08 décembre 2015

Conseil scolaire: un faux partenariat?

Le sympathique ministre de l'Éducation François Blais a enfin accouché du projet de loi 86 sur les commissions scolaires. Bien des choses ont été dites à ce sujet, mais je veux revenir sur une chronique de Camil Bouchard à ce propos. 

Ce dernier écrit: «La composition des conseils scolaires témoigne par ailleurs clairement de la volonté du gouvernement de donner une place plus importante aux parents, au personnel des écoles (enseignants et directeurs) et à la communauté locale.» On me permettra de m'inscrire en faux quant à cette affirmation en ce qui a trait au personnel des écoles.

Voici ce que dit l'article 143 du projet de loi 86 en ce qui a trait à la composition de ces nouveaux conseils scolaires:

143 -Une commission scolaire est administrée par un conseil scolaire composé des 16 membres suivants :
1° cinq parents d’élèves fréquentant un établissement d’enseignement de la commission scolaire élus par le comité de parents conformément à l’un des articles 153.6 ou 153.7 et qui ont été membres au moins un an d’un conseil d’établissement, d’un comité ou d’un conseil d’une commission scolaire;
2° un parent d’un élève handicapé ou d’un élève en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage fréquentant un établissement d’enseignement de la commission scolaire, élu par le comité de parents conformément à l’article 153.6;
3° quatre personnes de la communauté, élues conformément aux articles 153.6, 153.7 ou 153.8 à 153.12, selon le cas;
4° deux personnes de la communauté élues conformément à l’article 153.6 ou aux articles 153.8 à 153.12, selon le cas, et qui sont domiciliées sur le territoire de la commission scolaire;
5° un enseignant et un professionnel non enseignant de la commission scolaire élus respectivement par leurs pairs conformément à l’article 153.13;
6° deux directeurs d’établissement d’enseignement de la commission scolaire élus par leurs pairs conformément à l’article 153.13. 

Concernant les parents, prenons le cas de  la Commission scolaire de la Beauce-Etchemin (CSBE). Selon son président, Henri Lecours, «Dans un nouveau conseil, il va y avoir six parents sur 16. Actuellement, il y a 15 élus et quatre parents, mais sept commissaires sont aussi des parents, ce qui en fait 11. Les parents ne sont pas gagnants.»

Concernant les enseignants, pourquoi le chroniqueur emploie-t-il le pluriel quand le projet de loi 86 ne prévoit qu'un seul enseignant? Un seul. Oui, on leur donne une place plus importante puisqu'ils n'étaient pas représenté auparavant. Mais un siège sur 16...

Par ailleurs, il est impossible de ne pas remarquer à quelle point cette composition est complètement différente de celle des conseils d'établissement des écoles.

  1. au moins quatre parents d'élèves fréquentant l'école et qui ne sont pas membres du personnel de l'école, élus par leurs pairs;
  2. au moins quatre membres du personnel de l'école, dont au moins deux enseignants et, si les personnes concernées en décident ainsi, au moins un membre du personnel professionnel non enseignant et au moins un membre du personnel de soutien, élus par leurs pairs; 
  3. dans le cas d'une école [primaire] où des services de garde sont organisés pour les élèves de l'éducation préscolaire et de l'enseignement primaire, un membre du personnel affecté à ces services, élu par ses pairs;
  4. deux représentants de la communauté et qui ne sont pas membres du personnel de l'école, nommés par les membres visés aux paragraphes 1° à 4°
  5. Dans le cas d'une école [secondaire] qui dispense l'enseignement secondaire du second cycle, deux élèves de ce cycle élus par les élèves de l'école inscrits au secondaire ou, selon le cas, nommés par le comité des élèves ou l'association qui les représente.

Les écarts sont assez considérables, comme on peut le constater. On peut alors se poser la question: pourquoi autant de différences entre ces deux instances décisionnelles?

Par rapport aux parents, il m'apparait évident qu'il serait préférable qu'on retrouve des parents pour représenter les différents milieux; primaire, secondaire, adaptation scolaire, secteurs des adultes. 

Par rapport aux enseignants il m'apparait également évident qu'il serait préférable qu'on retrouve des enseignants pour représenter les différents milieux; primaire, secondaire, adaptation scolaire, secteurs des adultes. 

Par rapport au personnel des écoles, il m'apparait évident qu'il serait préférable qu'on retrouve deux employés, un plus général et un autre relié à un service de garde.

Par rapport au direction des écoles, il m'apparait évident qu'il serait préférable qu'on retrouve des directeurs pour représenter les différents milieux; primaire, secondaire, adaptation scolaire, secteurs des adultes. 

Quant aux membres de la communauté,  quant à moi, ils sont sur-représentés et leur nombre devrait être moindre. Quand on retrouve six fois plus de membres de la communauté que d'enseignants sur un conseil, on comprend que ces derniers comptent pour des prunes. 

Comme on peut le constater, il est faux cependant de déclarer, comme l'a fait M. Bouchard et d'autres chroniqueurs, que le personnel des écoles est gagnant dans ce changement. Ils seront, comme toujours, d'éternels figurants.

Un dernier mot sur l'article 197.1 créant un comité de répartition des ressources. 

«197.1. La commission scolaire doit instituer, sous la direction du directeur général, un comité de répartition des ressources formé en majorité de directeurs d’école et de centre choisis par leurs pairs. Le responsable des services éducatifs aux élèves handicapés et aux élèves en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage nommé en vertu de l’article 265 doit également être membre de ce comité. [...]


Le comité doit mettre en place un processus de concertation en vue d’établir les objectifs et les principes de la répartition annuelle des revenus conformément à l’article 275, de déterminer cette répartition conformément à l’article 275.1 et de déterminer la répartition des services éducatifs complémentaires conformément à l’article 261. 

Qu'on me permette cette remarque: les écoles primaires, de plus petite taille, sont plus nombreuses que les écoles secondaires et auront donc un avantage important quand viendra le temps de former ce comité. Le projet de loi 86 devrait en tenir compte.






1 commentaire:

Jonathan Livingston a dit…

Pour qu'il y ait une école, il faut au départ un enseignant et des élèves. Nous dispensons le service primaire, celui qui définit la fonction de l'école. Or, il est intéressant de voir que le beau monde au-dessus de nos têtes préfèrent nous voir comme de grands enfants gâtés qu'il faut gérer au lieu de venir nous consulter pour faire fonctionner une école plus efficacement. Nous sommes aussi des employés, alors être trop sur l'instance qui surveille l'instance décisionnelle pourrait créer des problèmes. Les parents et les étrangers à l'école, quelle matière manœuvrable quand on y pense.

Mais l'école restera aussi, dans ses platebandes inutiles, un lieu où des messieurs et des madames qui n'y connaissent rien viennent refaire le monde et se trouver des tremplins pour la vie politique en fréquentant du beau monde...

Si toutes ces belles instances au-dessus de nos têtes avaient la moindre influence, on ne nous assommeraient pas depuis 15 ans avec les débilités d'une réforme qui fait qu'on stagne, qu'on nous fait prendre des vessies pour des lanternes avec des processus d'inclusion, par exemple, qui vont vers l'impossibilité de donner un service de qualité à de trop nombreux jeunes, éduqués à la va-comme-je-te-pousse au lieu d'avoir une éducation sensée et profitable. Tout cela pour conforter des gens dont les principes sont plus importants que les résultats, qui siègent souvent on ne sait pas trop pourquoi sur ces belles instances qui n'ont aucune incidence sur la qualité de l'enseignement si ce n'est que de mettre des bâtons dans les roues au premier acteur de la prestation éducative.

Pour avoir fait des écoles dans ma vie, je sais que les meilleures sont celles où les enseignants se parlent, s'organisent et développent une vision pédagogique commune et où on leur permet de le faire, où on stimule cette rencontre et ce travail. Quand les instances décideront de nous inclure dans leur réflexion et leurs décisions, peut-être qu'on avancera. En attendant, nous attendrons le messie descendu du ciel pour éclairer nos décideurs... Je ne crois pas qu'il s'agit du sympathique personnage derrière ce projet de loi.