04 février 2014

Surtout ne pas parler de la réforme

Il ne faut surtout plus parler de la réforme, du renouveau pédagogique et de tout le tralala. Tout d'abord, parce que cette réforme n'aurait jamais vraiment été implantée comme il était prévu de le faire. Ensuite, parce que ce n'est pas constructif et signe que je vis dans le passé. Pourtant, c'est souvent après une dizaine d'années qu'on peut prendre la pleine mesure de certains changements en éducation.

Ce matin, la lecture des journaux me fournit deux exemples de constats.

Le premier est relié à l'enseignement des sciences. Tout d'abord, on relève que les Québécois sont moins forts en sciences depuis le fameux Renouveau. Un phénomène que je relevais ici. Alain Dubuc et son jovialisme scolaire sont, une fois de plus, remis en question. Un enseignant de quatrième secondaire en sciences et technologie, René Nault, souligne qu'en regroupant toutes les sciences dans un même cours (biologie, physique, chimie, etc.), «On a diminué de niveau, nous sommes passés de spécialistes à généralistes et nous avons le double de tâches». 

Comme je le soulignais ici, c'est un peu le même phénomène qu'en Univers social où des profs d'histoire enseignent maintenant la géographie et vice-versa. La réforme a demandé à des enseignants spécialisés de devenir multidisciplinaires.  Le professeur à l’Université Laval Simon Larose, qui s'intéresse aux effets de la réforme sur les élèves, constate: «Il y a eu un grand manque de vision dans l’implantation de cette réforme, même pour les enseignants. Parler de biologie ou de chimie, c’est un défi immense pour un enseignant spécialisé en science physique, par exemple.»

Le second concerne l'implantation de cours en orientation scolaire et professionnelle dès le primaire. Ainsi, en 2015, on compte rendre obligatoire des apprentissages en orientation scolaire et professionnelle tant au troisième cycle du primaire  (une nouveauté) que les deux cycles du secondaire. On parle de 5 à 10 heures par année sans pour autant qu'une nouvelle matière soit créée. J'ai bien hâte de voir quel cours son temps d'enseignement réduit. On parie que ce sera le français? 

Est-ce moi qui ai mal lu, mais ce n'est pas un certain constat que la philosophie de l'école orientante ne serait pas la solution miracle qu'on a tenté de nous vendre à l'époque?

Il ne faut surtout plus parler de la réforme, du renouveau pédagogique et de tout le tralala. Tout d'abord, parce que cette réforme n'aurait jamais vraiment été implantée comme il était prévu de le faire. Ensuite, parce que ce n'est pas constructif et signe que je vis dans le passé. 

Mais c'est fou comme le présent me dit des choses.

5 commentaires:

Anonyme a dit…

Autre raison de ne pas en parler: les vendeuses de la réforme sont maintenant en poste de pouvoir (question de les remercier pour leur docilité) et peuvent vous faire regretter vos propos.

Anonyme a dit…

Là où je suis, on en parle un peu. Souvent pour la décrier. Le prof d'histoire qui s'y est conformé, mais constate la difficulté de cette approche conceptuelle pour les jeunes. Il attend des changements qu'on laisse entendre qu'ils auront bientôt lieu.

Je remarque en sondant les programmes que la bio du secondaire 3 semble dilué dans un programme qui couvre beaucoup plus large, mais d'une façon aussi plus superficielle. La philosophie qu'on applique ici: essayer de faire aimer les sciences, ce qui veut dire parfois mettre de côté quelques chapitres. Ici aussi, on se dit que la biologie n'est vu au secondaire qu'en 3e, alors aussi bien la passer au moins. Ça intéresse les jeunes. On se parle entre profs de niveau en maths sciences, on laisse parfois tomber quelques chapitres qu'on sait que le prof de l'autre année va plus travailler avec les élèves.

En maths, tout a été transformé pour rendre, en CST de 4 et 5 en tous cas, la mathématique applicable en résolution de problème. Il y a un flou avec la compétence 1 évalué à 30 % à savoir ce qu'est une situation problème. Le niveau peut varier selon qu'on a un problème très complexe qui utilise plusieurs savoirs mathématiques à coordonner ou selon qu'on présente aux jeunes des situations problèmes plus simples et qui ne mettent en jeu que quelques connaissances. Les enjeux demeurent les mêmes, réforme ou pas: il faut bien faire apprendre la connaissance mathématique et donc l'exercer, faire développer la traduction mathématique des énoncés et faire gérer la démarche de résolution de problème.

J'ai cependant un peu de mal avec la critique de la pression généraliste. J'en suis un depuis toujours et pour moi, à moins de ne pas avoir vraiment de disposition pour une matière, un enseignant qui sait enseigner peut certainement communiquer un savoir même imparfaitement maitrisé, la longue, s'il se questionne, il va discerner l'essentiel de l'accessoire et développer sa pédagogie en conséquence. L'équipe en place est la clé dans ce processus. Ici, le programme de math-sciences a été pensé par les enseignants avec les années et se traduit dans le contenu des cartables qui restent dans l'école. De toute façon, ce n'est pas toujours l'érudition dans un domaine qui est souhaitable, mais la capacité de trouver la façon simple d'impacter l'apprenant qui est l'enjeu majeur. La gestion de classe au secondaire demeure un atout majeur dans cette capacité d'impacter.

Encore là, cela dépend du groupe avec lequel on travaille. Quand on a placé les plus calés des enseignants dans leur domaine avec les meilleurs élèves, les autres ont besoin qu'on mette surtout la barre à leur portée.C'est souvent ce que je constate dans les écoles du Sud, dans la plupart des écoles donc, il y a deux sentiers et deux équipes de profs dédiés à chacun de ces cheminements que la logique des choix de tâche syndicalement structurée favorise.

Jo Livingston

Francis a dit…
Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.
Anonyme a dit…

Non, le problème de la réforme est de balader l'élève dans la complexité de façon systématique en n'abordant souvent les choses qu'en surface. L'avantage des approches par discipline est de bien faire ancrer les méthodes qui lui sont propres. Je vais certainement aborder la stœchiométrie du cours de SE en trop peu de séances, quand je me souviens que jeune j'ai abordé
ce genre de calcul quelque part assez simple en chimie de 4 adapté à l'univers complexe de la chimie où on a beaucoup répété des schémas de correspondances pour résoudre avec des règles de 3 plutôt que de nous passer des formules qu'on oublie.

Cette apprentissage m'a tellement servi dans d'autres domaines que la chimie par la suite.

Vouloir faire faire de l'orientation scolaire à des jeunes qui ne se connaissent pas et qui ne connaissent encore rien de la vie est le genre d'erreurs systématiques que les gens qui ne connaissent rien à l'enfance et à son développement nous impose. Ça fait partie du lot des activités inutiles et impertinentes qu'on a mis sur nos routes de pédagogues.

Pour les classements, c'est comme les palmarès, il faut bien quelque part mettre les gens dans un ordre. Le 25e athlète dans une compétition olympique n'est pas forcément nul! Il y a d'autres instruments d'efficacité en éducation que Pisa et je préfère regarder de ce côté. Quand je regarde la marge d'erreurs de Pisa qui est d'environ 5 positions dans le classement de ce test, je me garde une petite gêne pour faire des interprétations trop certaines.

Jo Livingstone

Anonyme a dit…

Cher professeur,
je m'ennuie de vous en cette campagne électorale, même si vous seriez bien le seul à parler d'éducation.