22 mai 2018

Il est minuit et deux, Monsieur le Ministre

Le 10 mai dernier, des représentants de parents acceptaient une offre de règlement de 153 millions $ visant à régler un recours collectif concernant les frais que certaines écoles n'auraient jamais dû leur exiger. Le ministre de l'Éducation, Sébastien Proulx, annonçait alors qu'il ferait connaitre «bientôt» les balises pour encadrer de tels frais de la part des établissements scolaires.

Le 10 avril dernier, le ministre Proulx s'engageait à présenter de telles balises «au cours des prochaines semaines, d'ici la fin de l'année scolaire.» 

Le 12 octobre 2017, le ministre Proulx disait attendre un rapport sur cette question de la Fédération des commissions scolaires du Québec vers la mi-décembre avant de se prononcer.  LA FCSQ s'est finalement retiré du groupe de travail chargé d'examiner les frais exigés aux parents de crainte de s'incriminer quant au recours collectif auquel elle faisait face et le rapport n'a finalement jamais été déposé.

Le 22 aout 2017, le ministre Proulx indiquait que son ministère se penchait sur la question des frais exigés aux parents et précisait: «Je pense que cette année, on va bouger sur cette question-là.»

Nous sommes le 22 mai 2018. Le ministre Proulx n'a pas toujours pas fait connaitre quelles balises devraient guider les écoles par rapport aux frais exigés aux parents. La question n'est pas nouvelle. Le recours collectif réglé ce mois-ci a été déposé en 2013. Un recours semblable avait également été déposé en 2010 contre la commission scolaire des Grandes-Seigneuries et celle-ci avait alors également conclu une entente avec les parents. Par ailleurs, quelqu'un a-t-il informé le ministre que ces balises auraient dû être annoncées au début du mois de mai avant que les directions d'école présente à leur conseil d'établissement les frais exigés aux parents pour la prochaine année scolaire?

Actuellement bien des directions d'école ont dû déposer devant leur conseil d'établissement une liste des frais exigés aux parents pour l'année scolaire 2018-2019 tout en ignorant quelles seraient les lignes directrices du ministère. Certaines craignent de devoir refaire tout ce travail, d'autres n'ont pas pris de chance et ont simplement annulé toutes les sorties culturelles et éducatives pour la prochaine année. Le ministre réalise-t-il que le fait qu'il ne se soit pas encore prononcé sur ce sujet occasionne certains problèmes dans les différents établissements scolaires du Québec?

Par ailleurs, sur un autre plan, se peut-il que certains producteurs culturels, acteurs et artistes ne suivent absolument pas ce dossier? Alors que lors des différents boycotts par les enseignants de différentes activités culturelles et parascolaires, ils n'avaient pas hésité à se dire «pris en otages» et à dénoncer ces moyens de pressions, pourquoi sont-ils étrangement muets devant l'abandon complet de plusieurs sorties scolaires? Et un peu méchamment, devant qui iront-ils manifester cette fois-ci? Sûrement pas devant le siège de la CSQ.  :)

06 mai 2018

Utiliser l'ordi lors d'un examen d'écriture

Dans le Journal de Québec, on publie aujourd'hui un article indiquant que le MEES songe à permettre aux élèves d'utiliser un ordinateur et un logiciel de correction comme Antidote lors de l'épreuve d'écriture de cinquième secondaire. Une recherche a même été effectuée auprès de 300 élèves à cet effet. Certaines des conclusions de celle-ci rejoignent ce que l'on constate déjà depuis des années sur le terrain, soit que les élèves qui ont utilisé Antidote ont effectué moins d'erreurs et que ceux qui ont utilisé l'ordinateur sans correcteur, eux, en ont fait davantage que leurs confrères munis seulement d'un crayon et d'une feuille de papier.

La principale raison expliquant le deuxième constat est assez simple: des élèves qui n'ont pas l'habitude d'utiliser l'ordinateur sont «bousculés» dans leurs repères et leurs techniques de correction. Dans bien des cas, ils voient moins leurs fautes à l'écran que sur le papier parce que leur oeil, par un phénomène bien connu, a davantage tendance à «reconstruire» correctement un mot mal orthographié quand il est écrit à l'ordinateur.

Actuellement, il faut savoir qu'il est déjà permis d'utiliser un ordinateur sans logiciel de correction pour compléter l'épreuve du MEES. La principale condition pour ce faire, par contre, est qu'on doit démontrer que l'élève est habileté à le faire, c'est-à-dire qu'il a appris à utiliser l'ordinateur pour rédiger, ce qui est une bonne idée quand on pense aux résultats de la recherche mentionnée plus haut.

Ce que l'on remarque cependant est que ceux qui sont vraiment habiletés à utiliser l'ordinateur réussissent mieux, même sans correcteur, tout simplement parce qu'ils gagnent presque 40 minutes sur un examen qui en dure 195 parce qu'ils n'ont pas à retranscrire leur brouillon au propre. Personne ne soulève cet avantage indu dont bénéficient actuellement des élèves de certaines écoles où l'on exige l'achat d'un appareil électronique ou bien où l'on fournit ce dernier.

Plusieurs difficultés empêchent présentement l'utilisation à large échelle d'un appareil électronique lors d'évaluations en français. La première est bien sûr que les élèves n'ont pas un accès fréquent à un tel appareil afin de devenir habiletés à l'utiliser.  La seconde est de s'assurer de la sécurité de la passation de l'épreuve afin d'éviter le plagiat ou la tricherie.

Sur la question de fond, à savoir si les élèves devraient utiliser ou non un logiciel de correction lors de leurs examens d'écriture, les avis sont partagés chez les enseignants. Ceux en faveur de cette idée indiquent qu'en 2018, il est temps qu'on apprenne aux élèves à utiliser un logiciel de correction en classe. Ils vont comparer cet outil à la calculatrice graphique utilisée en mathématique, par exemple. Ils souligneront aussi que ce logiciel peut favoriser l'apprentissage en indiquant à l'élève ses erreurs et comment les corriger. Ceux qui sont en défaveur se demandent plutôt si on aide vraiment l'élève à bien écrire en lui fournissant un tel outil. Ils donneront le même exemple de l'utilisation de la calculatrice qui a amené certains élèves à ne plus savoir multiplier ou diviser sans cet outil.

Selon mon expérience,  l'utilisation d'un logiciel de correction à l'école avantagera les élèves déjà bons en français. Ceux-ci jouissent effectivement d'une bonne compréhension de la grammaire française et de sa logique interne. Ils n'en deviendront que meilleurs. Pour les élèves faibles et moyens, il est fort probable que leurs résultats s'amélioreront sans qu'ils comprennent pour autant ce qu'ils feront.

Pour ma part, l'utilisation d'un correcteur ne sera pas une panacée et ne remplacera pas l'enseignant, du moins pour quelques années encore si on se base sur l 'état actuel des programmes informatiques basés sur des concepts de l'intelligence artificielle. Il existe des limites à ce qu'un logiciel peut présentement expliquer à un jeune. Pour ce qui est de l'avenir, par contre, même avec une aide électronique plus développée, l'école et ses enseignants seront toujours aussi nécessaires, mais d'une façon différente. Ils devront mieux éveiller les jeunes à la logique, la beauté et les créations reliées à cette langue qui est la nôtre.