01 juin 2010

Une entente de principe: bof!

Le comité patronal et la FSE ont conclu une entente de principe dimanche quant aux clauses normatives de ce qui pourrait être une prochaine convention collective. Les médias ont rapporté la nouvelle, mais il est difficile de commenter celle-ci puisque je n'ai pu mettre la main sur la version originale de celle-ci. Cependant, comme certains éléments ont été divulgués, pourquoi se gêner...

Une réduction du nombre d'élèves par classe

Cette baisse de ratio touchera les classes du primaire en milieu défavorisé et les groupes de 1e et 2e secondaire.

Quelques bémols.

Au secondaire, celle-ci sera complétée seulement en 2013-2014(ici). On passera de 32 élèves actuellement à 28 en première secondaire et 29 en deuxième (ici).

L'entente conclue dimanche officialise une promesse déjà effectuée par la ministre de l'Éducation, Michelle Courchesne. Rien de neuf, pourrait-on dire. Mais cela indique bien ce que vaut une promesse faite en politique.

Ensuite, on semble constamment oublier que les élèves de troisiéme, quatrième et cinquième secondaire présentent, eux aussi, des difficultés. Mes collègues de ces niveaux sont irrités de constater qu'on ne semble pas sensible à leur réalité. Il en est de même pour les groupes appartenant à un programme particulier.

Également, alors qu'on est en pénurie d'enseignants depuis 1995, où trouvera-t-on les 2947 nouveaux enseignants que nécessitera cette entente (ici)? Actuellement, plus de 2000 individus enseignent dans nos écoles sans détenir les qualifications officiellement requises. On vit encore une fois dans la pensée magique.

Enfin, où logera-t-on les nouveaux groupes créés à cause de la réduction du nombre d'élèves par classe? Sur la Rive-Nord de Montréal et dans l'ouest de l'ile, la situation est déjà problématique (ici).

Une pondération des élèves en difficulté

L'entente prévoit une pondération a priori des élèves en difficulté. Par exemple, un élève de première secondaire avec un trouble envahissant du développement (TED) aura un facteur de pondération de 2,86. Donc, sa classe comptera 30 enfants au lieu de 32 (ici).

En théorie, cette idée est une bonne nouvelle. Il reste à savoir avec quelle souplesse on officialisera le statut des élèves en difficulté.

Vingt millions pour l'aide aux élèves en difficulté

L'entente entre le gouvernement et la FSE prévoit l'ajout de 20 millions de dollars annuellement pour soutenir l'intégration des élèves en difficulté dans les classes. Cependant, il faut savoir que cette somme ne sera pas renouvelée quand la réduction de la taille des groupes de 1e et 2e secondaire sera atteinte en 2013-2014 (ici).

Bien qu'on ne peut pas être contre la vertu, 20 millions, c'est une goutte d'eau dans un océan de détresse scolaire. Pour vous donner une idée de l'importance de cette somme, on parle d'un ajout qui représente 0,14% du budget du MELS qui se monte à 14 milliards (ici). Ou encore

Comme le soulignait un représentant de la Fédération autonome des enseignants (FAE), «ça représente 10 000$ par école. C’est à peine suffisant pour embaucher un orthopédagogue une journée par semaine.» (ici)

Les inconnues

Toute entente présuppose une négociation et un échange. Or, pour l'instant, on en sait peu sur ce que les enseignants ont cédé dans ces négociations. Politiquement, tant les parties patronale que syndicale n'ont pas intérêt à faire savoir ce que les enseignants perdront. Je suis désolé de l'écrire, mais j'ai déjà vu à quel point certains dirigeants syndicaux dorent la pilule pour faire passer une entente.

On sait déjà que les enseignants devront faire preuve de souplesse quant à l'affectation des tâches afin d'éviter une série de remplaçants pour un même groupe. Par ailleurs, on assisterait à une anualisation de certaines tâches. Pour la connaitre, cette façon de prodéder constitue généralement dans les faits un alourdissement de la tâche (ici).

Une autre inconnue est reliée au fait que, selon la ministre Courchesne, cet «accord permet d'introduire la notion qu'il est du devoir de l'enseignant de prendre les mesures appropriées pour lui permettre d'atteindre et de conserver un haut degré de compétence professionnelle.» (ici) De quoi parle-t-on ici concrètement?

Une évaluation personnelle

Bof.

Et il ne faut pas croire que tout est réglé. Il reste encore la question des salaires et de la retraite. Mais quel pouvoir de négociation aura-t-on maintenant ques les clauses normatives sont réglées?

7 commentaires:

pgiroux a dit…

Bonjour,

Quelques réactions "à chaud" afin d'illustrer à quel point cette entente va provoquer des réactions différentes selon la région du Québec...

Sur la pénurie: Il est important de prendre en compte que la pénurie chez vous n'a d'égal que le nombre trop important d'enseignants ici, au Saguenay. Pour une raison que je ne m'explique pas, des centaines d'enseignants décident de demeurer en région alors qu'ils ne font pas ou presque pas de suppléance tellement ils sont nombreux. Ce n'est pas vrai à tous les niveaux et dans toutes les matières, mais tout de même... Cela me questionne depuis quelques années maintenant. Il me semble que le gouvernement pourrait aider/inciter ces jeunes et moins jeunes enseignants qui n'ont pas de poste à se déménager.

Relocalisation: En région, nos écoles se vident et nous fermons des écoles primaires... La polyvalente qui dessert mon quartier a brulé il y deux ans et elle a été reconstruite en version "réduite". Peut-on vous proposer de nous exporter quelques apprenants? Je blague, mais ça illustre tout de même assez bien à quel point cette entente risque de ne pas être interprétée de la même façon partout au Québec. Ici, la création de nouvelles classes a peu de risque de devenir un problème...

En tant que professeur et observateur de l'éducation (université), j'ai aussi bien hâte de savoir comment va se concrétiser "la notion qu'il est du devoir de l'enseignant de prendre les mesures appropriées pour lui permettre d'atteindre et de conserver un haut degré de compétence professionnelle." Va-t-on seulement laisser aux enseignants le temps et l'énergie nécessaires à des mesures concrètes?

Monsieur Rémy a dit…

Je me suis toujours posé la question suivante, peut-être saurez-vous éclairer mes doutes.

Pourquoi y'a-t-il aussi peu de professeurs formés (ceux qui ont un brevet adéquat) au Québec? Pourquoi le gouvernement n'accepte-t-il pas les nouveaux arrivants qui ont souvent des qualifications pertinentes au travail demandé?

À noter, je suis un élève de 5e secondaire, donc je ne suis pas un éminent intellectuel. Je ne cherche qu'à comprendre un milieu qui risque fort bien d'accueillir le petit penseur que je suis.

Jimmy Grenier a dit…

Bien d'accord avec toi sur plusieurs points.

Je me permets une petite pub.

http://encoreunblogue.blogspot.com/2010/06/les-enseignants-ont-besoin-de-viagra.html

bobbiwatson a dit…

C'est l'fun de savoir qu'au primaire il y a des profs et qu'au secondaire il y a des pédagogues.

Anonyme a dit…

Je pense que la ministre a oublié de faire ses calculs avant de se présenter à la table des négos: réduction du nombre d'élèves = ? de profs de plus? On les trouvera où alors qu'on est en manque? Qu'est-ce qu'elle peut faire pour "agrandir par en dedans " une école qui n'a plus de locaux libres pour loger le groupe supplémentaire? La chaufferie? Le débarras du concierge?

Madame la ministre, faites vos devoirs avant d'accorder aux syndicats de profs ce qu'ils demandent.

Les syndicats ne voient pas toujours plus loin que le bout de leur nez et le MELS encore moins. Quelqu'un peut essayer d'unifier le tout?

Catherine a dit…

Pourrions-nous être satisfait des négociations? Sincèrement.. J'en doute..

De mon côté, rien n'est réglé encore car nous "n'appartenons" pas à la FSE, mais à la FAE.. Donc l'entente n'est pas avec eux.. Est-ce pour le meilleur ou pour le pire? On verra bien!

Le professeur masqué a dit…

PGiroux: merci de me dé-montréaliser. Votre regard est fort important. Votre interrogation finale rejoint la mienne.

Monsieur Rémy: cette pénurie remonte à 1997. Le gouvernement de Lucien Bouchard a alors offert des conditions de retraite plus intéressantes pour «dégraisser» la fonction publique. Il pensait qu'on aurait assez de nouveaux enseignants qui coutent moins cher parce qu'au début de leur carrière. Puis, on s'est aperçu que les universités ne fourniraient pas, que 20% jeunes enseignants quittaient la profession après cinq ans, que même des profs expérimentés quittaient. Bref, pénurie parce que la profession de prof n,attire pas.

On n'accepte peu les nouveaux arrivants pour des raisons de protection des emplois pour les futurs enseignants à mon avis.

Quant au fait que vous ne soyez qu'un élève cinquième, l'intelligence n'a pas d'âge; la bêtise non plus. Revenez et commentez quand vous voulez.

Jummy: pas de problème avec la pub!

Bobbi; ?

Anonyme: nos syndicats aussi ne savent pas compter...

Catherine: on a connu tellement de recul que j'ai de la difficulté à voir ce résultat comme un succès.