29 avril 2012

Quand il est mort le poète

Un musicien, chanteur et auteur-compositeur parmi les plus sous-estimés du Québec s'éteignait il y a 10 ans aujourd'hui. Ce qui est incroyable est à quel point son oeuvre n'est pas reprise. Et pourtant...



28 avril 2012

Petit exemple d'un grand problème

On se demande souvent où va l'argent en éducation. Voici un bel exemple de gestion efficace.

Denis Robichaud, professeur en économie et gestion à TÉLUQ, a découvert que la TÉLUQ (une composante de l'UQ qui fait de l'enseignement à distance) allait approuver des contrats dépassant de loin les sommes prévues à cet effet. Dans les faits, pour un projet de près de 5 millions, la TÉLUQ allait payer  433 000 dollars de plus pour les honoraires d'architectes et d'ingénieurs estimés au départ à 294 650$ (près du triple du montant de départ donc).

De plus, ce prof a aussi découvert qu'il existait des liens entre trois des quatre membres du comité de sélection et une haute dirigeante de la firme d'architectes choisie pour le projet.

Réaction de la TÉLUQ selon Radio-Canada:
«La direction de TÉLUQ était au courant de ces liens et ne s'en est pas inquiétée. Raymond Duchesne croit que le vérificateur trouvera qu'il s'agit d'erreurs de bonne foi.

En plus d'ordonner une enquête, la direction de la TÉLUQ a aussi décidé de reprendre à zéro tout le processus, incluant le choix des firmes d'architectes et d'ingénieurs chargées de cette construction.»

Peut-on parler d'incompétence, de mauvaise gestion, de malversation? Honnêtement, je suis sidéré. Comment un simple prof, sur son temps personnel, peut-il trouver tant de faits troublants alors qu'il existe des services juridiques et comptables à la TÉLUQ? Quelqu'un dort-il au travail? Peut-on accepter des liens de la sorte entre des membres d'un comité de sélection et une entreprise dans le contexte actuel que l'on connait? Plus que la bonne foi, ce qui importe est l'absence ou l'apparence d'absence de conflit d'intérêts dans l'octroi des contrats gouvernementaux.

Ma ministre de l'Éducation va-t-elle intervenir dans ce dossier ou cautionne-t-elle ce genre de gestion?

27 avril 2012

Le mensonge de Jean Charest

Miss Maths me corrigera mais, quand notre premier ministre dit que l'offre qu'il fait aux étudiants se traduit par une hausse de $0,50 par jour, il ne dit pas toute la vérité.

Cette année, oui, cette hausse sera de $0,50 par jour. L'année prochaine, elle sera de $1,00 par rapport à aujourd'hui. Dans huit ans, on parle d'une hausse de $4,00 par jour par rapport à aujourd'hui. Ce n'est plus la même chose. On parle d'une hausse de 82% sur 7 ans au lieu de 75% sur 5 ans. On est loin de 50 cennes par jour...

24 avril 2012

Papa Charest a raison

Depuis le début du conflit étudiant, c'est une constante: le gouvernement sait ce qui est bon et ce qui est vrai pour le autres. Appelons cela de l'arrogance, du mépris. Il demeure que cette attitude l'empêche de bien comprendre la situation actuelle.

Un autre exemple aujourd'hui: la réaction de notre premier ministre quant au débrayage amorcée dans deux écoles montréalaises: «Il n'y a pas de raison pour laquelle les élèves du secondaire devraient boycotter leurs propres cours. Il n'y en a pas. D'autant plus qu'on est en négociation avec les représentants des associations étudiantes.»

Il est réjouissant d'entendre un étudiant de quatrième secondaire, Alexis Chartrand, un porte-parole du Regroupement de l'École Joseph-François-Perrault contre la hausse des droits de scolarité, contredire cette affirmation du premier ministre en déclarant: «Nous, on a voulu montrer notre appui à ces étudiants-là et faire valoir nos opinions, au secondaire, parce qu'on est les élèves qui seront les plus touchés par cette hausse.» 

Quand tu te fais moucher par un kid de 15 ans, c'est que ton argumentation a besoin d'être révisée. En quelque part, c'est un signe que la jeunesse ne sera pas nécessairement aussi soumise qu'on le souhaiterait. Ou que certains dirigeants ne tiendraient pas 10 minutes dans une classe...

23 avril 2012

Madame Beauchamp et la négociation

Madame Beauchamp ne cherche pas des excuses pour ne pas négocier avec les étudiants. En exclusivité, j'ai mis la main sur la liste des prochaines raisons pour lesquelles Mme Beauchamp est prête à recevoir les étudiants.

Voici donc les prochaines demandes de Line Beauchamp:
- mardi: que le carré rouge soit bleu. Rouge, c'est agressif.
- mercredi: que le carré soit un cercle. Un cercle, c'est plus harmonieux.
- jeudi: que les porte-parole soient mieux coiffés. Une belle présentation prédispose à de meilleures négociations.
- vendredi: que les négos soient reportées à lundi, car elle a un brunch de financement politique à 100 000$ à préparer en fin de semaine.

22 avril 2012

Anglais intensif: la chaise musicale commence

Certaines écoles ont décidé d'implanter l'anglais intensif en 6e année du primaire dès l'année prochaine avec pour résultat qu'une de mes prédictions est en train de se réaliser. N'ayant pas envie d'enseigner à deux groupes différents au cours d'une même année, des profs d'expérience préfèrent quitter ce niveau qui sera parfois refilé à des gens moins intéressés ou à des enseignants à statut précaire.

Une sixième année terminale, avec tous les examens, un programme compressé de 50% donné par des enseignants dont ce n'est pas le poste l'année d'avant: une recette franchement gagnante!

21 avril 2012

Les blagues de Jean Charest

«Les propos que j'ai tenus lors de mon discours ont été cités hors contexte et interprétés par certains comme si je prenais la situation à la légère.»

- Jean Charest

Le premier ministre, Jean Charest, comme un meneur de claque, voire un animateur de foule, voulait détendre l'atmosphère. Quoi de mieux qu'une bonne blague ou deux, suggérant même de déporter des jeunes dans le Grand Nord? Affirmer par la suite qu'il a été cité hors contexte, c'est ajouter le mensonge au mépris. Il faut regarder cette vidéo pour le voir s'arrêter lorsqu'il est applaudi, son sourire satisfait qui goûte les applaudissements de la salle. Il rit à l'avance de sa prochaine répartie, prend le temps de mesurer son effet.



«Le Salon Plan Nord est déjà très populaire, les gens courent de partout pour rentrer, a blagué le premier ministre. Ceux qui frappaient à la porte ce matin, on pourrait leur offrir un emploi... dans le Nord, autant que possible»

Mon vote, dans le comté où je demeure, a toujours été perdu dans une vague péquiste. J'aurais voté contre ou pour le Parti québécois que cela n'aurait rien changé à la donne.

Avant l'annonce du gouvernement Charest d'instaurer l'enseignement de l'anglais intensif au primaire, je dois avouer qu'en matière d'éducation, j'aurais davantage voté PLQ que PQ parce que le parti de madame Marois est généralement trop intervenu de façon idéologique dans le réseau de l'éducation.

Mais avec la façon dont le gouvernement gère actuellement le conflit avec les étudiants, non seulement il a perdu mon vote, mais j'ai décidé de m'engager, le temps venu, comme bénévole dans un comté où les probabilités qu'un député libéral soit battu soient élevées. Poser des pancartes, distribuer des dépliants, agir comme chauffeur le jour du vote: il existe plusieurs façons de donner un coup de main.

Il me serait facile de dénoncer. Je vais faire mieux: m'engager pour que cet homme ou ce parti ne soit pas au pouvoir après les prochaines élections.

16 avril 2012

Communauté religieuse et éducation

Il est consternant de constater que les écoles hassidiques québécoises continuent à bafouer le droit fondamental des enfants à l'instruction. Le MELS semble s'asseoir sur ses deux mains dans ce dossier puisque, depuis cinq ans, il négocie, discute, palabre... (voir ici et ici).


15 avril 2012

Une information à vérifier et une proposition à explorer (ajout)

On parle beaucoup de la gestion des universités. Récemment, dans les commentaires sur un article portant sur la gestion de l'université Concordia, on retrouvait l'information suivante:

«Par exemple notre Monsieur Peter Kruyt le PDG de Concordia a donné au PLQ $ 30,000 en 10 ans, un autre qui ne regarde pas la dépense est un champion des dons avec $ 41,000. En fait 11 personnes du CA de Concordia ont donné plus de $ 141,000 en retour au PLQ pour avoir été un heureux élus sur ce conseil. Les nominations sont à 90% des hommes car selon les probabilités ils sont plus fidèle pour donner leur petit $ 3000 chaque année. C'est bien malheureux pour les femmes, mais heureusement Lisa Frulla a été nommé sur de tel conseil en occupant des sièges sur plusieurs Conseil d'administration.

En général, c'est le Parti Libéral de Monsieur Jean Charest qui récolte 95 % des dons.»


Il serait intéressant de vérifier ces faits.

Quand la FEUQ propose la création d'un organisme pour vérifier la gestion des universités, on commence à comprendre pourquoi cette idée mérite d'être explorée. «Cet organisme, qui serait composé d'étudiants, de professeurs, de dirigeants d'institutions et de fonctionnaires, assurerait le suivi de la gestion des universités afin d'éviter les débordements financiers», peut-on lire sur Cyberpresse.

De mémoire, ce sont les étudiants et les professeurs qui ont les premiers sonné l'alarme sur le fiasco de l'ilot Voyageur de l'UQAM. De mémoire aussi, ce sont les universités privées (à charte), pourtant financées par les deniers publics, qui accordent les salaires les plus élevés à leurs dirigeants. Les universités du réseau gouvernemental (des constituantes de l'UQ) sont plus modestes dans leurs dépenses à cet effet.

Mais combien on parie que le gouvernement libéral ne dira pas un mot à propos de cette idée. Tout va tellement bien au niveau de la gestion des universités, on le sait.

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Juste pour me faire mentir:  «J'ai pris acte de la proposition de la FEUQ et je suis tout à fait disposée à en discuter», a affirmé Mme Beauchamp cet après-midi. Mais pas question de parler de la hausse pour autant... Il y a juste un problème: la FEUQ a émis cette proposition dans le but de diminuer les frais de scolarité. 

13 avril 2012

Frais de scolarité: exercer une autorité intelligente (ajout)

Avec la lutte contre la hausse des frais de scolarité, j'espère que le premier ministre, Jean Charest, et la ministre de l'Éducation, Line Beauchamp, ont réalisé quels sont les étudiants que nous accueillons dans nos classes. Des jeunes pour qui l'autorité exercée de façon bête ne suffit pas. La police, la loi, ils s'en moquent un peu, croyez-moi. Ils ont des idées, des convictions. Et ils prennent les moyens pour les promouvoir.

Ce soir, je dois l'avouer, à ma grande honte, je suis parti à rire quand j'ai lu qu'une attaque informatique paralysait les sites Internet du ministère de l'Éducation et du parti libéral du Québec. Il s'agit d'un acte criminel, je sais, mais quand je pense à tout l'argent que notre gouvernement a dépensé en publicité, en sites Internet, en référencements de sites... je me demande qui est le plus condamnable.

Depuis le tout début de cette crise politique, le gouvernement a tout faux. Lors des consultations sur les frais de scolarité qu'ont boycottées toutes les associations étudiantes, il était clair que les dés étaient pipés. M. Charest et son entourage ont sous-estimé les étudiants. Et depuis, on a assisté à différentes attitudes gouvernementales.

La première consiste à infantiliser les étudiants en les grondant, on leur disant ce qu'ils doivent ou ne doivent pas faire. On est à la limite du mépris.

La seconde consiste à nier leurs revendications. Alors que, pendant deux ans, la société québécoise a réclamé une commission d'enquête sur l'industrie de la construction, nos dirigeants ont trouvé le moyen d'affirmer qu'ils écoutaient la majorité silencieuse dans ce conflit. 200 000 jeunes et moins jeunes sont descendus dans les rues de Montréal. La plus importante manifestation depuis des lustres. La ministre de l'Éducation fait une proposition renforçant l'endettement et refuse toute rencontre pendant que le premier ministre est à l'extérieur de la province alors qu'on connait la plus grave crise sociale de son mandat. Inutile de dire ici qu'on renforce de la sorte les risques d'escalade de ce conflit, ce qui définitivement la politique du pire. Par son manque de sensibilité, le gouvernement incite à la désobéissance civile et cautionne l'éclosion d'une génération qui croira que la résolution de tout conflit se trouve dans la rue et l'emploi de moyens parfois illégaux.

La troisième consiste à ne pas exercer un leadership pour sortir de cette crise et à sous-traiter la résolution du conflit à d'autres intervenants. Alors qu'après un affrontement si long, ce gouvernement  devrait s'élever au-dessus de la mêlée et en arriver à trouver une solution acceptable pour toutes les parties, la ministre de l'Éducation trouve le moyen de parler à la télé des lunettes brisées d'une de ses assistantes et sous-traite la résolution de ce conflit à des paliers de pouvoir inférieurs: les forces policières, les enseignants, les dirigeants des cégeps et des universités. Ce faisant, elle augmente les risques de dérapage puisqu'elle n'exerce plus un contrôle direct sur les actions de ces derniers. Une bavure policière, une déclaration malheureuse suffiront à embraser encore plus les jeunes.

Le pouvoir comprend la responsabilité de l'exercer avec intelligence, compétence et bienveillance. C'est de cette façon que les bons enseignants réussissent à amener les jeunes qui leur sont confiés un peu loin dans la vie qui s'ouvre à eux.

Le gouvernement actuel ne semble pas comprendre que, s'il continue dans la voie qu'il a choisie, il n'y aura que des perdants dans tout ce conflit. Le premier ministre Charest devrait se comporter en véritable chef d'État, revenir au pays au lieu de jouer au commis-voyageur en Amérique du Sud et déclarer un moratoire sur la hausse des frais de scolarité. En voulant augmenter ceux-ci de 1625$  en cinq ans, il s'est montré trop gourmand. Une hausse correspondant au cout de la vie avec des majorations ponctuelles aurait évité toute cette saga.

Monsieur Charest de grâce, cessez d'inciter une partie de notre jeunesse à la révolte et à la désobéissance civile par votre attitude. Manifestement, les gens qui vous entourent ne comprennent rien à la jeunesse d'aujourd'hui.

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Un exemple de la condescendance de la ministre Beauchamp. En entrevue à La Presse, elle déclare: «De leur côté, les leaders étudiants disent que la question, c'est celle du gel des droits de scolarité. Or ce n'est pas le bon sujet de discussion.» Pas le BON sujet? Qui est-elle pour affirmer cela quand 200 000 Québécois sont descendus dans la rue à ce sujet?

09 avril 2012

Frais de scolarité: carton rouge pour le gouvernement Charest

Les dix prochains jours seront décisifs pour le mouvement contre la hausse des frais de scolarité. Déjà, stratégiquement, la CLASSE a mis de l'eau dans son vin en indiquant que la gratuité scolaire constituait pour elle un objectif à moyen ou long terme. «Ce qu'il faut comprendre, c'est que nous avons une position de gratuité scolaire, mais il n'a jamais été dit que c'est ce que nous revendiquions cette année. Oui, on peut aborder la gratuité scolaire comme projet de société, mais en ce moment, ce n'est pas la revendication principale de la CLASSE», a affirmé Jeanne Reynolds, porte-parole de la coalition.  Il faudra voir comment cette déclaration s'accordera avec les mandats de grève illimitée adoptés par certaines associations étudiantes.

Pour ma part, si je suis d'accord avec l'esprit de cette lutte, j'éprouve des réserves quant à certains aspects de celle-ci. Allons-y tout de même avec quelques réflexions masquées.

La mauvaise gestion gouvernementale 

Un premier point qui me surprend est comment le gouvernement Charest a mal géré jusqu'à présent toute cette crise. Adepte de la pensée magique, il a cru, à tort, que le mouvement étudiant s'essoufflerait à force de le nier. Pourtant, 200 000 personnes dans la rue pour appuyer une cause, on n'a pas vu cela depuis longtemps au Québec.

Juste avant Pâques, le gouvernement a lancé l'idée d'un remboursement des prêts étudiants de façon proportionnelle au revenu et d'une augmentation du revenu parental de base n'empêchant pas d'être admissible à une aide financière. Une mesure estimée à 21 millions qu'il fait d'ailleurs porter aux universités alors que lui-même affirme qu'elles sont sous-subventionnées. Une mesure illogique et improvisée qui entre en contradiction flagrante avec le sort que cette même formation politique a réservé à une idée similaire émise par le ministre de l'Éducation Pierre Reid des années plus tôt.

Le gouvernement n'a pas su également diviser le mouvement étudiant comme il l'a fait en 2005, à moins que ce soit la CLASSE, la FECQ et FEUQ qui aient compris qu'elles ont tout à gagner à demeurer unies.

M. Charest et compagnie auraient tout intérêt à réaliser qu'ils ont été trop gourmands dans leur action. Ils auraient suscité moins de controverse en augmentant les frais de scolarité de façon annuelle à la hauteur du coût de la vie plus un rattrapage cette année de 3%, par exemple. Tout cela, quitte à instaurer un autre rattrapage par la suite si le climat politique le permet. Je ne suis pas convaincu qu'on serait au coeur d'une telle lutte si la hausse avait été moindre et mieux étalée. Trop gourmand. Mauvais jugement politique. Avec les résultats que l'on connait. Comment créer un psychodrame alors que la voie de la retenue et de l'habileté aurait été garante de succès.

La fameuse «juste part»

Cet argument du gouvernement Charest, répété ad nauseam par les ministres Bachand et Beauchamp,  est, n'ayons pas peur des mots, mensonger. Au Québec, notre société s'était toujours dotée de services en fonction des taxes et des impots que payaient les citoyens. Or, on assiste depuis quelque temps à une lente dérive: celle de l'utilisateur-payeur.

Il faut savoir que cette dérive va totalement à l'encontre du principe précédemment mentionné. Peut-on parler de «juste part» quand il est plus facile pour un individu riche de payer un service que pour un autre qui serait démuni? La fameuse taxe santé de 200$ par adulte, contenue d'ailleurs dans le budget 2012-2013 du ministre Bachand, en est un bon exemple et montre bien les contradictions qui habitent la pensée gouvernementale. Une juste part tiendrait compte des revenus des individus. La hausse des frais de scolarité également ne le fait pas et il est faux de penser qu'un régime de prêts plus généreux vient contrebalancer celle-ci: un prêt demeure un prêt.

Ce slogan creux et vide est, quant à moi, politiquement dangereux. Au lieu de présenter un Québec habité par des projets collectifs, il le réduit à une somme d'individus désireux de payer «juste leur part». Suivant cette logique pernicieuse, viendra peut-être le jour où j'exigerai de payer ma «juste part» en matière de CPE, de procréation assistée, de lutte au cancer du poumon, de bien-être social, de subvention au transport en commun, de tarifs préférentiels hydro-électriques à des alumineries, c'est-à-dire RIEN.

Une lutte passionnée, échevelée... et instrumentalisée

Tout d'abord, il faut souligner avec quelle originalité les organisations étudiantes ont su renouveler leur lutte sur le plan médiatique. La variété des activités pour contester la hausse des frais de scolarité n'a d'égal que leur originalité. Politiquement, le coup de génie a été d'associer les parents québécois à leurs revendications. Et l'extension d'une participation des élèves des écoles secondaires à cette lutte est aussi très habile.

Cependant, le combat mené actuellement par les diverses associations étudiantes me semble être mené sur un front très large. Il va de s'opposer à la hausse des frais de scolarité jusqu'à la gratuité scolaire. Dans le cas de la CLASSE, on parle même de «printemps érable».  Ainsi, Gabriel Nadeau-Dubois, porte-parole de ce regroupement, affirme à propos d'une manifestation prévue la semaine prochaine: «Cela va être l'occasion pour l'ensemble de la population de venir dire : "non seulement on est en appui aux étudiants et étudiantes, mais il est temps de contester de manière plus générale la direction que prend le Québec depuis les dernières années".»

On a parfois également l'impression que certaines organisations ont sous-traité aux étudiants la lutte qu'elles n'ont pas réussi à gagner contre le gouvernement Charest.  Et si le front étudiant tient encore, c'est à la fois peut-être à cause d'une volonté de demeurer unies chez les associations étudiantes, mais aussi de la faiblesse politique des dirigeants libéraux.

Par ailleurs, autant la lutte ratisse parfois large, autant elle exclut néanmoins une majeure partie du monde scolaire quand elle parle de gratuité. A-t-on entendu parler des frais exigés aux parents au primaire et au secondaire? Même au cégep ces frais peuvent soulever des questions légitimes si on adopte la logique de la contestation actuelle.

Dans la même veine, je remarque qu'on est prêt à prendre la rue pour dénoncer le cout de l'éducation que l'on reçoit mais rarement la qualité de celle-ci. Et si le gouvernement cédait, tout ce beau monde rentrerait bien sagement en classe sans se questionner davantage. Tristement, le fric avant les idées.

Une lutte redéfinie

La lutte qu'ont entreprise certains étudiants est aussi remise en question dans son essence même. Jamais on a autant questionné l'utilisation des termes «grève étudiante». Au-delà de la terminologie, on comprend bien qu'on parle de la définition même de cette lutte. Devrait-on parler davantage d'un «boycottage des cours»?

On a aussi assisté à certains recours judiciaires pour établir ce qui est acceptable de ce qui ne l'est pas comme actions militantes. Les associations étudiantes sont en quelque sorte coincées par leur propre discours où il leur est impossible d'utiliser des techniques propres à l'intimidation tout en dénonçant l'attitude gouvernementale ou celle des forces policières. À cet égard, le fait que certains leaders n'aient pas dénoncé certains gestes posés par des sympathisants a entaché leur lutte. Traiter les étudiants des HEC de «putes babyloniennes» n'est sûrement pas une façon de susciter une adhésion de ces étudiants à leurs idées.

De même, il ne serait pas surprenant de voir certains établissements d'enseignement coincés par des poursuites intentées par des étudiants non grévistes qui n'auraient reçu la formation reliée à leur inscription. Il leur serait facile de démontrer que ces établissements n'ont pas tout fait en leur pouvoir pour leur assurer celle-ci. (Tiens, ce texte à ce sujet ce matin.)

Une conclusion

Depuis la Révolution tranquille, le Québec a eu des airs de social-démocratie. Il s'est doté d'un ministère de l'Éducation, d'un réseau d'écoles primaires et secondaires. Il a procédé à la création d'un réseau collégial.  Enfin, il a voulu s'assurer d'une meilleure accessibilité à des études supérieures par la création d'un réseau universitaire gouvernemental et d'un système de prêts et bourses.

La crise que nous vivons actuellement est le symptôme d'un changement quant à l'esprit politique qui anime ce territoire et, dans une plus vaste mesure, l'ensemble canadien. L'éducation doit-elle être gratuite au Québec? La question mérite d'être posée puisqu'elle ne l'est même plus aux niveaux primaire, secondaire et collégial.

Pour ma part, je ne crois pas que ce soit dans la rue et dans la confrontation que nous trouverons cette réponse. Aussi, le gouvernement Charest devrait surseoir à la hausse des frais de scolarité et entamer un véritable débat sur cet enjeu avec tous les acteurs de la société québécoise. Devrait-on aller jusqu'à des États généraux sur l'éducation au Québec? Chose certaine, les sujets ne manqueraient pas si on y ajoutait l'abolition des commissions scolaires ainsi que la gestion des réseaux collégial et universitaire...