05 février 2011

Jeunes en mauvaise forme et cours d'éduc: un faux débat

Il y a plein de belles choses à commenter cette semaine dans le monde de l'éducation, mais je ne peux passer à côté de ce texte de François Cardinal. Ce dernier relève que, devant la mauvaise forme physique des jeunes, la solution proposée semble toujours la même: augmenter le nombre d'heures d'éducation physique à l'école. C'est encore ce que suggérait Kino-Québec au gouvernement tout récemment, «l'idéal étant au moins un cours par jour».

Or, M. Cardinal qu'on ne peut soupçonner d'être opposé à la bonne forme physique, s'inscrit en faux contre ce genre de raisonnement. «...aussi séduisante soit-elle, cette avenue a peu d'avenir tant elle est parsemée d'embûches, du faible nombre d'éducateurs physique à l'occupation des gymnases, en passant par l'horaire déjà chargé des écoliers», écrit ce dernier.

L'auteur y va également d'une statistique assassine qui devrait clore le débat sur l'ajout de période d'éducation physique à l'horaire. Ainsi, dans le cadre d'une heure de cours d'éducation physique, savez-vous combien de temps est consacré à réellement s'activer? À peine 24 minutes...

Ce que propose Cardinal est de cesser de penser en termes d'éducation physique, mais plutôt d'activité physique: «nos jeunes ont davantage besoin de bouger que d'apprendre comment bouger.» Et, à ce sujet, il repère des plages-horaire où il serait possible de le faire, soit la récréation, l'heure du repas et le service de garde.

Il est évident que le fait que je sois un enseignant de français au secondaire teinte mon opinion. J'ai participé à tellement de débat sur l'ajout de périodes d'éducation physique au détriment de celles en français au cours de ma carrière que je ne les compte plus.

Lors tous ces débats, il fallait voir à quel point on jouait de la corde de la culpabilité sans pour autant s'intéresser à l'efficacité des mesures proposées et à ce qu'on pouvait faire hors du temps d'enseignement. On se donnait bonne conscience en croyant améliorer les choses d'un simple ajout d'une période à l'horaire.

Par ailleurs, je tiens à corroborer le chiffre de 24 minutes d'activité par heure de cours d'éducation physique. Combien de fois suis-je allé voir des confrères d'éduc durant leurs cours pour constater, gymnase oblige, que bien des élèves étaient assis à attendre.

Je tiens à souligner cependant quelques éléments intéressants:
- de plus en plus, les nouveau enseignants d'éducation physique font preuve de créativité et d'originalité pour accrocher les jeunes.
- à mon école toujours, le diner et après la classe, les élèves ont la possibilité de participer à des activités physiques parascolaires ou encadrées par des fédérations sportives locales.
- à mon école toujours, on suscite de plus en plus la participation d'enseignants d'autres matières lors de manifestations sportives. Ainsi, les élèves voient leur prof de maths ou de français courir avec eux lors du cross-country, par exemple.

Tout comme dans le cas du décrochage scolaire, chaque école y va d'initiatives peu connues et qui demanderaient à être partagées. On est loin des méga-mesures ministérielles, mais celles-ci sont peut-être plus efficaces... et il reste les parents à qui on doit faire réaliser le rôle majeur qu'ils ont à jouer dans toute cette problématique.

8 commentaires:

unautreprof a dit…

Il y a aussi la part à la maison qui compte pour beaucoup, on le sait. Dans ma classe, j'ai certains jeunes qui jouent dehors (ces temps-ci, ils jouent dans la neige ou patinent) au retour de l'école et d'autres, qui jouent au jeux vidéos. Puis, certains, font un peu des deux.

Les profs d'éducation physique ont aussi à enseigner des notions qui nécessitent des moments d'enseignement et d'écoute de la part des élèves. Ce 24 minutes n'est donc pas surprenant.

gillac a dit…

Vous touchez-là un bon point. au collège, je me souviens très bien que nous détestions les cours d'éduc tout en ayant beaucoup de plaisir à jouer au hockey cosom ou au "touch football". La plupart participait alorsqu'un petit nombre prenait au moins l'air à l'extérieur, ce qui était déjà mieux que l'air du sois-disant gymnase que nous avions.

Anonyme a dit…

"Allez hop! On se bouge les fesse et on va jouer dehors un peu!"

Voir la BD.

Smeugd

L'engagé a dit…

Au Collège Notre-Dame, les cours commençaient à 8h30 et finissaient à 17h15.

Comment tenir les jeunes aussi longtemps? Il y avait une ou deux périodes d'étude, mais surtout une période de sport par jour. En plus, ceux qui faisaient de la musique avaient une répétition de 17h30 à 18h30 (3 ou 4 jours par semaine) et ceux qui faisaient du théâtre, de 18h à 20h15 (deux fois par semaine).

Certains faisaient de la musique et du théâtre, d'autres étaient dans une équipe de sport et faisaient de la musique. Je n'ai jamais connu quelqu'un qui ait fait sport/théâtre/musique, mais j'ai connu quelqu'un qui faisait sport, musique et Petits Chanteurs.

Je n'écris pas cela pour louanger le collège ni le privé. J'écris pour dire que ce que tout élève du collège de ces années-là vous dira, on ne serait jamais passé à travers les longues journées et un tel parascolaire sans une heure de sport par jour. Les périodes d'étude, elles, nous permettaient de rester à jour et justement de faire des devoirs que nous n'avions pas toujours le temps de faire le soir.

Je ne veux pas me faire l'avocat du privé, je suis certain que tout ancien étudiant de Notre-Dame vous dira qu'il souhaite ce genre d'éducation pour tout enfant au Québec, ce genre de modèle devrait être étendu au public.

L'activité joue un rôle dans la réussite scolaire et professionnelle, elle permet de diminuer les impacts du stress, par ailleurs une population qui fait de l'activité physique est moins susceptible d'être malade. N'oublions pas non plus que les enfants sont des acteurs sociaux importants : des enfants qui grandissent avec certaines valeurs sont susceptibles d'opérer des changements dans le sens de ces mêmes valeurs lorsqu'ils seront adultes.

Bref, quand les parents peinent à transmettre des pratiques pourtant importantes, il est nécessaire que l'école prenne le relais. Je sais que Prof Masqué n'est pas complètement d'accord, mais que l'on pense simplement aux vases communicants des finances publiques: veut-on payer en amont ou en aval? Veut-on payer en soin de santé en la lutte contre la pauvreté et dans les ravages qu'elle cause, ou préfère-t-on payer avant et contribuer à améliorer la santé sociale et physique de la société?

On me dit qu'on a pas les moyens, je dis justement que c'est parce qu'on n'aura bientôt plus les moyens qu'il faut songer à prévenir en amont. De toute façon, les infrastructures sportives scolaire à construire pourront être utilisées par la société à l'extérieur des heures d'école.

Ça serait encore une bonne manière de valoriser l'école.

Paul C. a dit…

Faudrait pas se surprendre de voir l'éducation amputée à l'éducation physique. L'important, c'est de s'amuser. La solution passe probablement par les TICs. Vous savez, les nouvelles consoles qui font bouger? Mettons plutôt nos fonds là dedans. Je suis certain qu'une école progressiste est à tenter l'expérience. Californie?
Finlande? Envoyons une délégation!

Féadaë a dit…

Je détestait l'éducation physique. Et j'était loin d'être la seule. L'école pour les filles? et bien stéréotypons et disons que l'éducation physique c'était pour les garçons. On avais pas de choix d'activités , c’était tout le monde dans le même bateau et vu que la priorité était de faire bouger les garçons, et bien c'était soccer, hockey et basket.

J'aurais aimé pouvoir avoir un cours d'éduc plus..comment dire plus adapté.
Je ne suis pas une sportive , je ne m’entraîne pas. J'ai une bonne santé , mais dans une partie de soccer il y a peu de chance que je touche au ballon plus d'une fois même en essayant fort. Je ne demande pas a ce que le ministère investissent 1 millions ou deux pour diversifier les cours d'éduc..ce serait irréaliste.Je veux juste m'opposer au commentaire de l'Engagé en montrant un autre point de vue.
J'ai connu plusieurs personnes , qui comme moi détestait tellement se sentir nulle et mise de coté dans ce cours qu’ils perdait intérêt dans le sport. Subir ça une période par jour m'aurait fais sincèrement détesté l'école.
Il y a les récréations, la pause dîner ainsi qu'après l'école pour courir et jouer. L'École est une institution qui a mes yeux est sacré , mais ne doit surtout pas, d'aucune façon , remplacé le rôle du parent en choisissant quand l'Enfant doit bouger , ce qu'il doit manger ou comment il doit être élevé.
L'École est importante, le sports l'est aussi. Mais pitié laissez-nous bouger comme on le veux, laissez-nous faire un sport que nous aimons et laissez les parents choisir la façon dont leurs enfants seront élevé sans créer un moule identique pour chacun, on est pas tous pareils.
On est pas tous sportif, et surtout, a ce que je sache on est pas tous OBLIGÉ de faire du sport.
Laissez-nous choisir. Ce n'est pas illégal de décider de ne bouger que 2 fois semaine dans un cours qui nous intéresse.

L'engagé a dit…

Justement Féadaë,

Dans le modèle dont je parle, vous auriez pu avoir le choix de faire de la danse, de l'escrime, de l'athlétisme, du volley-ball, de la musculation.

En secondaire 1 on fait tous les sports en apprenant un sport au deux semaines et de secondaire 2 à 5, on choisit (d'après une liste de préférences, on ne peut pas faire hockey pendant 4 ans).

Votre discours (« J'ai connu plusieurs personnes , qui comme moi détestait tellement se sentir nulle et mise de coté dans ce cours qu’ils perdait intérêt dans le sport.») me semble simplement représenter le propre d'un jeune qui n'a pas été initié au sport.

En secondaire 2-3, on voit effectivement une baisse de motivation dans les cours d'éduc (chez les filles) et en secondaire 4 ou 5, l'intérêt remonte et les jeunes jouent de bon coeur (la maturité sans doute du «tant qu'à être là») Dans un tel contexte, le but des profs est de nous voir nous améliorer dans une période de deux semaines.

Les sports (ou l'entrainement), ce n'est pas inné, c'est justement un acquis et ça prend de l'assiduité et de la patience pour atteindre une certaine maitrise; c'est à ce moment là que ça devient agréable.
L'école est l'institution idéale pour développer de telles pratiques.

Anecdote, j'étais petit, je n'aimais pas le sport et encore moins le basket, mais le prof était exigeant, à un moment donné dans les cours d'éduc, tu te forces, ça passe simplement plus vite, donc j'ai développé des aptitudes et j'ai compris que ma petite taille pouvait aussi être un avantage. Comme j'étais plutôt faible, je devais vraiment appliquer les techniques, mais lorsque je le faisais, je me débrouillais assez bien, assez en tout cas pour vouloir retoucher au ballon.

Un jour j'ai récupéré un ballon et tous mes coéquipiers étaient occupés, je me suis donc mis à dribbler en zigzaguant vers le panier adverse, j'étais vraiment «dans la zone» et j'ai fait un panier. Tous mes coéquipiers sont venus me féliciter, j'avais déjoué l'équipe adverse! Même les membres de cette dernière ont pris la peine d'indiquer que je les avais bien eus.

Je n'ai plus rejoué au basket, mais je me rappelle encore de cette anecdote et surtout de la leçon : on peut devenir bon si on s'en donne la peine.

Ce moment-là a changé mon rapport au sport, mais aussi à l'apprentissage en général. Ce genre de déclic, je ne l'aurais jamais eu sans un environnement sportif aussi régulier. Je me souviens d'une fille qui s'est mise à courir, elle n'était pas particulièrement sportive non plus, mais elle avait une disposition pour la course de fond, cela aussi la valorisait, elle battait les champions de foot! Elle m'a révélé un jour qu'elle ne pensait pas à ses problèmes lorsqu'elle courrait (et elle en avait), est-ce que la course ne devait pas ensuite contribuer à sa réussite scolaire?

Le sport, c'est comme la littérature, ça n'est pas réservé à une élite et ça ne doit pas l'être.

Je rappelle que je ne dis pas que le sport doit remplacer une autre matière, on doit en faire «en sus».

mery a dit…

Les profs d'éducation physique ont aussi à enseigner des notions qui nécessitent des moments d'enseignement et d'écoute de la part des élèves. Ce 24 minutes n'est donc pas surprenant.