12 novembre 2009

La réforme au quotidien...

J'enseigne en première secondaire. Aujour'hui, c'était la remise des notes pour le bulletin de la première étape. Il me fallait donc attribuer un résultat à chaque élève quant à deux compétences.

Avec la réforme, l'enseignant doit porter un jugement global. Celui-ci ne doit pas être un simple cumul de notes et de travaux.

Mise en situation: Vous avez évalué cinq ou six travaux. Vous les regardez, vous pensez à votre élève et vous émettez un jugement. C'est assez simple.

Et question de s'assurer que les enseignants ne fassent pas un cumul des notes, le sévice informatique de ma CS a retiré cette année la possibilité, dans le logiciel de notes, de calculer un résultat sur 100 à partir de plusieurs travaux.

Peu importe, que vos évaluations soient graduées et suivent une progression logique. Peu importe que vous les ayez ordonnées et conçues de façon à refléter la valeur de l'élève. Bref, vous êtes assez professionnel pour émettre un jugement sur un élève, mais pas assez organiser votre évaluation.

Résultat: certains collègues entrent les travaux sur un tableau Excel, calculent le résultat sur 100 et mettent une note au bulletin. À un adjoint, je disais à quel point cette situation était frustrante et hypocrite. À la blague, je lui ai dit que je ferais une moyenne des travaux au pif et la mettrais comme note à l'élève. «En autant qu'il y ait une note, tu sais...», m'a-t-il répondu, mi-blagueur.

Ouins, en autant qu'il y a des notes, on se fout de ce que les élèves apprennent.

12 commentaires:

Jonathan Livingston a dit…

Et interdire toute justification systémique et argumenté de la part de l'enseignant quand il met un échec... parce que le jeune ne fait simplement pas son bout... Au final, on en met de moins en moins...

Dans le monde des gestionnaires, l'idée que l'éducation est un processus progressif, avec des buts à atteindre, qui implique un certain effort et une évaluation de résultat, est devenue insupportable. Ça créait trop de bogue!

Alors on évalue des compétences...un truc abstrait et assez insaisissable dans le monde de la gestion!

Isabelle a dit…

Et si c'était juste de moi, je ne ferais pas quatre étapes mais trois.

unautreprof a dit…

Cette histoire de notes est tellement vide de sens.

Ça ne rentre pas dans ma tête : si je dois évaluer de manière qualitative, comment ça que je n'utilise plus les lettres cib**re!

À mon école, on a refusé tous les compromis et les échelles trop graduées. On reste avec les critères, on évalue comme avant et on convertit en chiffres. Ça semble peut-être illogique pour plusieurs, mais si Madame la Ministre avait fait le changement pour les bonnes raisons, on serait aussi plus ouverts...
VOuloir faire taire les parents sans y réfléchir pour que ça, c'est ce qui semble être la raison de ce retour aux notes. Pas pour une meilleure évaluation plus juste et plus précise, non.

Paul a dit…

L'évaluation: le gros boulet de la réforme. Mais au fait, à quoi sert l'évaluation? Si on peut s'entendre sur le rôle de l'évaluation, peut-être pourra-t-on s'entendre sur le type d'évaluation le plus propice à atteindre le but visé!

Mais voilà, un étape a été sautée. Définir précisément le rôle du résultat. Et cela amène plusieurs confusions.

Voici quelques rôles que l'on peut accorder à l'évaluation:
-donner de l'information aux parents
-créer une hiérarchie pour l'admission au cégep
-déterminer qui doit redoubler
-aider l'élève à identifier ses faiblesses et à s'améliorer
-obliger l'élève à travailler
-répondre aux exigences du MELS
-permettre aux élèves de mieux se connaître et d'évaluer ses capacités par rapport aux autres
-renforcer l'image de soi de l'élève

Aucune de ces réponses n'est fausse. Mais il peut y avoir des conflits... sans oublier que le rôle de la Ministre est d'abord et avant tout politique.

S'il est préférable pédagogiquement d'avoir des cotes mais plus rentable politiquement d'avoir des notes, que choisira la Ministre? S'il est pédagogiquement préférable de développer des compétences mais politiquement préférable d'évaluer des connaissances... que fera la Ministre?

Je ne le sais pas...

Paul a dit…

«En autant qu'il y ait une note, tu sais...», m'a-t-il répondu, mi-blagueur.


Et il a raison! En autant qu'il y ait une note, et que toi tu sois capable de la justifier. Car c'était sans doute un peu sous-entendu.

Le fardeau de la justification appartient à 100% au prof qui l'attribue. S'il est capable de la justifier, c'est réglé.

Justifier, mais auprès de qui? Des parents et de la direction. Et voilà qu'apparaît une des fonctions de la direction: s'assurer de la validité du processus d'attribution des résultats.

Paul a dit…

@ Isabelle: Comme tu as raison! 3 étapes, ce serait plus honnête envers l'élève.

A.B. a dit…

Mon commentaire est en retard, mais c'était possible chez nous de faire calculer au système un résultat sur 100. C'était impossible de faire verser ce résultat, mais c'était possible de le faire calculer en attribuant une valeur relative à chaque évaluation.

Lud. a dit…

Prof Masqué,

Une petite suggestion de lecture que j'ai beaucoup aimé et que, j'en suis sûre, vous aimerez aussi: de Normand Baillargeon «Contre la réforme - La dérive idéologique du système d'éducation québécois». C'est une perle au niveau argumentatif... un must!

Le professeur masqué a dit…

Salut Lud, comment vas-tu? je songe à me le procurer, surtout pour voir s'il a repris de mes idées : )

Lud. a dit…

Comme je vous lis depuis un bout, je sais qu'il est d'accord avec vous sur plusieurs points que vous avez déjà mentionnés dans votre blog. Par contre, son argumentation est doublée d'études et d'analyses de recherches qui donnent plus de poids aux arguments soutenus. Par ailleurs, il parle également du rôle des facultés de l'éducation dans la réforme, puisque celles-ci vont «main dans la main» avec le MELS. Le tout, sans mâcher ses mots en matière d'endoctrinement, de contructivisme radical, etc. Un must! Lisez-le et donnez-moi des nouvelles!!

Le professeur masqué a dit…

Pas de problème!

Méli a dit…

C'est d'une tristesse à faire pleurer !