En fait, tout le Québec n’est pas sur pause. Ici et là, on s’inquiète. Pas des risques d’être infecté. Pas que nos proches soient atteints ou malades. On s’inquiète des apprentissages des enfants et on commence à se livrer ici et là à des commentaires parfois désobligeants sur les enseignants.
On me permettra ici d’écrire que moi aussi, je suis inquiet. Comme vous tous, je suis inquiet pour mes proches, ma famille, mes amis. Pour l’avenir. Et honnêtement, je suis aussi inquiet pour certains de mes élèves. Pas à cause de leurs apprentissages. En temps et lieu, j’ai confiance que nous saurons rattraper ce retard. Je suis inquiet pour mes élèves qui ne mangent pas à leur faim, pour ceux qui vivent dans des milieux toxiques, pour ceux qui ne voient pas la psychologue de l’école et qui avaient déjà des idées suicidaires. Ces enfants, bien des parents ne savent pas qu’ils existent. Ce ne sont pas leurs, mais ce sont un peu des miens.
Bien des gens aimeraient que nous fassions comme si de rien n’était, que nous organisions de l’enseignement en ligne. Personne n’est prêt à cela, pour différentes bonnes raisons qu’on a pu lire ici et là. Le système scolaire et certains intervenants ont fait la preuve de leur inefficacité de bien des manières au cours des derniers jours. Il faudra en tirer des leçons. Mais pas maintenant.
Bien des profs piaffent d’impatience aussi. Dans certaines régions, ils ont organisé une parade dans les rues où habitent leurs élèves pour indiquer qu’ils pensent à eux. D’autres ont organisé des groupes Facebook d’apprentissage sans pour autant viser un contenu académique. D’autres enfin attendent. Ils attendent que le ministère se branche. Oui, oui : le même ministère qui nous a parlé de décentraliser les pouvoirs dans les écoles. Pourquoi cette attente? Parce qu’on leur a appris avec le temps à ne plus avoir d’initiative, à suivre les ordres.
L’enseignement en ligne? Il faudra patienter une semaine de plus que prévu pour voir des contenus ministériels en ligne. Des collègues en ont mis en moins de 24 heures. Aller chercher les effets scolaires dans les écoles? Des directions ont trouvé il y a une semaine une façon de rendre les objets essentiels aux parents qui en faisaient la demande parce qu’elles voyaient bien qu’il était insensé d’ouvrir les écoles à tout le monde en même temps. Les services de garde pour les enfants des employés des services essentiels de l’État? Des parents et des directions se rendent compte qu’il est illogique d’envoyer leurs enfants dans un lieu qui va à l’encontre de la distanciation sociale.
Aujourd’hui, le ministère invite les enseignants à écrire à leurs élèves. Je ne sais pas si quelqu’un à Québec sait que certains profs du secondaire ont jusqu’à 360 élèves…
Aujourd’hui, j’apprends aussi qu’en pleine pandémie mondiale, le gouvernement veut négocier rapidement toutes les conventions collectives des employés de l’État. Je croyais que la priorité de tous les Québécois étaient de sauver des vies…
Manifestement, il doit y avoir quelque chose que je ne comprends pas. Ça sera une de plus. Je m en doute. Mais de voir le gouvernement s'empresser de négocier nos conventions collectives, quel mauvais message. Ça manque de distanciation politique et sociale. Les snow birds sont bien légitimes de faire leur épicerie en Winnebago.
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