Les moments que nous vivons révèlent le caractère des gens et de nos décideurs. Et la façon dont le ministre de l'Éducation, Jean-François Roberge, gère actuellement son ministère semble indiquer qu'il est manifestement débordé par l'ampleur de sa tâche en temps de crise. L'homme est pâle, le visage émacié. Ses consignes manquent de clarté et se contredisent parfois. Il inquiète.
Depuis les tout débuts des moments difficiles que nous vivons, le ministre affirmait qu'il permettrait aux parents de récupérer les effets laissés par leurs enfants dans les écoles. Une date limite à cette opération était même fixée. Dans le milieu scolaire, c'était la consternation. Mais peu osaient répondre au ministre que cette idée était contre-indiquée. Il faut dire qu'actuellement, presque tout le Québec a perdu sa faculté de critiquer le gouvernement Legault quand il commet une erreur. Dans le réseau, si on soulevait la moindre question à propos de cette décision du ministre Roberge, la réponse était lapidaire: «C'est une directive du ministre.»
Il aura fallu les nombreuses interventions de diverses organisations et individus pour que la Santé publique demande au ministre de se rendre à l'évidence: ce n'est pas une bonne idée en temps de pandémie, alors que le Premier ministre suggère fortement aux Québécois de restreindre leurs déplacements, de permettre à des dizaines de milliers de parents et d'étudiants de retourner chercher des biens dans des écoles et institutions d'enseignement.
Je ne sais pas, mais il suffit de lire cette phrase pour comprendre toute l'incohérence de la position ministérielle qui a été en vigueur au cours des derniers jours. Des directions d'école et des commissions scolaires ont perdu un temps fou à répondre à cette demande. Comme si elles n'avaient pas d'autres préoccupations plus importantes! De l'extérieur, une décision qui aurait dû être guidée par des considérations reliées à la santé publique prenait des allures de décision politique. Comme me le confiait un intervenant d'expérience dans ce milieu: «Avec le ministère, il faut toujours attendre le contre-ordre avant d'obéir à l'ordre.» Et c'est toute la crédibilité des services publics qui en souffre.
Le ministre indique que c'est «sur la base des plus récentes informations relatives à l'évolution épidémiologique du virus» que la Santé publique lui a demandé de surseoir à cette idée. Il faudra alors qu'il explique pourquoi, pas plus tard que la veille de sa volte-face, le cégep de Sherbrooke, situé dans une zone où l'on interdit pourtant aux parents de l'Estrie de récupérer les effets scolaires de leurs enfants, invitait ses étudiants à se rendre sur le campus sans aucun problème. Comment, tout à coup, ce qui était bon dans une zone pourtant désignée à risque devient soudainement une pratique à laquelle il fallait surseoir pour l'ensemble du Québec?
La nouvelle directive du ministre a suscité la grogne chez certains parents. Mais ce n'est pas lui qui fait face à cette colère. Ce sont les directions d'école et les centres scolaires qui passent toutes, aux yeux d'un certain public, pour des organisations incompétentes et désorganisées. Ce fut la même chose lorsque le ministre a indiqué qu'il serait bien que chaque enseignant appelle chacun de ses élèves hebdomadairement. Il avait manifestement oublié qu'au secondaire, certains prof en ont jusqu'à 320 et qu'il n'était pas certain qu'un parent aimerait recevoir un coup de fil des huit enseignants de son enfant chaque semaine...
En temps de crise, les citoyens ont souvent le réflexe de se rallier autour de leurs leaders et ceux-ci sont alors investis d'une confiance dont ils doivent se montrer à la hauteur. En ce moment, le ministre Roberge inquiète ceux qui suivent l'éducation. Avec de grands pouvoirs viennent aussi de grandes responsabilités, dit-on dans un film hollywoodien bien connu. Jean-François Roberge saura-t-il se ressaisir et être l'homme de la situation? La tâche est lourde, difficile, faut-il le rappeler. Mais c'est ce qu'il faut nous tous souhaiter.
1 commentaire:
Xxx
Paola :)
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