14 mai 2008

L'enseignement extra-ordinaire

Dans un billet précédent, j'ai parlé de l'enseignement ordinaire. Laissez-moi vous parler aujourd'hui de ces élèves extra-ordinaires, ceux des programmes particuliers.

Tout d'abord, ils sont généralement sélectionnés. Donc, aucune chance qu'ils soient contaminés ces jeunes aux habiletés scolaires non conformes aux évaluations Otis-Lennon, par exemple. Est-ce que cela veut dire qu'ils sont meilleurs que les autres? Au niveau des résultats scolaires, peut-être. Mais vivent-ils moins de stress, de difficultés personnelles? Sont-ils moins impolis? J'en doute.

Ensuite, ces jeunes ont droit à des programmes particuliers parce qu'ils sont particuliers. On donne même parfois à ce peuple élu et sélectionné le Programme d'éducation international qui vante des valeurs de solidarité, de partage et d'ouverture. N'est-ce pas contradictoire? Peu importe.

À ces jeunes, on assure qu'ils auront des profs qualifiés et motivés en faisant passer des entrevues de sélection à ceux qui seraient tenter de leur enseigner. Celles-ci visent à vérifier que les candidats respectent et comprennent les valeurs du PEI. Pourquoi une telle sélection là et pourquoi embauche-t-on sans trop de discernement ailleurs?

Et puis, ces jeunes, ils ont des activités. C'est prévu dans le programme. Enrichissement. Les parents paient. On peut exiger que les parents paient, à vrai dire. Les autres, les ordinaires, on ne leur demande rien parce que la loi nous obligerait à payer pour ceux qui n'en ont pas les moyens. Too bad! Ils n'avaient qu'à se forcer. L'éducation ordinaire est gratuite pour les pauvres.

Enfin, ces extra-ordinaires auront rarement à vivre l'intégration des élèves en difficulté. Ils appartiennent à des groupes performants dans lesquels on ne saurait accepter d'intégrer des éléments qui ralentirait le rythme d'apprentissage. Pourtant... ils auraient à en tirer là bien des apprentissages. Surtout en ce qui a trait au partage et à la solidarité. Mais non: les ti-pas-vite et les pas-fins, qu'on les refile aux ordinaires, à ceux qui viennent à l'école ordinaire pour un enseignement ordinaire avec parfois des profs ordinaires.

5 commentaires:

Annie a dit…

Les pas-vite, les pas-fins? Connais pas.

Comme future prof, je dois dire que ce monde inconnu qu'est le régulier m'intimide. Vivement l'expérience.

bobbiwatson a dit…

Le régulier (le "ordinaire" maintenant) est ce qui correspond le plus à notre société. Ils ne sont ni sots, ni bollés : ils sont donc faciles à comprendre.

Une femme libre a dit…

Quand j'ai vu le titre, j'ai pensé que vous parleriez des enfants en trouble d'apprentissage et en trouble d'adaptation, ceux qui ne fittent vraiment pas dans les classes "ordinaires" et qui sont donc extra-ordinaires. Ceux qui en auraient tellement besoin de profs qualifiés et motivés et de programmes particuliers et adaptés parce qu'ils sont des élèves particuliers. Ceux qui ont le plus de risque de décrocher, de tomber dans la drogue et la délinquance, ceux qui ont une basse estime d'eux-mêmes, ceux dont on se moque, ceux à qui personne ne veut enseigner. Les élèves des programmes d'éducation internationale vont s'en tirer très bien dans la vie, même si on les plaçait dans une classe ordinaire. Les élèves vraiment extra-ordinaires, ce sont les autres, les laissés-pour-compte de l'éducation et de la société.

Anonyme a dit…

Mère de 3 jeunes au PEI (au fait, c'est le programme ou l'éducation qui est international?) j'ai choisi cette option pour permettre à mes enfants d'avoir un rythme d'enseignement qui correspond au leur. Et aussi pour leur éviter les pas-vite et les pas-fins. Des pas-fins, ils en côtoient tout de même, ceux qui sont au PEI sont juste plus vites. Mais il y a effectivement beaucoup moins de pas vite. Le rythme d'apprentissage correspond davantage à leurs capacités, et ils y apprennent qu'il faut travailler pour avoir certains résultats (ce qui n'était pas le cas dans leur classe primaire régulière.) Qu'auraient-ils à gagner au régulier? Se faire traiter de "bol", réaliser pleinement qu'on peut réussir sans effort? Aider les autres? L'entraide existe aussi au PEI. À l'adolescence où le désir est de se fondre dans la masse, c'est difficile de bien réussir à l'école. Et ceux qui le font ont à subir l'envie et le mépris de leurs congénères, et même parfois de leurs futurs profs. Personne ne voit de problème à créér des équipes sportives AAA, qui coûtent plus cher aux parents, qui ont des entraîneurs plus motivés, et qui permettent au jeune d'évoluer dans sa discipline sportive au meilleur de ses capacités. Quand est-ce qu'on dit à un jeune prodige du hockey reste dans le C, tu vas apprendre à passer la rondelle aux autres et à apprivoiser les différences? Mais il semble que notre société est prête à mettre en place une structure qui permet de crééer des Mario Lemieux et des Sydney Crosby, mais pas des Marie Curie ou des Albert Einstein...


Martine

Le professeur masqué a dit…

Moiprof: c'est en forgeant qu'on devient forgeron.

Bobbi: moi, je vais t'avouer que je ne comprends pas toujours cette société dans laquelle on vit.

Une femme libre: bonjour à vous! Je dois vous avouer que je n'avais pas de ligne directrice quand j'écris ce billet. C'est plutôt rare, en passant. Il faisait suite à celui sur l'enseignement ordinaire.

Dans ce billet, je voulais traiter des élèves qu'on ne mêle pas avec l'ordinaire. Ils sont donc extra-ordinaires (hors de l'ordinaire, si l'on veut. Ce que je voulais dire au fond, c'est que le programme ordinaire ne bénéficie pas des avantages du PEI. Il est juste ordinaire. Or, je crois que chaque type de clientèle a des besoins spécifiques et que les élèves doués sont peut-être les moins mal desservis dans notre système d'éducation, ce qui est quelque peu paradoxal. Il ne s'agit pas d'habiller Pierre en déshabillant Paul, mais je remarque que la concertation entre les profs est meilleure au PEI. Il y a plus de collaboration. Les ordinaires ont souvent l'air des laissés pour compte. Quant aux élèves des classes spéciales, ils reçoivent des services, mais jamais à la hauteur des besoins qu'ils présentent.

Anonyme: Excellente question! Il y a toujours de la confusion autour de cette appellation.

J'enseigne actuellement au régulier et dans une classe de douance. Règle générale, mes doués sont plus rapides, plus constants et plus homogènes. Au régulier, le groupe est plus hétérogènes. Plusieurs élèves pourraient être aussi performants, mais ils ont d'autres priorités.

En bout du compte, j'ai des attentes assez similaires envers ces groupes. Elles sont parfois atteintes de façons différentes, mais je préfère considérr que tous ont appris quelque chose que de comparer des élèves.

Enfin, quant à l'éternel phénomène des nerds, chaque élève pour moi a droit au respect. Chacun a ses forces et ses faiblesses. Et puis, on n'est pas obligé d'être bon dans ma matière pour mériter ma considération et mon respect. En les acceptant comme ils sont, j'évite un peu ce genre de climat.