourra les regrouper dans une même classe, comme on le fait actuellement avec les cours de maths 426 et 436», explique la présidente de la FSE, Johanne Fortier. «Que vont faire les élèves si la séquence qui les intéresse n'est pas offerte par leur école? Vont-ils être forcés de déménager, ou de se tourner vers des écoles privées?», demande Éric Dion, président du Syndicat de l'enseignement de Grand Portage, dans le Bas-Saint-Laurent.

Le MELS n'a toujours pas indiqué quels cours seront des préalables pour accéder aux différents programmes collégiaux.

Un dernier point: je vous rappelle que la réforme a vu son implantation reporté de deux ans au secondaire, si j'ai bonne mémoire. C'était à la demande des profs, ces mécréants qui voulaient la saboter et qui boycottaient les ateliers de formation, entendait-on ici et là.

Saboter? Boycotter? Pas utile. Le MELS, même avec deux ans de plus pour se préparer, se charge très bien de faire le travail tout seul.

15 février 2008

Les directions «moumans» (modifié)

AVERTISSEMENT: ce blogue est une fiction. Il ne raconte que des histoires fausses. Celles-ci ne sont jamais survenues dans la réalité et encore moins dans mon quotidien.

J'ai une nostalgie de l'époque ou, quand un élève était envoyé chez le directeur, on savait qu'il allait en revenir moins heureux et moins fringuant. La seule mention de ce mot de trois syllabes (DI-REC-TEUR) suffisait à calmer les ardeurs des plus téméraires et à remettre dans le droit chemin les plus déviant. Du moins, dans mon passé nostalgique.

Aujourd'hui, un directeur semble être devenu un confident pour l'élève, un psychologue, un conseiller et un soutien.

Prenons le cas de cet élève qui a harcelé un étudiant handicapé, une élève noire et qui, depuis le début de l'année se vante d'avoir brûlé deux profs tout en affirmant vouloir en ajouter un troisième à sa liste.

Tout d'abord, cet élève ne harcèle pas sa consoeur noire: il l'intimide. Ce n'est pas pareil. Ensuite, il n'existe pas de dossier formel relié à son comportement. Donc, il est impossible de mettre en branle des mécanismes pour régler ce problème. Enfin, il en est officiellement à sa première offense cette année: il faut donc y aller progressivement, même si l'année d'avant, il cumulait les écarts.

À cela s'ajoute le fait que les enseignants sont, semble-t-il, des «momans» qui attendent que «popa-directeur» fasse la discipline.

Bref, vous voyez le tableau: un élève avec lequel la direction n'a pas de prise et pour lequel elle attend des enseignants qu'ils lui remettent suffisamment d'informations pour intervenir, même si dans les faits... Et j'oublie la paperasse que la direction créé elle-même (ça l'occupe) et nous demande de compléter. C'en est rendu tellement absurde que les choses sont plus simples et plus rapides quand il s'agit envoyer un élève consulter un psychologue parce qu'on pense qu'il est suicidaire que de lui donner une sanction pour un comportement connu de tous, sauf la direction qui demeure cloisonné dans son bureau. On s'englue dans des démarches énergivores pour gérer des petits cons alors que les élèves en difficulté d'apprentissage et les poqués sont souvent mis sur la touche.

Bien sûr, un élève harceleur a besoin d'aide, mais il a tout d'abord besoin de sentir que son comportement est inacceptable, condamnable et condamné.

Allons vers un autre cas. Prenons un élève qui manque l'école deux jours par semaine depuis le début de l'année. Ne parlons pas du fait que ses parents motivent ses absences avec une fantaisie remarquable. Même si j'ai eu quelques discussions avec cet absent chronique, signalé le cas aux autorités en place, rien ne bouge. Ce n'est qu'en février, alors que j'ai finalement décidé que la farce avait assez duré et que je le mettais à la porte de mon cours pour qu'il me fasse un bilan médical, que la direction décide de le rencontrer. Il fallait voir la mine réjouie de mon supérieur hiérarchique m'expliquer que l'élève avait fait une très belle réflexion sur sa situation actuelle et qu'il allait corriger son comportement: «On a parlé pendant une heure et il m'a promis qu'il allait s'améliorer.»

Misère... Combien on parie qu'il ne changerait rien de son comportement? Les enseignants sont des «moumans» semble-t-il. Permettez-moi d'en douter.

Et puis, il y a cette jeune qui a signé un contrat de réintégration qui prévoit qu,elle serait suspendue à la mondre école buissonnière. Une semaine s'écoule et elle sèche déjà. Il faut lui laisser une chance, elle commence...

Terminons avec ce dernier élève qui enfreint une règle de l'école en utilisant son cellulaire dans un corridor. La règle, c'est la règle. Elle manque peut-être d'intelligence, mais elle s'applique encore. L'élève refuse de s'identifier, refuse de me remettre l'objet interdit.

Suis-je un adulte en position d'autorité? Manifestement, non.

L'école est-elle en position d'autorité? Non. C'est trop vieux jeu parler de discipline.

13 février 2008

L'apprentie pédagogue

Après Michelle Courchesne et ses tonnes de copies (...), c'est au tour de Pauline Marois de jouer à l'apprentie pédagogue.

Cette dernière propose que chaque petit Québécois ressorte de l'école bilingue en mettant sur pied un programme d'immersion pour tous au primaire. Au départ, madame Marois avait en tête que l'enseignement de certaines matières de la cinquième et sixième année du primaire soient enseignées en anglais, notamment l'histoire et la géographie. Finalement la chef du Parti québécois a reconnu qu'elle n'avait pas choisi les bonnes matières pour illustrer son idée et y allait d'une lettre ouverte dans les journaux pour corriger le tir en général. Il n'y a pas de doute: madame Marois a longuement réfléchi avant d'ouvrir la bouche.

Alors que de nombreux souverainistes dénoncent cette idée, dont Gérald Larose, Yves Michaud et Victor Lévy-Beaulieu, un de ses députés est venu à sa recousse aujourd'hui. Sylvain Simard, qui a déjà été ministre de l'Éducation, croit qu'il «faut qu'il y ait à quelques occasions dans un cursus scolaire, à la fin du primaire et du secondaire, des moments où on apprend vraiment une langue.» Ouf! M. Simard mentionne aussi qu'actuellement, bien des jeunes finissent leur secondaire sans pouvoir parler anglais. Voilà un constat rassurant d'un individu qui a été le premier responsable de l'éducation au Québec!

Personnellement, on peut parler d'un très mauvais moment pour aborder un tel sujet alors que la ministre Courchesne dévoilait son plan sur l"amélioration du français et encore plus si on pense au fait que l'Office de la langue française tient cachées des études sur la langue de Gilles Vigneault au Québec. Anglais intensif? Encore faut-il avoir les enseignants pour mettre une telle mesure de l'avant!

Mais là ou j'estime que madame Marois dérape, c'est lorsqu'elle écrit:
«Le Québec doit renforcer les critères d'application de la loi 101, intensifier la protection de notre langue, garantir sa visibilité, s'assurer d'un meilleur apprentissage du français tant pour ceux qui arrivent ici que pour nos propres enfants. C'est un projet de loi qui va exactement dans ce sens que j'ai déposé à l'Assemblée nationale. Car là est notre premier défi. Et notre vraie lutte!
En fait, qu'ai-je dit en parlant de l'apprentissage intensif de l'anglais? Deux choses.
D'abord, et on semble l'oublier, que nos enfants parlent, écrivent et lisent leur langue maternelle avec plus de rigueur.
Comment? En faisant en sorte, de la première à la quatrième année, que ce soit le français qu'ils apprennent, et le français seulement, pour que, avant de savoir les mots d'une autre langue, ils soient capables d'écrire, de lire, d'épeler la leur.
Voilà ce que j'ai d'abord dit.»
Dans la même veine, en entrevue à 98,5, madame Marois indiquait qu'un jeune de cinquième année du primaire maîtrisait suffisamment sa langue maternelle pour vivre une expérience d'immersion en anglais.

Je vais aller vérifier les mesures que le Parti québécois entend mettre de l'avant pour améliorer le français dans nos écoles. Mais je suis sans doigt devant la vision qu'ont certains politiciens de la maîtrise du français de plusieurs de nos élèves. Ça doit être les muffins au pot.

12 février 2008

La nouvelle orthographe pour aider nos jeunes?

Dans un article du 8 février dernier, la journaliste Isabelle Hachey se demandait si on ne pouvait pas améliorer la maîtrise de la langue écrite chez les jeunes en ayant recours à la nouvelle orthographe. Elle ramène cette idée dans l'actualité en soulignant que le rapport Ouellon suggérait d'accepter les nouvelles graphies acceptées en 1990 par l'Académie française, une idée que la ministre de l'Éducation. Michelle Courchesne n'a pas retenue.

On explique souvent la piètre qualité de l'écriture des jeunes en affirmant la langue française est compliquée alors que l'italien et l'espagnol ont su simplifier leur grammaire et leur orthographe. Pour Chantal Contant, chargée de cours à l'UQAM et membre du GQMNF, les jeunes Québécois sont en quelque sorte victimes de cette façon de faire : «À 8 ans, les enfants espagnols sont capables d'écrire une lettre sans faute à leur grand-mère. Nos adolescents de 17 ans en sont incapables sans faire 10 fautes par paragraphe. Pourquoi? Ce n'est pas l'enfant francophone qui est moins brillant, c'est qu'il y a plus d'embûches dans la langue française.»

Vous me permettrez de décrocher un peu devant ce discours pour plusieurs raisons.

Tout d'abord, j'ai suivi un atelier animé par madame Contant lors du dernier congrès de l'Association québécoise des professeurs de français (AQPF). De mémoire, je me rappelle qu'elle nous affirmait que ce renouvellement de la langue ne se voulait pas laxiste et n'avait pas tant pour but de faciliter la tâche aux jeunes scripteurs que de régulariser des anomalies de la langue française. Elle indiquait aussi aux participants présents que les nouvelles graphies auraient un impact mineur sur leur façon d'écrire un texte.
Pour qui s'intéresse aux modifications qu'on souhaite apporter à la langue française, cette rénovation linguiste est bien timide et manque parfois de cohérence. Honnêtement, on est loin d'une réforme majeure. Je doute donc qu'elle fasse des miracles dans nos écoles et afffirmer qu'elle permettrait aux jeunes Québécois de mieux écrire serait un brin exagéré.

Également, on souligne rarement que les erreurs de nos élèves sont davantage reliées à des accords simples des noms et des verbes. Encore ce matin, je corrigeais des copies truffées de «Ils les guettes» ou «Ils sont partient». Désolé, mais les modifications orthographiques ne changeront rien à ce type de fautes. Mieux connaître la classe et la fonction des mots et groupes de mots, par exemple, serait bénéfique. Mais quel enseignant voudrait s'embêter à faire de l'analyse grammaticale, surtout s'il est en cinquième secondaire et s'il a des élèves qui ne savent pas distinguer un adverbe d'un adjectif, un nom d'un verbe et j'en passe!

De plus, dans la plupart des évaluations auxquelles ils sont soumis, les élèves québécois ont droit à une grammaire et un dictionnaire. En plus de ne pas connaître la nature des mots avec lesquels ils travaillent, nos jeunes ont souvent de la difficulté à fournir l'effort nécessaire pour utiliser les outils qu'on leur donne. Et puisqu'on parle d'effort, on peut souligner qu'un élève peut encore écrire un texte truffé d'erreurs (à chaque mot même!) et malgré tout réussir son examen d'écriture. Pourquoi alors devrait-il se forcer? La ministre Courchesne entend resserrer les critères d'évaluation en écriture, mais seulement au primaire. Pourquoi s'arrêter là?

Enfin, un dernier petit point: celui du gazon plus vert chez le voisin. Il m'est arrivé de jaser avec des profs d'anglais provenant d'Ontario. Un de leurs constats était que les jeunes élèves qu'ils avaient sous leur gouverne maîtrisaient très mal cette langue qu'on dit pourtant plus facile que le français. Qu'en penser? J'attends de jaser avec des profs d'italien ou d'espagnol avant de me faire une idée. Si leur opinion à l'égard de leurs élèves est semblable, peut-être faudrait-il s'interroger davantage sur nos jeunes que sur les difficultés de la langue française?
Même si ces chiffres n'ont pas de lien direct avec l'écriture, l'Espagne et l'Italie occupent les 26e et 29e rangs en ce qui a trait à la compréhension de l'écrit dans les tests PISA 2003. Le Québec serait troisième. Plus faciles à écrire qu'à lire, l'espagnol et l'italien?

11 février 2008

Lire, ça coûte cher!

Ce matin, on apprend dans La Presse qu'un parent de Longueuil poursuit la commission scolaire de son territoire parce qu'elle autorisé les écoles à facturer aux parent le coût des romans que son enfant devait obligatoirement lire en classe.

Selon ce dernier, cette CS a enfreint la Loi sur l'instruction publique qui indique que tous les manuels et le matériel didactique - entre autres, dictionnaire et grammaire - nécessaires aux apprentissages des jeunes doivent être fournis gratuitement. Les seuls items que les parents doivent payer doivent être les cahiers d'exercices et le matériel non réutilisable ainsi, bien sûr, que les fournitures scolaires.

La CS se justifie sa position en indiquant qu'il s'agissait de matériel s'apparentant à des cahiers d'exercices puisque les élèves y prenaient des notes.

Plusieurs observations, avec un petit avertissement cependant: le dossier est complexe et je peux en échapper des bouts.

Premièrement, l'application de cette directive concernant les frais exigés aux parents est très mal comprise dans certaines écoles. Je ne serais pas surprise que certaines d'entre elles continuent à exiger des parents des frais qui ne sont pas permis par la loi.

En plus du matériel didactique, une école ne peut obliger des parents à payer pour une sortie qui est un prolongement de cours. Si un prof veut visiter l'Insectarium, par exemple, pour le cours de biologie obligatoire, l'école doit obligatoirement payer cette visite à tous les élèves si celle-ci s'inscrit dans une séquence d'apprentissage. De même en éducation physique obligatoire si l'activité est évaluée par l'enseignant, par exemple.

Également, dans tous les cas de sorties non reliées à des apprentissages, l'école doit obligatoirement offrir une activité comparable aux élèves demeurant en classe. Dans les faits, souvent rien n'est prévu comme activité «compensatoire» et les élèves profitent d'une journée libre... Dans d'autres, on remplace la pièce de théâtre par la lecture de la pièce ou le visionnement d'un film. Mummm...

Le cas des cours à option est plus douteux. Ainsi, on prévoit les coûts prévus dans le cadre de celui-ci et on indique aux élèves de ne pas le choisir s'ils n'aiment pas la facture qui y est relié. C'est bizarre qu'on puisse exiger d'un parent qu'il paie pour que son fils aille voir une pièce de théâtre en option, mais pas dans son cours de français régulier. Dans la même logique, j'ai déjà vécu le cas ou on a tenté de m'expliquer qu'on pouvait exiger des frais d'un enfant inscrit à un cours optionnel, mais pas à un programme optionnel particulier comme le mien. Au PEI, oui, mais pas le mien.

Deuxièmement, cette application de la LIP a eu comme effet pervers que certaines écoles ont cessé d'organiser des activités de prolongement de cours parce qu'elles ne voulaient pas organiser des activités complémentaires ou payer la sortie à l'ensemble des élèves. L'exemple du théâtre est un cas éloquent. Si je lis la pièce avec eux et veux aller la voir, c'est un prolongement de cours, semble-t-il. Donc, l'école doit payer. Réaction d'une direction: «Ben, on ira pu au théâtre!»

Troisièmement, sous le couvert de l'anonymat, je vais vous révéler un secret: la stratégie mise de l'avant par la CS en question était une excellente façon de refiler la facture aux parents. Certaines écoles ne veulent pas payer pour l'achat de romans ou de dictionnaires. Elles ont d'autres priorités. De la sorte, elles n'avaient plus de problème à fournir aux enseignants le matériel dont ils avaient besoin pour enseigner. On manque de fric ou on veut le mettre ailleurs qu'en français!

Quatrièmement, j'ai déjà profité de cette façon de faire et je m'explique. Dans mes groupes, chaque élève avait un roman à lui durant l'étape de la lecture. Fini de gérer une série de 32 exemplaires pour 120 élèves! Je n'en finissais plus de jouer à la bibliothécaire. Qui a pris un exemplaire pour la fin de semaine? Qui ne me l'a pas ramené? Fini aussi de laisser des élèves lire des romans au choix (leur choix étant le même depuis des années)! Fini enfin de laissr les élèves lire en classe, une activité qui coupe le temps d'enseignement! La plupart de mes élèves, et que la ministre se le dise, n'aiment pas lire en classe. Si j'anime la lecture, oui, mais sinon, ils préfèrent un cours. Certains n'arrivent pas à se concentrer, d'autres détestent qu'on ne respecte pas leur rythme de lecture ou estiment qu'il s'agit d'une perte de temps quant à cette activité qu'ils peuvent faire facilement à la maison.

Cinquièmement, le MELS lui-même nous invite à amener les élèves à annoter et à marquer avec des repères les oeuvres qu'ils lisent. On leur enseigne tout cela pour ensuite leur remettre dans les mains un roman qu'ils ne doivent pas toucher. Et devinez ce qu'ils font: ils les annotent quand même et on doit les punir parce qu'ils le font!

Cinquièment, puisqu'on parle de frais exigés des parents, y a-t-il un journaliste quelque part qui va découvrir que tout le matériel scolaire (crayons et efface inclus) est gratuit en Ontario? Stupéfiant!

09 février 2008

Courchesne: la suite de la suite

Dans ce dernier billet sur le rapport Courchesne (il y a tellement d'autres sujets actuellement dans l'actualité), je reviendrai dans un premier temps sur ce que la ministre a retenu et n'a pas retenu du rapport Ouellon, un comité d'experts qui devait la guider sur des mesures à apporter pour améliorer l'enseignement du français. Par la suite, je commenterai quelques nouvelles réactions dans les journaux à propos du plan qu'elle entend mettre de l'avant. Mais tout d'abord, intéressons-nous au rapport lui-même.

Le rapport Ouellon et ceux qui l'ont rédigé

Les auteurs du rapport Ouellon sont très prudents quand ils s'attardent à qualifier leur travail. On le constate en lisant les passages suivants:

«Malgré toutes les contraintes liées aux emplois du temps chargés des membres experts du Comité, nous avons tenu neuf journées entières de discussions auxquelles a assisté la très grande majorité des membres. »

«Compte tenu des échéanciers serrés que nous nous étions fixés, certains aspects de notre mandat n’ont été qu’effleurés. »

«Étant donné le court laps de temps qui lui était imparti, le Comité n’a pas la prétention d’avoir abordé tous les sujets se rapportant à la délicate question de l’apprentissage de lalangue écrite.»

Ces auteurs sont :
  • Conrad Ouellon, président du Comité Président du Conseil supérieur de la langue française;
  • Aline Boulanger, coordonnatrice à l’enseignement général, Commission scolaire des Grandes-Seigneuries;
  • Olivier Dezutter, professeur de didactique du français, Université de Sherbrooke;
  • Carole Fisher, professeure de didactique du français, Université du Québec à Chicoutimi;
  • Daniel Germain, enseignant de français au secondaire, Collège de Lévis;
  • Michel Laurier, doyen de la Faculté des sciences de l’éducation, Université de Montréal;
  • Pascale Lefrançois, professeure de didactique du français, Université de Montréal;
  • France Le Petitcorps, conseillère pédagogique de français au primaire, Commission scolaire Marie-Victorin;
  • Arlette Pilote, présidente de l’Association québécoise des professeurs de français (AQPF);
  • Jocelyne Cauchon, secrétaire du Comité Conseillère pédagogique de français au primaire, Commission scolaire Marguerite-Bourgeoys.
On peut être déçu qu'il y ait si peu de vrais professeurs de français au quotidien et encore moins de profs du collégial. Soulignons malgré tout la présence de la présidente de l'AQPF, une première dans ce genre de comité.

Ce qui n'était pas dans le rapport Ouellon

Vous l'avez en mille: l'imposition de la dictée, de la rédaction de textes chaque semaine et la période quotidienne de lecture. Voici ce que dit le rapport Ouellon à ce sujet:

«Peu de pratiques sont bonnes ou mauvaises en soi. Il s’agit de les utiliser intelligemment et à bon escient. Par exemple, s’il s’agit d’exercices, il faut privilégier ceux qui amènent à construire véritablement les connaissances ou ceux qui se rapprochent le plus fidèlement possible de véritables situations d’écriture. Si on utilise la dictée, il faut s’assurer que la correction aide à transmettre des connaissances que l’élève pourra ensuite transférer dans d’autres situations d’écriture, ou se préoccuper de permettre à l’élève d’expérimenter l’utilisation de certaines ressources comme le dictionnaire ou le correcteur orthographique.»

«L’élève doit écrire souvent, en produisant des textes de différente longueur, que ce soit en classe de français ou dans les autres disciplines. Pour devenir une scriptrice ou un scripteur compétent, il lui faut profiter de toutes les occasions d’écrire et de réfléchir surson écriture. Ces contextes d’écriture peuvent devenir autant d’occasions d’appliquer les règles de grammaire apprises, d’utiliser les stratégies de révision et de correction correspondant à son profil de scripteur, d’apprendre de nouvelles règles en contexte, etc. Il faut s’efforcer de chercher les pratiques gagnantes qui, selon l’expérience, ont le plus d’effet sur les élèves.»

Une autre mesure de la ministre qu'on ne retrouve pas dans le rapport Ouellon est le resserrement des critères d'évaluation au primaire. On peut regretter qu'elle n'ait pas eu l'audace ou le courage de faire de même au secondaire et au collégial.

Ce que la ministre n'a pas retenu du rapport Ouellon

Plusieurs recommandations du rapport Ouellon n'ont pas été reprises par la ministre Courchesne.

Recommandation no 4 :
Le Comité recommande que le ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport fasse en sorte que l’enseignement du français au secondaire soit obligatoirement assuré par une enseignante ou un enseignant spécialisé en français ou par une enseignante ou un enseignant inscrit dans un programme de formation continue en français, ce qui implique une modification du Règlement sur l’autorisation d’enseigner.

Bref, un professeur d'éducation physique pourra toujours enseigner le français. On comprendra que la ministre ne voulait pas s'embêter d'une telle restriction qui aurait été difficile à appliquer avec le contexte de pénurie des enseignants de français et avec les contraintes de confection des tâches dans les écoles.

Recommandation 7
Le Comité recommande que le ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport mette en place des mesures incitatives pour favoriser la formation continue en français des enseignantes et des enseignants du primaire et du secondaire par rapport aux objets nommés au chapitre 3.3 du rapport.

Ici, le mot-clé oublié est «incitatives». On sent que la ministre se dirige lentement vers des mesures obligatoires. Le mot «incitatif» s'accordant avec «monétaire» tandis qu'«obligatoire» coûte moins cher.

Recommandation no 12 :
Le Comité recommande au ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport d’assurer que le régime pédagogique du secondaire garantit un minimum de deux cents heures d’enseignement du français, par année, durant les trois premières années du secondaire.

Il pourra donc encore exister des programmes particuliers ou le français verra son nombre de période réduit comme peau de chagrin. Également, on note que les auteurs du rapport Ouellon ne s'intéresse pas à ce qui se passe après la troisième secondaire comme si les élèves, à ce niveau, maîtrisaient bien leur langue écrite. Dans les faits, c'est justement à ce moment de leur parcours scolaire que les jeunes sont les plus conscients de leurs lacunes, examen ministériel oblige.

De plus, les auteurs du rapport accompagnent cette recommandation d'une explication qui fait hurler en moi le prof de cinquième:

«Les enseignantes et les enseignants de français au secondaire devraient bénéficier de conditions particulières pour tenir compte de la lourdeur des tâches liées à l’enseignement de la langue française. À tout le moins devrait-on faire en sorte que le régime pédagogique garantisse un minimum de deux cents heures d’enseignement par année, durant les trois premières années du secondaire.»

Et les profs des autres niveaux sont-ils des «cotons»? Quand on sait la longueur des textes en quatrième et cinquième ainsi que le nombre d'élèves que nous avons!

Recommandation no 13 :
Le Comité recommande que le ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport mette en place des conditions qui facilitent l’accompagnement dans l’apprentissage de l’écriture des élèves allophones, telle la réduction du nombre d’élèves par classe.

Cette mesure a été rejetée à cause de ses coûts importants. Pourtant, la ministre réfléchissait à l'idée d'embaucher des correcteurs pour aider les professeurs à corriger les textes que les élèves auraient à écrire chaque semaine. Je ne comprends pas.

Recommandation no 14 :
Le Comité recommande que le ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport mette en place des conditions qui facilitent l’accompagnement dans l’apprentissage de l’écriture des élèves à besoins particuliers, telle la réduction du nombre d’élèves par classe.

Encore une fois, je ne comprends pas.

Recommandation no 19 :
Le Comité recommande au ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport d’entreprendre une réflexion sur l’épreuve unique de fin de cinquième secondaire pour examiner la possibilité d’y offrir d’autres choix que le texte argumentatif et pour étudier le poids relatif du lexique dans les critères d’évaluation de cette épreuve.

On reste avec l'argumentatif, pour le meilleur et le pire. Un détail: il aurait fallu travailler à créer de nouveaux formats d'examen, de grilles de correction. Trop de boulot.

Recommandation no 21
Le Comité recommande que le Comité d’agrément des programmes de formation à
l’enseignement demande aux responsables des programmes universitaires de faire en
sorte que les étudiantes et les étudiants en formation à l’enseignement soient informés sur
les rectifications de l’orthographe.

La ministre, on l'a constaté à l'émission Les Francs-Tireurs, ne veut rien savoir des modifications apportées à la langue française. Donc, ces recommandation sont passées à la trappe.

Recommandation no 22 :
Le Comité recommande que la ministre de l’Éducation, du Loisir et du Sport voie à la
création d’un organisme permanent qui aura comme mandat à court et à moyen
termes d’assurer le suivi des recommandations du Comité d’experts sur l’apprentissage
de l’écriture et, à plus long terme, de veiller à ce que soit assurée la qualité de
l’enseignement et de l’apprentissage du français au Québec.

Il s'agit ici d'une recommandation importante du comité Ouellon. Ce dernier explique d'ailleurs largement l'importance d'assurer un suivi aux mesures qu'il recomande:

«Le Comité juge que son travail et ses recommandations ne peuvent avoir de suites que si est créé un organisme permanent qui aura comme mandat à court et moyen terme de veiller au suivi de ses recommandations et, à plus long terme, de prendre les dispositions nécessaires pour que soit assurée la qualité de l’enseignement et de l’apprentissage du français au Québec. La création d’un tel organisme se justifie, à notre avis, par l’importance du français comme matière et langue d’enseignement et par la place importante qu’occupe la languefrançaise, « cette langue qui est le coeur de notre liberté et de notre identité » (Allocution dupremier ministre du Québec, M. Jean Charest, lors de l’ouverture de la 1re session de la 38e législature, Assemblée nationale, le 9 mai 2007).»

La ministre n'a pas donné suite à cette recommandation. Elle formera, semble-t-il, un comité chargé de suivre l'application du plan qu'elle propose, mais elle ne veut pas en faire un comité permanent. Pourquoi s'embêtrait-elle une créature beaucoup plus difficile à contrôler?

Quelques réactions sur le plan Courchesne

Dans Le Devoir, Marie-Andrée Chouinard brosse un portrait positif du plan Courchesne tout en remarquant le principal danger qui le guette: «Au redressement promis manque toutefois l'essentiel: une sentinelle qui veillera à ce que les promesses se réalisent. (...) Voilà pourquoi on se désole que Michelle Courchesne n'ait pas jugé bon de retenir cette recommandation phare du rapport Ouellon qui appelle à la création d'un organisme indépendant chargé de l'application à long terme des mesures décidées en haut lieu, bien plus, en somme, qu'un éphémère comité de suivi.» On constate toutefois qu'elle réalise peu les impacts de ce plan sur le quotidien des enseignants.

Dans La Presse, Nathalie Collard dit que le plan de la ministre «reprend presque point par point les recommandations du comité Ouellon sur l'apprentissage de l'écriture», ce qui est inexact, on l'a vu. Elle y a ajouté des éléments importants et en a retranché d'autres.

Elle se leurre aussi quant à moi quand elle écrit: «L'accent n'est pas seulement mis sur les efforts qu'auront à faire les élèves, mais aussi sur la formation des maîtres, qui est absolument déficiente.»

Rien ne garantit que les élèves feront plus d'efforts si on n'exige pas davantage d'eux. Ils écriront peut-être plus, mais pas nécessairement mieux. Dans la mesure ou l'on ne resserre pas les critères d'évaluation au secondaire et au collégial, dans la mesure ou les évaluations «resserrées» au primaire seront fondues dans les grand tout du bilan de fin de cycle, j'ai de sérieux doutes. L'intention ministérielle est noble, mais insuffisante.

Par contre, elle voit juste quand elle conlut : «Enfin, on ne répétera jamais assez que français ne se vit pas en vase clos. La famille, les médias, l'ordinateur ont une grande influence dans la vie des jeunes.»

Enfin dans Le Devoir, déjà, on peut voir que les commissions scolaires et les syndicats commencent à affirmer qu'il n'est pas nécessaire de modifier le régime pédagogique pour appliquer certaines recommandations du plan Courchesne.

«On n'a pas besoin de modifier le règlement. Je fais confiance aux trois paliers, les commissions scolaires, les directions d'école et les enseignants, pour qu'une amélioration du français puisse être perçue. Ils vont trouver les moyens pour que les 22 mesures prévues dans le plan d'action aient un effet. On est capables, si tout le monde y met du sien, de livrer la marchandise», a affirmé le président de la Fédération des commissions scolaires du Québec (FCSQ), André Caron.

«La présidente de la Fédération des syndicats de l'enseignement (FSE-CSQ), Johanne Fortier, croit elle aussi que la mobilisation devrait donner des résultats, sans qu'on ait besoin de contraindre les enseignants par règlement. «Je ne vois pas comment on pourrait modifier le régime pédagogique sans tomber dans les travers d'une approche trop tatillonne.»

Quand deux acteurs si opposés du monde scolaire s'entendent de la sorte, ça commence à sentir l'enterrement de première classe.

08 février 2008

Plan Courchesne : la suite (modifié)

Après quelque temps de réflexion, je me sens plus à l'aise d'effectuer un retour plus approfondi sur certains points du plan de la ministre Courchesne quant au français, retour que j'avais débuté mercredi.

1- Les élèves devront écrire un texte au moins une fois par semaine dans le cadre de leur cours de français et faire une dictée régulièrement de manière à vérifier l'acquisition des connaissances.

Tout d'abord, pour ce qui est d'écrire un texte par semaine, il est plus facile d'appliquer cette mesure au primaire qu'au secondaire. À vrai dire, bien des enseignants de primaire le font déjà! Rien de bien nouveau pour eux.

Au secondaire, la chose est autrement plus difficile.

Pour un enseignant de français qui a entre 90 et 120 élèves, cette idée de la ministre Courchesne peut représenter une tâche minimale d'une dizaine d'heures par semaine à raison de 5 minutes par copie si l'on parle d'un texte court. Si le texte est plus long, on oublie carrément l'idée d'avoir une vie personnelle. Oui, notre convention minutée à la seconde près comporte du temps pour corriger, mais jamais autant!

On peut toujours les faire écrire et ne s'attarder par la suite qu'à corriger qu'un aspect de la langue ou qu'un texte ici et là. Mais, en connaissez-vous des élèves qui accepteraient de voir leur prof corriger qu'une partie de leur effort? Moi, il n'y en a pas dans mes classes.

Là-dessus, je crois que la ministre ignorait totalement la somme de travail qu'ajoute une telle mesure aux enseignants. En entrevue à Désautels sur les ondes de Radio-Canada, elle suggérait que les conseillers pédagogiques pourraient leur venir en aide. Dans Le Devoir ce main, elle parlait d'embaucher des correcteurs. Dans les deux cas, ces hypothèses ne pourraient pas fonctionner. Ce n'est pas le rôle des conseillers pédagogiques et ils sont trop peu nombreux. Pour ce qui est des correcteurs, il en faudrait un nombre considérable, disponibles facilement et avec qui il faudrait coordonner notre travail d'enseignement. De plus, pourquoi embaucher des correcteurs (une mesure qui pourrait coûter cher si on pense qu'il en faudrait au moins un pour quatre enseignants quand on pourrait réduire le nombre d'élèves par classe. On complique donc les choses en voulant soulager les profs.

Au secondaire, une façon de s'en tirer serait de confier aux profs de chaque matière, à tour de rôle, le soin de donner et de corriger un texte. On montrerait ainsi l'importance de la langue dans chaque cours. Le hic réside dans le fait que j'ai des collègues qui seraient incapables de faire un tel exercice tellement leur maîtrise du français est discutable. Également, la réforme interdit qu'on enlève des points pour la qualité de la langue dans un cours autre que le français. On revient donc un peu à l'idée d'évaluer le tout dans une des compétences transversales. Tiens, tiens...

Quant à la dictée, elle existe encore au primaire et au secondaire, quoique la réforme, du moins à ses débuts, a voulu reléguer cette pratique aux oubliettes. C'est d'ailleurs pour cette raison que la ministre insiste tant sur cette méthode pédagogique: cette dernière est une icone, une image du retour à une certaine pédagogie traditionnelle très payante aux yeux d'un certain électorat.

Il existe différentes formes de dictée et chacune vise un but précis. Règle générale, elle se corrige plus rapidement qu'un texte et ce travail formateur peut même être effectué par des pairs, une pratique pédagogique qui a l'avantage de ne pas surcharger l'enseignant de travail et d'amener l'élève à recorriger de nouveau le même texte.

Dans les deux cas cependant, la ministre s'immisce dans le travail des enseignants et je reviendrai sur ce point en conclusion.

2- Une plage horaire consacrée à la lecture devra être prévue quotidiennement par les écoles.

Au primaire, encore une fois, il n'y a pas de problème. Cette façon de faire existe déjà et est assez répandue.

Au secondaire, méchant problème en vue! J'ai hâte de voir comment certaines écoles vont appliquer cette mesure. Si l'élève a du français chaque jour, on alloue simplement 15 minutes à la lecture. Mais si ce n'est pas le cas (comme c'est fréquent dans les programme spécialisés ainsi que ceux de quatrième et cinquième secondaire), comment se débrouille-t-on? On lit en éducation physique?

Encore une fois, la ministre s'immisce dans le travail de l'enseignant qui fait lire ses élèves à la maison pour consacrer son temps de classe à l'enseignement de l'écriture ou à tout autre projet. Quinze minutes par jour, c'est un cours par semaine.

12- Le nombre de conseillers pédagogiques en français sera augmenté et un plan de formation assurera la mise à jour de leurs connaissances.

Cette mesure a fait sourire mes collègues. Les conseillers pédagogiques sont des fantômes à leurs yeux. La ministre veut les faire passer de 150 à 300. Comme il y a 3 000 écoles au Québec, je peux m'attendre à en voir débarquer dans mon milieu de travail une fois par deux semaines dans le meilleur des cas.

De plus, les conseillers pédagogiques que j'ai connus étaient contre la dictée et pour l'enseignement de la grammaire en contexte. Problème idéologique en vue!

Conclusion

Plus que jamais, les points 1 et 2 du plan de la ministre Courchesne m'apparaissent davantage guidés par des convictions personnelles et électoralistes. Elle voulait plaire à certains parents, se démarquer de la réforme. Il faut comprendre qu'il s'agit d'une politicienne mais aussi de quelqu'un qui a une vision extérieure de l'éducation.

Encore une fois, je me questionne sur l'entourage de la ministre et la façon dont on la prépare sur certains dossiers. Elle ne pouvait ignorer la charge de travail qu'entraînerait une telle mesure. Sa méconnaissance du rôle des conseillers pédagogiques (à moins qu'il ne s'agisse que d'un oubli) aussi est troublante.

Également, madame Courchesne s'immisce beaucoup dans le travail des enseignants au quotidien au détriment de leur autonomie professionnelle, comme si elle ne leur faisait majoritairement pas confiance. Le président de la Fédération québécoise des directeurs d'établissements (FQDE), Serge Morin, mentionne d'ailleurs à ce sujet: «On traite tout le monde pareil, cela ne lisse pas de place pour exploiter le professionnalisme dont les enseignants sont capables.»
Au lieu de les aider, elle risque de leur compliquer davantage la vie en prescrivant comment ils doivent enseigner. D'ailleurs, le texte du Devoir souligne que la rédaction des modifications qu'elle doit apporter au régime pédagogique «sera délicate puisque la Loi sur l'instruction publique garantit l'autonomie professionnelle des enseignants.»

À cet égard, le peu de réaction de nos syndicats me consterne. Avant Noël, la FSE et la CSQ avaient fait circuler une pétition dans toutes les écoles du Québec pour indiquer au gouvernement Charest que son simple engouement pour la dictée ne devait pas l'amener à vouloir régir la pratique enseignante au quotidien, ce qu'il n'hésite manifestement pas à faire aujourd'hui avec le plan Courchesne.

Globalement, je crois la ministre quand elle dit vouloir améliorer l'école québécoise. Je la sais très préoccupée par ce qui se passe dans nos écoles. Plusieurs des solutions qu'elle propose sont intéressantes et méritent d'être appliquées à condition qu'on s'assure efficacement du suivi de celle-ci. Mais la sincérité ne suffit pas.

Ce qu'il manque à ce plan, ce sont tout d'abord des moyens qui iront directement dans les classes, auprès des élèves et des profs. Pensons à des budgets pour du matériel didactique (livres et dictionnaires), à la réduction du nombre d'élèves par classe, à un meilleur encadrement et soutien des élèves au quotidien.

Dans le fond, sur le coup, j'ai été très déçu par ce plan de la ministre sans savoir pourquoi. Aujourd'hui, je comprends mieux ma réaction. Madame Courchesne impose des contraintes aux enseignants sans rien leur donner en retour. Des bibliothécaires, des conseillers pédagogiques... Désolé, mais mes besoins les plus urgents sont ailleurs! Les points les plus publicisés de son plan (texte et dictée) ne reposent que sur les épaules des seuls enseignants.

Également, j'aurais souhaité l'annonce d'un resserrement des critères d'évaluation au secondaire et au collégial. Déjà, il y a quelques années, le MELS avait imposé, à une année d'avis, un seuil de maîtrise de la langue écrite en français de cinquième secondaire. Globalement, si un élève faisait plus d'une faute de grammaire et d'orthographe à tous les 15 mots, il était simplement recalé. Ce seuil, encore aujourd'hui, n'existe qu'en cinquième secondaire, comme si on admettait qu'un jeune pouvait écrire un texte bourré de fautes pendant le reste de son parcours à l'école.

Bien sûr, une faute aux 15 mots, ce n'est pas la mer à boire et l'on pourrait se montrer plus sévère quant à moi mais, globalement, les élèves, même les plus faible, atteignent ce niveau de maîtrise de la langue. D'ailleurs, cette mesure, qu'ils craignent, les stimulent, les poussent à travailler davantage.

Je ne veux pas qu'on pense que je suis adepte de la crainte comme motivation pédagogique. Je lui préfère la fine psychologie, le dépassement de soi. Mais comment amener l'élève à y parvenir si les attentes qu'on a ne lui demandent aucun effort?

Il appartient, entre autres, à l'enseignant de motiver les élèves qu'il a sous sa gouverne. Seulement, quand ce dernier à l'impression de se battre contre un système laxiste, des parents mous et des jeunes désabusés, lui demander d'en faire davantage est purement décourageant.

Enfin, en terminant, je suis désolé de l'avouer, mais je ne crois pas que le fait d'obliger un élève à écrire davantage le fera nécessairement écrire mieux. Faire plus n'équivaut pas toujours faire mieux. C'est souvent ce qui se passe avant et après l'acte d'écrire qui compte le plus. Et même mon syndicat ne semble pas le comprendre!
Tiens, ce matin, dans Le Devoir, un lecteur y va de ce commentaire prouvant que le vrai problème, ce sont les enseignants: «Les enseignants craignent que le nouveau programme d'enseignement du français augmente considérablement leur travail de correction. à ceux-ci, je leur rappelle que pendant nos études classiques, nos professeurs de français enseignaient à plusieurs classes et qu'ils corrigeaient nos dissertations sans jamais se plaindre qu'ils n'avaient pas le temps de les corriger.» Dans votre bon vieux temps, monsieur, les profs ne passaient pas autant leur temps à jouer au psychologue et au travailleur social en plus de gérer des cas d'enfants délinquants et mal élevés. Épargnez-nous, s'il vous plait, les comparaisons...
Demain: un dernier billet sur le plan Courchesne (ce que la ministre n'a pas retenu du rapport Ouellon) et j'arrête de vous emmerder avec mes propos pédagogiques pour un bout.

06 février 2008

Le plan Courchesne quant au français

Il est toujours dangereux de réagir à chaud à un dossier comme je le ferai dans ce billet. Les jours qui suivent apporteront des précisions quant à des éléments qui manquent de clarté ou que j’aurais mal compris. De plus, il faudra voir comment ces intentions ministérielles se traduiront dans la réalité.

Vous comprendrez aussi que mon billet sera teinté de mon regard d’enseignant de français et d’enseignant tout court qui vit au quotidien dans une école depuis maintenant 15 ans.

Je vous livre donc ma lecture exhaustive du plan de madame Courchesne concernant le français, plan qui fait suite au rapport Ouellon. Si vous n’êtes pas dans la catégorie des lecteurs patients, vous pouvez toujours sauter à la partie conclusion de ce texte.

Plan d'action pour l'amélioration du français à l'enseignement primaire et à l'enseignement secondaire

Volet : valoriser la place du français à l'école

1- Les élèves devront écrire un texte au moins une fois par semaine dans le cadre de leur cours de français et faire une dictée régulièrement de manière à vérifier l'acquisition des connaissances.

Impact peut-être négatif, entre autres pour les enseignants du secondaire

Si on la prend au pied de la lettre, c’est une mesure inapplicable au quotidien. Au secondaire, j’ai des collègues qui ont 120 élèves. Imaginez la correction qui vient de leur tomber sur la tête! Même si cette mesure aura des effets moins grands au primaire, c’est quand même une atteinte à l’autonomie professionnelle des enseignants. On détermine encore comment ils doivent enseigner.

Essentiellement, il s’agit d’une mesure politique.

En entrevue à Radio-Canada, la ministre Courchesne n’a pas indiqué quels moyens elle comptait fournir aux enseignants pour y parvenir. Elle a cependant indiqué que des guides seraient mis à leur disposition.

Il est fort à parier que les enseignants, sans ressources appropriées, adapteront cette mesure dans leur quotidien. Une réponse à développement de cinq lignes constitue, après tout, un texte.

2- Une plage horaire consacrée à la lecture devra être prévue quotidiennement par les écoles.

Impact en partie négatif au secondaire

«Plus on lit, plus on maîtrise l'écriture», a dit la ministre au quotidien La Presse. J’ai mes réserves sur ce raisonnement.

Au secondaire, comment va-t-on procéder? On vient jouer directement dans la grille-horaire de toutes les écoles et de réduire le temps d’enseignement de certains cours. Et de quelle durée sera cette période? Quant à moi, cette période de lecture, sans être inscrite dans une démarche signifiante, pourrait constituer une perte de temps pour certains élèves et constituer davantage une corvée disciplinaire pour les enseignants. De plus, les écoles ont-elles suffisamment de livres à offrir à leurs élèves?

Essentiellement, il s’agit encore une fois d’une mesure politique.

3- Les commissions scolaires devront fournir annuellement de l'information à l'égard du temps que leurs écoles consacrent à l'enseignement du français et analyser en conséquence les résultats de leurs élèves aux épreuves du Ministère en français.

Impact indéterminé

En soi, cette mesure se veut possiblement une réponse aux programmes particuliers qui réduisent le nombre de périodes consacrées à l’enseignement du français.

Elle sera pertinente si les CS ont véritablement des comptes à rendre.

Ou est la contrainte d’adopter pour les commissions scolaires un plan d’action et de véritables mesures favorisant la réussite en français? Implicitement, cet exercice est déjà fait, de façon volontaire si l’on veut, dans de nombreuses CS.

De plus, comme ce sont les CS qui analyseront elles-mêmes les résultats de leurs élèves aux épreuves du ministère, je doute qu’elles se livrent à des exercices d’auto-flagellation. Comme actuellement, il est facile de réussir les examens du ministère, on peut douter qu’il faille en venir à ce que celles-ci adoptent des mesures de redressement. D’autant plus que les programmes particuliers choisissent leurs élèves parmi les meilleurs.

4- Chaque commission scolaire devra avoir une politique linguistique, notamment en ce qui concerne l'apprentissage du français et les communications avec les parents.

Impact indéterminé

Cette mesure sera pertinente si les CS ont des comptes à rendre.

Quant à la qualité des communications avec les parents, la ministre a indiqué qu'elle ne tolèrera plus des fautes d'orthographe dans les communications externes des établissements scolaires et des enseignants. Auprès de qui ceux-ci se plaindront-ils et qu’est-ce que cela changera à la situation actuelle?

5- Le niveau de maîtrise du français atteint par chaque élève à la fin du primaire sera communiqué à l'école secondaire qui l'accueille.

Impact à déterminer

Toujours en entrevue à Radio-Canada, la ministre parle de dossier de l’élève personnalisé. En soi, que le portrait de l’élève soit constitué d’autre chose que d’une note est une bonne idée. Il faudra voir comment cette information sera transmise du primaire au secondaire et si elle constituera une augmentation de la tâche de l’enseignant du primaire.

Volet: réviser le contenu du programme de français

6- Les programmes d'études en français seront revus de manière à préciser ce que les élèves doivent connaître et être en mesure de faire à la fin de chaque année (orthographe, syntaxe).

Impact partagé

En soi, ces précisions pourront apporter certaines clarifications quant aux programmes d’études et une hiérarchisation des contenus notionnels.

Pour le journal La Presse, «Mme Courchesne impose un virage majeur à la réforme de l'éducation, en misant désormais sur les bonnes vieilles méthodes d'apprentissage de connaissances - de l'orthographe, de la syntaxe et de la grammaire, à travers la dictée et la lecture - plutôt que l'acquisition de compétences.» On aime ou on n’aime pas.

Deux bémols.

En entrevue à Radio-Canada, la ministre semblait indiquer que les programmes préciseraient le moment de l’année ou certaines notions devraient être vues. Il s’agit encore une fois d’un empiétement dans l’autonomie professionnelle des enseignants.

Sur un plan personnel, j’aurais souhaité qu’on détermine de façon plus précise quand les genres littéraires doivent être vus au cours du cheminement de l’élève, entre autres au secondaire afin d’éliminer le chevauchement actuel. Par exemple, la nouvelle littéraire, un récit difficile pour un jeune élève, peut être abordé à toutes les années du secondaire, ce qui entraîne une répétition du contenu d’une année à l’autre.

7- Un processus de mise à jour continue des programmes d'études sera établi, en commençant par le programme de français et en y associant étroitement les enseignants concernés.

Impact possiblement positif

Certains programmes d’études méritent d’être clarifiés. Le principe de mise à jour évite les réformes à tous les 10 ans, mais il a le défaut d’exiger des intervenants scolaires une plus grande vigilance quant aux changements apportés au fil du temps.

Le fait d’associer les enseignants concernés à cette démarche est une initiative intéressante, mais encore faut-il voir comment seront déterminés ceux-ci et de quelle transparence jouira ce processus.

Volet: accroître le suivi des élèves en français

8- Deux examens d'écriture seront ajoutés (4e année du primaire et 2e secondaire) et les écoles devront prendre en considération le résultat obtenu par l'élève.

Impact fort possiblement positif

En soi, il n’est jamais mauvais d’évaluer de façon précise la qualité du français écrit des élèves. De ne pas attendre à la fin du primaire et du secondaire pour procéder à une évaluation de la sorte est une bonne initiative.

D’une part, on peut s’interroger sur l’importance qui sera accordée à ces examens. Les «prendre en considération» est une indication un peu vague. Verra-t-on leur importance diminuée en étant noyée dans le bilan des apprentissages? C’est à voir.

D’autre part, ces examens auront peut-être un effet incitatif sur les élèves quant à la maîtrise du français écrit à condition que les critères d’évaluation de ceux-ci soient assez rigoureux.

9- Les exigences de réussite à l'épreuve d'écriture de la fin du primaire seront rehaussées, notamment en orthographe.

Impact fort possiblement positif

En soi, rehausser les exigences de réussite à l’épreuve d’écriture de la fin du primaire est intéressant. Encore faut-il voir comment quelle importance sera accordée à cette épreuve dans le bilan des apprentissages.

En entrevue, la ministre a précisé que l’application de cette mesure sera progressive afin de ne pas pénaliser les élèves actuels.

On remarque qu’une mesure similaire n’est pas proposée pour l’examen ministériel d’écriture de cinquième secondaire. Il s’agit, quant à moi, d’un oubli inquiétant quand on sait à quel point la correction de cet examen est laxiste. Au minimum, il aurait été intéressant que la ministre indique qu’un plan de resserrement des critères d’évaluation en écriture, tant au primaire, au secondaire et au collégial, était actuellement à l’étude.

10- Les commissions scolaires devront déterminer des cibles à atteindre concernant la performance des élèves aux examens de français du Ministère.

Impact à déterminer

Implicitement, les commissions scolaires déterminent déjà des cibles à atteindre en analysant leurs résultats aux examens de français du ministère. Cette mesure ne sera pas contraignante si ce sont les commissions scolaires n’ont pas de compte à rendre.

11- Les écoles devront se fixer des objectifs d'amélioration en écriture dans toutes les matières et les intégrer à leur planification annuelle.

Impossible à déterminer

Cette mesure manque de clarté. S’agit-il de s’assurer de la maîtrise du français en écriture dans toutes les matières afin de contrer les mesures du Renouveau pédagogique qui interdisaient l’évaluation du français dans d’autres matières?

Chose certaine, pour y parvenir, il faudra s’assurer de la qualité du personnel enseignant et que l’école ait des comptes à rendre.

Volet: accroître le niveau de préparation des enseignants

12- Le nombre de conseillers pédagogiques en français sera augmenté et un plan de formation assurera la mise à jour de leurs connaissances.

Impact à déterminer

En soi, cette mesure peut s’avérer positive. On passera ainsi de 150 à 300 conseillers pédagogiques. Cependant, ceux-ci ne feront cependant pas de miracle. Par rapport au français, certains d’entre eux sont partisans d’une approche de la grammaire en contexte qui pourrait même aller à l’encontre d’un enseignement des connaissances que semble privilégier la ministre.

Il faudra voir comment s’articulera leur plan de formation afin de s’assurer de la mise à jour de leurs connaissances.

13- Les universités devront revoir le contenu linguistique de leurs programmes de formation préparant à l'enseignement du français.

Impact positif

En soi, cette mesure pourrait permettre de former des enseignants de meilleure qualité. Il faudra cependant voir comment elle se traduira dans la réalité.

14- Les universités devront offrir une formation de 2e cycle en didactique comportant notamment un volet consacré aux difficultés des élèves en lecture et en écriture.

Impact à déterminer

Cette idée est intéressante. Il reste à savoir combien d’étudiants s’inscriront dans ce type de programme et combien d’argent y sera consacré.

15- Les universités devront faciliter l'accès à l'enseignement du français au secondaire pour les étudiants diplômés en linguistique et en littérature.

Impact possiblement positif

Actuellement, le Québec est aux prises avec une pénurie d’enseignants. Faciliter la formation d’étudiants en linguistique et en littérature permettra de combler des besoins en personnel avec des candidats ayant de bonnes connaissances quant à des contenus reliés au français.

Par contre, on peut douter que les universités soient pressées de répondre à cette demande pour des considérations financières.

16- Chaque enseignant devra se donner un plan de formation continue en français. Les universités devront mettre en place une offre de formation compatible avec les besoins exprimés.

Impact partagé

En soi, que les enseignants actuellement dans nos écoles soient mieux formés est préférable. Par contre, il s’agira de voir comment cette mesure se traduira dans la réalité.

Qui fournira cette formation et qui la paiera? De plus, quand les enseignants devront la suivre et à quel rythme? N’en demande-t-on déjà pas trop à certains enseignants? De plus, est-il souhaitable que cette formation soit obligatoire et ne devrait-on pas plutôt avoir recours à des incitatifs pour mieux motiver les enseignants?

Cette proposition soulève également toute la question du statut de l’enseignant : employé syndiqué ou professionnel?

Volet: renforcer les mesures de soutien

17- Une liste d'ouvrages sur l'écriture, la grammaire, l'orthographe et la syntaxe sera transmise aux écoles.

Impact à déterminer

Cette liste complétera vraisemblablement le travail du conseiller pédagogique en français.

18- Un programme de recherches sera établi afin de subventionner des études pour améliorer la capacité des élèves à bien écrire.

Impact à déterminer

Cette idée est intéressante. Il reste à savoir combien d’argent y sera consacré.

19- Les impacts seront analysés pour déterminer, s'il y a lieu, la nécessité d'ajouter des exigences particulières pour pouvoir enseigner le français à l'enseignement secondaire.

Impact à déterminer

Que signifie cette mesure et en quoi se traduira-t-elle pour les enseignants actuellement en poste? Ajout à la formation continue?

20- Un portail informatique sera créé afin de faciliter l'accès pour le personnel scolaire à la documentation relative à l'enseignement du français.


Impact à déterminer


Ce portail complétera vraisemblablement le travail du conseiller pédagogique.

21- Les programmes de formation à l'enseignement en formation professionnelle seront revus pour que les enseignants maîtrisent bien le lexique propre aux divers métiers concernés.

Impact partagé

En soi, que les enseignants dans nos écoles soient mieux formés est souhaitable. Par contre, il s’agira de voir comment cette mesure se traduira dans la réalité.

Qui fournira cette formation et qui la paiera? De plus, quand les enseignants devront la suivre et à quel rythme? N’en demande-t-on déjà pas trop à certains enseignants?

Cette proposition soulève encore une fois toute la question du statut de l’enseignant : employé syndiqué ou professionnel?

22- Le Plan d'action sur la lecture à l'école, qui est en vigueur depuis trois ans, sera renouvelé et bonifié par l'embauche de bibliothécaires.

Impact positif

Tout investissement en éducation est le bienvenu. On peut cependant se demander si l’embauche de bibliothécaire universitaire était nécessaire. De plus, il faut souligner qu’on parle de l’embauche de 200 bibliothécaires sur 10 ans, alors qu’il existe quelque 3 000 écoles au Québec.

Conclusion personnelle

En soi, le plan d’action de la ministre Courchesne constitue un pas dans la bonne direction. Il est quand même bon de voir que le français préoccupe nos décideurs scolaires et que ceux-ci reconnaissent l’importance de bien enseigner cette langue.

Parmi les points positifs de ce plan, on retrouve le resserrement des critères d’évaluation en écriture au primaire, la révision des programmes d’études et une amélioration de la formation initiale des futurs maîtres.

Par contre, d’autres mesures viennent empiéter sur l’autonomie professionnelle des enseignants. Pensons, par exemple, à la fameuse dictée, à la rédaction d’un texte une fois par semaine et à la période de lecture obligatoire.

Dans la même veine, comme l’écrit La Presse, on peut constater qu’«Implicitement, le ministère reconnaît qu'une trop grande marge de manoeuvre est actuellement laissée aux enseignants et aux écoles. Désormais, le ministère énoncera donc de façon explicite quelles sont les connaissances qui devront être acquises par l'élève avant la fin de chaque année scolaire.» Les partisans du Renouveau pédagogique y reconnaîtront évidemment la pensée de la ministre actuelle.

De plus, on remarquera que le MELS accorde peu de ressources pour l’application de ce plan alors que l’école québécoise manque de tout (dictionnaires, romans, etc.) et que les conditions d’exercice des enseignants de français sont exténuantes (pensons au nombre d’élèves par groupe). Également, on ne tient pas compte de l’apprentissage du français des élèves venant de milieu défavorisé ou multiethnique. Si on y ajoute l’obligation d’une formation continue, on est en droit d’affirmer qu’on en demande beaucoup aux enseignants, notamment de français, sans pour autant leur concéder quelque avantage que ce soit. Peut-être pousse-t-on le bouchon un peu trop loin.

Du côté de l’évaluation, on peut être déçu que la ministre ne semble pas ouvrir pas la porte à un resserrement progressif des critères d’évaluation de l’écriture au secondaire. Le problème demeure entier.

Quant aux opposants aux commissions scolaires, on remarquera que le plan Courchesne semble présager que celles-ci seront loin d’être abolies avec toutes les contributions qu’on leur demande.

Enfin, il reste à voir comment ces mesures seront appliquées et quel suivi en sera fait. En effet, on sait que les plans ministériels durent ce que durent les ministres eux-mêmes.

Autres documents à consulter: