Dans un billet précédent, j'écrivais la phrase suivante à propos des jeunes qu'on confie à l'école: «Ils ne sont pas ignorants: on accepte qu'ils le soient.»
Celle-ci m'est venue en tête à la suite de mes 17 années d'enseignement ou j'ai vu à quel point on est permissif dans la correction des évaluations ministérielles de fin d'année et ou j'ai compris pourquoi des élèves performants et même des élèves «ordinaires» décrochent de l'école. Un récent fait appuie d'ailleurs cette vision des choses.
Nous étions en réunion avec la conseillère pédagogique (une fort charmante personne) quand la discussion a porté autour des participes passés avec avoir ou les fameux PPA. Bref, quelle ne fut pas ma surprise quand on m'a appris que je ne pouvais pas, en première secondaire, pénaliser un élève qui ne les maitrisait pas. Kossésa!
Dans mon imaginaire reptilien et borné, je me rappelle très bien que ma fille les a vus en troisième année du primaire. Elle devait être tombée sur une folle, j'imagine. Qui plus est, comme je les enseigne cette année, je ne comprends pas que je ne pourrais pas évaluer la maitrise de ceux-ci dans un texte. Qui plus est, mes élèves s'y attendent.
Je me suis donc masqué de mon plus beau sourire et j'ai pris une grande décision: je serai cohérent avec moi-même dans mon incohérence avec les attentes ministérielles.
8 commentaires:
Cher Professeur Masqué,
Je ne suis pas enseignant et ne parle pas français chez moi, mais j'essaie de comprendre.
Au sujet des collégiens (en Belgique, c'est la même chose), comme j'ai déjà constaté le français hésitant (pour ne pas dire plus) de jeunes élèves et même étudiants, j'ai essayé de trouver des causes...
1) "Ce qui se conçoit bien s'énonce clairement, et les mots pour le dire viennent aisément", disait déjà Boileau. Conclusion: des idées confuses ne peuvent s'exprimer que de façon brouillonne...
2) En tant que scientifique, souvent en contact avec des étudiants, j'ai toujours cherché le pourquoi de ces laxismes orthographiques et syntaxiques. L'accord des participes passés n'est que la face émergée de l'iceberg...
Malheureusement, je crains de n'avoir trouvé que deux causes (navrantes):
- Certains professeurs ne maîtrisent pas leur propre langue. (Faire une telle constatation est affreux, je sais.)
- La concurrence entre établissements empêche toute note éliminatoire sur le sujet. Et c'est malheureusement aussi le cas avec la présentation des copies.
Si cela t'intéresse, et si tu ne la connais pas, il se trouve, au Canada, une charmante dame dont le blog est uniquement consacré à ta langue:
http://chouxdesiam.canalblog.com/
Amitiés
Bonjour Prof masqué! Ce que vous nous racontez est en lien direct avec ce que j’ai vécu en décembre en surveillant un examen de fin d’étape en français de 5 (oui, nous avons pu conserver nos évaluations de fin d’étape, chez-nous). La grande majorité des élèves ont pu quitter la salle, il ne reste qu’une vingtaine de minutes à l’évaluation. Une jeune fille complètement paniquée lève la main et me demande : «Madame, je ne comprends pas cette question là». Je regarde sa copie : «Ponctue correctement la phrase suivante». Un peu surprise, je lui demande de m’expliquer un peu mieux ce qu’elle ne comprend pas… Elle me répond : «J’ai comparé la phrase avec celle qui est dans le recueil de texte, il n’y a pas d’erreur!». De surprise, j’ai complètement oublié la consigne de la direction de ne pas répondre aux questions des élèves pour lui lancer : «Ponctuer! Mettre une virgule, un point, ça ne te dit rien?». Je la laisse griffonner sa copie et retourne m’asseoir à l’avant pour quelques minutes à peine car elle relève la main : «Madame, je ne comprends ce mot-là!» Je me rapproche de son bureau, craintive, avant de découvrir, au-dessus de son ongle parfaitement manucuré, «participe passé».
Comment une élève de secondaire 5 peut ne pas connaître la définition des mots «ponctuer» et «participe passé»?
En même temps, quand je regarde mes collègues du régulier (primaire) qui enseignent tant de matières et qui ont des groupes avec plein d'élèves en difficulté, je me dis que c'est bien beau de ne pas vouloir les laisser dans leur ignorance, on fait ce qu'on peut aussi avec les moyens et la clientèle.
Quatre mots : nivellement par le bas.
Assez parlé.
Oui, nivellement par le bas.
Ce n'est pas pour rien que les élèves arrivent en cinquième secondaire et qu'ils ne maîtrisent pas encore cette règle... même s'ils l'ont découverte au primaire!
C'est d'ailleurs ce que je trouve ridicule en première secondaire... Ils ont «le droit» de faire 20 erreurs dans un texte de 100 mots (bon, j'exagère un peu...) doublé du fait qu'on ne doit pas pénaliser la moitié des erreurs qu'ils font!
Les PPP sont passés de la troisième à la cinquième secondaire dans le contenu notionnel. ;o) Bonne année, PM! :O)
Malheureusement tu es "pogné" pour ré-enseigner ce qui a été survolé au primaire alors que cela aurait dû être vu pendant cette période. Ta fille n'est pas tombée sur une folle. Si c'est le cas mes trois enfants ont alors eu la chance d'en rencontré chacun une pendant leurs années au primaire. Je trouve dommage que les profs de la première secondaire soient obligés de palier aux lacunes du programme du primaire. Les profs de deuxième secondaire doivent te remercier de leur sauver d'la'job.
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