05 juin 2007

Pot et malbouffe

Petit détail de la vie ordinaire scolaire.

Depuis quelques années, la discipline s'est relâchée dans mon école. Changements de direction fréquents, embauche de personnel mal encadré: tous les ingrédients sont là pour créer une détérioration de ce milieu de vie.

Il ne faut donc pas se surprendre qu'aujourd'hui, en fin d'après-midi, j'ai croisé dans un corridor un élève qui portait un gaminet ou l'on retrouvait bien en évidence des feuilles de pot. Le jeune, qui semblait être en deuxième secondaire, l'a donc porté toute la journée au vu et au su de tous les éducateurs qui l'ont croisé. Si l'on pousse plus loin, ce chandail a aussi été acheté par des parents qui devaient avoir une idée de ce que représentait ce vert feuillage.

Je n'ai pas osé intervenir. Je suis un peu tanné du rôle de gros méchant qui voit tout et qui remet en cause et ses collègues et la façon dont le code de vie de mon école est appliqué. Sauf que...

On parle beaucoup de décrochage scolaire au Québec. Même qu'on a fait une réforme pour contrer ce phénomène et qu'on a investi des centaines demillions de dollars. Sans y voir un lien direct de cause à effet, saviez-vous que près de 18% des jeunes au Québec sont des consommateurs réguliers? Saviez-vous que les commissions scolaires de tout le Québec viennent de se doter d'une politique concernant les toxicomanies? Et pourtant, dirait le grand Charles...

Pour l'instant, on en juste contre la méchante malbouffe. Et certains parents, en bons hypocrites, demandent aux écoles de bannir les aliments mauvais pour la santé alors qu'ils en gavent leur marmaille à la maison chaque jour...

Pour en savoir davantage sur la consommation de drogues chez les jeunes:

11 commentaires:

Elle a dit…

Y'a un an, je sortais du secondaire et je me rends compte aujourd'hui à quel point je tiens des mauvais plis du secondaire.

Je trouve que les écoles secondaires sont en relachement et ne préparent pas au cégep.

L'école secondaire est une période importante dans la vie d'un adolescent: c'est à ce moment que les jeunes commencent à se faire leurs propres opinions et à agir par eux-même. J'trouve ça plutôt désolant qu'on ait à faire cela dans ce genre d'environnement...

Hortensia a dit…

La malbouffe est la nouvelle idée fixe des bien-pensants.
Savoir que son enfant ne mangera pas des frites et des hamburgers tous les jours permet à certains parents de se déculpabiliser du temps qu'ils ne passent pas avec eux. On en revient toujours à une question de responsabilité, qu'on parle d'alimentation, de sexualité, de consommation de drogues ou d'habillement inapproprié (je pense à votre exemple, mais aussi à l'hypersexualisation des jeunes filles). Certains adultes (parents, enseignants, etc.) ont abdiqué leurs responsabilités d'éducation et de protection envers les plus jeunes...

Mme Prof a dit…

Yep... Dans mon temps, soit en 1992, il y avait déjà du pot dans mon école...primaire! Je n'ose pas imaginer ce dont ça doit avoir l'air maintenant.
Mon chum rit de moi car j'ai été élevé dans la terreur de la drogue, car c'est maaaaaaaaaaaaaaal! Mais c'est un rôle que les parents doivent jouer et qu'ils ne jouent plus à ce sujet. Les miens ont réussit. À ce jour, je n'ai inhalé que des vapeurs secondaires de pot en sortant dans les bars ou dans les partys. Le règne de terreur est nécessaire aux enfants, ça leur donne des balises.
Bon, je ne demande pas aux gens de ne jamais fumer de pot ou autre chose, mais je demande seulement aux parents de jouer leur rôle de parents : donner des balises claires et sévères à leurs enfants. Car on sait tous que les enfants vont défoncer ces barrières. Si elles sont trop loin, pas assez solides, imaginez jusqu'où les enfants iront!

Forsythia a dit…

L'an dernier, j'enseignais dans une école fréquentée par des gens très désorientés et perdus. Bien sûr, certains profs faisaient preuve de laisser-aller comme celui dont vous parler.
Par contre, étant jeune et inexpérimentée, parfois, sûrement, je passais l'éponge. Parfois, je recevais aussi les conseils des plus expérimentés, et lorsque c,est bien dit (et je suis certaine que c'est votre cas) ça passe bien et ça fait évoluer. Donc pourquoi vous privez d'être un "gros méchant" puisque c'est sûrement pour le mieux de tous.

A.B. a dit…

Allo Prof Masqué,
"Mea culpa": moi, j'ai lâché prise pour les sacs à main en classe. C'est un fléau dans l'école où je travaille et l'an passé, lors de mon arrivée dans cet établissement, je me suis battue avec acharnement à coup de copies, de retenues et de sorties de classe pour finalement baisser les bras...parce que la majorité de mes collègues ne faisait pas appliquer ce règlement et que je me faisais toujours dire par les filles que j'étais la seule à faire appliquer ce règlement (et elles avaient malheureusement un peu raison).
La solidarité et enseignement, voilà une belle antithèse!

Anonyme a dit…

À chaque fois que je lis des commentaires sur l'école, je ne peux m'empêcher de me demander «Mais où sont donc les parents de tous ces enfants?»
Parfois, j'ai l'impression (même la certitude) que certains parents se servent de l'école pour combler un vide de responsabilités qu'il ne sont pas capables ou ne veulent pas assumer eux-mêmes. «Je ne suis que son parent, pourquoi serait-il à moi de lui inculquer des valeurs, un minimum de savoir vivre, un peu d'éducation?... Voyons, pour ça, il y a l'école!»
Bien sûr, on ne peut pas généraliser, mais je crois vraiment que le problème, ce n'est pas l'école en tant que tel, c'est plutôt la société et les individus qui la font.

Anonyme a dit…

"Saviez-vous que les commissions scolaires de tout le Québec viennent de se doter d'une politique concernant les toxicomanies? "

Non, je ne savais pas. Seriez-vous en mesure de fournir une référence, web de préférence?

Quoi qu'il en soit, merci.

A.B. a dit…

J'ai commencé à enseigner à 22 ans et déjà, lors de mes première rencontres de parents, certains mes demandaient carrément des conseils pour élever leurs enfants. «J'ai 22 ans, pas d'enfant et c'est à moi que vous demandez conseil?» Le pire, c'est que j'étais capable - et le suis toujours - d'en donner, des conseils. Je joue le rôle d'éducatrice dans un cadre scolaire dont ledit cadre s'étire malheureusement gravement; les joints vont finir par lâcher si certains parents ne jouent pas leur rôle de parent et non d'ami/cool/irresponsable.

Le professeur masqué a dit…

M. Chartrand: voici un exemple de CS qui a adopté un cadre de référence en intervention et en prévention en toxicomanie :
http://www.csaffluents.qc.ca/communiquer/2007_02_27_CC.htm

Pour le reste, l'information m'est venue d'un cadre scolaire. En espérant qu'il n'était pas dans le champ...

Le professeur masqué a dit…

L'indécise: le rôle du secondaire et du primaire est de donner de bonnes bases de travail et de vie aux jeunes qui leur sont confiés. Trop souvent, pour paraître cool ou éviter les problèmes, certains intervenants ne prennent pas leurs responsabilités devant les comportements des jeunes. Ils se conduisent comme de mauvais parents. Un ado qui consomme des drogues le fait rarement parce qu'il va bien et qu'il est éperdu de bonheur. Un élève est un peu comme un enfant prêté à une école: il a droit au respect, à l'écoute, à la disponibilité et è la discipline. Cependant, manifestement, certains éducateurs ne peuvent pas donner ce qu'ils n'ont pas.

Hortensia: se déculpabiliser tout en les laissant se gaver de malbouffe à la maison. Et je ne parle pas des jeunes qui consomment des drogues avec leurs parents. Quelle famille! Encore une fois, on ne peut donner ce qu'on n'a pas. Proposons de bannir la malbouffe dans tout le Québec ou de la taxer et vous allez voir ces mêmes adultes inconséquents hurler!

La marâtre: honnêtement, pour l'éducation par la terreur, je ne suis pas si sûr que cela fonctionne. On ne fait que cela dire aux élèves que la drogue est une horreur. Or, lorsqu'ils en fument pour la première fois, comme le diable en personne n'est pas apparu, ils se disent qu'on leur mentait et ils continuent à consommer. Dans la plupart des cas, je crois que la dépendance à la drogue est le symptôme d'un malaise plus profond qu'il convient de traiter avec des professionnels.

Forsythia: le problème, c'est la culture d'entreprise! Quand une direction d'école est laxiste, quand une majorité de collègues deviennent mous et en recherche de popularité au détriment de leur rôle d'éducateur, l'enseignant sévère perd trop souvent la face et sa crédibilité est minée. Il est alors devant un «catch 22»: soit qu'il continue à être sévère et perd constamment la face, soit qu'il ne fasse rien et perde la face de toute manière...

Safwan: vous illustrez exactement ce qui se passe quand la culture de la discipline (on ne parle pas d'armée, je ne suis pas de droite, je parle de discipline...) fout le camp. Normalement, parmi les étapes qui suivent, on retrouve les retards, la tenue vestimentaire non conforme, le non-respect entre élèves et avec les éducateurs, les devoirs non faits, le décrochage et l'échec. Et je parle en connaissance de cause, vous le savez!

Madame Masquée: je vous aime, pis c'est vrai que l'incapacité de certains parents explique les exigences démesurées qu'on a envers l'école. Autrefois, on parlait du ministère de l'Instruction publique. On a eu par la suite le ministère de l'Éducation. A suivi le ministère de l'Éducation, des Sports et des Loisirs. La ministre actuelle a vu le dossier de la famille rattaché à ses fonctions. Tous ces changements ne sont pas le fruit du hasard et sont très révélateurs.

Anonyme a dit…

Merci, Professeur masqué.