08 septembre 2010

Ces malades qui nous gouvernent

D'après le titre d'une oeuvre qui a suscité bien des débats à l'époque.

Bon, un sujet délicat. Et je détonnerai peut-être dans le concert d'éloges funèbres qui remplit les médias depuis hier. Comprenez bien que je ne juge pas l'homme, mais la situation.

Claude Béchard a démissionné comme ministre hier et, une heure après, on annonçait son décès. Une véritable onde de choc. De quoi frapper l'imaginaire des citoyens. Moi ce qui m'a plutôt frappé, c'est que le ministre de l'Agriculture et des Affaires intergouvernementales canadiennes du Québec occupait ce poste depuis des mois alors qu'il était gravement malade :

Peu de gens le savent, mais, depuis longtemps, il recevait une chimiothérapie extrêmement agressive, utilisée en Europe, qui était encore au stade du protocole expérimental. Le 11 août, lors du remaniement ministériel, il s'était présenté à l'Assemblée nationale pour être reconfirmé dans ses fonctions de ministre de l'Agriculture et des Affaires intergouvernementales canadiennes. Bien que souriant et détendu, il portait alors sous son veston des bouteilles de soluté qui faisaient partie de son traitement de chimiothérapie. Ce fut sa dernière apparition publique. Son état de santé s'est détérioré peu de temps après.

Sans critiquer l'homme toujours, quelle performance pouvait-il offrir comme ministre dans un tel état? N'aurait-il pas été de son devoir ou du devoir du premier ministre de le convaincre de céder la place? La situation était délicate, soit, mais je crois que l'amitié que Jean Charest témoignait à l'égard de Claude Béchard l'a éloigné de la conduite qu'il aurait dû adopter. Tout comme aujourd'hui, le fait de décréter des funérailles nationales en l'honneur de l'ex-ministre me semble, encore une fois, une décision davantage dictée par des considérations personnelles que des considérations d'État.

Gilles Carles en a eues. Claude Ryan aussi. René Lévesque. Robert Bourassa. Gaston Miron. Maurice Richard. Michel Chartrand et Pierre Bourgault, non. Là, Claude Béchard y aurait droit?

Au risque de paraitre cynique et très méchant, le parti Libéral fait encore la preuve qu'il est le parti des intérêts personnels et des petits amis. Claude Béchard n'avait pas la stature d'un homme politique qui méritait un pareil honneur de l'État québécois, parce que c'est bien de cela dont il s'agit.

******

Suite du bilan médical ce soir. Là, je vais dormir.

7 commentaires:

Anonyme a dit…

Je partage ton avis quant aux funérailles nationales «non méritées» de Claude Béchard. Billet risqué, mais nécessaire.

Safwan

Le professeur masqué a dit…

Très honnêtement, je trouve inappropriée cette idée de deuil national. Cela signifie que la nation porte le deuil, que la nation est en deuil. Or, il suffit de faire un sondage et de demander à la population qui est Claude Béchard et quel ministère il a déjà occupé pour se ramasser devant beaucoup de réponses vagues. Si on avait fait ce sondage il y a une semaine, je n'ose même pas présumer du taux de réponses correctes.

Ce n'est pas méchant, ce n'est pas contre M. Béchard. C'est plus Jean Charest qui salit tout ce qu'il touche depuis un bout.

laluciole a dit…

Le bilan politique de Claude Béchard est bien mince. On se rappellera de lui pour Rabaska, le mont Orford, des projets qu'il a défendus, mais dont le Québec ne voulait pas. En outre, on se souvient du contrat sans appel d'offres octroyé à Bombardier pour les wagons de métro, ce qui encore là est un fiasco.

Bien sûr, il a fait preuve de courage et de détermination, mais beaucoup de gens en font preuve en luttant chaque jour pour survivre. Je pense ici aux personnes vivant dans des conditions d'extrême pauvreté, à des vieillards.

Pour tout cela, des funérailles nationales sont inappropriées. Ce faisant, on enlève tout sens civique à ce symbole.

spirale a dit…

Avant que tout le monde ne s'emballe, prenez note que le Gouvernement du Québec, service du Protocole, distingue diverses sortes de funérailles.
Les funérailles d'État sont réservées aux ex-premiers ministres ou à un premier ministre en exercice et très exceptionnellement à un ex-ministre.
Les funérailles nationales, quant à elles, sont réservées aux personnalités qui ont marqué la vie politique, culturelle ou sociale du Québec, selon une décision du gouvernement.Je n'aurais pas compris que l'on organise des funérailles d'État à monsieur Béchard. Va donc pour des funérailles nationales pour souligner l'engagement politique et le courage personnel de ce dynamique citoyen et la reconnaissance que beaucoup de gens lui témoignaient.
Il a été un grand exécutant, un bon adjoint. Peut-être serait-il devenu un Homme d'État? J'en doute.

Anonyme a dit…

D'accord avec tout ce qui a été dit plus haut. De plus, je ne peux m'empêcher de penser que tout ce tapage médiatique autour de sa mort fera immanquablement grimpé la cote sympathie du parti libéral... C'est moche à dire, mais c'est pour le parti un « heureux hasard » et ils n'ont certes pas intérêt à passer sous silence cet événement.

Tout ceci, bien sûr, n'est pas pour juger l'homme, que je ne connaissais pas et qui pouvait très bien être un bon gars. C'est simplement ma perception de la situation, qui m'apparaît pour le moins un peu tordu.

Le professeur masqué a dit…

La spirale: merci des ces précisions. Mais même nationales, je trouve cela exagéré.

Anonyme: ce qui est tordu, c'est de poser ce geste qui porte aussi à débat.

Julie a dit…

Quoi qu'en pense PM, l'homme est quand même décédé pendant qu'il était au service de l'état. Ça pourrait justifier des funérailles nationales.
Je ferai peut-être un mauvais parallèle: c'est comme si un prof meurt. S'il meurt pendant qu'il est prof, peut-être que son école va souligner la chose avec plus de force (surtout si le prof a été aimé de ses collègues). S'il meurt une fois retraité, l'école ne soulignera probablement pas son départ.
Je vois ça comme ça.