24 mai 2014

TBI: chronique d'un cafouillage annoncé

Peu importe les positions de certains enseignants...

Peu importe les recherches...

Peu importe les rapports de vérificateurs externes...

Le nouveau gouvernement du Québec, animé de l'esprit des «vraies affaires» et d'une gestion rigoureuse, a décidé de continuer l'implantation des tableaux blancs interactifs dans les écoles.

Pourtant, dans la catégorie des horreurs, on relève ici et ici que:

  • l'impact pédagogique positif de ces tableaux reste à démontrer;
  • les commission scolaire n'ont pas l'argent pour le soutien technique de ces appareils;
  • les enseignants n'ont pas toujours la formation requise pour les utiliser;
  • une faible concurrence entre les soumissionnaires (tiens, tiens... pour les amateurs des vertus du libre marché);
  • un écart de 1100$ entre le cout de ces appareils selon les fournisseurs (1871$) et le cout réel d'installation (2979$).

Un partie de ces constats étaient tellement prévisibles que certains chroniqueurs et blogueurs les avaient vus dans leur boule de cristal dès l'annonce de ce programme en 2011. Et on a oublié un élément essentiel: ces tableaux ne sont interactifs généralement qu'avec un individu à la fois, soit l'enseignant... Peu d'écoles, publiques tout au moins, ne sont prêtes à équiper les élèves d'une manette qui leur permet d'interagir en temps réel avec le tableau et l'ensemble de la classe.

De mon expérience, au primaire, l'intégration de cet objet technologique a été plus réussie qu'au secondaire. Certains facteurs peuvent expliquer ce fait. Généralement, au primaire, il n'y a qu'un groupe et un titulaire par classe. Le nombre d'élèves par classe est également plus petit. Et, il faut le dire, le primaire se prête mieux, à mon avis, à une pédagogie innovante (pour le meilleur et pour le pire). Au secondaire, un même local peut voir défiler un nombre impressionnant d'enseignants et de matières. Certains profs utilisent le TBI, d'autres pas. De plus, un même enseignant peut avoir différents locaux dans sa tâche. Certains équipés de TBI, d'autres pas. Rien pour l'inciter à s'approprier cette technologie. La taille des groupes est généralement plus grande et les cours davantage magistraux (pour le meilleur et pour le pire). Et toutes ces conditions changent chaque année, selon la clientèle et les cours offerts. Milieux différents, conditions d'enseignement donc.

Dans mon école secondaire, j'ai peu vu d'enseignants utiliser sur une base fréquente un tableau interactif de façon poussée. En maths et parfois en univers social. Règle générale, le TBI fait plutôt office de rétroprojecteur ou d'un gros écran de télé moderne. À tel point qu'on a décidé d'équiper toutes les classes de rétroprojecteurs fixes et de tableaux blancs qui coutent trois fois moins cher et qui constitue une technologie moins poussée mais dont on sait qu'elle sera utilisée fréquemment.

Qu'importe tout cela! Le ministre de l'Éducation, Yves Bolduc, celui-là même qui a dit du CUSM était un projet «sans failles», croit que les TBI se sont avérés «utiles» pour l'apprentissage des élèves.

Au cours des dernières années, on n'a pas eu d'argent pour donner une augmentation salariale supérieure au cout de la vie aux enseignants mais, par contre, on a dépensé 210 millions $ sans connaitre l'efficacité de cette dépense. À mon avis, ce sont les enseignants à même leurs conditions salariales qui ont payé ces tableaux dont on ignore l'efficacité... et qu'ils utilisent peu.

1 commentaire:

Jonathan Livingston a dit…

Bon, moi je les ai adoptés et me voir sans m'attristerait un peu, mais bon, il a fallu en avoir un défectueux pendant quelques semaine pour me rendre compte que je peux tout à fait faire sans et, depuis, je ménage son utilisation à son nécessaire.Car, c'est beaucoup de temps farfouiller avec la préparation informatique. Effectivement, même si j'aurais aimé tenter d'utiliser l'express post de Prométhéan, pour voir, parce que je suis comme ça, un peu fouilleux, il est difficile d'avoir des fonds pour cet investissement. Si j'étais restés chez mes autochtones qui manquent d'argent en éducation, je les aurais certainement testés à l'heure actuelle!

Dans cette question évidemment, il faut rester réaliste: l'éducation coute déjà cher et tant que la quincaillerie qu'on nous propose ne revient pas à un prix aussi base que les pitonneuses, banales dans nos milieux de nos jours, la technologie restera un investissement assez douteux et trop couteux pour se le permettre surtout si l'illusion de rareté de la domination néo-libérale ultrariche, qui pompe toute l'énergie de nos sociétés pourtant hyperactives, continue d'alimenter notre conception des choses...