03 octobre 2016

L’école publique a besoin qu’on s’occupe d’elle

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La Presse publiait récemment les propos un peu vagabonds - tant ils allaient dans plusieurs directions - d’un enseignant de Québec,  Stéphane Boulé. Celui-ci était d’avis que les choses n’allaient pas si mal en éducation au Québec. Il estimait que dénoncer les mauvais côtés du système scolaire équivalait à le «salir» et qu’une des plus importantes belles choses qui s’y produit est que «la majorité des jeunes qui y entrent en sortent avec un diplôme sous le bras.» Encore faut-il voir ce qu’exige ce diplôme…  

La réalité est parfois fort différente

Dans les faits, au Québec, le taux de diplomation ne regroupe pas uniquement le fameux Diplôme d’études secondaires (DES) mais aussi 12 qualifications ou diplômes différents. Qu’on pense au certificat de formation préparatoire au travail, par exemple. Certains intervenants n’hésitent d’ailleurs pas à affirmer qu’on décerne aujourd’hui à des analphabètes fonctionnels des diplômes qui sont parfois de niveau primaire. Pour Caroline Meunier, du Regroupement des groupes populaires en alphabétisation du Québec, «Il y a des gens qui ont leur secondaire cinq et qui ont un faible niveau de littératie. On peut se questionner sur leur parcours scolaire.»

Par ailleurs, en français, M. Boulé devrait pourtant savoir qu’au fil des ans, les exigences ont été constamment réduites quant à la réussite de ce cours. Pis encore : en 2003, 47 % des Québécois étaient considérés comme analphabètes fonctionnels. En 2013, ce pourcentage augmentait à 53 % comparativement à 49 % au Canada. Et ne n’oublions pas le décrochage scolaire : 21,5 % pour les garçons et 13,6 % pour les filles en 2009-2010 d’après un document de la CSQ.

D’autres égarements pédagogiques

Dans une autre veine d’idée, M. Boulé croit fermement que «ce n’est pas le milieu social ou le revenu familial qui, en premier lieu, fait qu’ils [les élèves] réussissent leurs études.» Sans aucune preuve à l’appui autre que son expérience personnelle, ce dernier s’inscrit en faux contre une foule d’études et d’experts qui ont clairement démontré le contraire.  

Plus loin dans ses propos, M. Boulé écrit également : «Cesser de donner des devoirs aux jeunes ou les leur faire faire à l’école nuit tôt ou tard à leur réussite scolaire, ce que confirme la recherche en éducation.» Ah bon, quelle recherche? Un expert en éducation comme Normand Baillargeon reconnaît que les devoirs au primaire ont peu d’impact sur la réussite des jeunes. Par contre, il indique qu’il est préférable d’en donner au dernier cycle du primaire afin de mieux préparer les élèves aux devoirs du secondaire qui, eux, semblent pertinents.

Quant à moi, depuis dix ans, peu de choses ont changé depuis. La situation s’est même détériorée dans certains cas car l’école publique a subi au cours des dernières années des coupes qui ont nui à la réussite de plusieurs jeunes et les réinvestissements qu’annonce le gouvernement actuel ne suffiront même pas à revenir à un niveau de services acceptables, surtout pour les élèves en difficultés d’apprentissage. 

Comme enseignant, quotidiennement, je vois qu’il se fait de belles choses dans le réseau scolaire québécois. Cependant, on ne peut affirmer, comme Candide, que «Tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles». Devant la place qu’occupe l’école privée au Québec et une opinion publique qui cherche constamment à la dénigrer, l’école publique est souvent déchirée entre dénoncer publiquement les ratés qu’elle connait et affirmer qu'elle réussit malgré tout à atteindre plusieurs de ses objectifs. Il ne faut pas se bercer d’illusion : l’école publique, celle de tous les Québécois, a besoin qu’on s’occupe d’elle. Reste à voir comment nos décideurs entendent le faire.

7 commentaires:

riendutoutpantout a dit…
Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.
Le professeur masqué a dit…

Il suffit de diviser votre réponse en plusieurs commentaires.

:)

riendutoutpantout a dit…
Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.
Le professeur masqué a dit…

Pourtant pas compliqué. Mais bon.

riendutoutpantout a dit…

Finalement, après mûre réflexion, sachez que je ne poursuivrai pas, ici, ce qui aurait pu devenir une discussion intéressante.

Le jour où vous aurez le courage de vos opinions en signant vos textes de votre vrai nom, comme je le fais, il me fera plaisir de reprendre là où nous avons laissé.

Débattre à visage découvert et en terrain neutre pourrait même s’avérer constructif et mutuellement enrichissant : vous devriez essayer!

Cordialement,

Stéphane Boulé

Le professeur masqué a dit…

Pour votre gouverne, La Presse+ n'a pas publié la lettre que je lui ai envoyée. Ce n'est pas de ma faute et pas un manque de courage. Il m'est arrivé souvent d'être publié et j'ai participé à la rédaction de deux livres en éducation.

Dommage qu'il vous faille un nom pour échanger.



Le professeur masqué a dit…

Pour le reste, comme me l'a souligné un ami, le courage dont je manquerai semble faire davantage défaut chez vous. Quant à la mention de «terrain neutre», mais c'est quoi cette idée? On dirait quelqu'un quis e cherche des excuses. Platement.