21 septembre 2009

Les futurs profs ne sauraient pas écrire

Voilà ce que l'on peut en déduire de cette série d'articles parus dans La Presse aujourd'hui (ici, ici, ici, ici). Dans les faits, il ne faut pas généraliser: il y a d'excellents candidats à l'enseignement dans nos universités. Mais on en retrouve d'autres que...

Faut-il en être surpris quand on réalise que ces futurs profs ont été formés par un système dont on connait les failles en ce qui concerne l'enseignement du français? quand on sait que ce sont les facultés de l'éducation qui accueillent les étudiants ayant une des plus faibles cote R du réseau universitaire? quand on admet un peu n'importe qui parce qu'on n'atteint même pas le nombre d'étudiants prévu par les mesures de contingentement de ce programme de formation?

Les chiffres montrent que la situation était semblable au milieu 90. Je me souviens aussi de ces années d'université ou je rédigeais les travaux en équipe pour être certain de la qualité de la rédaction, mes collègues présentant d'importantes lacunes.

Je demeure cependant très perplexe en lisant les propos de Michel D. Laurier, doyen de la Faculté d'éducation de l'Université de Montréal, qui veille à l'implantation du nouvel examen national de français pour futurs enseignants,

«Ça pourrait, effectivement, avoir un effet pour ce qui est de la déperdition en cours de formation. Ça peut aussi avoir un autre effet sur l'attraction de la profession. Ce n'est pas impossible qu'à un moment donné, les gens se disent: Je n'irai pas en enseignement parce que je risque d'échouer à l'examen de français.»

Quand on lui souligne que les profs auront une meilleure maitrise du français, M. Laurier répond: «C'est l'objectif. En même temps, on a besoin d'enseignants.»

Je comprends qu'on a besoin de profs, mais est-ce exagéré d'exiger d'eux une maitrise de leur langue maternelle?

Enfin, dans la catégorie «Je ne sais pas de quoi je parle et je vais le dire à la télé», soulignons l'apport inestimable de Gérald Boutin, professeur à la faculté des sciences de l’éducation de l’UQÀM, à la bêtise humaine. Sur les ondes de LCN, le sympathique universitaire, que j'aime bien habituellement, a blâmé la réforme pour la piètre qualité du français des futurs enseignants:

«On ne peut pas enseigner une discipline qu’on ne connaît pas», constate le professeur Boutin. Selon lui, la réforme s’est traduite par un recul des savoirs de base sans lesquels on ne peut maîtriser sa langue maternelle, au profit des fameuses «compétences», qui ont d’ailleurs été l’objet de virulentes critiques à la suite de l’implantation de la réforme.

Hey chose! L'application de la réforme est rendue en cinquième année du secondaire. Bien parler, oui, mais bien penser aussi.

21 commentaires:

Hortensia a dit…

Je trouve ça un peu étrange cette nouvelle.
On implante un examen de français parce que les nouveaux enseignants étaient faibles en langue. Pourquoi s'étonne-t-on alors que certains échouent l'examen? Je suis sans pitié sur ce sujet: tu enseignes, tu dois savoir écrire. Ça finit là.

Ça me fait penser au seuil de réussite des étudiants dans nos classes: on vise le 100%! Comment pourrait-on avoir des taux de réussite de 100%? Si on l'obtenait, ce serait qu'on «fait passer» tout le monde. Ça ne voudrait plus rien dire. Belle société de jovialistes où tout le monde il est beau et tout le monde il passe? Grrrr!

Charles Samares a dit…

J'adore la conclusion de ton billet! :)

C'est, semble-t-il, à la mode de généraliser et de mettre la faute sur le dos de n'importe quoi...

Ce qui est triste cependant là-dedans, c'est que la plupart des gens ne savent pas trop ce qu'est la réforme et quand elle a été implantée, donc ils croiront aisément les propos de monsieur...

A.B. a dit…

Oh! que monsieur Boutin contribue à la bêtise humaine! C'est vraiment une bourde terrible.

Ce que Charles Samare affirme («(c)e qui est triste cependant là-dedans, c'est que la plupart des gens ne savent pas trop ce qu'est la réforme et quand elle a été implantée, donc ils croiront aisément les propos de monsieur...») est probablement malheureusement juste et très inquiétant.

À ma connaissance, une majorité de c.s. exigeaient déjà un test de français réussi de la part de leurs enseignants pour qu'ils obtiennent leur permanence. Le test national aura l'avantage d'être le même pour tous les enseignants québécois. En ce sens, c'est une bonne chose. Toutefois, comme tu le soulignes, tant que l'enseignement du français (primaire, secondaire, bac. en enseignement) ne sera pas plus efficace, on a beau faire passer tous les tests que l'on veut aux futurs enseignants, on travaille dans le vide.

Missmath a dit…

Les politiques sont là, adoptées, de plus en plus sévères.

À l'université, on peut enlever jusqu'à 30 % de la note d'un travail s'il contient en moyenne 4 erreurs ou plus par page. (Ce pourcentage varie proportionnellement avec le temps, pour les premières années, il est fixé à 20 %.) Ça peut faire une belle différence entre la réussite et l'échec d'un cours... sauf que... Quand on réussit de peine et misère à avoir une cohorte de 2 étudiants, il faut du courage pour les recaler à cause du français. (... Entre autres...)

À l'embauche d'un professeur, on exige (du moins chez nous) la réussite d'un test de français (test qui a été modifié dernièrement pour être moins bidon). Les nouveaux profs qui l'échouent doivent le reprendre et le réussir dans un délai assez court. Il n'en demeure pas moins que si un prof ne maîtrise pas la langue après tant d'années d'études, je vois mal comment le miracle peut se produire en un an ! (Je ne parle évidemment pas des profs étrangers qui peuvent vite progresser ou qui, bien souvent, maîtrisent mieux le français que nous...)

Le Suppléant a dit…

Personnellement, ce qui me donne vraiment le goût de vomir à chaque fois qu'on accuse ma génération de pas savoir écrire, c'est que ce sont les adultes qui ont été nos professeurs qui nous le reprochent et ce sont nos parents qui rient de notre génération, alors qu'ils étaient également formateurs de celle-ci. Oui ma génération ne sait pas écrire, c'est horrible... Et la réforme tente de changer les choses justement à cause de cela. Mais pourquoi c'est nous qui sommes amenés au pilori? Et non pas les enseignants qui nous ont formés... On pourrait dire: les enseignants d'aujourd'hui ne savent pas écrire, parce que les enseignants l'ont mal enseigné. Mais non, notre génération arrive sur le marché du travail et n'a pas encore le droit de réplique... Eurk. Une génération complète qui ne comprend pas et c'est de la faute à chaque individu (qui avait dans le temps entre 6 et 16 ans... Ouiiiii...).

En passant, les profs (8/10 du Bacc) qui ont coulé le test de français se sont fait pratiquement fouetter sur la place publique, en plus de voir continuellement leurs notes diminuer (-20% à chaque travail ça finit part affecter quelqu'un). Et je peux dire que les cours de français obligatoires qu'ils ont dû suivre suite à cet échec ont porté fruit parce que tous ont réussi le test en bout de ligne... Alors il y a de l'espoir, même si c'est triste d'apprendre son français à l'Université!

Le professeur masqué a dit…

Le suppléant: la réforme ne changera rien à cette situation. J'en suis très désolé.

Cela étant écrit, oui, il y a des gens qui devraient être imputables, mais vous me permettrez de vous dire que j'enseigne depuis 16 ans. Depuis 16 ans, j'ai remarqué et dénoncé l'enseignement du français au Québec. Mais qui écoute? Les élèves à qui l'on ment en donnant de belles notes et qui ne se posent pas de question alors qu'ils font parfois une faute aux 15 mots? Leurs parents qui sont bien heureux de ne pas les voir doubler?

On vit dans la culture du mensonge institutionnalisé. Blâmer les profs, par exemple, serait bien facile. Il y a des gens au-dessus d'eux. Des concepteurs de programme,des fonctionnaires, des décideurs...

Guillaume Payette a dit…

N'y a-t-il pas eu une réforme en l'enseignement du français au milieu des années 90? C'est peut-être de celle-ci dont il est question ...

Le professeur masqué a dit…

Gecko: effectivement, on a «réformé« la terminologie et en partie la façon d'enseigner la grammaire (uniquement) en 1995 dans nos écoles, mais cette réforme n'est pas liée au renouveau pédagogique.

Donc, les commentaires de M. Boutin qui parle de compétences sont dans le champ...

Anonyme a dit…

J'en aurais long à dire sur ça, mais pas maintenant. Je sais que ma vision de cette « problématique » est à cent lieues de ce qu'on entend partout à ce sujet.

Je crois que je suis dû pour un billet là-dessus. À suivre…

Anonyme a dit…

Je suis prof de français depuis 1995. Je suis menotté depuis ce temps dans une nouvelle grammaire imposée sans discussion dans le même état d'esprit que la réforme. Nous n'avons plus de grammaire commune. La grammaire partout est un ramassis de règles alambiquées qui veut rendre compte d'une description exhaustive de la langue telle que le cerveau en formation d'un enfant ne peut l'appréhender à moins de dispositions exceptionnelles.

On vit à une époque où utiliser des termes comme proposition ou principale font l'objet de décrets d'interdiction et où le noyau du groupe verbal, receveur d'accord, s'accorde avec le noyau du groupe nominal donneur d'accord!

On vit une époque d'hurluberlus qui ont réussi au mépris le plus bas de la réalité à nous faire croire qu'on apprend la langue du global vers les détails et qui nous emmerdent d'une grammaire textuelle ronflante et stupide qui s'invente difficilement pour justifier l'ânerie...

Et on se demande pourquoi les jeunes ne pigent plus rien à la langue écrite... J'ai suivi mon premier cours de linguistique à l'université à 24 ans et je trouvais cela ardu... Imaginez pour des cerveaux au stade des opérations concrètes...

Foutez-moi cette gang de connards à la porte et qu'on redécouvre les approches classiques de la pédagogie des langues... Quand on ne sait plus ses natures et fonctions, comment peut-on arriver à gérer des règles d'accord? Quand les règles se présentent sous des formes débilement compliquées, mais logique (?), comment peut-on toucher la mémoire d'un enfant? Je suis un prof désarmé... L'analyse grammaticale et logique classique rejetée aux oubliettes étaient pourtant les gammes obligées de la langue. Au milieu des années 80, on en faisait encore régulièrement à tous les niveaux... Curieusement, depuis 1990, ça empire...

J Livingston

Le professeur masqué a dit…

M. Jonathan: vous seriez surpris de savoir que les résultats des futurs enseignants à ce genre de test de français ont toujours été faibles depuis les années 90. Il existe aussi un test que doivent compléter tous les étudiants universitaires. Ce sont les étudiants en médecine qui ont les meilleurs résultats.

Mais sur le fond de votre propos, la façon d'enseigner la grammaire est devenue une aberration. Partir du global pour aller vers le particulier est totalement inefficace et le jargon employé rebutant. Pourquoi faire compliqué quand on peut faire simple?

Chez nous, je triche allégrement. Je garde les même terminologie, mais je travaille de petits groupes avant de vouloir aller vers ce qu'on appelle des expansions.

Anonyme a dit…

Misère…

Premièrement, la « nouvelle grammaire » n'a de nouveau que l'approche qu'elle préconise, i.e. une approche qui vise à inférer les règles à partir d'observation du corpus de la langue et du désir de voir ces observations être transférées dans une meilleure compréhension de ladite grammaire.

Oui, la terminologie a changé, mais à mon avis, pour le mieux. D'abord parce qu'elle s'est arrimée sur les avancés en linguistique et une meilleure connaissance des fonctions et des rôles des objets de la phrase. Elle est certainement plus logique, mieux structurée que ne l'a jamais été « Le bon usage » de notre vieil ami Grévisse.

De plus, on y a retiré un certain nombre d'irrégularité et autres incongruités qu'on y retrouvait en étant en mesure de faire des généralisations qui s'avèrent aujourd'hui beaucoup plus facile à expliquer. À cet effet, je vous recommande vivement la lecture de la Grammaire française de Gobbe et Tordoir (http://www.amazon.ca/GRAMMAIRE-FRANCAISE-Roger-Gobbe/dp/2892491851/ref=sr_1_1?ie=UTF8&s=books&qid=1254077890&sr=8-1), probablement le meilleur ouvrage écrit sur cette nouvelle approche de la langue.

Maintenant, est-ce à dire que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes? Pas du tout. Il y a lieu de revoir son enseignement et, ma foi, il est évident qu'il reste beaucoup de travail à faire. Mais de là à jeter le bébé avec l'eau du bain…

Le professeur masqué a dit…

Barbare: je ne jette pas le bébé ni l'eau du bain, mais l'approche des grands groupes fonctionne mal avec les gamins que j'ai, tout au moins.

Je commence donc par de petits éléments simples pour aller vers des structures plus complexes. Je conserve l'idée d'observation, de positionnement, de manipulations logiques.

Anonyme a dit…

Je vous envie de tricher sans vous faire prendre! Les précaires sont surveillés de près par des chefs d'équipe qui ne savent même pas travailler avec un Bescherelle sans se tromper, mais qui font leur formation ministérielle régulière. Drôle d'époque.

Jo

Le professeur masqué a dit…
Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.
Anonyme a dit…

Prof: je vous crois très bien pour ces futurs profs qui ne réussissent pas l'examen. Je ne vois pas comment on peut maîtriser la grammaire de nos jours sans un talent exceptionnel en logique formel ou un exceptionnel don des langues qui permet de mémoriser les détails linguistiques sans les comprendre.

La grammaire, sensé pour les écrivains, être un référent pratique et organisé pour résoudre les difficultés sans surcharger la mémorisation n'atteint plus ce but de nos jours. Non, on nous sert une grammaire exhaustive et logique de linguiste bonne pour les informaticiens et les machines...

La complexité de la Grammaire nouvelle la rend hermétique au profane. Vous proposez quelle grammaire pour les examens où c'est permis? Tiens une question qui pourrait être fort intéressante à poser à la communauté en leur demandant combien de leurs élèves s'en servent avec profit!

Je crois pouvoir la comprendre parce que j'ai suivi son développement. Pauvres jeunes adultes d'aujourd'hui qui n'ont pas la solidité des gammes d'autrefois dans les incontournables analyses grammaticales qui formaient l'esprit à la logique grammairienne.

Si les jeunes adultes normalement mieux équipés que les enfants n'y arrivent pas, on devrait se poser des questions sérieuses en ce qui concerne les aptitudes des enfants pour appréhender les complexités des linguistes.

En passant, Grevisse avait fait le Précis à l'intention des jeunes élèves, beaucoup moins complexes que son Bon usage qui vers la fin deveenait de la Grammaire nouvelle...

Peut-être que les Suzanne Chartrand de ce monde devraient se mettre au même exercice. Ça nous aiderait à moins galérer!

Pour moi, le grain dans l'engrenage se situe surtout là: nos méthodes nouvelles se plantent... Et les dogmes survivent à l'inefficacité, c'est déroutant...

Jo L

Anonyme a dit…

Érudit: vous avez bien appris votre leçon. Je vous souhaite de belles expérience de logique. Mon point est simple, le cerveau de l'enfant fonctionne selon la pensée opératoire concrète et développe la capacité de synthèse et d'abstraction sur le tard. La logique n'est pas son mode d'acquisition le plus sûr. Logique syntaxique sans appuie du sens, voilà ce qu'on a banni de nos pratiques au nom du sacro-saint structuralisme. Vous avez ouvert des grammaires pour lire des règles d'accord logique de nos charmants manuels? C'est le royaume de la surcharge rendant impossible tout effort de mémorisation. Je m'ennuie de Grevisse... Mais bon, chacun ses opinions.

La manipulation syntaxique est lourde très souvent à gérer. Mais bon, pour certaines notions, on y arrive comme pour les CP. La logique des groupes est franchement lourde: on charrie des Groupes adjectivaux, là où il n'y a qu'un adjectif. Idem pour les G adverbiaux. La notion de G nominal avec les kyrielles d'expansions est aussi une présentation plutôt lourde pour un jeune apprenant. On veut faire enregistrer des subtilités pour rendre variés les textes, alors qu'on ne maîtrise même pas la structure de base de la phrase. Pour m'être promené, je n'ai jamais vu autant de jeunes abandonner l'espoir de même comprendre la grammaire.

Mais entendons-nous, je ne vais pas remettre en question la valeur de cette nouvelle compréhension du fonctionnement de la langue. Pour mon cerveau d'adulte, elle me satisfait beaucoup. C'est au plan pédagogique que ça se gâte.

Pour moi, il est une loi de l'éducation qu'on oublie toujours trop, c'est qu'un apprenant va du connu vers l'inconnu et qu'on a souvent avantage de passer du simple vers le complexe.

La théorie qui est avancée à l'effet qu'une règle découverte (approche inductive) risque plus d'être retenue qu'une simple mémorisation ne cadre pas du tout avec mon expérience. J'ai acquis toutes ses règles avec des grammaires classiques et aussi avec la solidité de mes bases: connaître mes natures de mots, la structure sujet-verbe- complément avec l'habitude de poser des questions pour m'aider à trouver chaque élément fonctionnel de la phrase (je n'ai même plus le droit de montrer mes trucs dans certaines écoles orthodoxes puristes des «manips» où j'ai travaillé). Tout cela s'est fixé dans une discipline constante de l'analyse grammaticale qu'on pratiquait autrefois fort régulièrement.

Avec les élèves d'aujourd'hui, on se décourage de voir que les bases sont incertaines quand elles ne sont pas inexistantes.

Pour moi, quelques-uns de mes élèves vont découvrir après beaucoup de patience en méthodes inductives. La plupart n'ont pas ce genre d'esprit pour pleinement profiter de la douce émotion de l'«Euréka!».

Mais bon, une règle bien chantée, qui garde l'essentiel, qui est pratique et facile à utiliser sans se casser la tête peut avantageusement faire l'affaire. Et pis bon si la découverte n'a pas gravé les mémoires... que fait-on?

Répéter et répéter des vers bien tournés, c'est la formule gagnante des publicitaires pourtant. Je ne vois pas beaucoup leur logique et pourtant ça marche pour eux, non?

Une collègue acharnée m'a avoué commencer après 11 ans à maîtriser son enseignement de la Nouvelle grammaire. 11 ans! Pauvres enfants...

Jo L

Anonyme a dit…

Érudit: vous avez bien appris votre leçon. Je vous souhaite de belles expérience de logique. Mon point est simple, le cerveau de l'enfant fonctionne selon la pensée opératoire concrète et développe la capacité de synthèse et d'abstraction sur le tard. La logique n'est pas son mode d'acquisition le plus sûr. Logique syntaxique sans appuie du sens, voilà ce qu'on a banni de nos pratiques au nom du sacro-saint structuralisme. Vous avez ouvert des grammaires pour lire des règles d'accord logique de nos charmants manuels? C'est le royaume de la surcharge rendant impossible tout effort de mémorisation. Je m'ennuie de Grevisse... Mais bon, chacun ses opinions.

La manipulation syntaxique est lourde très souvent à gérer. Mais bon, pour certaines notions, on y arrive comme pour les CP. La logique des groupes est franchement lourde: on charrie des Groupes adjectivaux, là où il n'y a qu'un adjectif. Idem pour les G adverbiaux. La notion de G nominal avec les kyrielles d'expansions est aussi une présentation plutôt lourde pour un jeune apprenant. On veut faire enregistrer des subtilités pour rendre variés les textes, alors qu'on ne maîtrise même pas la structure de base de la phrase. Pour m'être promené, je n'ai jamais vu autant de jeunes abandonner l'espoir de même comprendre la grammaire.

Mais entendons-nous, je ne vais pas remettre en question la valeur de cette nouvelle compréhension du fonctionnement de la langue. Pour mon cerveau d'adulte, elle me satisfait beaucoup. C'est au plan pédagogique que ça se gâte.

Pour moi, il est une loi de l'éducation qu'on oublie toujours trop, c'est qu'un apprenant va du connu vers l'inconnu et qu'on a souvent avantage de passer du simple vers le complexe.

La théorie qui est avancée à l'effet qu'une règle découverte (approche inductive) risque plus d'être retenue qu'une simple mémorisation ne cadre pas du tout avec mon expérience. J'ai acquis toutes ses règles avec des grammaires classiques et aussi avec la solidité de mes bases: connaître mes natures de mots, la structure sujet-verbe- complément avec l'habitude de poser des questions pour m'aider à trouver chaque élément fonctionnel de la phrase (je n'ai même plus le droit de montrer mes trucs dans certaines écoles orthodoxes puristes des «manips» où j'ai travaillé). Tout cela s'est fixé dans une discipline constante de l'analyse grammaticale qu'on pratiquait autrefois fort régulièrement.

Avec les élèves d'aujourd'hui, on se décourage de voir que les bases sont incertaines quand elles ne sont pas inexistantes.

Pour moi, quelques-uns de mes élèves vont découvrir après beaucoup de patience en méthodes inductives. La plupart n'ont pas ce genre d'esprit pour pleinement profiter de la douce émotion de l'«Euréka!».

Mais bon, une règle bien chantée, qui garde l'essentiel, qui est pratique et facile à utiliser sans se casser la tête peut avantageusement faire l'affaire. Et pis bon si la découverte n'a pas gravé les mémoires... que fait-on?

Répéter et répéter des vers bien tournés, c'est la formule gagnante des publicitaires pourtant. Je ne vois pas beaucoup leur logique et pourtant ça marche pour eux, non?

Une collègue acharnée m'a avoué commencer après 11 ans à maîtriser son enseignement de la Nouvelle grammaire. 11 ans! Pauvres enfants...

Jo L

Anonyme a dit…

Message de Le barbare érudit:

Je comprends et je ne t'accuse pas. C'est simplement que j'ai l'impression d'entendre toujours les mêmes histoires au sujet de la « nouvelle grammaire » et ça m'irrite. Ça doit être ma formation de linguiste qui remonte à la surface. Que veux-tu, quand j'entends « dans mon temps… », le poil de mes bras se dresse!

Anonyme a dit…

Barbare: Je n'ai que 41 ans cibole, ce temps n'est pas si loin...

J'ai eu quelques soeurs sur ma route d'élève, de très bonnes enseignantes dans mon souvenir. Elles devaient savoir quelque chose qu'on a oublié. Comme le fait de chanter ses tables de multiplication pendant un blitz de 2-3 mois en 4e année est plus efficace que les jeux modernes qu'on a inventé pour les faire apprendre soit-disant dans la joie du jeu. Je leur remercie pour leur efficacité. Mais bon, il y avait aussi des élèves en difficulté à l'époque. Je ne veux pas les glorifier. N'empêche que ça allait quelque part... Combien d'enfants sortent du primaire sans les maîtriser sans hésitation... On serait surpris du résultat... Presque aucun...

Et, en passant, le fond de la question n'est pas le «dans mon temps», ce sont les arguments que je tiens: j'attends une réflexion en rapport avec l'analyse que j'en fais. Je me fous pas mal du titre de quelqu'un, sans vouloir vous faire offense, l'objet ici est l'efficacité de la grammaire des linguiste comme outil pédagogique pratique pour l'apprentissage et l'acquisition de la maîtrise du français...

Jo L

blondiau isabelle a dit…

bonjour à vous, je viens de lire tous ces commentaires, c'est vrai que la grammaire Gobbe Tordoir est excellente!!! Je la recherche d'ailleurs pour ma fille qui est aux études, quelqu'un parmi vous pourrait-il m'aider??? En Belgique ce livre n'est hélas plus réédité, un aberration encore de ce pays!!!!
blondiauisabelle@hotmail.com
Isabelle Blondiau